AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de bdelhausse


J'avais 13-14 ans quand le punk a déboulé. Autant dire que du point de vue de Derf Backderf, je suis du mauvais côté. du côté qui a raté l'explosion punk...

Il faut se rappeler du séisme de London Calling, mais surtout du fait que ce genre de musiques, cela ne passait pas en radio. Et les images de punks à Soho servaient surtout à se rassurer... "ouf, nous sommes normaux" disaient les bons bourgeois devant la télévision, "sont fous ces rosbifs" renchérissaient les ouvriers avant Jacques Martin...

Akron, une petite ville perdue, chômage, désoeuvrement, club punk The Bank, et la jeunesse entre rock FM made in US qui remplit les stades et le punk qui résonne dans les âmes (et les burnes) des collégiens. Notamment de Otto, le Baron... qui devient videur, chanteur de punk rock.

L'histoire est indescriptible. Entre Mandryka et Gotlib pour le ton, la déconne... mais j'ai aussi vu quelque chose qui m'a rappelé La Fureur de Vivre. Cette angoisse de vivre, au temps présent, vite, impérativement. Sans ignorer l'humour, un rire parfois grinçant, sur l'air du "je m'empresse de rire de tout, de peur d'avoir à en pleurer".

Derf Backderf nous invite à une plongée dans un univers musical incroyablement plus riche que ce que les radios veulent donner à croire en 2016... Je suis régulièrement branché sur une radio "Classic Rock" en Belgique (Classic 21) et on entend un peu les Clash (les tubes), rarement Ian Dury and the Blockheads, quelques Ramones, un peu de Pretenders (les plus écoutables), un peu de Specials (le côté ska), les trucs insipides des Stranglers, quelques Siouxsie, Talking Heads, B52's... et du Evlis Costello (période pop)... mais jamais Devo, Plasmatics, Dead Boys, The Slits, Wreckless Eric, Graham Parker, PIL, Buzzcocks, Rubber City Rebels, New York Dolls, Gen X, Rotters... Et le peu de punk rock que l'on y entend, c'est une fraction du prog rock diffusé. Et on diffuse plus souvent du punk récent made in US que les vrais de vrais de la fin des années 70.

La playlist fournie au début est réellement impressionnante. Bien pensée, elle est riche de toutes les influences punk.

Je recommande chaudement la page 98... tous les dialogues sont cultissimes, alors qu'Otto parle avec les Clash... Cela dézingue le rock FM US, de Boston aux Eagles... Ce sont les années Reagan aussi. Des années qui sont à l'image des années Thatcher en Angleterre. Mais là où les kids anglais réclament les Clash... les Américains demandent leur ration de Jésus et de Reagan...

Ce roman graphique, c'est aussi la critique d'une sorte d'Amérique. Pas celle qui gagne, mais celle des laissés pour compte. C'est la critique d'une vision où la religion a une place prépondérante.

La fin amère, mais pleine d'espoir aussi, quand le club ferme et que Wes meurt mais qu'Otto prend sa vie en main, vient marquer le rêve d'une réalité brutale.

En exergue du livre, on lit : "Ceci est une fiction. Mais ça AURAIT PU arriver." Je dirais plutôt: "Ceci est une fiction. Mais c'EST arrivé."

No Future... Death or Glory, that's just another story.
Commenter  J’apprécie          60



Ont apprécié cette critique (5)voir plus




{* *}