Texte puissant et poétique sur la vie des femmes issues d'un petit village italien à travers les générations au 20ème siècle.
Ce texte m'a beaucoup émue, car chez moi, la transmission est aussi passée par les femmes et mon arrière grand-père était venu d'Italie pour fuir la famine.
Il est question de lutte des classes, et aussi comment parfois on oublie les savoirs ancestraux pour mieux détruire la nature et la convertir en profits pour certains.
Et des rêves, les rêves de vivre mieux, mais à quel prix ?
Les rêves de justice, au prix de la violence ?
Les rêves de s'instruire, même si ce n'est pas toujours possible.
Changer d'une vie simple mais difficile pour juste remplir son assiette trois fois par jour, pour une privée d'une certaine liberté ?
Mais toujours la beauté de ces femmes, dans leur humanité et leurs questionnements sur la vie.
Très belle lecture.
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Et quand le père et le fils prirent enfin leur envol ensemble, elle pensa que deux petites ailes décidées à vivre peuvent parfois faire dévier le tracé d'un destin.
Elle appartenait à une lignée de femmes de fer. De celles qui étaient déjà aux champs le lendemain de leur accouchement, leur dernier né au sein. De celles qui faisaient des enfants les uns après les autres et en enterraient un bon nombre, comme s'ils étaient eux-mêmes le produit de récoltes, parfois bonnes, parfois pas. De celles qui restaient sur les terres quand les hommes émigraient en Amérique ou partaient au front.
Au sein de la communauté de familles entassées dans des pièces dépouillées qui considéraient encore leurs enfants de sexe féminin comme un poids dont il fallait se débarrasser sans tarder, j'ai entendu ma mère dire:... Ne vous pressez pas de vous marier, trouvez-vous d'abord un travail, comme ça vous ne serez les servantes de personne.
Chez elle il n'y avait pas de livres et personne ne s'y intéressait. Tout au plus, les adultes remplissaient une demi-page et signaient un papier quand il le fallait. Et tous n'en étaient pas capables. Pour elle, ce serait différent.
Elle allait chaque matin à l'école avec cette certitude.
Et elle y allait avec joie.
L'excès était un luxe que seuls les riches pouvaient se permettre, impunissables car ils possédaient tout, justice comprise.