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EAN : 9782204050234
150 pages
Le Cerf (17/10/1988)
4/5   1 notes
Résumé :
En marche vers Compostelle, l’auteur tente de mettre en lumière les multiples facettes du pèlerinage en interrogeant l’Histoire, la Légende, les Monuments — et bien sûr le Chemin et ses Pèlerins : Francs-Maçons, Templiers, Alchimistes et autres aspirants à l’initiation. La leçon du Chemin est sagesse et non savoir, les connaissances glanées sont intégrées pour modifier l’être au cours de son apprentissage de la juste attitude.

Par son texte et ses pho... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
C'est le genre de livre que j'aurais rêvé de trouver dans une bouquinerie. Sa couverture bordeaux m'aurait attiré, même si les couleurs de la photo d'un bout de Camino desséché lui donnent un petit côté vintage.

Publié en 1986 à Genève, il narre le périple de deux jeunes femmes entre le Puy-en-Velay et Saint-Jacques de Compostelle. Outre de magnifiques photos mises en valeur par le format A4, cet ouvrage à la mise en page soignée est un témoignage d'un autre temps, celui où le chemin n'était que peu balisé et où le téléphone fixe n'existait pas encore dans tous les villages espagnols !

Avec beaucoup d'aisance, Florence Baccheta réussit le tour de force de mêler roadtrip et des éclairages historiques fort à propos, sans pédanterie aucune. Et, d'emblée (p. 8) elle donne le ton et dessine le cadre de son récit :

« Dès les premiers jours de marche, j'ai appris à douter. Tout d'abord de moi : de mes forces et de ma résistance physique, de mon endurance bien sûr, mais surtout de ma perspicacité ! J'ai dû constater que malgré toutes mes informations, l'inconnu ne cessait de grandir et au lieu de vouloir contrôler notre cheminement, il me fallait essayer — long et lent apprentissage — de trouver l'attitude juste, la difficile confiance en l'insondable.

Tout d'abord, il s'agissait d'oublier les notions raisonnables qui prétendent que le kilomètre, ou l'heure, sont des mesures exactes, objectives, car l'expérience prouve bien l'absurdité de ces affirmations. Soudain, le village que l'on pensait atteindre bien plus tard surgissait au débouché de la forêt devant nos regards incrédules. A d'autres moments, une force maligne nous condamnait à piétiner sur place, sans que nous puissions nous en apercevoir, et certains kilomètres demeuraient presque infranchissables, à notre amère surprise. »

Car, malgré une licence en lettres médiévales et un diplôme de l'Institut C. G. Jung de Zürich (Suisse), cette psychothérapeute genevoise éprouve une véritable fascination pour l'ésotérisme, au sens noble du terme. Et, pour notre plus grand bonheur, elle n'hésite pas à partager ses découvertes :

« Louis Charpentier, s'est penché sur les étoiles du Chemin et le résultat de ses recherches est pour le moins surprenant! : sur le tracé de deux lignes parallèles, est-ouest, suivant les 42° 30' et 42° 46' de latitude, commençant en Catalogne française (l'une au nord, l'autre au sud de Perpignan) et aboutissant en Galice (respectivement à Padron et à La Toja, au bord de l'Océan) dix noms de lieux — montagnes, villages, lieux-dits, etc. — renvoient à l'étoile! Et certains, désignés par le vocable basque, sont sans conteste bien antérieurs au christianisme... Ceci laisse supposer que les astres disséminés sur ces axes correspondent à une intention et résultent de mesures et de calculs très précis. le Chemin d'Etoiles était «tracé» bien avant que naisse la légende de saint Jacques et lorsque le christianisme emprunte cet axe, il s'inscrit dans une tradition certes très ancienne, mais encore connue de certains !
Si cette marche vers l'ouest existe depuis quelques millénaires, peut-être... et n'a pas été abandonnée, c'est qu'elle correspond à un besoin profond, s'inscrivant dans une perspective archétypique. L'océan Atlantique à l'ouest du continent européen se présente comme le lieu de disparition du soleil couchant. L'astre de lumière symbolise la manifestation de l'énergie première, qu'elle soit rayonnement divin, connaissance illuminante ou spiritualité irradiante. Bien que tout-puissant et lié à l'essence de la vie, le soleil semble quotidiennement menacé par sa disparition. Lorsque l'homme primitif se rassure en constatant sa fidèle résurgence, il a compris le rythme cyclique vie-mort-résurrection, l'une des lois fondamentales de l'univers. Ainsi, la marche à l'ouest s'annonce comme un cheminement vers la mort, non pas au sens biologique, mais au sens symbolique, mort sans laquelle l'accès à un plan de conscience supérieur n'est pas possible. »

Si le parcours jusqu'à Moissac constitue un véritable enchantement, l'arrivée dans le sud-ouest n'est pas au diapason : « Si nous souffrons moins, physiquement, qu'en septembre dernier (elle a parcouru le Chemin en quatre tronçons de 450 kilomètres chacun), et pourtant la marche est plus difficile, paradoxalement. L'exaltation de l'aventure qui commence est passée, le pays qui s'étend autour de nous, peu sollicitant : pas de forêts où se perdre, pas d'étendues sauvages ou montagneuses où errer à jamais ! Les petites villes qui se succèdent sont pittoresques, certes, mais n'offrent pas de joyaux architecturaux devant lesquels s'émerveiller. le Chemin, s'il n'est pas boueux et impraticable se présente goudronné et souvent clôturé: sa poésie s'évanouit.

L'épreuve demandée est d'un autre ordre que l'exploit aventurier. Elle nous renvoie à nous-même, au sens de cette quête, à l'obstacle intérieur, puisqu'extérieurement, géographiquement, aucune barrière ne se présente de Moissac aux Pyrénées. Régularité, constance, persévérance, enracinement à un «ici et maintenant» moins qu'exaltant sont les «vertus» à développer, jour après jour; on pourrait également les appeler patience, attente, temps de gestation... »

Et ce ne sont pas les bordiers croisés sur la route qui égayent son humeur : « Les indigènes (terme d'usage courant en Suisse, sans la connotation coloniale propre aux Français !) peu chaleureux nous regardent avec une interrogation un peu suspicieuse lorsque leurs chiens et leurs oies rivalisent de vacarme à notre passage : où allons-nous à travers leur campagne ? Compostelle ne semble pas trouver un écho signifiant en eux. » Les choses ont-elles tant changé en 2020 ? Ce n'est pas ce qui m'est apparu en traversant ce printemps la vallée de la Broye entre Payerne et Montpréveyres...

Pourtant, arrivées en Espagne, les alizés ne semblent pas plus favorables, au contraire : « Parfois, le Chemin cesse brusquement d'exister, sans raison aucune — et ce n'est, hélas, pas un mirage! —. Nous avançons alors à la boussole, droit à l'ouest, à travers les vagues ocres et or de cet océan soudain terrifiant, parce que privé de son précieux ruban de poussière, notre fil d'Ariane salvateur, le Chemin... Lorsqu'il nous abandonne ainsi en traître, nous n'avons pas le loisir de philosopher ou de nous lamenter à ce sujet; il s'agit plutôt de bien canaliser notre énergie pour progresser malgré les nouvelles difficultés. Sous nos pieds fatigués, la terre battue est remplacée par des reliefs alternants : les céréales ont été moissonnées à environ 20 centimètres du sol et nous marchons sur les tiges sèches qui se dressent droites et dures et s'écrasent avec un bruit sec sous nos pas. »

Quant aux fiers hidalgos, descendants du Cid, leur accueil n'est pas à proprement parler exemplaire : « Carrion de los Condes, déserte, vide, où les aubergistes prétendent que leurs établissements sont complets, nous renvoyant, implacables au dédale des ruelles où, finalement, nous cherchons la pharmacie... pour plaider notre cause auprès d'une personne que nous présumons à même de comprendre qu'en dépit de notre apparence poussiéreuse et malgré notre modeste bagage, nous sommes solvables! Nous apprenons que les marcheurs vagabonds, à Carrion, sont assimilés aux gitans à voleuse réputation... mais qu'il existe un petit bar avec chambres, nommé «Carmen» où l'on accepte les pèlerins. » Qu'on est loin de la fièvre mercantile qui semble aujourd'hui s'être emparée du Camino Francès !

Finalement, la seule partie un peu décevante concerne le tronçon Ponferrada-Santiago. Est-ce dû au fait que la narratrice et son amie y sont accompagnées par deux nouvelles compagnes de voyage ? Toujours est-il qu'elle cesse complètement de parler de son ressenti pour évoquer plutôt les personnages plus ou moins pittoresques rencontrés en chemin ou les légendes liées aux lieux traversés.

Mais qu'à cela ne tienne : la qualité des photos compense en bonne partie l'intérêt moyen du texte des 30 dernières pages et, après tout, nous avons 100 pages de pur bonheur derrière nous. Alors, « nos da igual » (on s'en fiche) comme disent les Ibères.
Lien : http://marcheurs.blog.peleri..
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