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EAN : 9782253029441
472 pages
Le Livre de Poche (21/03/2001)
3.97/5   214 notes
Résumé :
L'amour maternel est-il un instinct qui procéderait d'une " nature féminine ", ou bien relève-t-il largement d'un comportement social, variable selon les époques et les mœurs ? Tel est l'enjeu du débat qu'étudie Elisabeth Badinter, au fil d'une très précise enquête historique menée avec lucidité mais non sans passion.
L'amour en plus, un livre passionnant, dérangeant.
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Critiques, Analyses et Avis (26) Voir plus Ajouter une critique
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L'amour maternel : un instinct universel qui ne connaît que quelques ratés de quelques ratés de temps en temps. Badinter défend plutôt l'idée d'une construction sociale, récente de surcroît. Dans cette essai, elle passe en revue les rôles attribués aux hommes et aux femmes, la place de l'enfant, durant quatre siècles.

Au XVIIème siècle, on trouve bien peu d'amour entre les parents et leurs enfants : envoyés chez une nourrice dès les premiers jours ou même les premières heures de leur vie, ils ne reviennent que plusieurs années plus tard dans la maison familiale, auprès de parfaits inconnus. le séjour est bref, puisque l'étape suivante est l'entrée au couvent ou en pension jusqu'au mariage. le phénomène ne concerne pas que les plus riches, la mise en nourrice concernait toutes les classes sociales (quitte à mettre son propre enfant en nourrice pour aller s'occuper des enfants des autres).

Le changement s'opère lentement, pour plusieurs raisons : la première est une prise de conscience de la part des économistes du potentiel humain gâché : combien de bras, combien de soldats un pays perd-il chaque année à cause des mauvais soins apportés aux enfants ? Il est temps d'arrêter ce gaspillage ! Moins cynique, un autre moteur provient du courant philosophique de retour à la Nature et à la valorisation des instincts du « bon sauvage » par rapport à la civilisation corrompue : les animaux et les sauvages gardant leurs enfants près d'eux, les femmes européennes sont invitées à faire de même.

Il faut toutefois constater que les femmes ne sont pas retournées à leur « nature profonde » de très bon gré, et qu'il a fallu quantité d'exhortations pour qu'elles entendent raison, voire même de menaces (l'égoïste qui refuse d'allaiter ne risque pas moins que la mort, diront les médecins de l'époque).

Au final, si un instinct maternel existe, il semble incapable de lutter contre les normes sociales du moment : quand l'enfant est peu considéré, et l'affection qu'on leur porte réputé dangereux pour leur éducation, les parents les abandonne à d'autres personnes sans beaucoup d'état d'âme. L'amour maternel se construit finalement comme les autres, jour après jour, au fil des contacts.

L'essai est copieusement fourni en faits, témoignages d'époque, et chiffres. Certaines parties me semblent déséquilibrées : on parle beaucoup du phénomène des nourrices par exemple, en passant un peu rapidement sur d'autres sujets qui me semblaient intéressants à traiter (considération de l'enfant, rôle du père, …). Une pointe d'agacement se fait de temps en temps sentir quand l'auteure émet des opinions personnelles qui n'ont pas beaucoup de liens avec le sujet traité (si la position de l'Église catholique à une époque donnée est intéressante à connaître, savoir si elle était ou non conforme à la parole de l'Évangile me semble sans intérêt). Enfin, on peut regretter que la contraception n'est jamais abordée dans cet essai, alors qu'elle change à mon avis considérablement la donne sur la question. Même si sa légalisation ne datait que de quinze ans au moment de la publication du livre, l'auteure a pourtant cité des phénomènes encore plus récents.
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J'ai lu l'étude d'Elisabeth Badinter à sa sortie en 1980 et je viens de le redécouvrir sous un autre angle, c'est à dire dans notre époque.
C'est remarquablement bien analysé et bien mené, très intéressant.
Dommage qu'elle soit conditionnée par sa conviction de départ, c'est à dire que l'instinct et l'amour maternels ne sont que des phénomènes sociaux.
C'est plutôt le contraire, on dénaturait les femmes de la bourgeoisie en confiant leurs enfants à des nourrices.
C'est quand même une très belle étude,intéressante, pas commune, sur l'histoire de la maternité et ce, sur près de quatre siècles.
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Avant tout jugement, il faut replacer ce livre dans l’époque de sa publication (1980): une bonne partie de la société française portait encore une idéologie iconoclaste héritée du mouvement de ’68. Beaucoup d’intellectuels avaient envie de théoriser à l’encontre les points de vue traditionnels, trop considérés autrefois comme "évidents". La philosophe E. Badinter était donc dans l’air du temps quand elle mettait en cause un des piliers de la famille et par conséquent de la société. Dans son ouvrage, elle nous livre une étude détaillée de la relation mère-enfant au cours des quatre derniers siècles. Elle insiste sur une coutume qui s’est prolongée longuement: l’envoi des bébés chez des nourrices qui les gardaient durablement; ensuite il y avait souvent la mise en pension ou l’entrée au couvent. Ce traitement des très jeunes enfants - et d’autres pratiques que l’auteure analyse aussi dans son livre - sont pour elle significatifs: l’amour maternel n’est pas "naturel", il n’est pas inné; au contraire, c’est une invention qui s’est progressivement imposée, pour que chaque sexe ait son rôle bien déterminé, dans un but de cohésion sociale.
Le travail d’E. Badinter est sérieux. Mais on a le droit d’estimer qu’elle va trop loin. Je ne me lancerai pas dans une critique détaillée de cette thèse. Pour moi, le vrai problème des relations parents-enfants, autrefois, c’est que personne ne s’intéressait aux jeunes enfants en tant que tels. Pour les parents, c’étaient en quelque sorte des "homoncules", des adultes en miniature non dégrossis qu’il fallait au plus vite éduquer (à la dure, en général), pour les placer sans tarder sur une trajectoire sociale convenable. L’idée qu’un enfant a son propre point de vue, ses propres intérêts, ses richesses intérieures propres, est assez récente. Elle a été mise en avant notamment par J.-J. Rousseau, donc assez tardivement. Ses idées (par exemple sur l’éducation) étaient révolutionnaires et n’ont porté ses fruits que plus tard encore. Ensuite sont venus d’autres philosophes, des psychologues, des éducateurs, qui ont enfoncé le clou. Dès lors que l’enfant a été considéré en tant que tel, l’amour maternel - s’il existe spontanément dans le cœur de la mère (et je crois qu’il en est ainsi) - s’exprime et apporte une touche essentielle à l’évolution affective des enfants.
J'ajouterai une opinion strictement personnelle. Il est "amusant" de constater que, dans la France du XXIème siècle, on est plutôt dans une tendance inverse à celle que décrivait l’auteure. Maintenant, la plupart des jeunes parents manquent terriblement de recul par rapport à leurs rejetons et l’amour maternel (mal compris) porte des fruits parfois vénéneux. Sous prétexte de ne pas brimer leur liberté, on laisse trop souvent la bride sur le cou à des "enfants-rois" qui, arrivés à l’adolescence et surtout à l’âge adulte, se retrouvent très mal adaptés aux réalités actuelles de la vie sociale. A ce sujet, il ne faudrait pas oublier que « éduquer » veut dire étymologiquement « mener quelque part ». Or, j’ai la fâcheuse impression que beaucoup d’enfants sont présentement "menés" nulle part.
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Il faut replacer ce livre dans le contexte de la date de sa sortie: 1980. A l'époque cela ne faisait que peu d'années qu'en France les femmes disposaient de la liberté de contrôler les fruits de leur propre corps - par l'introduction de la loi autorisant l'avortement - et la croyance en l'existence d'un instinct maternel était alors encore tellement ancrée que l'idée de le remettre en cause apparaissait encore saugrenue, du moins de ce côté-ci de l'Atlantique.
Ce livre de Badinter fit donc le "buzz" à sa sortie, l'auteure s'attachant à démontrer que l'attachement de la mère à l'enfant dès la naissance n'est pas un donné "naturel" que, partant, la culture ne pourrait remettre en cause. Badinter rappelle notamment que, durant l'ancien régime, la mise en nourrice des enfants pour ne les voir revenir au bercail familial que vers 5-6 ans (souvent pour être immédiatement envoyés en internat) était largement répandue à l'époque et certainement pas limitée à la sphère aristocratique...
Aujourd'hui l'on peut évidemment reprocher à ce livre son côté jusqu'au boutiste. A trop vouloir rompre le cou au "donné naturel", entravant la liberté des femmes, Badinter déséquilibrerait la balance en sens inverse. de nos jours on a tendance à admettre le "subtil mélange" entre le "donné" naturel et le "construit" culturel, tant pour les hommes que pour les femmes. Ce faisant toutefois et à force de trop vouloir nuancer le discours une bonne partie de la population en vient à être larguée et retombe vite dans les vieux démons, et notamment celui du destin "naturel" des femmes à centrer essentiellement leur existence sur la maternité. Les idéologies rétrogrades, notamment religieuses, opérant leur grand retour aujourd"hui, en attestent.
Par conséquent ce livre de Badinter demeure pour moi un livre important, à lire quitte à se concocter son propre "dosage" ensuite...
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L'amour en plus était présenté comme le livre de la controverse, le livre qui avait fait trembler bon nombre de personne comme le Docteur Edwige Antier sur l'amour maternel.
ce livre est au final une très belle étude argumentée avec un historique très fouillé sur la famille à travers l'histoire. Mais oui, on est plus sur l'histoire des familles, mère, père, enfant. L'amour maternel n'est à mon sens pas le sujet principal du livre mais il y contribue. J'avoue que je ne vois pas où il y a polémique et c'est ce qui m'a un peu déçu. J'ai déjà lu pas mal de livre d'Elisabeth Badinter et je m'attendais plus à des écrits dans le style de son livre le conflit, un peu plus cash et vindicatif. Je reste un peu sur ma faim mais il s'agit là néanmoins d'une très belle thèse qui mérite d'être reconnue.
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Citations et extraits (29) Voir plus Ajouter une citation
À parcourir l'histoire des attitudes maternelles, naît la conviction que l'instinct maternel est un mythe. Nous n'avons rencontré aucune conduite universelle et nécessaire de la mère. Au contraire, nous avons constaté l'extrême variabilité de ses sentiments, selon sa culture, ses ambitions ou ses frustrations. Comment, dès lors, ne pas arriver à la conclusion, même si elle s'avère cruelle, que l'amour maternel n'est qu'un sentiment et comme tel, essentiellement contingent. Ce sentiment peut exister ou ne pas exister ; être et disparaître. Se révéler fort ou fragile. Privilégier un enfant ou se donner à tous. Tout dépend de la mère, de son histoire et de l'Histoire. Non, il n'y a pas de loi universelle en cette matière qui échappe au déterminisme naturel. L'amour maternel ne va pas de soi. Il est "en plus".
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Au XVIIe siècle et surtout au XVIIIe siècle, l'éducation de l'enfant des classes bourgeoises ou aristocrates suit toujours à peu près le même rituel, ponctué par trois phases différentes : la mise en nourrice, le retour à la maison puis le départ au couvent ou en pension. Tout au plus l'enfant vivra en moyenne cinq ou six ans sous le toit paternel, ce qui ne signifie aucunement qu'il vivra avec ses parents. D'ores et déjà nous pouvons dire que l'enfant du maître marchand ou du maître artisan, comme celui du magistrat ou de l'aristocrate de cour, connaîtra une solitude prolongée, parfois le manque de soins et souvent un réel abandon moral et affectif.
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Il est plus juste de conclure à une connivence entre père et mère, mari et femme, pour adopter les comportements que l'on vient de voir. Simplement, on est moins choqué de l'attitude masculine car nul n'a jamais, jusqu'à ce jour, érigé l'amour paternel en loi universelle de la nature. Il faut, croyons-nous, se résigner à relativiser également l'amour maternel et constater que « le cri de la nature » peut ne pas s'entendre.

On verra qu'il faudra, à la fin du XVIIIe siècle, déployer beaucoup d'arguments pour rappeler la mère à son activité « instinctive ». Faire appel à son sens du devoir, la culpabiliser et même la menacer pour la ramener à sa fonction nourricière et maternante, dite naturelle et spontanée.
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Quand une femme a des ambitions (mondaines, intellectuelles, ou professionnelles comme aujourd'hui) et les moyens de les satisfaire, elle est infiniment moins tentée que d'autres d'investir son temps et son énergie dans l'élevage de ses enfants.
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«Au lieu d'instinct, ne vaudrait-il pas mieux parler d'une fabuleuse pression sociale pour que la femme ne puisse s'accomplir que dans la maternité ?»
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