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Théâtre (Badinter) tome 1 sur 2
EAN : 9782213718361
306 pages
Fayard (10/03/2021)
4.05/5   31 notes
Résumé :
Trois pièces qui ont toutes à voir avec la justice et le destin des hommes. L'une, déjà publiée, C.3.3., dans laquelle R. Badinter évoque le procès pour homosexualité d'Oscar Wilde, celui-ci sera condamné à deux ans de prison, et marquera le début de sa chute.
Les briques rouges de Varsovie : nous sommes au coeur du ghetto, aux derniers jours de l'insurrection, les personnages ont déjà vécu le pire et sont acculés dans leurs derniers retranchements.
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Ce livre est né de l'amour pour le Théâtre.
C'est pour le moins une bonne raison.
Il contient trois pièces : "cellule 107", "les briques rouges" et "C.3.3.".
Et son auteur, Robert Badinter, y propose au lecteur d'en devenir, par la grâce de l'imagination, le metteur en scène et l'acteur de chacun de ces trois morceaux de scène.
"Frappons les trois coups !
Instant magique, le rideau se lève" : nous dit-il ...
Le premier lever de rideau est une conversation sans témoin, un dialogue imaginé, entre Pierre Laval et René Bousquet lors de la nuit précédant l'exécution du premier de ces deux hommes.
Le décor est celui de sa cellule, dans le quartier des condamnés à mort de la maison d'arrêt de Fresnes.
Robert Badinter fait ici preuve d'avoir une belle plume, élégante, fine et intelligente.
Il fait preuve aussi d'une grande connaissance de l'âme humaine et des arcanes politiques.
Le dialogue est policé, retenu entre ces deux hommes qui, au fond, ne semblent pas s'estimer, mais qui ont ensemble touché le fond de la compromission, de l'infamie et du crime.
La conversation est éclairante sur la personnalité de chacun d'eux et sur le rôle tenu durant les années d'occupation.
Robert Badinter réussit à faire passer dans le verbe toute la complexité et l'ambiguïté de leurs relations.
Et, à l'épilogue de la pièce, par l'introduction de nouveaux personnages, par un procédé dramatique astucieux, l'auteur de la pièce place finalement l'accusé devant un dernier tribunal.
Cette pièce, tragique et sensible, est peut-être un peu trop pathétique sur sa fin ?
Mais la vie, parfois, ne l'est-elle pas aussi ...
La deuxième pièce, "les briques rouges de Varsovie" est précédé d'une brève histoire du ghetto pour la rendre plus intelligible et compréhensible au lecteur d'aujourd'hui.
L'action se déroule en mai 43, aux derniers jours de l'insurrection.
Quatre personnages se font face, cernés par les allemands dans un grand atelier sous le toit d'un grand atelier : un rabbin, Schmiele un ouvrier tailleur bundiste, Jo un policier juif et Rivka une étudiante sioniste.
Ces quatre personnages, portés ici par le ressac d'une immense tragédie, représentent pour l'heure ce qu'il reste d'un monde juif tiraillé entre la soumission, l'espoir, la révolte et la soif de vivre, le tout porteur d'autant de désespoir.
La pièce est poignante.
Elle porte les dissensions qui apparaissent par dessus le martyr commun.
Elle pose une profonde interrogation métaphysique : si l'éternel n'est pas notre Dieu, peut-il être celui, monstrueux, de notre bourreau ?
Ici, le pire voisine avec le meilleur.
Mais l'âme humaine n'est-elle pas ainsi faite ? ...
La troisième est dernière pièce du recueil a pour titre "C.3.3.".
Elle s'intéresse au destin judiciaire d'Oscar Wilde et pose, par dessus l'intelligence et la précision du récit, une question fondamentale : comment une justice, respectueuse du droit, largement approuvée par la conscience collective, peut-elle nous apparaître, un siècle plus tard, si injuste ?
Là encore, Robert Badinter signe une pièce magnifique.
Devenu belle plume de Théâtre, le grand homme politique, en avant-propos, a promis, ou presque, un deuxième recueil, intitulé "Théatre II", ce serait nous offrir encore après tout ce qui a été donné déjà ...
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Les nations aiment glorifier les « grands hommes ». M. Badinter fait partie de ces icônes grâce essentiellement à sa participation au combat ayant mené à l'abolition de la peine de mort en France (c'était déjà fait en Autriche, en Finlande, en Suède, au Danemark etc...).
Mais on sait peut-être moins que cet avocat aimait la littérature, le théâtre et ce sont trois de ses pièces qui sont regroupées ici (il semble écrire qu'il y en a possiblement d'autres parmi celles qu'il a lui-même éliminées). Trois pièces à vocation historique puisque deux d'entre elles concernent la seconde guerre mondiale et la troisième le procès en homosexualité de M. Oscar Wilde.
Je concentrerai mes remarques sur les deux premières puisqu'elles entrent bien plus dans mon domaine de connaissances : « Cellule 107 » : retour sur Vichy, la collaboration, Bousquet et Laval et « les briques rouges de Varsovie » sur l'insurrection du ghetto du printemps 1943.
Le premier est très intéressant car le dialogue imaginaire entre ces deux personnages ayant participé au régime de Vichy est construit de manière à exposer le point de vue de M. Laval « dans son référentiel ». M. Bousquet fait en comparaison presque pâle figure et on devine plus de considération de M. Badinter pour M. Laval, exécuté en octobre 1945 que pour celui qui fût acquitté par la Haute Cour de justice le 23 juin 1949.
En tout cas, il imagine ce qui n'a pas été possible en 1945 : laisser s'exprimer, s'expliquer cette figure de proue de la collaboration.
« Quant à Laval, l'homme le plus détesté de France après la Libération, il avait joué sa vie en décidant, en août 1945, de rentrer d'Espagne en France plutôt que de gagner l'Irlande ou une dictature d'Amérique latine où il aurait obtenu l'asile politique. »
Il les fait donc dialoguer et pour quelqu'un connaissant bien cette période historique, c'est très intéressant, instructif à certains égards tellement la chronologie des évènements, le passé des protagonistes est à garder en tête pour comprendre les justifications de l'un, la sérénité de l'autre.
Pour Varsovie, c'est plus lourd, avec une introduction qui rappelle simplement et brillamment tout le contexte de la situation de la capitale Polonaise et de ses 30% de population juive (360 000, la plus nombreuse d'Europe).
Il met en scène un rabbin, un ouvrier tailleur, un policier juif et une étudiante sioniste.
C'est beaucoup plus enlevé que la précédente, plus visuel et on peut imaginer que ce texte donnera lieu en France et ailleurs a des adaptations et réalisations.
Rivka, l'étudiante sioniste glorifiée par M. Badinter dans la préface historique de sa pièce explique à elle seule le lien qui réunit ces deux premiers textes :
« Eretz Israël est tout ce qui nous reste comme espoir. Qui peut encore croire à un avenir pour les Juifs en Pologne ? Tu as vu beaucoup de Polonais venir à notre secours ? La vraie leçon de cette guerre, pour nous, c'est que les Juifs ne peuvent compter que sur eux. Toujours. Partout. »
« Puis, la guerre finie, tu iras en Eretz Israël, tu verras Jérusalem et tu auras des enfants, là-bas, au kibboutz. »
Prophétie inversée puisque ces lignes ont été écrites après la réalisation du rêve sioniste mais qui éclaire tout de même de manière saisissante la seconde moitié du vingtième siècle et la réalité des rapports entre les occidentaux et l'état d'Israël.
Voilà, je crois que quelqu'un ayant déjà une bonne connaissance du dossier seconde guerre mondiale et conséquences appréciera à sa juste valeur ces textes. Pour ceux qui n'en ont que la version médias vingt et unième siècle, cela ne constitue pas un corpus suffisant.
Finissons en disant que c'est très bien écrit, ce qui n'est pas surprenant si l'on considère que M. Badinter était un brillant avocat.
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Dans ce recueil de théâtre, nous découvrons le dramaturge Robert Badinter, que nous ne soupçonnions peut-être pas. Malgré tout, les thèmes abordés eux, au final nous étonnent moins : la shoah, le combat, les luttes contre l'injustice.

Ce recueil vaut autant par ses pièces que par les introductions de ces pièces qui peuvent faire plusieurs dizaines de pages, notamment pour la seconde sur Varsovie. Et ces dossiers sont passionnants et personnellement les 30 pages sur le ghetto de Varsovie et tout ce qui l'entoure m'ont passionné et instruit.

La première pièce tourne essentiellement autour du huisclos imaginé entre Bousquet et Laval, dans la cellule de ce dernier la veille de son exécution. Badinter y interroge les responsabilités de la collaboration, les engagements qui construisent une carrière et les paradoxes d'hommes pouvant aimer passionnément leur enfant et en envoyer des milliers à la mort.

La seconde pièce est celle que j'ai le plus apprécié. La très riche introduction permet de mieux comprendre la vie à l'intérieur du ghetto de Varsovie et comment les allemands ont pu faire disparaitre plusieurs centaines de milliers de juifs dans la région presque sans jamais entrer dans le ghetto jusqu'à sa liquidation. Ils se sont appuyés sur le Judenrat qui, au départ, pensant pouvoir sauver une partie des leurs "collabora" puis se fut le règne du plus fort et du plus nanti. Il n'y eu presqu'aucune résistance jusqu'à la fin.
La pièce évoque ces derniers jours, lorsque les allemands décident de raser le ghetto et font face à une vive résistance, véritable guérilla urbaine qui les mobilise plusieurs semaines.

Enfin la dernière pièce est plus tournée sur le fait judiciaire. L'auteur, dans son introduction évoque son "étonnement" face à la criminalisation de l'homosexualité en Angleterre à la fin du XIXe. Il va aborder cette question par le prisme de l'un des évènements majeurs de cette époque, le procès et l'emprisonnement d'Oscar Wilde accusé d'avoir perverti la jeunesse par sa vie intime avec des hommes et des hommes plus jeunes que lui.

C'est un recueil très plaisant, que j'ai pris beaucoup de plaisir à lire.
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Trois pièces composent ce recueil.
Toutes ont un rapport avec la justice, chacunes sous un angle différent.

La première évoque la notion qu'a le coupable de la justice, un dialogue entre deux dirigeants de la France de Vichy, l'un ayant veillé à la collaboration, le second aux rafles. Une pièce où les acteurs essaieront de se dédouaner, se rejeter la faute, et fuir la justice, mais le peut on vraiment?

La seconde évoque les dernières heures du ghetto de Varsovie, plusieurs juifs, condamnés à périr sous les armes ou dans les camps, se posent la question de la justice.
Qu'est ce qui peut être juste quand le sort nous condamne à nous entretuer?

La dernière montre plutôt la notion d'injustice, si je savais qu'Oscar Wilde avait été emprisonné, je pensais que c'était pour ses écrits et non pas pour sa sexualité, son procès et emprisonnement ont toutefois servi à couvrir des personnes plus haut placées.
Une injustice donc, qui marquera le début de sa déchéance.

Des pièces avec des introductions fournies, qui nous permettent de rentrer facilement dans l'histoire, le cadre étant bien établi.
J'ai beaucoup aimé la dernière pièce, qui réussit à reprendre tout un pan de l'histoire d'Oscar Wilde et nous en apprend beaucoup sur une partie de son oeuvre.
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Passée la surprise du Robert Badinter dramaturge (ce qui a d'ailleurs constitué l'un des attraits de ce livre pour moi), j'ai retrouvé l'homme de justice et l'homme de lettres qu'il est, avec un grand plaisir !
Ce livre regroupe 3 pièces qui présentent 3 moments forts : la dernière nuit de Pierre Laval dans sa prison, les dernières heures de l'insurrection du ghetto de Varsovie, et le procès et enfermement d'Oscar Wilde.
Chaque pièce est précédée d'une introduction, au moins aussi intéressante que la pièce elle-même.
A travers cet ouvrage, j'ai plongé dans l'histoire avec délectation, c'est passionnant et vraiment addictif.
Je le conseille !
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critiques presse (1)
LeFigaro
17 mars 2021
Dans son dernier livre, l'avocat témoigne de la misère et de la complexité humaine à travers trois pièces écrites comme des leçons magistrales
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Bousquet avait été appréhendé en Bavière, en avril 1945, où ses amis de la Gestapo l’avaient placé en résidence surveillée dans une villa. Il avait été interrogé par les services secrets américains. À l’issue de ces auditions, ceux-ci lui auraient offert de gagner les États-Unis avec sa famille sous une nouvelle identité.
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Pourquoi faut-il que même dans le ghetto, dès qu'il y a trois juifs ensemble, les voilà qui s'empoignent, sionistes contres bundistes, communistes contre betar, assimilés contre orthodoxes ? ...
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L'orgueil du vice est pire que le vice lui-même ...
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Le propre de la tragédie est que le ressort caché des événements terribles qui vont advenir se trouve dans la personnalité des héros. Il ne manque que le déclic du destin pour que la machine infernale qu’ils portent en eux se mette en marche et que l’explosion survienne.
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les vues des philistins sur l'art, maître Carson, sont incroyablement bornées ...
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