Nous sommes tous des sauvages

mes os ont mal
frémissant du manque de mots
une douleur se fige
sans pouvoir raconter
qu’un hier lui échappe
je rêve d’un seul récit
qui dicterait sans faute
toute une vie vécue
tu ne me regardes pas
tu ne me vois pas
tu ne m’entends pas
tu ne m’écoutes pas
tu ne me parles pas
tu es ici en conquérant de ma Terre
tu m’emprisonnes dans ma Terre
tu me prives de mon identité
tu me prives de mon territoire
tu m’enchaînes dans des réserves que tu as créées
tu veux être maître de mon esprit
qui suis-je ?
tu ne me connais pas
tu m’appelles : Montagnais
tu m’appelles : Cri
tu m’appelles : Tête de boule
tu m’appelles : Algonquin
tu m’appelles : Naskapi
tu m’appelles : Abénaki
tu m’appelles : Micmac
tu m’appelles : Huron
tu m’appelles : Iroquois
tu ne connais pas mes légendes
tu ne connais pas mon histoire
n’attends pas que je me fâche telle une tornade
n’attends pas que je me libère de mes chaînes

jusqu'au bout de la vie
le moment est le moment
toi mon frère
tu installes des mots
parfois tristes parfois joyeux
ils dictent les amitiés fidèles
aucun sort ne les tue
les aurores rouges sont jalouses
de l'éclipse qui a fait
le tour de la Terre
avec toi.

toute vie se fatigue vite d'être
un brouillon dans le brouet des siècles
la parole colonise ceux qui ne l'ont pas
le silence torture ceux qui en sont incapables

beaucoup d'oiseaux attendent
la fin de la pluie des mots
et la résurrection des vers de Terre
pour clore le bec à leur faim

José

j’ai vu des horizons
que je n’ai pas atteints
des aurores
m’attendaient ce matin
je te cherchais
et tu n’existais pas
maintenant je vais
où l’on t’a vu
tu n’échapperas plus
à mes songes
je te retrouve
dans un rêve
qui nous rassemble

Joséphine Bacon

une nuit de rêve
j’ai vu le vent
danser
j’ai vu mes jupes
danser à l’unisson
d’un souffle
c’est d’ici qu’on voit
l’immensité de la Terre

Joséphine Bacon