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Critique de Francharb3


Commençons brièvement par la traduction : elle a l'air complète (tous les chapitres de l'original y sont, j'ai vérifié le début et la fin autant que mes moyens me le permettent), ce qui est loin d'être une évidence en matière de traduction du roumain. Pour le reste, je n'ai pas pu comparer avec la traduction de Leon Negruzzi des années 60. Dans l'ensemble, c'est plutôt agréable à la lecture : diacritiques roumains et autres respectés, « coquilles » très rares. Comparativement, ma compagne pense néanmoins que ce n'est pas la meilleure de Laure Hinckel. Pour ceux qui sur babelio, se plaignent, parfois, à juste titre, des termes roumains utilisés et non définis en notes ou en glossaire, je signale ici « codoş » qui signifie en argot « proxénète ».
Mais je m'étends trop : à l'essentiel… Barbu est comparé, pas seulement par le premier commentaire, à Céline. Dans l'ensemble, bonne impression, 3 étoiles, ce serait 3,5 si cela existait. Néanmoins, je relève d'emblée un certain nombre de divergences. L'avertissement de l'éditeur et de la traductrice est bref : Barbu était certes une personnalité controversée. Mais surtout, il a été reconnu coupable de plagiat. Céline est lui aussi controversé, mais sur la parenté de ses oeuvres… En Roumanie, des voix non négligeables (Ştefan Agopian par exemple) doutent de celle du « Grand dépotoir ». La comparaison est à part cela surtout, je pense, le fait de l'usage de l'argot. Si Barbu en use, mes souvenirs de Céline, notamment « Casse-pipe » me poussent à nuancer. Chez ce dernier, l'argot est structurant : en clair pour l'essentiel, au moins à la première lecture, on n'y comprend rien. On parle parfois à propos de Céline de chefs-d'oeuvre pour l'invention de son propre langage et l'idéologie misanthrope. On en reste éloigné chez Barbu.
Ceci étant, beaucoup d'éléments pertinents, en vrac : la description des marges, malgré tout peu fréquente dans la littérature roumaine à cette époque (si ce n'est dans les romans d'un George Mihail Zamfirescu, non traduits à ce jour) ; la présence de la nature ; l'illégalité ; la déconstruction partielle d'un certain nombre de mythes (le mariage, la musique, voire la sexualité) ; la précision presque naturaliste, la dénonciation de l'injustice et de la corruption, l'humour.
Reste cette propension, y compris dans la traduction (« Groapa » en roumain c'est le trou, la fosse et cela devient « Le Grand dépotoir ») à une forme de sensationnalisme, de surenchère permanente dans la misère et l'incurie, celle qui, au fond, ferait presque croire, non pas que les riches sont intelligents, mais que les pauvres sont des crétins. Heureusement ou malheureusement, c'est tout aussi faux. Pour moi, donc, pas un salaud. Pas un chef-d'oeuvre non plus.
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