Tout destinait Teresa à succéder à son père à la tête de la brasserie familiale après un passage dans une école hôtelière coûteuse, mais c'était sans compter sur le caractère bien trempé de la jeune fille.
Angela aime la vie, les garçons, les baisers, les mains audacieuses glissées sous sa jupe et le plaisir ressenti.
Lorsque Damaso croise sa route, la jeune femme n'hésite pas et le suit sur un bout de terre balayée par des vents furieux et les courants de l'Atlantique.
Quelques cabanes de pêcheurs et une poignée d'hommes rompus aux intempéries.
Très rapidement Teresa prend ses marques et tandis que son mari, à la fois gardien du phare de Cabo et télégraphiste vaque à ses occupations, elle s'improvise maîtresse d'école bien décidée à éduquer les enfants de la communauté.
J'ai adoré ce court roman dans cette première partie. Les paysages sont parfaitement décrits. On sent presque le vent et les vagues de l'océan déchaîné se fracasser sur le phare les jours de tempêtes.
J'ai aimé le regard ébahi et émerveillé des écoliers devant leur maîtresse.
J'ai cru tenir « un coup de coeur ».
Seulement voilà, lorsque le roman avec la vie de Teresa change de cap, l'histoire perd de mon point de vue une partie de son intérêt.
En nous immergeant dans le monde des Tupamaros à la suite de Machado, ancien élève de Teresa, l'auteur ne fait que survoler la réalité et les motivations de ce mouvement révolutionnaire.
J'aurais aimé en savoir plus.
Un autre gros bémol à ma lecture, j'ai trouvé que la psychologie des personnages manquait de consistance.
Je resterai très attentive au prochain roman de Catherine Baldisseri tant je reste convaincue, qu'elle a un talent certain, des idées et une écriture particulièrement élégante. Il suffit qu'elle ose aller plus loin avec ses personnages, quitte à les malmener, car cette fois-ci j'ai eu l'impression qu'elle les bridait de peur d'aller trop loin.
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Voici un roman qui dépayse. Géographiquement d'abord, avec l'Uruguay, son minuscule village de pêcheurs et son phare, dissimulés derrière les dunes .
"D'ailleurs, parler de village pour dire ce qu'était Cabo Polonio à l'époque relevait de la plus pure prétention. Un bout de terre marécageuse coincée entre de hautes dunes mouvantes et les flots, malmené par les vents et les courants de l'Atlantique."
Dépaysement avec ses personnages tout d'une pièce qui avancent sûrement, sans dévier. Qui font rêver. Teresa à la forte personnalité "entrevit une existence aventureuse s'ouvrir à elle aux côtés d'un homme qui lui plaisait terriblement".
Un regard, l'amour comme une évidence. C'est beau.
"Elle fut séduite.
C'est comme dans les contes, un regard allumé de paillettes se fiche droit dans nos yeux, une voix chaude ravit nos oreilles et notre petit coeur flanche."
Dépaysement avec l'horrible chasse, le massacre des loups de mer, autrement dits otaries à fourrure australe.
La première partie est la plus intense, la plus merveilleuse. Les deux autres parties relatent le retour de Teresa dans la capitale, chez ses parents, retrouvant ainsi le rôle qui lui était dévolu.
J'ai eu plaisir à lire l'ensemble, en quelques heures, je peux dire que c'est une lecture qui fait du bien.
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C'est grâce aux 68 premières Fois que je découvre ce premier roman de Catherine Baldisseri…, une histoire sud-américaine dans l'Uruguay des années 1970, un portrait de femme sur fond de nature hostile et de guérilla lors de la révolte des Tupamaros et du mouvement de libération nationale qui a marqué le pays.
Cabo, c'est d'abord un lieu, Cabo Polonio, un tout petit village côtier, perdu au milieu des dunes… Aujourd'hui, c'est un endroit touristique, une station balnéaire au milieu d'un parc naturel. À l'époque où se situe le roman, il y a surtout un phare, un gardien de phare, sa jeune épouse et leur petit garçon. C'est un peu « le bout du monde », tant c'est isolé, loin de toute civilisation, à quelques trois cents kilomètres de la capitale.
Teresa est issue d'une famille d'immigrés italiens qui s'est enrichie sur trois générations en exploitant des brasseries à la mode à Montevideo ; jeune fille insatisfaite et éprise d'aventure, elle a coupé court à un avenir tout tracé dans les affaires familiales et suivi l'homme mystérieux dont elle est tombée amoureuse jusque dans ce hameau isolé où on pratique la chasse intensive aux loups de mers.
À Cabo Polonio, entre un mari peu présent, totalement investi de père en fils dans la mission d'éviter les naufrages, et l'isolement, Teresa trouve une occupation et donne un sens à sa vie en prenant en charge l'instruction des enfants et leur fait la classe dans la cuisine du phare ; elle devient ainsi une passeuse de savoir. Quand Machado, un étrange adolescent analphabète, chasseur de loups, avide d'apprendre entre deux saisons de chasse (du printemps à l'automne), arrive dans sa classe, elle s'intéresse particulièrement à lui et l'encourage doublement à progresser. Malgré les grands bouleversements de la vie, une promesse va lier Teresa à Machado aux delà des épreuves et des séparations.
La question du lieu reste centrale dans le roman, même quand le récit intercale les chapitres entre Montevideo où revient Teresa et Cabo Polonio où reste d'abord Machado : le jeune homme n'oublie pas celle qui lui a ouvert les possibles de l'instruction et Teresa espère que Machado fera ce qu'elle lui a demandé lors de leurs adieux.Le contraste entre les mondanités de la capitale et le village perdu donne force à l'intrigue ; les tribulations des Tupamaros que Machado a rejoints accentuent les différences entre les villes et les zones rurales du pays. Par son engagement, la jeune femme avait su donner vie au phare ; devenue pour toujours la voix de Cabo, elle se fait allégorie de la culture, de la conscience populaire de ce lieu reculé alors qu'à Montevideo, elle dirige une brasserie ou afflue une clientèle raffinée et cosmopolite.
Les personnages sont travaillés, mais forcément stylisés, vu la brièveté du roman : ils dégagent donc une vision d'excès, révèlent des tempéraments entiers, sans concession, sans atténuations, sans nuances. Leurs comportements, leurs réactions et leurs attitudes vont de pair avec la violence et la dureté des éléments naturels : l'océan et ses tempêtes, le vent mordant, les nappes de brouillard… Au fur et à mesure que l'on avance dans le roman, c'est la violence de la répression policière qui prend le relais de la nature hostile. La cour assidue de Stephen auprès de Teresa paraît bien frivole et toute en représentation face à ces dures réalités. Les oppositions sont tranchées ; les deux mondes sont aux antipodes l'un de l'autre, seulement réunis par les évènements historiques.
La Voix de Cabo est ma cinquième lecture pour les 68 premières Fois et je croyais bien tenir là mon premier coup de coeur… Je suis un peu déçue cependant, je reste sur ma faim…
Ce n'est pas la première fois que je m'étonne, voire déplore le format court des romans de cette rentrée littéraire. Ici, la trame esquissée supporterait bien des développements : l'histoire de Dario et Chela, les parents de Teresa ou encore l'inconscience de son frère Domingo, amateur de luxe et de vie facile, auraient gagné à être plus détaillées ; de même la lignée des gardiens du phare aurait mérité une plus longue évocation… Naturellement, Machado, surnommé « le colosse de Cabo », personnage brossé à trop grands traits, nécessitait selon moi plus de profondeur entre son passé misérable, sa grande intelligence, sa prise de conscience politique et son indéfectible lien avec Teresa. Prise dans ma lecture, j'avais besoin d'en savoir plus aussi sur les hommes qui l'ont suivi « dans sa marche sur les pas d'Artigas », le leader révolutionnaire ou encore sur ceux qui l'ont aidé… Que dire enfin de la révolte des Tupamaros, trop rapidement traitée ?
À côté de ce manque, je salue les descriptions des scènes de chasse aux loups de mers, très réalistes dans leur crudité et leur violence, dont la signification profonde peut prendre sens si on les compare aux scènes de tortures et de massacres des révoltés politiques. Bien sûr, j'ai aussi apprécié la symbolique du phare qui porte le flambeau de la connaissance, de la lutte pour la survie, du lieu de ralliement, de la solidarité, d'une forme de rayonnement…
Sensible à l'intertextualité, j'ai retrouvé avec bonheur le rôle joué par Jonathan Livingston le goéland de Richard Bach dans l'apprentissage de Machado : la lecture laborieuse de ce livre culte illustre à merveille une quête d'absolu, une recherche de soi-même à travers une transgression sans que l'auteur aie besoin de beaucoup la détailler, le goéland portant en lui tout un univers métaphorique et allégorique déjà connu de la plupart des lecteurs (enfin, je l'espère car ils passeront alors à côté de passages significatifs, ce livre n'étant pas explicitement cité).
Je me suis sentie tout de suite embarquée par ce livre, par une écriture qui me rappelle l'univers des romans d'Isabel Allende ou de Luis Sepúlveda ou encore l'influence de Gabriel García Márquez (les amours de Teresa avec le beau télégraphiste me font penser à celles des parents de l'auteur colombien). La Voix de Cabo dépayse, fait voyager, met en lumière un pan d'histoire peu connu des lecteurs français, mais mon horizon d'attente s'est heurté à un format trop court, à une trame narrative pas assez développée... Dommage !
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Uruguay, années 1970. Ne désirant pas reprendre la brasserie familiale de son père, Teresa Monti quitte Montevideo et emménage avec un télégraphiste dans un phare de Cabo. Les années passent et les enthousiasmes des débuts s'étiolent. Pour ne pas se sentir inutile, elle dispense des cours à la petite communauté de pêcheurs. Elle rencontre alors Machado, illettré et solitaire.Mais 5 ans plus tard, après le décès de son fils et de son mari, elle retrouve la brasserie familiale et reprend le flambeau et va tomber sur un nouvel amoureux.
On suit en parallèle parcours de ses anciens élèves, dont Machado...Vont ils se retrouver?
Je n'ai pas été emballée par ce roman tant par l'histoire de Teresa que celle beaucoup plus âpre des marins tueurs qui s'alternent. le style littéraire ne m'a pas convenu non plus... Il est rude, brut et ne m'a pas convenu.
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Teresa sera la honte de sa famille : elle a quitté Montevideo (Uruguay) où on lui promettait un futur de confort avec un mari bien choisi pour les beaux yeux de Damaso, le gardien du phare de Cabo. A terre, les hommes chassent les loups de mer, ces cétacés dont on mange la chair et dont la peau, surtout celle des bébés, est très prisée. Javelot, balles, dynamite, tout est bon pour que la chasse soit bonne, et il suffit de serrerl'estomac et les lèvres pour ne pas vomir à la vue du carnage.
Dans la cuisine du phare, Teresa fait la classe aux enfants tandis que Damaso protège les bateaux du naufrage grâce àses messages en morse. Il en a sauvé des vies mais pas celle de son propre petit garçon, décédé une nuit de tempête sanssoins médicaux, le phare était inaccessible. Alors Teresa vomit sa rage et son désespoir et Damaso, d'un saut fatal dans l'océan, abandonne son phare pour toujours.
La vie va reprendre ailleurs pour Teresa, à Montevideo, une autre vie. de son côté, Machado, l'un de ses grands élèves à qui elle a appris à lire et à écrire lutte pour sa vie, entre carnages de loups de mer et compagnons d'infortune. Et il intègre le groupe des révolutionnaires, les Tupamaros et sa vie devient lutte et danger, camaraderie et fuite devant les policiers qui les traquent.
La mer, la liberté, la responsabilité envers les autres, l'amour fort qui ne résiste pas au désespoir, la solitude, les sentiments purs et doux, rageurs et vénéneux : un arc-en-ciel d'émotions et de moments de vie dans une langue vive et belle qui restitue l'âpreté de la vie dans les conditions extrêmes. Un bon roman, plein de sensibilité et qui propose un total dépaysement.
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Cabo Polonio est un hameau au bord de l' Atlantique,en Uruguay. Aujourd'hui station balnéaire (72 habitants !). A l'époque où se situe le roman (années 70), ce n'était qu'un phare et quelques masures de pêcheurs. L'activité principale était la chasse aux loups de mer , violente et sanglante, mais qui faisait vivre une dizaine de personnes en quelques jours de massacre des bêtes.
Teresa, fille de restaurateurs de Montevideo, va y vivre avec l'homme qu'elle a choisi, contre l'avis de sa famille . Elle est jeune, amoureuse, enthousiaste. Elle installe une classe pour apprendre à lire aux enfants des pêcheurs , dans la cuisine du phare où elle réside (Damaso est télégraphiste et gardien du phare). Un jour, arrive Machado, un jeune colosse qui participe aux chasses de loups de mer: il veut apprendre à lire, s'instruire. Il fait une promesse à Teresa quand celle-ci abandonne le phare après un drame familial: il continuera à apprendre et viendra à Montevideo.
Teresa devra réapprendre à vivre, Machado trouvera sa voie dans un Uruguay en pleine révolution des Tupamaros…. Et ils se reverront à Cabo Polonio, un jour.
C'est un livre qui se lit sans déplaisir.La langue est plutôt fluide. Cependant je n'ai pas totalement accroché ; les histoires ne sont pas assez approfondies : le cadre politique (les Tupamaros) n'est qu'effleuré, la personnalité de Teresa insuffisamment décrite .
J'ai eu le sentiment que ce livre n'est pas tout à fait abouti, même si de nombreux ingrédients y sont: le cadre, ce phare d'un bout de monde, l'âpreté de la vie des chasseurs et pêcheurs, la situation conflictuelle de l' Uruguay des années 70, la famille de Teresa …. Je ressors un peu déçue de cette lecture, mais je remercie Babelio et Masse critique de m'avoir permis de lire ce roman.
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