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EAN : 9782072736872
272 pages
Joëlle Losfeld (01/01/2018)
4.07/5   303 notes
Résumé :
Chassé de son pays d'origine par la Grande Famine, Thomas McNulty, un jeune émigré irlandais, vient tenter sa chance en Amérique. Sa destinée se liera à celle de John Cole, l'ami et amour de sa vie.
Dans le récit de Thomas, la violence de l'Histoire se fait profondément ressentir dans le corps humain, livré à la faim, au froid et parfois à une peur abjecte. Tour à tour Thomas et John combattent les Indiens des grandes plaines de l'Ouest, se travestissent en ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (100) Voir plus Ajouter une critique
4,07

sur 303 notes
Cet étonnant western m'a surprise de bout en bout par sa façon très singulière d'explorer les fondements de la nation américaine ( l'émigration et la dispersion d'un peuple sur des terres inhospitalières , la guerre de Sécession et le génocide amérindien ) jusqu'à construire une méditation profonde sur la notion d'identité nationale.

Le héros est un tout jeune Irlandais qui a traversé l'Atlantique, déterminé à se forger une nouvelle vie, en Amérique, après le choc traumatique de la Grande famine qui a décimé sa famille. Il atterrit dans le Missouri à la fin des années 1840. Tour à tour danseur travesti dans un saloon pour mineurs en manque de femmes, soldat dans l'armée américaine pour exterminer les Amérindiens, soldat dans l'armée unioniste, on colle aux pas de ce personnage incroyablement souple et mobile. Sa narration est terriblement propulsive, très chargée aussi, hantée par les cris de la guerre civile et des carnages d'Amérindiens, traversée par une nature sauvage et punitive ( très proche d'un Cormac McCarthy dans ce registre ) qui abat sur les hommes faim, canicule, fièvre jaune, inondation et pluie verglaçante. Certaines scènes sont saisissantes, pas tant par la violence décrite, réelle, mais par la puissance de leur clarté à la retranscrire en flairant le banal dans l'apocalyptique, et inversement. Les descriptions de combat au corps à corps sont ainsi souvent dérangeantes mais jamais gratuites.

Le roman est tout aussi inattendu par le choix d'un personnage principal homosexuel, revêtant avec bonheur une tenue féminine en temps de paix tout en cochant toutes les cases des stéréotypes virilistes du guerrier lorsque le clairon retentit. Qui plus est lorsqu'avec John, son amoureux rencontré à l'adolescence dans le saloon, ils « adoptent » une fillette sioux. Cette fluidité des genres tout comme cette redéfinition de la famille respirent l'anachronisme, et pourtant, on y croit tellement tout est rupture, refonte, plasticité dans ce pays mouvant dévasté par la convoitise des frontières et l'anarchie. On y croit à cette famille de substitution dans ce pays fracturé peuplé de figures spectrales et de quasi squelettes affamés errants à la recherche d'un lieu pour se poser et être heureux.

La potentielle lourdeur des symboles est miraculeusement allégée par la sincérité de la voix de Thomas, exceptionnel narrateur avec son éloquence verbale bien au-dessus de celle à laquelle on s'attendrait. Elle surprend par sa simplicité pleine de sagesse et sa candeur juvénile, questionne et charme. La prose de Sebastian Barry est souvent éblouissante, notamment lorsqu'elle se pare d'accents lyriques qui rendent hommage à la somptuosité de la nature qui force l'admiration.

« le souffle de nos trois cents chevaux forment une brume qui s'élève dans la fraicheur de novembre. Leurs corps chauds fumaient sous l'exercice. On avait ordre de rester en formation mais les vieux séquoias nous laissaient pas faire. Ils nous écartaient comme si c'était eux qui se déplaçaient. On aurait pu attacher jusqu'à cinquante chevaux au tronc de certains. Les oiseaux d'Amérique, toujours étonnants, piaillaient d'un arbre à l'autre et faisaient tomber des myriades de gouttes de givre depuis les cimes. de temps en temps, on entendait un crépitement comme un tir de mousquet. Les arbres avaient pas besoin de nous. Ils faisaient leurs petites affaires. Nous, on était bruyants, avec notre harnachement, nos éperons, nos sacoches qui se heurtaient et s'agitaient, les sabots de nos chevaux qui frappaient le sol. Pourtant, les soldats parlaient à peine, on chevauchait sans un mot, comme si c'était une chose entendue. Alors que c'était les arbres qui nous réduisaient au silence. »

Mais ce qui charme le plus, malgré les atrocités qui traversent le roman, c'est son optimisme presque joyeux. Contrairement au couple condamné de Brokeback Mountain, l'homosexualité de Thomas et John n'est pas un drame, c'est un recours pour survivre aux remous de la vie. Aux fracas de l'extérieur, répond le calme quasi sacré de l'intériorité d'un couple qui s'aime tendrement, avec pudeur, et puis c'est tout.
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Le jeune Thomas McNulty a fui la Grande Famine irlandaise dans l'espoir d'une vie meilleure en Amérique. Aux côtés de celui qui est devenu son inséparable compagnon, John Cole, il endosse la tunique bleue et combat les Indiens dans les grandes plaines de l'Ouest, se travestit en femme pour chanter dans un cabaret, puis s'engage dans l'armée de l'Union pendant la guerre de Sécession. Et aussi, comme pour conjurer la violence qui les cerne, John et lui adoptent une fillette sioux après le massacre de tous les siens.


Les westerns modernes n'ont heureusement plus grand-chose à voir avec ceux des années trente à cinquante. Terminé le mythe des gentils et virils cow-boys confrontés à la cruauté des sauvages indiens. D'abord, en un hommage au fils gay de l'auteur, c'est un couple homosexuel qui, évoqué avec une pudeur et une délicatesse contrastant singulièrement avec les violences induites par les guerres et par la prévalence de la loi des armes en cette période de l'histoire américaine, joue le rôle principal dans cette vaste fresque. Et puis, Indiens, soldats et colons se retrouvent emportés, la plupart du temps bien malgré eux à leur petit niveau, dans une spirale infernale où s'enchevêtrent inextricablement, jusqu'à leur faire perdre toute raison, misère et famine, peurs et représailles de plus en plus terribles. Dépassés et impuissants, Thomas et John constatent amèrement que nul autour d'eux n'échappe au processus de pourrissement qui transforme peu à peu les protagonistes les plus raisonnables en incontrôlables bêtes fauves.


Alors que les massacres entre colons et indiens ne concernent déjà plus que les territoires les plus occidentaux d'Amérique, c'est bientôt le Nord et le Sud qui s'empoignent à leur tour dans un nouveau carnage dont les enjeux passent encore par dessus la tête des simples soldats employés comme chair à canon. Toujours, le regard et le bon sens paysan de Thomas traduisent en mots simples et imagés la nécessité de suivre le mouvement et de tenter de survivre, souvent tout court, parfois le moins mal possible. Et l'on demeure saisi par tant d'instinctif à-propos, exprimé avec une innocence et une sincérité encore amplifiées par la langue un peu frustre de cet homme condamné depuis la naissance à une existence des plus humbles.


Ce naturel contribue pour beaucoup à l'attachement du lecteur pour ce couple étonnant de courage et d'humanité, qui, en adoptant une fillette sioux après avoir contribué à l'extermination de sa tribu, relègue par ailleurs définitivement tout manichéisme loin de ces pages en permanent clair-obscur. Aussi brutal soit leur contexte, les personnages parviennent à y préserver, chaque fois que possible, ces tranches de bonheur qui donnent malgré tout son prix à leur vie.


Une grande réussite donc que ce roman plein d'aventure et d'émotion, écrit à la hauteur d'un humble émigré irlandais jeté dans le chaudron d'une jeune Amérique en ébullition. L'on retiendra incidemment que les Amérindiens ont de tout temps considéré l'existence d'hommes à tendance féminine et de femmes à tendance masculine, portant au moins à quatre le nombre de genres humains.

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Quel drôle de bon bouquin !
Ce récit nous propose une fresque historique dans l'Amérique des colons, à une époque où les frontières n'ont pas encore été dessinées, un récit qui commence environ 40 ans avant "Little big Horn" et Custer.
Une fresque car le parcours vécu par le narrateur est une synthèse d'à peu près tout ce que l'on pense connaître de l'histoire des Etats-Unis.
Il y a d'abord le sort des immigrants, souvent pauvres et ne comptant pour rien aux yeux des nouveaux américains, il faudra une volonté énorme et de la chance pour survivre, le destin ne tient souvent qu'à une rencontre décisive.
Thomas va nous raconter sa rencontre avec Cole, sa participation aux guerres indiennes, à la guerre de sécession, il va nous parler de l'esclavage et de la folie de ce monde d'alors ou la vie ne tenait souvent qu'à un fil.
Ce qui va cependant rendre cette histoire extraordinaire tient à la personnalité du narrateur, elle est aux antipodes de l'image que l'on se fait du cowboy viril et crasseux. On peut parler de contre pied voire d'anachronisme car Thomas et son "galant" John Cole sont homo.
Autant dire qu'ils ne se trouvent pas au bon endroit au bon moment et pourtant l'histoire de cette destinée est parfaitement crédible, bravo à l'auteur d'avoir trouvé cette note et ce tempo.
Le style narratif est à la première personne et sans aucun dialogue autre que ceux évoqués par Thomas. Il y est question d'atrocités, de celles que l'on commet car il faut bien obéir aux ordres, mais aussi de repentance et d'espoir. Ce qui m'a frappé dans ce récit, c'est cette conscience de la brièveté de la vie et la façon dont elle est sous entendue toujours.
Le personnage principal semble veiller en permanence sur une flamme de bougie vacillante, sa vision du monde est belle dans sa simplicité car il sait exactement de quoi dépend son bonheur et j'ai beaucoup aimé sa lumière intérieure. Beaucoup aimé aussi ses observations de la nature humaine et de la nature tout court.
La galerie des personnages de ce roman est sublime de représentativité, ni anges ni démons, ils sont tous ou presque un mélange de férocité et de bienveillance, deux faces d'une même pièce qui s'expriment selon les aléas de la vie. Parmi tous ces personnages j'ai été particulièrement ému par Winona qui est à mon sens le personnage symbolique de ce roman.
Il me reste à parler du style plutôt "familier" et qui m'a un peu étonné au début, mais qui se révèle finalement bien adapté au récit et à l'instruction supposée du narrateur.
A l'arrivée c'est probablement le western le plus atypique que vous lirez un jour mais c'est aussi une belle expérience de lecture.
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Thomas McNulty a traversé l'Atlantique pour fuir la famine et la misère de son Irlande natale. Jeune adolescent, sa route croise par hasard celle du beau John Cole. Quitte à errer, autant le faire à deux. À Daggsville, ils se font embaucher comme jeunes danseurs travestis en femmes devant des mineurs la plupart du temps avinés. Chaque soir, pendant deux ans, ils ont tourbillonné et virevolté sur la piste. Mais, leurs corps changeants, ils n'ont eu d'autre choix que de troquer leurs robes à froufrous contre une tunique bleue. Engagés volontaires, les deux adolescents prirent la direction des grandes plaines de l'ouest où l'ennemi commun aux Anglais, aux Irlandais ou encore aux Espagnols, l'Indien, tombera sous leurs balles. Mais bientôt d'autres combats les attendront tous avec la Guerre de Sécession...


Sebastian Barry s'est inspiré du destin d'un arrière-grand-oncle, dont la magnifique photo orne la couverture, pour nous raconter l'histoire de Thomas McNulty et de John Cole. Il nous livre un roman épique, au souffle romanesque où se côtoient la mort, les guerres, la violence, la misère, la famine mais aussi l'amour. L'amour que se porte Thomas et John, un lien indéfectible, à la fois puissant et pudique dans une Amérique puritaine. Thomas, le narrateur, décrit tout à la fois les combats sanguinaires, les massacres des Indiens, la rage et la haine qui peuvent habiter certains soldats, l'absurdité de la guerre mais aussi la bonté et la générosité de certains hommes, la splendeur d'un paysage ou d'un soleil couchant. le ton employé se révèle parfois détaché, candide ou encore innocent, ce qui n'empêche pas d'imaginer les pires horreurs. Un roman puissant, intimiste, à la fois grave et poétique. Une épopée lyrique habitée par d'inoubliables personnages.
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" On était des pestiférés .
Des humains faits rats, la faim ça vous prend tout."
Voici une fresque grandiose où abondent les questions existentielles qui oscille entre récits de guerres effroyables et soirées animées où les protagonistes sont déguisés dans un saloon pour mineurs un peu avinés ...ils se travestissent en femmes pour des spectacles....
L'auteur imagine les mémoires de Thomas Mc Nulty, un orphelin irlandais fuyant son pays , traversant l'Atlantique afin d'échapper à la famine : "le Canada avait peur de nous, la faim ça vous prend tout, alors on était plus rien...."s'engageant du côté de l' Union dans la guerre de Sécession.
A travers la société de 1850 , au coeur du récit écrit à la premiére personne, Thomas décrit comment il vivait son quotidien : son corps livré à la faim, au froid parfois à une peur abjecte et insondable...sa quête d'identité sexuelle .
Sa rencontre avec John Cole, un "copeau d'humanité " comme lui, son amant, son amour : "John Cole était mon amour, tout mon amour ètait pour lui..."est pour lui une révélation , et les souffrances s'éloignent ....
L'auteur conte la violence de l'Histoire dans une Amérique parcourue de plaines immenses, de bisons et d'ardentes mêlées ou tour à tour John et Thomas combattent les Indiens des grandes plaines de l'ouest .
L'écriture simplifiée comme une épure ressemble à un tableau fort, coloré , puissant , on marche avec Thomas et John en quête d'un toit pour la nuit , dans un beau vacarme où les voilà obligés , malgré eux , à " aller tuer de l'Indien " .
Un ouvrage au côté épique et romanesque, de toute beauté , naturel, à la fois intime et universel qui se double d'une réflexion sur des destins contrariés des familles irlandaises, l'amour, l'arrachement à un pays et la capacité d'un peuple migrant prêt à résister à tout , en plus de l'attachement à ce qui vaut la peine d'être vécu dans une existence âpre et passionnée.

(Le visage du héros : l'arrière grand- père de l'auteur figure sur la couverture du livre .)

Traduit de l'anglais ( Irlande) par Laetitia-Devaux.
Encore un beau roman Irlandais !


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critiques presse (6)
Actualitte
25 octobre 2018
La prose de Sebastian Barry, remarquablement traduite par Lætitia Devaux, est une merveille pour faire sentir et ressentir le goût et l’odeur du sang, le rythme d’un galop, l’éclat d’un rire, le froissement d’une étoffe, Ou la détonation d’un canon.
Lire la critique sur le site : Actualitte
LeFigaro
26 janvier 2018
Le romancier poursuit sa saga des McNulty en imaginant une histoire d'amour entre deux jeunes soldats durant la guerre de Sécession.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
LaCroix
26 janvier 2018
L’Irlandais Sebastian Barry retrace l’épopée américaine de deux jeunes orphelins qui partageront uniforme et amour dans une fresque où se conjugue histoire, effroi et bonheur.
Lire la critique sur le site : LaCroix
Lexpress
22 janvier 2018
Une fresque sans concession des guerres américaines du XIXe siècle sous la plume enfiévrée d'un auteur irlandais.
Lire la critique sur le site : Lexpress
LeMonde
17 janvier 2018
Un jeune homosexuel se construit dans la sauvagerie américaine des années 1860. « Des jours sans fin », célébration joyeuse et optimiste – malgré tout.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Liberation
17 janvier 2018
L’Irlandais raconte une histoire d’amour inspirée de l’homosexualité de son fils.
Lire la critique sur le site : Liberation
Citations et extraits (135) Voir plus Ajouter une citation
À Saint-Louis, on se rend compte que tout a changé. Au port, il y a de grands entrepôts aussi hauts que des collines. Tous les affranchis se trouvent là, comme une moisson d’âme, et presque chaque visage qu’on croise sur les rives est une déclinaison du noir au marron clair. On a besoin d’eux partout. Pour transporter, suspendre, tirer. Mais ils ont plus l’air d’esclaves. Leur chef est noir, les ordres proviennent de poumons noirs. Il y a plus de fouets comme avant. Je sais pas trop dire, mais ça a l’air mieux. Winona et moi, on aperçoit pas une seule tête indienne. Mais c’est vrai qu’on traîne pas à la recherche des cafards et de la vermine des bas-fonds non plus. On fait que passer, et à vrai dire, il y a même quelque chose d’agréable, là. Saint-Louis, détruite par la guerre, avec ses maisons en ruine à cause des obus, commence à se reconstruire. L’impression que deux univers se confrontent. Est-ce que je suis américain ? Je sais pas. Winona et moi, on prend place dans les cales avec des pauvres hères comme nous. C’est un plaisir de faire un bout de trajet sur le fleuve. Ce bon vieux Mississippi. La plupart du temps, c’est une bonne fille raisonnable à la peau douce et lisse. Si vieille et pourtant dotée d’une jeunesse éternelle. Le fleuve prend jamais de rides, et si c’est le cas, ça dure que le temps d’un orage.
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John Cole et moi, on s’est présenté au bureau de recrutement ensemble, bien sûr. C’était les deux ou rien, à prendre ou à laisser. L’un comme l’autre, on devait vraiment avoir l’air sans le sou. Des jumeaux. On avait pas quitté le saloon avec nos robes, alors on devait avoir l’air de vagabonds. Il venait de Nouvelle-Angleterre, où la terre de son père avait fini par s’épuiser. John Cole avait douze ans quand il est parti sur les routes. Dès que je l’ai vu, je me suis dit, un camarade. Et quel camarade. Je trouvais ce garçon assez élégant, même avec son visage pincé par la faim. J’ai fait sa connaissance sous une haie dans ce maudit Missouri.
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Parfois, on sait qu'on est pas très intelligent. Pourtant, parfois le brouillard de vos pensées se lève, et on comprend tout, comme si le paysage venait de se dégager. On se trompe en appelant ça sagesse, c'en est pas. Il parait qu'on est des chrétiens, des choses comme ça, mais c'est pas vrai. On nous raconte qu'on est des créatures de Dieu supérieures aux animaux, mais tout homme qui a vécu sait que c'est des conneries.
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Il y a beaucoup de monde sur terre, alors quand il s'agit de massacres ou de famine, de vivre ou de mourir, on compte pas vraiment. Il y a trop de monde. On pouvait bien mourir de faim dans les marais, dans ce désert qui en était pas un, dans ce voyage qui était moins un voyage qu'une fuite vers l'Est. Les gens meurent sans cesse, par milliers, partout. La terre s'en moque, ça lui est égal.
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Toute l’armée a l’air de frémir. D’autres braves traversent le village armés de carabines. Les femmes et les enfants partent par l’arrière. Il y a beaucoup d’agitation et de grabuge chez les squaws. Leurs cris et hurlements dérivent jusqu’à nous. Le capitaine Sowell a pas d’autre choix que de rejoindre sa compagnie. Les Gatling se mettent à tirer sur les femmes. On les regarde tomber comme si elles appartenaient à un autre monde. Puis les canons ouvrent une autre sorte de feu, et une douzaine d’obus foncent sur le village. Ensuite, les soldats exécutent les ordres. On leur a ordonné un massacre, alors ils massacrent. Sinon, c’est eux qui vont mourir. Celui-Qui-Domptait-Les-Chevaux hésite. Il rappelle ses braves et se met à courir seul. Il court aussi vite qu’un jeune garçon. Ses jambes le propulsent à travers l’armoise. Le major lève son Enfield, vise et tire. Le grand Celui-Qui-Domptait-Les-Chevaux tombe, tué en plein ahurissement. Laissez rien en vie, crie le major. Tuez-les tous. Alors on se précipite comme le pire Déluge de tous les temps.
Qui vous expliquera la raison de tout ça ? Certainement pas Thomas McNulty. La sauvagerie de l’humain était présente en chacun de nos soldats ce matin-là. Des hommes que je connaissais bien et des nouveaux que je fréquentais depuis quelques jours. Tous se précipitent sur le village comme une bande de coyotes. Des braves jaillissent armés de leurs wigwams. Des squaws pleurent et supplient. Les soldats hurlent comme des démons. Ils tirent partout. Je vois Starling Carlton en tête de sa compagnie, sabre tendu vers l’ennemi. Le visage aussi rouge qu’une plaie. Sa corpulence dans un dangereux équilibre. Un danseur meurtrier. La force, le pouvoir et la terreur. Jusque dans le cœur de chaque soldat. La peur de mourir ou de prendre une balle. Une balle qui pénètre votre corps mou. Tuez-les tous. On a jamais entendu un ordre pareil.
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