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Critique de Root


Root
17 novembre 2014
Difficile d'évoquer avec justesse un roman auquel on pense encore longtemps après l'avoir refermé…
Trouver les mots pour exprimer à quel point ceux d'une inconnue nous ont touchés, et procuré un sentiment si fort qu'on en a oublié la fiction pour se plonger dans la réalité des personnages. Ces personnages devenus dès les premières lignes des personnes, que l'on avait hâte de retrouver…

Si l'est un livre qui m'a marquée ces dernières années et que j'ai soigneusement rangé dans ma bibliothèque comme un bijou, sachant que l'envie de rouvrir l'écrin qui l'abrite se présenterait, c'est bien cette merveille de littérature que nous a offert Angélique Barbérat

Lorsque Corin, docile est disciplinée, se mue en une jolie jeune fille aux longs cheveux blonds encadrant son visage candide, son père, méfiant, redoute que quelque individus mal intentionnés ne lorgnent d'un peu trop près la seule fille de sa grande tribu. Avec la complicité d'un ami, il la fait embaucher comme serveuse dans le restaurant de ce dernier. Gardant ainsi un oeil sur elle, il se met en quête du meilleur parti, songeant plus à ses propres intérêts qu'à ceux de Corin.
Quand tous deux repèrent Jack, concessionnaire automobile, son allure distinguée et le respect qu'il témoigne à Corin malgré son attirance évidente pour la jeune femme, les deux compères sont convaincus d'avoir trouvé la perle rare. Mais ne dit-on pas qu'il ne faut jamais se fier aux apparences ? Client régulier du restaurant, tous sont aux petits soins pour lui, et Corin aura à peine le temps de s'en apercevoir qu'elle se retrouvera la bague ou doigt, sous la coupe de cet homme violent, jaloux et possessif, qui exige d'elle obéissance et soumission, sans quoi les coups pleuvent autant que les cadeaux hors de prix et les promesses que jamais cela ne se reproduira…

Puis vient cet « instant précis où les destins s'entremêlent »…, et sa rencontre avec Kyle, l'écorché vif, qui ne vit que par et pour sa musique. Parti rejoindre son manager, Kyle renverse accidentellement le fils de Corin et les accompagne à l'hôpital à l'arrivée des secours. Ce n'est ni le lieu ni le moment, mais les coups de foudre ne se prévoient pas… Leurs regards se croisent, leurs doigts se frôlent, la gêne de ce besoin tactile en est presque palpable... Fou de rage, Jack vient interrompre cette magie inattendue et ramène sa famille à la maison, cage dorée d'où Corin, que rires et désirs ont abandonnée depuis longtemps, observe le monde à travers les barreaux…

Témoin du meurtre de sa mère lorsqu'il était enfant, Kyle n'a jamais surmonté ce drame et le porte comme un fardeau. Très proche de sa demi-soeur Jane, il tente de dépasser son sentiment de culpabilité en s'investissant dans les activités de la « Maison », où elle recueille les femmes victimes de maltraitances conjugales. Malgré sa vie tumultueuse avec le groupe de rock dont il est le leader (dont l'ingérable Patsy !), « Migraine » et ses tourments ne lui laissent aucun répit, qu'il soit en tournée à Londres ou au fin fond de l'Asie.

De cet « instant précis » née l'obsession commune de se revoir, un refuge, une échappatoire qui n'appartient qu'à eux. Comme si Kyle et Corin étaient capables de communiquer à travers tout ce qui les entoure, au-delà de la distance qui les sépare : le souvenir de ce premier regard, la vue d'un paysage, une odeur, un objet… Les occasions de se croiser sont pourtant nombreuses : lui, toujours sur la route ou dans les airs ; elle, suivant Jack et son égo surdimensionné, ne jurant que par son statut social et se pavanant aux quatre coins du monde, exhibant sa famille modèle dans les lieux en vogue où il faut être vu…

Que dire de cette petite araignée qui tisse sa toile partout où elle se trouve ? Et elle se trouve parfois là où l'attend le moins ! Quel drôle de personnage ! Elle observe, constate, relate à sa façon. Est-elle le livre qui s'adresse à son lecteur, mélange de prises de conscience, de doutes, de rêves, d'espoirs, de peurs … ? Elle n'est qu'une petite touche de magie supplémentaire qui fait de ce roman une pépite, de la première à la dernière ligne, où le plus infime des détails se rappelle à nous, comme un écho, 200 pages après l'avoir lu sans y prêter l'importance qu'il méritait.

Bien sûr, on suppose, on imagine, on se retrouve impuissant et déchiré, ne sachant jamais ce qu'il va se produire. Mais l'auteur parvient sans cesse à nous surprendre, apportant toujours plus de profondeur au récit. Elle a ce talent tout magnifier, de la douleur à l'absence au plus petit moment de joie…
Et « Les joies.... Pas besoin de les réviser. On peut les accueillir par surprise. Mais les anti-joies... Mieux vaut les anticiper pour les digérer. C'est comme les claques dans la gueule. Les plus dures sont celles qu'on n'a pas vues venir. »

Mais ces destins entremêlés nous réservent bien d'autres surprises, et il serait dommage d'en dévoiler plus…



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