« Un tatouage vous fait ce genre de chose : il vous fait penser à votre corps comme à un costume particulier que vous pouvez mettre et enlever chaque fois que vous en avez envie. »
Un adolescent en mal de vivre, Chappie puis Bone, lorsqu'il décidera de changer son nom et de devenir un « autre », est un de ces « ados » sans repère, n'ayant pas « mauvais fond » mais se laissant entraîner à la suite d'erreurs de choix, à se droguer, voler, fuir tout en essayant de vivre sa vie …
Vu comme ça, pas très engageant ce roman, n'est-ce pas ?
Alors, changeons d'angle de prise de vue …
Russel Banks a pour point fort de réussir à la perfection « les rôles de composition ». Il se met dans la peau de son personnage, il en adopte le langage, les pensées, les doutes, les forces et les faiblesses …. Il EST Chappie puis Bone …
Il parvient ainsi à nous faire partager le voyage « initiatique » de ce jeune, un « road-movie » à l'américaine.
Voyage au demeurant intéressant, par la galerie de portraits rencontrés, par ces Etats-Unis (puis Jamaïque) que nous entrevoyons, par les expériences, auxquelles Bone va être confronté et qui entraîneront chez lui des opinions, des tâtonnements … Au fond, Bone, dans son voyage se cherche lui-même, mais il cherche aussi les autres (l'autre qui est ton frère…) pour voir s'il peut les croire, leur faire confiance, les aider, vivre des moments forts avec eux …
Une rencontre lui permettra de s'affirmer, mieux se connaître, mieux aller à la rencontre des autres, lui "apprendra" à dire « je » (même si le livre est dès le départ écrit à la première personne du singulier)….
La seconde partie évoquant la Jamaïque est remarquablement bien documentée et apporte des éléments intéressants.
Le voyage se finira-t-il un jour ? Peut-on savoir qui on est réellement ? Se connaît-on vraiment ?
Russel Bank touche du doigt un des problèmes majeurs de la société : argent, drogue, violence …. Comment grandir et s'épanouir dans un monde qui vous montre de telles choses ? Comment éviter les mauvais choix ?
L'écriture est en lien avec l'âge et la vie
De Bone, langage familier (jamais vulgaire), mots écourtés, négations incomplètes. Les dialogues sont en style indirect, ce qui met un peu de lourdeur dans le propos mais donne « un style » tout particulier au récit.
Il est évident que ce roman m'a fait penser à « L'attrape-coeurs » de Stalinger. Il faut absolument le remettre dans son contexte (date, lieu…) pour en saisir la subtilité et l'apprécier.
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