Claude Seignolle, l'écrivain fantastique français, prétendait que la machine à écrire de
Jean Ray pouvait faire des choses toute seule.
Lui-même avait peut-être commencé à le croire !
Tellement l'imaginaire se battait sans relâche contre l'encre et le métal de cette vieille UnderWood aux touches usées sur laquelle
Jean Ray a tapé toute son oeuvre.
Le 24 avril 1963,
Jean Ray, comblé avait reçu le premier prix des Bouquinistes.
Le jury était présidé par
Marcel Allain, un des pères de Fantomas.
Jean Ray, l'écrivain, l'insaisissable.
Jean Ray, entre la réalité et la légende.
Il aurait bourlingué aux quatre coins du monde, il aurait été trafiquant d'armes, de perles et d'ivoire, d'alcool à l'époque de la prohibition américaine.
Il aurait exercé mille métiers insolites : bourreau à Venise, pirate en mer du nord ou gangster à Chicago.
Soixante ans de sa vie à mystifier, raconter, à inventer et à imaginer des mondes d'épouvante, de mystères et d'aventures.
Combien de pages
Jean Ray a-t-il écrites ?
Plusieurs milliers ...
Jean Ray fut conteur, romancier mais aussi poète, chroniqueur, journaliste, critique théâtral et littéraire, fantaisiste, dramaturge, traducteur, hagiographe, préfacier, scénariste de BD et anthologiste ...
Son vrai nom était Nicolas
Jean-Marie de Kremer.
Il a principalement écrit en français sous le pseudonyme de
Jean Ray, et en flamand derrière celui de
John Flanders, patronyme choisi à cause de la célèbre héroïne de
Daniel Defoe, Moll Flanders, égérie flamande des pirates anglais.
Une couverture toute de gris, un nom entremêlé à la silhouette d'un visage, c'est
Jean Ray, l'archange du fantastique.
C'est un album écrit par
Jean-Baptiste Baronian et
Françoise Levie, et paru, en 1981, à la Librairie des Champs-Élysées.
L'ouvrage vient s'intercaler entre le numéro "spécial
Jean Ray" de la revue "Fiction" paru en mai 1964 et le dossier "Phénix" paru chez Lefrancq en 1995.
Mais l'album de
Jean-Baptiste Baronian et de
Françoise Levie a ceci de particulier qu'il est écrit de manière atypique, littéraire en même temps que biographique.
C'est la caverne d'Ali Baba !
C'est une biographie bibliographique, bien sûr.
Mais c'est aussi un livre de références où apparaissent des noms évocateurs : Michel Ghelderode,
Marie Gevers,
Henri Vernes,
Pierre Goemaere,
Thomas Owen,
Francis Lacassin, Fritz van den Berghe,
Alain Resnais ... certains connus, d'autres un peu oubliés, mais tous gravitant autour de la littérature de l'imaginaire.
L'album est articulé en quatre parties, quatre itinéraires, quatre voyages et quatre pérégrinations :
- le gantois magnifique
- la fureur d'écrire, une chronologie
- les images de la vie
- les miroirs convergents
La troisième partie, les images de la vie, est un dossier photographique d'une trentaine de pages où s'étalent photographies, couvertures de livres, lettres et planches de BD.
Tandis que la quatrième, "les miroirs convergents", est un recueil de textes courts pour certains inédits jusque-là.
Cet album n'est donc pas un livre de plus sur le grand-maître gantois dont un des textes avait été choisi par
André de Lorde* pour figurer dans la première anthologie de littérature fantastique de langue française : "les maîtres de la peur".
Cet album est très bien réalisé, très accessible et très didactique.
Il est tout simplement indispensable à tous ...
*l'âme du théâtre du Grand-Guignol