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C'est pas ma faute" fait partie de la sélection 13-15 ans du prix UNICEF de littérature jeunesse 2021.
Anne-Fleur Multon et
Samantha Bailly nous proposent de suivre une youtubeuse qui cesse tout à coup de poster des vidéos. Ma première réaction : pas grave, il paraît qu'il y en a plein et qu'en plus, stocker ces vidéos est un désastre écologique.
Sauf que ces jeunes filles sont suivies par des (dizaines de) milliers d'autres jeunes filles qui s'attachent à elles comme à des personnages de sitcom. Ce roman exprime bien la relation de dépendance qui lie parfois ces ados, ainsi que le poids de l'image et des commentaires parfois dévastateurs des "haters". Pourquoi courir le risque d'être ainsi jugée ? Je ne comprends pas, mais ce n'est pas le sujet.
Le sujet, c'est la relation entre deux jeunes filles, chacune devant leur écran : Lolita, influenceuse, à la peine en bac pro ASSP dans le civil, et Prudence, qui brille aussi bien en seconde qu'à ses cours de danse au conservatoire, totalement accro aux vidéos postées par Lolita. Ainsi qu'aux loukoums, à tout un tas d'aliments frits et aux crêpes au Nutella, ce qui est étonnant pour une danseuse de ce niveau (d'autant qu'on nous décrit une prof tyrannique, mais nous ne sommes plus à une incohérence près, elles sont trop nombreuses pour être listées ici).
Je ne suis familière ni des réseaux sociaux (pas la moindre idée de ce qu'est "une story sur Insta") ni du milieu des influenceuses, et je ne sais pas dans quelle mesure cette intrigue est crédible. Ce qui me semble probable en revanche c'est que ces jeunes femmes, souvent seules devant leur ordinateur, sont des proies toutes indiquées pour les pervers, les désordres alimentaires et les difficultés juridiques liées à leurs partenariats avec des marques. Ça tombe bien, tous ces écueils sont utilisés dans l'intrigue.
Si j'ai plutôt apprécié de découvrir un univers qui m'était inconnu, l'histoire ne m'a pas beaucoup intéressée. La fluidité du texte est perturbée par les multiples allers-retours temporels et l'alternance des points de vues Prudence/Lolita (dont les parties sont en plus rédigées à la deuxième personne - ce n'est pas très subtil mais c'est pour montrer qu'elle ne s'appartient plus
et on revient au "je" quand elle supprime tous ses comptes et qu'elle entre en HP ). Cela ne m'a pas empêchée de voir venir LA révélation de très loin.
Parce que Prudence n'est pas si parfaite. Enfin, c'est ce qu'elle nous martelle parce qu'elle culpabilise d'être lesbienne. Ah, et elle est noire aussi, alors que sa prof de danse est raciste. Ça fait beaucoup, surtout ajouté aux difficultés rencontrées par Lolita ? Tant pis, c'est comme ça.
La bonne volonté des deux auteures ne fait aucun doute, mais à trop en rajouter ça tourne au gloubiboulga et la clarté du message en pâtit. Pourtant je suis sûre que ce roman peut plaire, ce que confirme le nombre moyen d'étoiles attribué par d'autres lecteurs !