Ce qui frappe chez
Bachelard est son syncrétisme philosophique si rééquilibrant. Mais attention à ne pas s'y méprendre : il ne s'agit pas d'un simple bricolage, une doctrine d'influence a toujours une supériorité sur une autre. Pour
Bachelard ni l'empirisme, ni l'idéalisme, ni le positivisme, ni le réalisme naïf ne peuvent décrire la logique de la science moderne. Il développe donc sa doctrine du rationalisme appliqué. Il faut insister sur ce dernier terme car
le rationalisme appliqué n'est pas un rationalisme du fondement vide, c'est un rationalisme du retravail scientifique, polémique et permanent des règles de la raison, un rationalisme de la solidité.
le rationalisme appliqué est perpétuel recommencent. C'est dire que
Bachelard s'oppose à l'existentialisme français de son temps. La séparation nette entre la connaissance vulgaire et la connaissance scientifique est entamée. La phénoménologie existentialiste ne peut pas, en vertu de cette séparation, atteindre le sens de la recherche scientifique : car celle-ci n'est pas dérangée par le problème de l'expérience commune et du soi-disant "premier irrationnel", elle travaille en permanence ses bases rationnelles. La nouménologie est possible par une telle recherche rationnelle.
Bachelard parle ici de dialectique. Mais il faut dire que
Bachelard ne se prétend pas idéaliste malgré son habituelle critique du réalisme : certes conceptualiste, il considère que l'idéalisme est piégé par son solipsisme et le principe d'identité vide. Ce n'est pourtant pas si simple, à moins de limiter l'idéalisme à une certaine époque. Mais on sent que le sens est là. Il n'est pas tendre avec les philosophes peu au fait de la science moderne : il a assez raison.