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Critique de Takalirsa


C'est un défi Babelio qui m'a fait enfin lire ce classique de la sociologie. J'avais peur que le texte soit daté (il a été publié en 1992) mais l'homme nouveau étant toujours en gestation, la plupart des propos restent pertinents, d'autant que cet essai puise également dans la psychologie et l'histoire. J'ai notamment appris que les Précieuses (pas si ridicules) du 17e siècle ont été les premières à remettre en question le rôle des hommes et de l'identité masculine.

On pourrait reprendre la célèbre phrase de Simone de Beauvoir et dire « On ne naît pas homme, on le devient » : « Il est plus facile de faire une femme qu'un homme. de la conception d'un XY à la masculinité adulte, le chemin est semé d'embûches ». On n'en est pas forcément consciente en tant que femme, mais « le petit garçon se définit avant tout négativement. La masculinité, c'est ce qui n'est pas féminin ». Il paraît d'ailleurs que le programme embryonnaire de base est orienté de façon à produire des femelles : « Le seul rôle de l'Y est de détourner la tendance spontanée de la gonade embryonnaire indifférenciée à organiser un ovaire et de la forcer à produire un testicule ». Au passage, il y a dans ce chapitre un texte très moderne sur l'identité sexuelle (« Aussitôt né, nous apprenons au bébé par le geste, la voix, le choix des jouets et des vêtements, à quel sexe il appartient. Mais on ne prend vraiment conscience de l'influence de ce phénomène d'apprentissage que lorsque le sexe de l'enfant pose des problèmes ». A ce sujet, je vous recommande le roman le choeur des femmes de Martin Winckler).

Pour devenir un homme, le petit garçon devra se différencier de sa mère qui l'a porté pendant neuf mois et, le plus souvent, élevé dans ses jeunes années. Il se construit donc par opposition. A la différence des filles que les premières menstruations font passer naturellement à l'état de femmes, les garçons doivent passer par un processus éducatif pour devenir hommes (d'où les rites d'initiation dans de nombreuses cultures). Il s'agit de rompre avec la faiblesse et la dépendance de l'enfance. L'autrice consacre de longs passages à l'homosexualité, ses origines supposées et ses conséquences sociales.

Dans la construction de la masculinité, l'importance du père est primordiale. Or il est bien trop souvent absent (physiquement) ou tout au moins distant (affectivement). La masculinité a longtemps été réduite à « l'homme-dur » (dont le cow-boy est l'un des symboles), hyper viril, agressif et misogyne. A l'opposé s'est développé « l'homme-mou » passif et soumis, dépendant de la femme (mère puis épouse) qui « l'a dressé pour faire tout ce qu'elle veut » au point qu'elle finit par ne plus le respecter. Si le premier est un mythe, un idéal masculin fatal à l'homme lui-même, le second l'enferme dans un malaise identitaire créant angoisse, difficultés affectives, peur de l'échec et comportements compensatoires destructeurs (comme l'alcool). Ce sont les pères « manquants » qui engendrent tous ces fils « manqués ». L'absence d'attention paternelle a en effet pour conséquence d'empêcher le fils de s'identifier à lui et d'établir son identité masculine.

Les pères ont donc un rôle fondamental à jouer dans l'invention de cette autre masculinité plus équilibrée, compatible avec la féminité sans se dénaturer. Objectif : une humanité réconciliée… le défi est entre les mains des nouvelles générations !
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