AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782868531469
200 pages
Le Temps qu'il fait (19/05/1998)
4.17/5   3 notes
Résumé :
La Grande Bretèche, ce drame de la jalousie violente (l'amant sera emmuré alors que l'épouse s'est elle-même réduite au silence par son mensonge), Balzac a certainement été poussé, voire contraint à l'" inventer " par la blessure secrète qu'il ne peut pas taire ni, non plus, dire en clair.
- Un épisode sous la terreur est caractéristique de la manière dont Balzac aborde la " grande histoire " : de biais, en laissant libre l'imagination de son lecteur.
... >Voir plus
Que lire après La grande Bretèche - Un Épisode sous la TerreurVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
On l'oublie souvent, mais Honoré de Balzac était un grand nouvelliste, parmi les tout grands. le problème, c'est qu'il a fait tellement de choses, et de grandes choses, que ses nouvelles passent, aux yeux des commentateurs, pour une portion congrue de son oeuvre, presque pour les miettes d'un ensemble extraordinairement vaste et complexe.

Il est vrai que quand vous venez de lire un morceau tel que les Illusions Perdues, vous vous demandez qu'est-ce qui dans son oeuvre peut rivaliser avec un monument pareil. Mais, je le répète, c'est un tort. Balzac est indéniablement le modèle De Maupassant, bien plus que Flaubert ou que Zola auprès desquels on le rapproche parfois.

En fait, l'ennui avec ce genre de personnes, c'est qu'il savait tout faire, du vers, de la prose, du théâtre, du conte, de la nouvelle, du roman (naturaliste, fantastique, policier, historique, etc.), de la philosophie, des essais de sorte que notre cerveau étroit, qui aime bien coller des étiquettes sur les gens pour savoir où les ranger, peine à lui en coller une. Et, en plus, le scolaire s'est invité dans le débat si bien qu'on a tous, plus ou moins des souvenirs d'oeuvres imposées par les programmes, oeuvres que je trouve, pour la plupart inadaptées à l'âge et à l'intérêt des élèves de l'âge considéré.

Et si, pour faire découvrir Balzac aux plus jeunes on commençait par des nouvelles ? Ça ce serait drôlement rusé ; voilà une mayonnaise qui risquerait de prendre et des truites mordre à l'hameçon (loin de moi cependant de prendre les lycéens pour des truites, gardez-m'en bien).

En voici deux qui feraient, me semble-t-il, parfaitement l'affaire. Tout d'abord LA GRANDE BRETÈCHE, et cette interrogation, en guise de teasing : Qu'y a-t-il derrière un mur abandonné ? Ne vous êtes-vous jamais demandé ce qu'il pouvait bien y avoir derrière ce que l'on prend du soin à dissimuler ?

Combien de fantasmes, d'histoires rocambolesques ne nous sommes-nous pas déjà construits, échafaudé sur rien de tangible, juste une impression qu'on nous cachait quelque chose.

Balzac titille cette fibre en nous grâce à cette nouvelle, une très belle nouvelle ayant à nouveau pour narrateur le médecin Horace Bianchon, tout comme la non moins réussie Messe de l'Athée que je recommande bien volontiers aux lycéens.

Notre Honoré national nous emmène cette fois dans le Vendômois, où Bianchon s'est pris d'une passion pour un lieu insolite : La Grande Bretèche. Il s'agit d'un magnifique domaine en bordure du Loir, parc à la française et manoir de caractère, le tout complètement laissé à l'abandon depuis au bas mot une dizaine d'années. le médecin y goûte quelques temps le bonheur d'un lieu de recueillement propice à la création poétique.

Jusqu'au jour où un vieux notaire de sinistre physionomie, maître Regnault, vient lui signifier qu'il n'est pas permis à qui que ce soit de pénétrer sur ce domaine et ce, par volonté testamentaire. Quel mystère baigne cette incompréhensible décision d'un mourant ?

C'est ce que vous découvrirez en même temps que Bianchon qui, émoustillé par le piment de l'intrigue décide d'en connaître le fin mot, quitte à tirer les vers du nez de Madame Lepas, l'aubergiste ou à faire les yeux doux à Rosalie, l'ancienne femme de chambre du domaine.

Par ce bref récit, Honoré de Balzac nous livre une fois encore toute l'étendue de son talent de conteur ; si doué à susciter les merveilleux parfums de l'évocation et si prompt à faire palpiter les ressorts du suspense.

Basculons ensuite sur un tout autre type de nouvelle avec UN ÉPISODE SOUS LA TERREUR. Ici, Honoré de Balzac nous offre une nouvelle assez particulière, sans le caustique habituel ni le luxe de description. Ici, tout est épuré et, une fois n'est pas coutume, il fait l'éloge de ses personnages.

Un mystérieux homme (je cache volontairement son identité afin de ne pas ruiner l'effet recherché par l'auteur) vient réclamer une messe clandestine à un abbé, terré dans une mansarde miteuse aidé de deux soeurs dévotes. (Vous avez compris que la Terreur est bien entendu cette période de la Révolution française durant laquelle les têtes volaient un peu plus que de coutume sous le grand couperet de la guillotine, surtout si l'on était, de près ou de loin, ami du clergé ou de la noblesse.)

Le plus étonnant est que l'étranger en question vient, très solennellement, demander une messe pour... le feu roi Louis XVI ! Balzac sait y être poignant et célébrer le dénuement et la dévotion. Bref, un beau petit bijou de nouvelle, mais de ceci comme de la précédente, ce sera à vous de vous en faire une meilleure idée par vous-même car ceci n'est que mon avis, un tout petit avis sous la terreur d'une erreur, autant dire, pas grand-chose.
Commenter  J’apprécie          780
Je n'étais pas revenue vers ce cher Balzac depuis début septembre, mettant en pause mon ambitieux projet de lire ou relire tous les titres de la Comédie Humaine.
Je reprends avec une nouvelle, La grande Bretèche et retrouve avec plaisir le docteur Horace Bianchon en tant que narrateur. J'avoue une grande sympathie pour ce personnage secondaire récurrent.

Les théoriciens rapprochent cette nouvelle de deux autres courts récits, Autre étude de femmes, une sorte de variation sur des portraits de personnages féminins et véritable peinture d'une époque que, personnellement, j'avais presque considéré comme des notes de travail De Balzac et le Message que j'avais trouvé brouillon et inachevé.
Ce texte a successivement été rattaché puis détaché d'autres passages de la Comédie Humaines comme Les Contes bruns que je n'ai pas encore lus.

Ici, nous n'avons qu'une seule histoire, très aboutie, celle de Mme la Comtesse de Merret et d'un jeune grand d'Espagne exilé en France, une histoire d'amour et de mort.
Il est deux heures du matin dans un salon et le docteur Bianchon s'apprête à raconter une « histoire terrible » pour le plus grand plaisir des personnes qui l'entourent. Il narre alors avec talent comment il a percé le secret d'une belle propriété laissée à l'abandon près de Vendôme grâce aux récits d'un vieux notaire et d'une servante d'auberge. Nous l'imaginons sans peine, désoeuvré dans les moments de liberté que lui laissaient ses soins à une riche malade, laissant d'abord libre court à son imagination puis menant sa petite enquête.
Son récit monte graduellement en puissance, dévoilant peu à peu une dramatique énigme où l'adultère, la religion et la morale, thèmes et valeurs chers à Balzac, sont en bonne place ; il est surtout question du poids des serments portés sur la croix du Christ et des risques que l'on prend en cas de mensonge. J'ai lu quelque part que Balzac se serait inspiré d'une relation de sa mère avec un amant espagnol à l'époque où il était pensionnaire au collège de Vendôme et qu'on peut donc lire entre les lignes une sorte de punition oedipienne…
Bianchon campe admirablement ses personnages ; le notaire notamment est haut en couleur avec une diction et des expressions particulières.
La grande Bretèche est une véritable nouvelle avec une vraie chute, où Balzac nous ramène dans le salon du début et fait état de l'effet de l'histoire racontée par le docteur sur l'assistance féminine : « après ce récit, toutes les femmes se levèrent de table, et le charme sous lequel Bianchon les avait tenues fut dissipé par ce mouvement. Néanmoins quelques-unes d'entre elles avaient eu quasi froid en entendant le dernier mot ».

Ainsi que je le dis souvent, certains des textes courts De Balzac sont de véritables petits bijoux et il est vraiment dommage qu'ils ne soient pas davantage étudiés dans les collèges et lycées.
Nous avons ici un beau conte cruel, savoureux et bien tourné.
Une belle découverte !
Commenter  J’apprécie          130
J'ai apprécié cette nouvelle, lue en deux heures environ (elle n'est pas très longue), qui semble partir d'un fait divers dans des lieux réels. Toutefois, s'il existe bien un couvent de la Grande Bretèche à Vendôme, je doute qu'il ait grand-chose à voir avec la riche maison bourgeoise abandonnée de la comtesse de Merret, alors que le château dans lequel cette dernière agonise trois mois avant le récit est bien inspiré par le château de Meslay. Qu'est-ce qui a bien pu amener la comtesse et son mari à se séparer aussi subitement, et elle-même à déménager et ne plus voir personne, vivre en recluse ?

Cette histoire nous est contée par un personnage récurrent de la Comédie humaine, Horace Bianchon, médecin, qui se trouve ici par hasard, ayant suivi son maître en médecine dans cette ville de province. Assez désoeuvré, il en profite pour pénétrer dans le jardin de la mystérieuse demeure des Merret, laissée en friche et en décomposition avancée depuis dix ans. Il va un peu malgré lui en apprendre l'histoire par trois personnes, et ce n'est pas joyeux. C'est une histoire de jalousie poussée jusqu'à la cruauté - sachez seulement qu'une bretèche est une petite loge ou avancée en saillie dans un ouvrage de fortification, et que cela a un sens. Je n'en dirai pas plus...

Une fois de plus, Balzac nous prouve qu'il est à l'aise autant dans une forme de réalisme et d'observation des moeurs, ici en province tourangelle, avec une pointe d'histoire, puisque le récit se situe quelques quinze ans plus tôt, vers 1816, que dans un style gothique, le narrateur faisant souvent référence aux romans d'Ann Radcliffe ou à des ambiances d'église abandonnée où glisse un fantôme, le soir venu. Sa plume précise et généreuse nous régale de portraits pris sur le vif, de scènes puissantes, d'une force d'observation humaine à laquelle rien n'échappe, ni grandeur ni petitesse. Cette assez courte nouvelle est un microcosme qui nous enchante, empreint du goût de cette belle région proche de la Touraine.
Commenter  J’apprécie          10

Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Les rues étaient désertes. La crainte assez naturelle qu’inspirait le silence s’augmentait de toute la terreur qui faisait alors gémir la France ; aussi la vieille dame n’avait-elle encore rencontré personne ; sa vue affaiblie depuis long-temps ne lui permettait pas d’ailleurs d’apercevoir dans le lointain, à la lueur des lanternes, quelques passants clair-semés comme des ombres dans l’immense oie de ce faubourg. Elle allait courageusement seule à travers cette solitude, comme si son âge était un talisman qui dût la préserver de tout malheur. Quand elle eut dépassé la rue des Morts, elle crut distinguer le pas lourd et ferme d’un homme qui marchait derrière elle. Elle s’imagina qu’elle n’entendait pas ce bruit pour la première fois ; elle s’effraya d’avoir été suivie, et tenta d’aller plus vite encore afin d’atteindre à une boutique assez bien éclairée, espérant pouvoir vérifier à la lumière les soupçons dont elle était saisie. Aussitôt qu’elle se trouva dans le rayon de lueur horizontale qui partait de cette boutique, elle retourna brusquement la tête, et entrevit une forme humaine dans le brouillard ; cette indistincte vision lui suffit, elle chancela un moment sous le poids de la terreur dont elle fut accablée, car elle ne douta plus alors qu’elle n’eût été escortée par l’inconnu depuis le premier pas qu’elle avait fait hors de chez elle, et le désir d’échapper à un espion lui prêta des forces. Incapable de raisonner, elle doubla le pas, comme si elle pouvait se soustraire à un homme nécessairement plus agile qu’elle. Après avoir couru pendant quelques minutes, elle parvint à la boutique d’un pâtissier, y entra et tomba, plutôt qu’elle ne s’assit, sur une chaise placée devant le comptoir. Au moment où elle fit crier le loquet de la porte, une jeune femme occupée à broder leva les yeux, reconnut, à travers les carreaux du vitrage, la mante de forme antique et de soie violette dans laquelle la vieille dame était enveloppée, et s’empressa d’ouvrir un tiroir comme pour y prendre une chose qu’elle devait lui remettre. Non-seulement le geste et la physionomie de la jeune femme exprimèrent le désir de se débarrasser promptement de l’inconnue, comme si c’eût été une de ces personnes qu’on ne voit pas avec plaisir, mais encore elle laissa échapper une expression d’impatience en trouvant le tiroir vide ; puis, sans regarder la dame elle sortit précipitamment du comptoir, alla vers l’arrière-boutique, et appela son mari, qui parut tout à coup.

UN ÉPISODE SOUS LA TERREUR.
Commenter  J’apprécie          230
À l'aspect de ce jardin qui n'est plus, les joies négatives de la vie paisible dont on jouit en province se devinent, comme on devine l'existence d'un bon négociant en lisant l'épitaphe de sa tombe. (page 3)
Commenter  J’apprécie          10
À chaque phrase, mon hôtesse tendait le cou, en me regardant avec une perspicacité d'aubergiste, espèce de juste milieu entre l'instinct du gendarme, l'astuce de l'espion et la ruse du commerçant. (page 10)
Commenter  J’apprécie          10
Rosalie me paraissait située dans cette histoire romanesque comme la case qui se trouve au milieu d'un damier ; elle était au centre même de l'intérêt et de la vérité. (page 14)
Commenter  J’apprécie          10
Cette maison, vide et déserte, est une immense énigme dont le mot n'est compris de personne. (page 4)
Commenter  J’apprécie          10

Videos de Honoré de Balzac (155) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Honoré de Balzac
Deuxième épisode de notre podcast avec Sylvain Tesson.
L'écrivain-voyageur, de passage à la librairie pour nous présenter son récit, Avec les fées, nous parle, au fil d'un entretien, des joies de l'écriture et des peines de la vie, mais aussi l'inverse, et de la façon dont elles se nourrissent l'une l'autre. Une conversation émaillée de conseils de lecture, de passages lus à haute voix et d'extraits de la rencontre qui a eu lieu à la librairie.
Voici les livres évoqués dans ce second épisode :
Avec les fées, de Sylvain Tesson (éd. des Équateurs) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/23127390-avec-les-fees-sylvain-tesson-equateurs ;
Blanc, de Sylvain Tesson (éd. Gallimard) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/21310016-blanc-une-traversee-des-alpes-a-ski-sylvain-tesson-gallimard ;
Une vie à coucher dehors, de Sylvain Tesson (éd. Folio) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/14774064-une-vie-a-coucher-dehors-sylvain-tesson-folio ;
Sur les chemins noirs, de Sylvain Tesson (éd. Folio) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/14774075-sur-les-chemins-noirs-sylvain-tesson-folio ;
Le Lys dans la vallée, d'Honoré de Balzac (éd. le Livre de poche) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/769377-le-lys-dans-la-vallee-honore-de-balzac-le-livre-de-poche.
Invité : Sylvain Tesson
Conseil de lecture de : Pauline le Meur, libraire à la librairie Dialogues, à Brest
Enregistrement, interview et montage : Laurence Bellon
--
Les Éclaireurs de Dialogues, c'est le podcast de la librairie Dialogues, à Brest. Chaque mois, nous vous proposons deux nouveaux épisodes : une plongée dans le parcours d'un auteur ou d'une autrice au fil d'un entretien, de lectures et de plusieurs conseils de livres, et la présentation des derniers coups de coeur de nos libraires, dans tous les rayons : romans, polar, science-fiction, fantasy, BD, livres pour enfants et adolescents, essais de sciences humaines, récits de voyage…
+ Lire la suite
autres livres classés : nouvellesVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (11) Voir plus



Quiz Voir plus

Connaissez-vous La Peau de Chagrin de Balzac ?

Comment se comme le personnage principal du roman ?

Valentin de Lavallière
Raphaël de Valentin
Raphaël de Vautrin
Ferdinand de Lesseps

10 questions
1298 lecteurs ont répondu
Thème : La Peau de chagrin de Honoré de BalzacCréer un quiz sur ce livre

{* *}