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EAN : 9782259310444
468 pages
Plon (20/01/2022)
3.67/5   3 notes
Résumé :
Jean-Luc Barré signe une passionnante biographie d’un des hommes les plus puissants de la Troisième République : Philippe Berthelot.

Ce haut fonctionnaire original et sulfureux, sorte de Vidocq de la diplomatie, a tenu un rôle majeur dans notre histoire politique et littéraire. « Un paradoxe à la fois scandaleux et magnifique », disait de lui son ami et protégé Paul Claudel. Celui qui fut le très puissant secrétaire général du ministère des Affaires é... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Difficile d'ajouter quoi que ce soit à la superbe contribution de Bigmammy, qui m'a incité à me plonger dans cette biographie de Philippe Berthelot, si ce n'est que celle ci apporte un regard incisif sur les tentations d'un expert des affaires étrangères qui ne fut pas plus étranger aux affaires qu'un Talleyrand comme l'a montré Emmanuel de Waresquiel, en se plongeant dans les archives des banques anglaises, dans « Talleyrand , le prince immobile ».

Philippe Berthelot est une première fois écarté du Quai d'Orsay en 1894 pour avoir confondu son budget avec celui du ministère ; la nomination de son père, Marcellin Berthelot, comme Ministre des Affaires étrangères (1895/1896) du Gouvernement Léon Bourgeois efface cette bévue et le réhabilite.

Après la guerre, la faillite de la Banque industrielle de Chine, fondée par son frère André Berthelot, met en évidence, au terme d'une enquête présidée par le sénateur Jules Jeanneney, les initiatives de celui qui était Secrétaire Général du Quai d'Orsay et est intervenu, y compris en commettant des télégrammes portant la signature ministérielle, au profit de la banque familiale. Sanctionné d'une suspension d'activités de 10 ans, il est amnistié par Aristide Briand et réintègre le ministère.

Cette biographie éclaire le premier tiers du XX siècle en décrivant le contexte diplomatique, les courants politiques, le milieu intellectuel et artistique. Epoque où se succédèrent au secrétariat du Quai d'Orsay Jules Cambon, Maurice Paléologue, Philippe Berthelot et Alexis Leger, dit Saint-John Perse. Epoque où Paul Morand, Jean Giraudoux et surtout Paul Claudel déployaient leurs talents diplomatiques.

Fort bien écrit, ce long récit est aussi un formidable roman animé par un diplomate d'une culture, d'une intelligence et d'une clairvoyance exceptionnelles
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Pépite de poids découverte sur la table d'une librairie du boulevard Saint Germain … une épaisse biographie, d'un auteur renommé, l'image d'un homme au regard d'acier … me voilà sous emprise.

Qui connaît le nom, quel étudiant en relations internationales, connait le parcours atypique et l'influence majeure exercée par ce haut fonctionnaire du quai d'Orsay : Philippe Berthelot (1866 – 1934) sur la politique internationale de l'entre-deux guerres ?

Enfant difficile, fantasque, jeune homme attiré par la littérature mais qui, au lieu de publier sous son nom - sauf des critiques littéraires et des entrées dans une encyclopédie - qui va dédier tous ses efforts à faciliter la carrière d'écrivains majeurs mieux connus aujourd'hui pour leur oeuvre littéraire que pour leur activité diplomatique : Paul Claudel, Paul Morand, Jean Giraudoux, Saint John Perse.

Secrétaire général du ministère des Affaires étrangères, sorte de ministre permanent palliant la valse des gouvernements, un poste créé sur mesure, il prône inlassablement le maintien de l'alliance avec l'Angleterre et le rapprochement avec l'Allemagne vaincue.

Elevé dans une famille exceptionnellement unie entre son père catholique savant de notoriété internationale très impliqué en politique - Marcellin Berthelot - et sa mère protestante, issue de la dynastie d'horlogers Bréguet, Philippe Berthelot fut un haut fonctionnaire hyperactif, incontournable, arrogant, influent et même parfois se substituant à l'action de ses ministres successifs : Clémenceau puis Briand, tout en se faisant un ennemi redoutable de Poincaré.

Joueur – sur un coup de poker heureux, il finance de ses deniers un court de tennis au quai d'Orsay – homme à femmes, travailleur compulsif le jour qui passe ses nuits dans les lieux de plaisir et les théâtres, fasciné par la Chine, Philippe Berthelot est le pilier incontournable de la diplomatie française dans les temps troublés qui précèdent et suivent les ravages de la Grande guerre, qui lui apparaissait comme un immense défi lancé à l'intelligence.

Avec Clemenceau puis Aristide Briand, il se heurte avec violence à Poincaré qui précipite sa chute à l'occasion de la crise de la Banque Industrielle de Chine dont le président est son frère aîné André, mais il reviendra plus fort aux affaires avec le retour de Briand.

Sa rivalité avec Poincaré éclate dans le roman de Giraudoux Bella, et le portrait de deux familles antagonistes, les Rebendart et les Dubardeau, où il incarne Philippe Dubardeau, l'indispensable second des grands hommes.

Impénétrable, visionnaire à la personnalité provocante qui semble enivrer ses détracteurs de préjugés et de haine : j'ai dévoré cette biographie écrite avec élégance comme on lit un roman à suspens.

Cet athlète à la moustache fournie, au visage rectangulaire impressionnant et à la crinière brune bouclée, cet ami indéfectible des arts et surtout de la littérature de son temps, se détendait en compagnie des chats …

Il est mort à la tâche, continuant à voyager en Europe pour sauvegarder la paix, sans se soucier d'une maladie cardiaque menaçante et qui a fini par le terrasser, au lendemain de l'arrivée au pouvoir d'Hitler.
Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
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Jean-Luc Barré est directeur des éditions Bouquins et il sait qu'il existe des lecteurs qu'un grand nombre de pages n'effraie point. Il ose donc lui-même écrire des plats de consistance. Eh bien bravons cet aplomb.
Et dans la longue marche de cet accompagnement au fil des années, remontant aux générations qui ont préparé le terrain à cet homme d'esprit, la récompense vient, étape par étape, à savourer les styles de l'époque, grâce à ces multiples extraits de mémoires, de biographies, de témoignages. Même si l'impression vient parfois d'entrer dans un décor aux vieux meubles polis d'encaustique, le caustique et le faste ont plus d'attrait que le "fast" qui ne se mâche pas. Grâce au temps déroulé doucement comme un tapis moelleux à souhait nous comprenons la constance et la consistance de cette existence marquée par la confiance.
Après avoir lu des faits, des dates, des discours, des détails privés surprenants, le tout sans effets d'emphase, il appartient à chacun de se faire une idée sur la personne de Philippe BERTHELOT, mais il est fort concevable que cette réédition en 2022 d'un titre de 1988 ait bien des raisons de se lire sous nos jours.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Le 22 août (1914), on apprend à Paris la chute de Charleroi. L'ennemi se déverse à grands flots vers la frontière. Les télégrammes du général Joffre, restés jusque-là fort laconiques, ne peuvent plus masquer l'ampleur du désastre. Un gouvernement d'Union sacrée est aussitôt constitué, dans lequel Delcassé retrouve le ministère des Affaires étrangères. Le 28, l'avancée des troupes allemandes est telle qu'une véritable psychose s'abat sur Paris. Gallieni prend le commandement du camp retranché. À la demande de Joffre, les pouvoirs publics se mettent en route pour Bordeaux dans la nuit du 2 septembre.

« Je dînai, la veille de cette fuite, qui n'avait rien de glorieux mais qui était raisonnable, avec quelques diplomates qui cherchaient à l'excuser, rapporte Boni de Castellane. Philippe Berthelot l'annonçait comme un fait divers. »

Fait divers, sans doute, si on le rapporte aux dimensions de la guerre elle-même. Néanmoins le gouvernement vide les lieux avec une précipitation si indécente que Joffre en fera sèchement grief à Poincaré : « Je vous avais dit de partir, pas de foutre le camp ! » Apostrophe que Berthelot ne pourra s'empêcher de recueillir dans ses carnets.
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Meurtrie par la mort de leur petit-fils, Olivier Lyon, tué à vingt ans dans un déraillement de train, Sophie Berthelot ne s'est jamais remise d un drame qui s'ajoutait à celui de la disparition de la mère du jeune homme, sa fille Hélène. Une maladie de cœur l’avait contrainte depuis lors au repos. « Comment vous dire le tragique de ces longs mois pendant lesquels, jour après jour, nous sentions ma mère bien-aimée plus proche de la mort et mon père encore parmi nous et déjà étranger à ce monde dont il se détachait peu à peu pour la guider vers l'autre rive », confie Daniel Berthelot à Anna de Noailles. Le 18 mars, Marcellin Berthelot, brisé par le chagrin, ne survit qu'un quart d'heure à la disparition de sa femme.

Comme Victor Hugo vingt ans plus tôt, le savant est honoré d'obsèques nationales au Panthéon où, fait exceptionnel, Sophie Berthelot et lui pourront reposer côte à côte.
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« Clémenceau trouve absurde le fatras de Philippe Berthelot », signale Paul Cambon à son fils en décembre 1918. Absurde ou trop contraignant ?

Le président du Conseil n'est pas homme à se laisser dicter une conduite, encore moins une politique. Il se méfie des experts, des fonctionnaires, des conseillers. Dans l’action, il ne procède jamais que par humeurs, réflexes, coup de sang, intuition, ruptures. Ses arguments n'ont jamais rien de pesé ou de prémédité. Cet homme d'opposition n'a qu'une loi : envenimer les situations pour en tirer parti. La Conférence de la Paix ne sera pour lui qu'un champ de bataille comme un autre.

Berthelot lui reprochant un jour d'être « vraiment trop méchant », Clemenceau de répondre : « J'ai eu une femme, elle m'a fait cocu. Des enfants, ils m'ont abandonné. Des amis. ils m'ont trahi. Il me reste mes mains malades et je ne quitte pas mes gants ; mais il me reste aussi des mâchoires : je mords. »
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« Les diplomates échappent par la discrétion professionnelle au jugement du vulgaire », écrit-il. Du vulgaire, oui. Mais des autres ? Le surcroît de puissance que lui confère en 1921 l’accession au secrétariat général, le prestige dont cet homme du monde entre tous recherché jouit dans les salons parisiens et les lieux à la mode, l'adulation ou la haine qu'il inspire sans autre forme de sentiment, l’ont peu à peu privé du halo protecteur que lui assuraient jusqu'alors le service de l'État et son propre souci d'anonymat.
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Philippe s’accommode moins bien en revanche de la signification qu'on prête à son patronyme : Berthelot voudrait dire en chinois : « Beaucoup de promotions ou de fortune » - traduction qu il juge « trop directe et grossière »...
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Vidéo de Jean-Luc Barré
Jean-Luc Barré vous présente son ouvrage "De Gaulle, une vie. Vol. 1. L'homme de personne : 1890-1944" aux éditions Grasset. Entretien avec Christophe Lucet.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2929736/jean-luc-barre-de-gaulle-une-vie-vol-1-l-homme-de-personne-1890-1944
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