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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
A travers Paul Valéry qui, à l'aube de sa vie, visite les carnets (annotations, confessions) de Berthe Morisot, nous découvrons un peu plus celle-ci , et surgit alors un fine analyse du beau, de la relation entre l'art et l'intime.
Durant toute une partie de sa vie, Paul Valéry a eu une curiosité quasi obsessionnelle pour Berthe Morisot qu'il n'a peu connue (puisque morte peu avant qu'il ne s'allie avec les familles Morisot, Manet et Gobillard). Il faut dire qu'il avait épousé la fille de la soeur de Berthe, que les toiles de celle-ci décoraient certainement les salons familiaux, que la légende de cette femme brune et mystérieuse intriguait.
Longtemps considérée à tort comme "la peintre des poussettes", parce que ses sujets étaient des enfants et leurs mères en robe de mousseline , Berthe Morisot était beaucoup plus complexe que cela. Manet l'avait compris, lui qui la peignait toujours en sombre, en noir, presque inquiétante.
Ne cherchez pas les écrits de Berthe Morisot, Jean-Daniel Baltassat les a imaginés, fantasmés (tant ils restent parcellaires ; Berthe a eu soin de beaucoup détruire durant sa vie ! ) avec beaucoup d'intelligence et de savoir.
Ne cherchez pas non plus une biographie de l'un ou de l'autre ; le récit alterne entre Paul Valéry et Berthe Morisot sur le thème du souvenir et de l'art .
Si, à l'épilogue de ce roman, la visite impromptue d'une certaine femme au domicile de Paul Valėry m'a intriguée, j'en vois après coup un hommage à Hélène Berr, "l'autre Anne Franck".
Merci à la Masse Critique de Babelio et aux Éditions Calmann Lévy de m'avoir permis de découvrir cet ouvrage.
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Nous sommes le 25 février 1945. Paul Valéry est perdu dans la contemplation d'une aquarelle de Berthe Morisot qu'il affectionne. Pour lui, cette oeuvre représente la beauté absolue. Il relit aussi les carnets laissés par l'artiste. Soudain, la sonnerie du téléphone l'arrache à ce moment de sérénité. C'est son amie Mathilde, en larmes, qui vient de découvrir l'horreur des camps de concentration.
Un aussi beau titre ne pouvait pas me laisser indifférente. Sur le bandeau, une reproduction de Berthe Morisot. J'aime beaucoup l'Impressionnisme et cette artiste, je la connais mal (et je ne pense pas être la seule). Aussi, lorsque je découvre ce titre dans ceux que propose Masse critique, je le coche et j'ai la chance de le recevoir .
Le point de vue adopté par l'auteur est celui de Paul Valéry, qui a réellement connu la peintre, son aînée d'une trentaine d'années. Jean-Daniel Baltassat ne se met pas à la place du vieux poète. Il le présente de l'extérieur, mais passe sans cesse du « il » au « nous » ou au « on », de sorte qu'on imagine découvrir les scènes à travers le regard de Valéry, sans être tout à fait lui.
Celui-ci apparaît à deux époques. Son présent est ce 25 février 1945 . Il est déjà âgé et mourra d'ailleurs quelques mois plus tard. En replongeant dans ces carnets que Berthe a transmis à son ami Mallarmé et que Valéry a pu recopier, il est comme transporté dans le passé. Lui-même, jeune homme d'une vingtaine d'années, avait croisé cette femme qui l'intriguait. La narration sera donc interrompue à divers endroits pour céder la parole à Berthe, qui livre ses états d'âme à son cahier de moleskine jaune, cadeau de son amie, la duchesse d'Affry. Ces pages permettent de connaître ses pensées face à l'art en général, à son rôle de peintre en particulier. Évidemment, elle parle beaucoup d'Édouard Manet, son beau-frère, dont elle fut un modèle privilégié. Elle livre ses hésitations : comment rendre tel ou tel sujet ? Souvent, elle se décourage ou se fâche. Elle détruit un grand nombre d'oeuvres dont elle n'est pas satisfaite. Ils sont nombreux à cette époque, les thèmes interdits aux femmes. On aurait plus vite fait de citer ce qui leur est permis ! Cela m'a fait penser à l'éducation de Sophie, dans « l'Émile » de Jean-Jacques Rousseau, où le philosophe trouve bon que les femmes s'adonnent au dessin ou à la peinture, mais proscrit quasiment toutes les représentations de telle sorte que, finalement, c'est à peine s'il leur reste plus que quelques lettres de l'alphabet destinées à être brodées !
Au fil du récit, on croise divers artistes qui discutent entre eux, se disputent parfois, donnent leur avis en littérature ou peinture.
Le livre devrait donc être très intéressant (il l'est). Pourtant, souvent, il m'a semblé ennuyeux. D'abord parce que l'auteur fait preuve d'une érudition qu'il étale sur un ton pédant : « Des mascarons menaçants peuplaient les frontons et les linteaux. Des mosaïques diffusaient des ors surnaturels au haut des tympans. Des noeuds d'acanthe virides ou couleur d'algues célestes couraient sur les colonnes, investissaient des corniches surmontées de bustes de gypse et d'albâtre (etc.) » Voilà un vocabulaire qui n'est pas à la portée de n'importe quel lecteur ! Nombre de phrases sont très longues (une dizaine de lignes), entrecoupées de plusieurs parenthèses, si bien que, arrivé au bout, on ne se souvient plus du début. de temps en temps, même moi, qui me targue pourtant d'être une bonne lectrice, je ne saisis pas ce qu'il veut dire exactement : « l'horreur, dit-il de son ton le plus sec, l'horreur n'est pas une variété d'actes issus de l'imagination. le mal non plus. Si l'on en croit ce qu'on voit, il faudrait plutôt les classer dans les catégories du plaisir et du spectacle. » Je ne vois pas bien la rapport entre mal, horreur et plaisir.
Sans doute est-ce parce qu'il adopte le point de vue d'un poète hermétique (Mallarmé) ou cérébral (Valéry). Lui-même, dans son écriture, fait, de temps à autre, penser à certains textes connus. Ainsi, cette allitération : « Paix de l'insomnie et paix dans Paris » me fait songer à ce vers de Rimbaud dans le « sonnet des voyelles » : « Paix des pâtis, paix des rides » auquel il emprunte aussi l'adjectif « viride ».
J'ai apprécié les analyses de nombreux tableaux. Il nous fait ainsi découvrir les secrets de la pose pour « le Balcon » ou « Rêverie », où Manet offre la première place à sa belle-soeur Et on se rend compte alors combien cette attitude, qui paraissait si naturelle, demande d'efforts et occasionne de fatigue.
Il décrit, bien évidemment, un grand nombre des oeuvres de Berthe Morisot et les techniques utilisées. Il faut aller voir les tableaux pour profiter de la lecture, et cela m'a donné l'envie d'acheter d'autres livres consacrés à l'artiste. Mais, au début du roman, Paul Valéry est devant cette aquarelle qu'il connaît par coeur, « Lisière, forêt de Fontainebleau » et en souligne les « élancements verticaux d'un bleu aqueux » (Berthe se reproche d'avoir trop détrempé son papier et doit attendre qu'il sèche, laissant fuir l'instant et compromettant son inspiration), « des taches de verts, de carmin transparent, une liquidité de touches superposées, flottantes, volantes », qui nous invitent à contempler à notre tour cette merveille. Hélas, j'ai beau chercher, je n'en trouve nulle trace. Jean-Daniel Baltassat l'a-t-il inventé, tout comme il invente les propos prêtés à Valéry, Mallarmé, Degas ou le journal de Berthe ? (C'est ce qu'il nous révèle dans une note en fin de volume).
Je ne sais donc trop que dire à propos de cette oeuvre brillante, certes, mais trop froide, intellectuelle, élitiste, pas assez vivante. Elle m'a donné envie de me tourner vers d'autres documents et de visiter le cimetière de Passy, que je ne connais pas. En parlant de l'enterrement d'Edmond (le mari de Berthe), il livre une superbe description de la tombe voisine, celle d'une fillette (Emilia del Saz Caballero) que j'aimerais beaucoup voir de mes propres yeux, moi qui suis fanatique de l'art funéraire.
Il me reste donc à remercier Babelio pour son opération Masse critique et les éditions Calmann-Lévy qui m'ont offert cette lecture.
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Février 1945, Paul Valéry écrivain et poète français est seul chez lui. Indifférent aux troubles de son temps, il doit pourtant en admettre l'horreur.

Pour y échapper et retrouver un peu de lumière il se plonge dans les écrits que lui a laissé la peintre Berthe Morisot.

Jean-Daniel Baltassat a le don précieux de faire revivre cette époque, la fin du 19ème siècle, et de nous amener dans les pas des artistes et intellectuels de cette période.

Valéry est alors l'un des fidèles du salon de Mallarmé. C'est là qu'il rencontre Berthe Morisot, veuve d'Eugène Manet, peintre et modèle d'Edouard Manet. Nous sommes en mars 1894, Paul a 24 ans et Berthe 54.

Avec une plume délicate, précise et précieuse, Jean-Daniel Baltassat nous entraîne dans leurs pas, recréant magnifiquement l'atmosphère de l'époque. Un récit poétique et nostalgique.

Si je me suis parfois perdue entre les différentes époques, les souvenirs de Valéry et les écrits de Berthe, cela n'a finalement fait qu'ajouter à l'ambiance du récit.
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Jean-Daniel Baltassat drape son récit d'une belle tristesse. Celle d'une époque puisque nous sommes à la fin de la seconde guerre mondiale, lorsque le monde découvre l'horreur des camps de concentration et celle qui émane d'une artiste peintre peu diserte, Berthe Morisot.
Paul Valéry rencontre pour la première fois Berthe Morisot aux Mardis de Mallarmé en 1894. Il avait tout juste vingt ans. Berthe, mariée à Eugène Manet était en deuil. Peu expressive, en dehors de son regard de malachite, elle ne peut répondre à la question de son hôte sur le sens de sa peinture.
« Auriez-vous pour nous, m'aviez-vous demandé en mars, un mot, une phrase qui dirait le poème de votre peinture? »
Alors qu'il doit préparer un papier pour l'exposition des oeuvres de Berthe Morisot au musée de l'Orangerie, Paul Valéry est absorbé par cet énigme au point de ne pas entendre les craintes de son amie Mathilde sur la situation des juifs.
« L'art, selon le mot de Nietzsche, n'est-il pas la seule présence qui permit de survivre à la réalité? »
C'est en lisant les lignes que Berthe Morisot consignait dans un petit carnet à la couverture jaune offert par son amie, la Duchesse Adèle que Paul Valéry va tenter de comprendre la personnalité discrète et obscure de Berthe Morisot et peut-être trouver la lumière en cette période obscure de guerre.
« Souvent, j'ai pensé que nos peintres (Degas, Renoir, Monet surtout) ne cherchaient qu'à lutter contre ce temps qui passe et nous accable de la ruine perpétuelle qui est à l'oeuvre en nous comme en tout ce qui nous entoure. Mais cette peinture-ci ne lutte pas. Elle est la couleur du présent. Ou peut-être du passage, comme dit Monet. »
Ce carnet jaune, son contenu, les propos de Paul Valéry, Mallarmé, Degas ou autres sont de pure fiction. Il en reste l'atmosphère d'une époque mouvementée, d'un milieu d'artistes où les femmes peinaient à se faire une place, le portrait énigmatique de Berthe Morisot qui posa pour Édouard Manet mais épousa son frère.
Et surtout, une réflexion sur l'art.
La technique de Manet, bien évidemment, « qui fait chatoyer ce qui ne peut être vu et ce que nous ne pouvons caresser de la main. » La théorie sexiste de Blanc qui associe le dessin à la virilité masculine et la couleur comme expression du féminin sans oublier tout ce qu'une femme ne doit pas peindre. L'opposition courtoise entre gens de lettres et peintres. On y croise Mallarmé, Baudelaire, Degas, Duret, Manet.
Les descriptions de tableaux combleront les amateurs d'art. Je suis pour ma part restée très dubitative sur l'analyse du tableau de Manet ( le repos) où Berthe Morisot pose en robe de mousseline.
L'ensemble du récit manque d'unité pour réellement capter mon intérêt.
Si le roman commence et termine par l'effarante découverte de la condition des juifs pendant la seconde guerre mondiale, on effleure à peine ce thème lors du développement.
La vie passionnante de Berthe Morisot, certes personnage assez énigmatique, s'effiloche par bribes noyées dans les considérations assez pointues sur l'Art.
Tous les personnages, toutefois suffisamment connus, manquent pourtant d'ancrage dans ce récit.
Une lecture à réserver aux amateurs d'Art.
Lien : https://surlaroutedejostein...
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Nous sommes en février 1945 à Paris dans l'appartement de Paul Valery, lorsque celui-ci se replonge avec mélancolie dans ses archives. Il relit ses notes et contemple une aquarelle de Berthe Morisot. Petit à petit nous pénétrons dans l'intimité de Paul Valery pour y découvrir les liens très étroits qu'il entretenait avec de nombreux auteurs et artistes novateurs du XIX siècle tels Mallarmé, Manet, Degas et bien sûr Berthe Morisot, dite Mme Eugène Manet, grand nom de la peinture impressionniste.
Il s'agit donc d'une plongée dans le paris mondain et intellectuel de cette fin du XIX siècle. J'ai peu accroché à ce contexte, ni à la narration entre-coupée de réminiscence de Paul Valery qui se croisent avec les souvenirs de Berthe Morisot. Dans ce roman, on est imprégné de nostalgie, de remords, de non-dits qui peuvent devenir pesant sur la fin. L'écriture est belle, le style est très littéraire mais le manque d'optimisme, d'enthousiasme entourant la vie de Paul Valery et de Berthe Morisot m'a semblé alourdir la lecture. Peu de sentiments joyeux, légers. L'amour comme l'art est ici tourmenté et proche de la folie.
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