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Aller à la bibliothèque pour y emprunter livres et CD est aujourd'hui un geste banal. Pourtant, il n'en a pas toujours été ainsi. C'est ce que raconte Frédéric Barbier dans sa passionnante « Histoire des bibliothèques ». Comme dans bien d'autres domaines, cette histoire commence vraiment dans le monde grec, et tout particulièrement à Alexandrie, où Ptolémée Ier crée le célèbre Musée vers 290 avant J.C. Ce Musée, ou « demeure des Muses », destiné à rassembler l'ensemble des textes de l'Antiquité, se compose d'une gigantesque bibliothèque (le chiffre de 700 000 volumes sera avancé), d'un atelier de copistes et d'une équipe de « grammairiens » chargés de garantir la qualité des textes conservés. Construit dans le « Basileia », le quartier royal, subventionné par le prince, le Musée est directement lié au pouvoir, auquel il assure prestige et rayonnement. Ce sera du reste l'une des fonctions majeures des bibliothèques royales et princières qui se constitueront au fil des âges en occident et dont beaucoup donneront les bibliothèques nationales d'aujourd'hui. Après sa destruction, le Musée d'Alexandrie et son mode d'organisation, rassemblant copistes et savants autour d'une bibliothèque, serviront de modèle aux communautés monastiques qui essaimeront dans toute l'Europe médiévale au fur et à mesure de la christianisation des populations… Impossible, bien sûr, d'évoquer ici toutes les étapes d'une histoire millénaire, qui suit de près celles de l'écrit et du livre. Citons pourtant deux moments clés. Tout d'abord la Réforme, qui favorise la création de très nombreuses bibliothèques. Luther compte en effet sur le livre imprimé pour diffuser sa pensée, tandis que sa théologie, fondée sur la lecture (de la Bible, mais pas seulement) et sur la formation intellectuelle, suppose d'avoir des fonds d'ouvrages aisément disponibles pour alphabétiser et instruire les fidèles. Ces premières bibliothèques protestantes sont largement alimentées par les « sécularisations » opérées dans les monastères et couvents catholiques. Ce sera également le cas au début de la Révolution française, lorsque les biens du clergé sont mis « sous la main » de la nation. Parmi ceux-ci, de très riches bibliothèques (auxquelles viennent bientôt s'ajouter celles des aristocrates émigrés), qui constitueront le noyau de nos modernes bibliothèques municipales. Ce n'est qu'avec la Révolution que l'accès aux bibliothèques et au livre commence réellement à se démocratiser. Et encore par pour tout le monde : en effet, les bibliothèques resteront longtemps un monde d'hommes , et il faudra attendre la fin du XIXè siècle pour que la présence des femmes y soit perçue comme naturelle. + Lire la suite |