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Critique de Chaplum


En cette veille de Noël, Bob Dubois a comme une révélation : il en a marre de cette vie dans la petite ville de Catamount dans le New Hampshire. Réparateur de chaudière, marié à une femme qu'il aime, père de deux filles et amant occasionnel d'une chouette nana, il sait que sa situation n'évoluera jamais. Il sera toujours pauvre, propriétaire d'une maison mal meublée, rafistolée et sans les moyens d'offrir une paire de patins à glace rutilantes pour sa fille aînée. Pris de rage, il s'aperçoit qu'il ressemble de plus en plus à son père, dont il se moquait et dont il pensait, sûr de lui, qu'il s'en sortirait mieux. Surtout que son frère est parti en Floride et réussit dans les affaires et son meilleur ami profite de la vie sur un bateau. Il décide de tout plaquer et d'emmener sa famille en Floride, pour profiter à son tour du rêve américain.
En Haïti, Vanise et son neveu Claude rêvent eux aussi d'une vie meilleure. Et les Etats-Unis leur semblent à cet égard plein de promesses.

Russell Banks est un écrivain américain prolifique qui dénonce bien souvent les travers de cette Amérique qui fait tant rêver. Ses romans sont rarement joyeux et décrivent une réalité brute. J'avais éprouvé un véritable coup de coeur pour Américan Darling qui traitait du Libéria et de la participation américaine dans ce pays. Sous le règne De Bone avait aussi été une magnifique rencontre alors que de beaux lendemains m'avait laissée plus mitigée.
Malheureusement, ce titre se classe parmi les déceptions. Non que la qualité ne soit pas au rendez-vous. L'écriture de Russell Banks est encore une fois d'un niveau exceptionnel et les réflexions qu'il développe m'ont profondément intéressée et plu. le thème du roman justement m'interpellait beaucoup et c'est la façon dont il a été traité par l'auteur qui m'a déçu.

J'aimais l'idée de montrer la réalité, ce qui se cache réellement derrière ce fameux « rêve américain ». La trajectoire de Bob Dubois est claire à cet égard et au travers de ce personnage, Russel Banks prouve que ce n'est plus qu'un mythe, qu'on est loin de l'époque des pionniers. C'est d'ailleurs une des explications du titre, le romancier démontre ses thèses par des comparaisons à la Grande Histoire et à la géologie. Les hommes ne se soucient pas de la Terre, des continents qui bougent mais uniquement de leur propre petite personne. Tout comme ils ne se rendent pas compte que l'Amérique d'aujourd'hui n'est plus celle de Christophe Colomb.
Si tous ces postulats m'ont convaincu dès le départ et me font adhérer sans équivoque à la vision pessimiste du monde dépeinte par Russell Banks, j'ai eu plus de mal avec sa façon de traiter le sujet dans le roman, au cours duquel je me suis souvent ennuyée. Et la lecture m'en a été parfois longue ou fastidieuse.
J'aurais aimé que les raisons pour lesquelles le rêve américain de Bob échoue, tout comme celui de son frère et de son ami Ave, soient davantage expliquées. Elles ne sont que vaguement évoquées. On parle d'emprunts à de mauvaises personnes, de prêts à des taux très élevés, de personnes peu fréquentables, de trafics en tout genres, … Mais rien de plus. On ne sait finalement pas vraiment pourquoi une affaire ne peut pas fonctionner honnêtement. le problème des soins de santé est lui aussi à peine effleuré. Dommage. Tout comme la violence. Au final, je n'ai eu l'impression que seuls les questionnements de Bob, et particulièrement ses questionnement sexuels et sur le bien et le mal sont développés en long et en large. Honnêtement, je me serais davantage intéressée à pourquoi ses entreprises ratent que de savoir avec qui il couche, combien de fois, pourquoi etc. J'ai trouvé que ça occupait bien trop de place dans l'histoire.

En ce qui concerne la deuxième intrigue, que l'on suit en parallèle, celle de Vanise et Claude, mes griefs sont semblables. Là aussi, les étapes principales de leur voyage jusqu'en Floride sont éclipsées au profit de leurs épreuves dans les pays qu'ils traversent. Ce qui donne lieu à une multitude de scènes de viols et de cultes vaudou. Bref, là aussi, j'ai eu la sensation que l'auteur passait à côté de son sujet.

Même si je ne suis pas satisfaite du traitement fait, je suis quand même contente d'avoir lu ce récit dont le sujet m'intéressait beaucoup. Bien qu'écrit dans les années 80, je suis persuadée qu'il reste brûlant d'actualité, tant au sujet du rêve américain, de moins en moins concret que de la réalité de l'émigration aux Etats-Unis.
Lien : http://www.chaplum.com/conti..
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