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Jacques Le Goff (Préfacier, etc.)Béatrice Bonne (Traducteur)
EAN : 9782213026602
717 pages
Fayard (04/06/1991)
4.1/5   5 notes
Résumé :
4° de couverture :
(Edition source : Fayard, Grande biographie - 08/1998 (1° DL : 1991))


On n'a jamais douté du rôle capital du règne de Philippe Auguste (1179-1223) dans le «décollage» du pouvoir royal, et le prestige de ce souverain dans la mémoire collective n'a rien d'usurpé. Mais on s'est longtemps mépris à la fois sur les modalités et sur les étapes de cet essor. Tributaire de sources anglo-normandes plus fournies et plus aisé... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Il fallait oser : faire remonter la création - ou l'embryon de formation - d'un véritable État français au règne de Philippe II Auguste (1179 - 1223), semblait audacieux. Et pourtant, quand l'on y réfléchit et que l'on refait la liste des avancées territoriales et administratives réalisées de son temps, depuis qu'il avait remis la main sur la Normandie vers 1204, après la mort du roi d'Angleterre Richard 1er Coeur de Lion et avec le remplacement de ce dernier par son médiocre frère, Jean Sans Terre, tout nous incline à penser que c'est bien, en effet, de cette époque qu'il faut dater le début réel de ce que l'on a pu appeler le "miracle capétien", et que, sans cette action d'un roi, tenace dans ses idées comme dans ses ambitions pour le royaume, rien de tout ce qui a suivi - et l'on pense à ce qui fut fait par et sous Louis IX et Philippe IV le Bel - n'aurait été possible.
C'est donc un historien né Outre-Atlantique qui est venu nous confirmer que nous pouvons être fiers de ce qu'a accompli Philippe Auguste, dont on sait que le règne fut surtout illustré par la brillante et décisive bataille remportée à Bouvines en 1214 sur les troupes germaniques d'Otton de Brunswick alors que son fils, le futur Louis VIII mettait en déroute les Anglais à La Roche-aux-Moines. Tout un symbole : tous les "grands ennemis" du royaume de France avaient été défaits, entre mai et juillet, sur notre sol.
Après cela, et l'agrandissement tant des fiefs relevant de la couronne que du domaine royal proprement dit, l'oeuvre de construction de l'État capétien, avec ses rouages administratifs, ne pouvait que se poursuivre et se solidifier.
Un ouvrage incontournable pour qui veut comprendre ce qui s'est passé en France à la charnière des XIIe et XIIIe siècles. Et qui n'est donc pas seulement une biographie, mais, déjà, un classique.

François Sarindar, auteur de : Jeanne d'Arc, une mission inachevée (2015)
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John Baldwin, professeur d'histoire médiévale à l'université Johns Hopkins de Balitmore, a participé à l'édition scientifique des Registres de Philippe Auguste. Il a écrit de nombreux articles et commis des ouvrages traitant de l'évolution des idées, des idéologies et des mentalités au XIIème et XIIIème siècle. Son étude sur Les théories médiévales du juste prix l'a familiarisé avec la réflexion des clercs sur les mutations d'une économie de plus en plus sensible au marché et à la monnaie. de même son essai remarquable et brillant, que nous avons grandement apprécié, intitulé La culture scolastique au Moyen Agelui a permis de replacer dans la longue durée le mouvement scolaire et intellectuel qui prit son ampleur avec l'institutionnalisation de l'Université de Paris.

L'objet de cette biographie consacrée au fils de Louis VII, dit le Pieux, est d'étudier à la fois la personnalité du roi, son gouvernement et sa construction, ainsi que les fondations du pouvoir royal français au Moyen Age. Dans la préface, rédigée par Jacques le Goff, nous lisons l'analyse suivante : « trois règnes ont marqué, dans un long XIIIème siècle, trois phases décisives de la genèse de l'Etat monarchique en France, celui de Philippe II Auguste le premier, décisif (1180-1223), celui de Louis IX - saint Louis (1226-1270), celui de Philippe IV le Bel (1285-1314). Cet Etat est à l'origine de l'Etat moderne ».

Comment appréhender Philippe Auguste ?

L'auteur constate qu'il semble difficile d'approcher « le vrai Philippe Auguste, car il vécut en un temps où les fabricants de mémoire et d'histoire se souciaient peu de léguer à la postérité les traits individuels d'un roi mais se contentaient de lui appliquer les lieux communs élogieux propre à un souverain et les qualités stéréotypées qui lui conféraient une place dans la galerie des grands rois à l'instar de ceux dont les statues ornaient les façades des cathédrales contemporaines ».

Nonobstant cette difficulté, Baldwin réussit à esquisser la personnalité du roi, « un homme qui devient chauve jeune, marqué par une maladie contractée à la Croisade, un gouvernant très capable, quoique handicapé par un manque de culture et même d'instruction, détestant les jurons et les amuseurs publics (son petit-fils saint Louis qui l'a connu et l'admirait malgré leur grande différence de caractère s'en souviendra) ». L'étude des sources doublée d'un réexamen attentif des archives permettent à l'auteur de bien cerner Philippe.

Baldwin écrit que « personne n'a jamais douté du rôle capital du règne de Philippe Auguste dans le décollage du pouvoir royal. le prestige de ce souverain dans la mémoire collective n'a rien d'usurpé ». Comme il l'énonce dans son introduction « les documents émis et conservés par l'administration de Philippe Auguste sont en quantité suffisante pour permettre de dégager les grandes lignes des transformations clés qui intervinrent avec et par lui ».

Il est donc intéressant de remarquer que « le gouvernement de Philippe Auguste est le premier gouvernement capétien à préserver systématiquement des documents dans des comptes financiers périodiques, des archives, des registres et des recueils judiciaires ». La conséquence logique de ces classements entraîne une modification de l'Etat royal : « ces collections résultent et témoignent en même temps de l'émergence d'une administration perfectionnée ».

Cependant, Baldwin ne se contente pas d'étudier les documents officiels, comme il le reconnaît sans détour : « à côté des chartes royales, des comptes fiscaux, des registres, des inventaires et des rôles judiciaires qui éclairent les institutions administratives, je me suis également penché sur l'idéologie politique dont la formulation revenait aux historiographes de la cour et aux poètes ».

Quels sont les atouts des Capétiens ?

Baldwin note « que les deux principaux atouts des premiers Capétiens n'étaient donc pas leurs ressources financières et militaires, mais plutôt deux principes essentiels : le caractère sacré de leur royauté et la continuité dynastique ». Il précise son propos : « lorsque l'archevêque de Reims oint le jeune roi en 1179, il accomplit une cérémonie qui fait de Philippe un personnage sacré et qui lui permet de gouverner par la grâce de Dieu ». Il ajoute très justement : « au cours de cette cérémonie - et en contrepartie, pour ainsi dire, de cette consécration -, les Capétiens font le serment solennel de défendre l'Eglise contre ses ennemis ». Raison pour laquelle tout au long de l'histoire, le roi de France est considéré comme le « Fils Aîné de l'Eglise ».

Il demeure important de savoir, contrairement aux royaumes voisins, « que le déroulement normal des successions en France avait constitué un autre atout de la monarchie. En effet, les querelles pour le trône viciaient inévitablement le gouvernement et privaient la maison régnante de ses ressources ». L'explication tient, en partie, au fait que les premiers Capétiens durant de longues décennies couronnent l'héritier du trône de leur vivant avec l'objectif - réussi - d'éviter les crises politiques une fois leur mort advenue.

La décennie décisive

Bien souvent, les historiens ont coutume d'écrire que la « décennie décisive » s'ouvre au début du XIIIème siècle. Pour l'auteur, à l'aide des archives (notamment les registres fiscaux), il affirme que cette fameuse décennie décisive commence plutôt aux alentours de 1190 avec la « prise de possession de la Normandie ». Il développe son analyse comme suit : « c'est au cours des années 90 que, avec l'aide d'hommes nouveaux, le roi gère le Domaine autrement que comme un simple ensemble de seigneuries ; qu'à travers la justice (baillis et les sénéchaux) et les finances (Chambre des comptes) il fait vigoureusement valoir ses droits ; qu'apparaît un authentique budget (dépenses et recettes) ; que son entourage se dote d'outils statistiques afin d'établir un véritable bilan ». Philippe réforme avec succès le gouvernement royal comme le démontre brillamment Baldwin en s'appuyant sur des exemples précis .

La gloire du règne

Concrètement, pour échapper au morcellement des territoires et aux difficultés de gestion qui sont associées, Philippe Auguste entreprend très tôt la mise en place d'une nouvelle structure administrative en promouvant baillis, prévôts et sénéchaux. Ces derniers lui permettent d'exercer directement son pouvoir (notamment rendre la justice) sur ses nombreuses terres. Il organise ce système à l'occasion de son départ en croisade, par une ordonnance-testament de 1190 qui règle l'organisation du pouvoir en son absence. Rappelons brièvement que Philippe Auguste est le premier roi ayant mis sur ses actes, sporadiquement à partir de 1190, officiellement à partir de 1204, Rex Franciæ, « roi de France », au lieu de Rex Francorum, « roi des Francs ».

Les résultats de cette politique ambitieuse et fondatrice sont connus : « un formidable accroissement des ressources et de puissance s'ensuit pour un pouvoir désormais fixé à Paris ». Si la cour est encore itinérante, Paris acquiert cependant un statut particulier dont les différents travaux accomplis témoignent (la foire Saint-Lazare, pavement des principales rues parisiennes, cimetière des Saints-Innoncents, construction d'enceintes, améliorations au Petit Châtelet, charte royale créant l'Université de Paris, etc).

Pour les réussites, il convient aussi de noter la mise au pas des grands barons peu habitués à voir le roi parler et se conduire en maître, ainsi que l'abaissement des Plantagenêt. le vrai mérite de Philippe Auguste est d'avoir « forgé, sur le plan idéologique comme sur celui des organes administratifs, les composantes essentielles du gouvernement royal, composantes que Saint Louis et Philippe le Bel après lui rassembleront en une puissance politique qui dominera la chrétienté occidentale tout le XIIIème et le XIVème siècle ». le contraste se révèle saisissant entre l'avènement de Philippe, sous une quasi-tutelle de la haute noblesse, avec un domaine qui fait de lui le roi de l'Île-de-France plus que de la France, et la fin de son règne, avec un domaine très agrandi, auquel il faut ajouter de nombreux territoires soumis à l'autorité royale.

Un livre à lire

Pour notre plus grand plaisir intellectuel, Baldwin nous propose une oeuvre magistrale, exhaustive, solidement documentée et surtout d'une grande clarté. A la lecture de ce livre de très grande qualité, nous comprenons les raisons qui attestent que Philippe Auguste, le grand vainqueur de Bouvines, demeure l'un des monarques les plus admirés et étudiés du monde médiéval. Effectivement, son long règne, ses importantes victoires militaires, les progrès essentiels accomplis pour affermir le pouvoir royal et la position de la France marquent encore les esprits…

Franck ABED
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Philippe a hérité de son père un petit domaine dont le revenu régulier, lorsqu'il était affermé, ne dépassait pas probablement 20000 livres par an. Ses acquisitions territoriales ne peuvent avoir augmenté ses revenus de plus de 20 %. Un tel revenu n'était pas assez substantiel pour mener une politique royale vigoureuse contre les grands barons et surtout contre Henri II.
Page 89
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La seconde phase, qui dure jusqu'en 1185, n'est pas aussi nette. Elle est marquée par de nombreuses menaces d'hostilités ouvertes, mais de fréquentes trêves suspendent les combats. En ce qui concerne les changements d'alliances des barons, cette période est surtout caractérisée par l'opposition croissante de la maison de la Flandre à la royauté. Empêché par Henri II de manipuler le roi depuis la cour royale, le comte Philippe passe au défi ouvert.
Page 40
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Les finances sont, avec la justice, le principal souci de l'administration de Philippe Auguste. Le système fiscal rudimentaire hérité des premiers Capétiens peut être divisé en revenus ordinaires,sur lesquels le roi peut notamment compter chaque année, proviennent pour une large part du domaine royal administré par les prévôts.
Page 71
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