Un oeil sur le moniteur, l'autre sur le plateau, je me dis que le cinéma, c'est de la haute couture, de la peinture. Un tournage, c'est un concert où chaque note a son importance, un tableau où le plus petit coup de pinceau est important. Le cinéma, c'est tout sauf du cinéma.
La nuit, déjà, a planté ses griffes dans la lumière du jour.
Si on empilait les "Je t'expliquerai" qu'elle me sert en ce moment, on pourrait bâtir un monument au mensonge inconnu.
Je me retrouve assise devant un miroir comme j'en ai toujours rêvé : grand, avec des ampoules tout autour. J'ai les yeux qui brillent, mieux qu'à la fête foraine, je suis au pays d'Alice. Mais les merveilles s'éparpillent à mes pieds quand une grosse femme se plante derrière moi, saisit mes cheveux dans sa main géante et les tire en arrière. Je crie.
- T'es bien chochotte, ma cocotte. Faut souffrir pour faire la star.
Là, je veux profiter un max de mes derniers jours sur le Vieux Continent. Dévorer chaque seconde jusqu'au trognon.
La perspective du départ d'Amos me laisse aussi hébétée qu'une équation polynomiale à coefficients complexes.
Nous, les blue Cerises, on est comme ça. On passe notre temps à vouloir se protéger les uns les autres. On se cache des trucs, on esquive. Parfois je me demande si nous faisons autre chose que de nous mentir.
On n'embrasse pas pareil une personne dont on connaît chaque centimètre de la peau.
Quand il pose ses mains sur mon corps, il a la précision délicate d'un amateur de porcelaine ming.
- Tu sens quoi ?
Je rigole :
- 5 de Chanel... J'en ai trop mis ?
- Nan, mais je me demandais pourquoi j'avais des images de toi... hum... sans pyjama.