"Les chemins de fer, dans un avenir aujourd'hui peu éloigné, doivent faire disparaître certaines industries, en modifier quelques autres, et surtout celles qui concernent les différents modes de transport en usage dans les environs de Paris. [...]Nos neveux ne seront-ils pas enchantés de connaître le matériel social d'une époque qu'ils nommeront le vieux temps?"
Et bien, moi, je suis enchantée de découvrir ce nouvel opus de la Comédie Humaine : roman d'apprentissage comme le titre
Un début dans la vie le laisse entendre : Oscar Husson, 17 ans à la fin du lycée, fils posthume d'une ancienne gloire du Directoire tombée mariée à un fonctionnaire, s'en va à Prêles rejoindre Moreau, régisseur du domaine du Comte de Sérisy, qui le protège. A peine sorti de l'adolescence, par vanité, il commet un impair qui compromet son avenir. On ne donne pas cher du futur de ce benêt sans ambition ni caractère, sans nom ni fortune, naïf et influençable. Son oncle lui donne une seconde chance : il fera son Droit et et son apprentissage dans l'étude d'un notaire. Son avenir semble assurer quand il commet une nouvelle bévue. Lâché par ses protecteurs à quelques jours de la conscription, il sera soldat!
Le personnage est falot. le lecteur devine de loin ses bévues. L'intérêt du roman est ailleurs : dans les intrigues compliquées autour des propriétés du Comte de Sérisy de leur gestion par Moreau qui s'est passablement enrichi. Ce dernier deviendra marchand de biens, on devine les spéculations et magouilles. On voit aussi comment, à travers les régimes qui se sont succédé : Révolution, Directoire, Empire, Restauration, et finalement Monarchie de Juillet, les fortunes et les influences se font et se défont, ascension sociale ou déchéance. Qui aurait deviné que le balourd fermier Léger deviendrait un propriétaire influent, que Pierrotin qui conduisait lui-même son "coucou" tiré par des chevaux poussif deviendrait un entrepreneur, un Monsieur?
"Oscar est un homme ordinaire, doux sans prétention, modeste et se tenant toujours, comme son gouvernement, dans un juste milieu. Il n'excite ni l'envie ni le dédain. C'est un bourgeois moderne.
Paris, février 1842"
Ainsi se termine l'histoire.
Balzac est un analyste et un peintre fabuleux quand il décrit les rouages de la société et ses contemporains au travail dans leur décor familier. J'avais adoré les descriptions de l'atelier du peintre dans
la Vendetta, l'étude de notaire dans
le colonel Chabert, les spéculations de
la Maison Nucingen.
La pièce de choix se trouve dans les voyages entre Paris et Beaumont. le roman commence dans une voiture hippomobile modeste, le coucou de Pierrotin et se termine dans la diligence de ce dernier une décennie plus tard. Je jubile en découvrant l'installation des voyageurs, en écoutant les conversations, en imaginant les paysages de la Seine-et-Oise et de l'Oise, paysages que j'ai traversés en train, ou parcourus à pied. J'imagine leurs transformations dans les deux siècles qui séparent 1820 de 2020!
Certains sautent les descriptions dans les ouvrages
De Balzac. J'en redemande!
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