Le divan de Staline

Ce qu'a dit Tatiana Sulovskaïa,Danilov s'en souvient parfaitement. Qu'il était un fils à sa maman,un toutou,un trouillard de première grandeur,un menteur,un voleur d'idée,un homme sans dignité et même,par dessus tout,ce qui était un comble pour un salopard se prétendant le prodige de la peinture, un aveugle.

Le camarade Staline est insomniaque. Tant qu’il est debout, personne n’a le droit d’éteindre les lampes ni de se coucher.

L'oeil se contente de refléter l'apparence des choses tandis que la connaissance est une conscience.
P. 110

La vérité du mensonge, voilà ce qu'il reste d'un visage quand l'âge commence à le manger.

Les souvenirs ne sont que du sable sous la tempête du présent, a dit un poète. La vérité, c'est que l'homme est traître par sa mémoire avant de l'être par le cœur.

Car comment être l'artiste sincère du monument d'éternité de Staline si on éprouve envers Staline le ressentiment du passé et non la joie du présent et du futur ?

La force des bolcheviks est de savoir toujours affronter la vérité. L'erreur est humaine, mais l'héroïsme qui surmonte l'erreur est bolchevique. Surmonter les fautes, surmonter l'impossible, surmonter le passé, voilà la prière bolchevique.

Il va jusqu'au divan,s'y allonge,s'y cale confortablement,ferme les paupières,tire sur sa cigarette. Des rêves,dit-il,il en fait lui-même des quantités en ce moment .Pas de nuit sans rêves,et de toutes sortes,les plaisants et les autres.

Le 9 mars, le cœur du Père de la Révolution cesse de battre. Dix secondes d'immobilité , puis la mécanique systole-diastole recommence. Bancale mais suffisante pour pousser Vladimir Ilitch vers le nimbe doré des morts vivants

Par bonheur, mystérieuses demeurent les pensées d'un homme à travers les os de son crâne.