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Au Bar des habitudes le carburant est presque exclusivement la bière à part le vin de Meuse et le café et ne serait rien sans le moteur du chaos des vies sans relief et sans gloire qui tourne ici en sur-régime (« Ma tournée » ; « Histoire molle » ; « Lili »). On change d'histoires assez vite tout en restant suspendu à la tasse ou aux vapeurs du bock de celle d'avant ; la métaphysique du plein et du creux propre à l'ivrognerie telle que développée par un certain Protone (« Un mauvais joueur »), et à laquelle l'humour noir de l'auteur règle bien son compte, forme le creuset de ces nouvelles toutes différentes mais qui ont l'air de se poursuivre à toute vitesse avec ce même petit air de famille venu d'une "province aimable", "ralentie", d'un "pays où il y a plus de néons que de lumière". L'itinéraire n'est pas rectiligne, les point de vue souvent décalés. Si vous êtes "champagne" passez votre chemin, si vous êtes "Ardennes" rester s'impose. Tout dépend aussi de la manière dont vous envisagez l'ivresse en lecture. Si vous l'aimez lente et sinueuse avec de bonnes embardées, des arrêts forcés sur les bas-côtés et la promesse d'une montée en régime jusqu'à l'apothéose finale alors sautez sans crainte, comme Targette passant d'Homère à San Antonio dans « Un parcours sans fautes ». Les vapeurs d'une ambiance corrosive, incorrecte, pour des nouvelles cruelles et toutes réussies signées Franz Bartelt.

Seize histoires courtes très excitantes en vérité. Très, très bien écrites avec un art consommé du crescendo dans la déraillerie générale (pardon au professeur Belvaux du « Parcours sans fautes » pour ce barbarisme) et qu'illustrerait peut-être l'ultime récit (« Ta tête d'assassin »). le premier de tous, tout à fait « soft », donne le ton et l'esprit de l'ensemble (un dérèglement anodin dans un rituel de comptoir parfaitement rôdé) et son titre au recueil. le deuxième est déjà nettement plus inquiétant («Mauvais rêve ») : un type a envie de tuer sa femme – rien d'anormal en soi n'est-ce pas – sauf qu'il lui annonce officiellement la chose entre la poire et le fromage et qu'il s'agit d'un désir irrépressible… Les accroches sont incisives et changeantes et les chutes parfaites à chaque fois. Histoires de hautes et basses consommations, comme "Date limite ", ivresse à l'eau de glacier ou "La Tourte", pleines de mauvaises odeurs et de remugles variés (« le souvenir de Fred » ; « Un voisin redoutable »), de fantasmes de maris jaloux (« le sixième commandement ») et d'hystérie masculine incontrôlable (« Testament d'un homme trop aimé", une variation narcissique moderne à la testostérone). On « monte » allègrement et sans vergogne – grimpettes sexuelles vigoureuses et drôles c'est rare – sans jamais vouloir descendre en marche contrairement au narrateur dans le train censé le ramener au pays natal (« Dans le train »). Ah, j'oubliais le "Tueur en série" à contre courant et juste quelques viscères et boyaux par ci par là pour la forme.

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Bartelt Franz – "Le bar des habitudes" – Gallimard / folio, 2005 (ISBN 978-2-07-034780-3)
– recueil de seize nouvelles.

Ce recueil confirme mes lectures précédentes : Franz Bartelt est un maître incontesté de la "nouvelle", ce genre littéraire si peu prisé en France.
Les récits sont brefs : dix pages pour "le bar des habitudes", moins de dix pages pour "Mauvais rêve", à peine neuf pages pour "Ma tournée" etc).
Les thèmes sont originaux, tout en étant généralement tirés de la vie courante, et sont traités le plus souvent sur un mode humoristique : "Date limite" est franchement bien trouvé, tout comme "le souvenir de Fred" (huit pages) et le "Parcours sans fautes" se relit en provoquant à chaque fois la même hilarité, même si les épouses de notaire devraient peu apprécier l'humour plutôt noir de "Tueur en série", tout comme certains voisins du "Voisin redoutable".

L'auteur possède deux talents indispensables pour écrire de si bonnes "nouvelles".
D'abord, installer une situation, un contexte percutant l'intérêt du lecteur dès les premières phrases, si ce n'est les premiers mots du récit,
ensuite, terminer par une chute décisive, inattendue, retournant la situation en une phrase, et en ce domaine, Bartelt possède une impressionnante maestria.

Ajoutons que la plupart des nouvelles contenues dans ce recueil peuvent être recommandées à un public adolescent, car aucune ne contient de ces paragraphes scabreux ou violents qui sont monnaie courante dans la littérature d'aujourd'hui.

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Ah les Ardennes.
Ah les bonnes nouvelles.
Un recueil qui a bien mérité son Goncourt.
C'est grinçant. Ça vous embarque à la découverte de petites gens qui vivent dans ces coins brumeux et méconnus de nos campagnes.
J'ai adoré l'histoire molle et le tueur en série, Lili et la date limite et le voisin redoutable et le testament.
En fait, je les ai toutes aimées. Un peu moins celle avec le train.
Les autres, c'est comme un très bon album de musique : on hésite toujours entre plusieurs chansons pour désigner sa préférée.
Que ce recueil vous donne envie d'aller dans les Ardennes. C'est beau les Ardennes quand le brouillard se lève. Les boucles de la Meuse qui scintillent comme un miroir au levée du jour, le charme de Monthermé et des quatre fils Aymon, les sangliers, le boudin (de Rethel), et le fort de Givet, petite ville perdue au milieu des belges. Oups, je viens de faire une poussée de nostalgie.
Alors, faut-il le lire ? Oui. Et partir en week-end dans les Ardennes, françaises et belges.
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Un style intelligent au service de la distance et de l'humour. Un très bon recueil de nouvelles.
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Je ne connaissais Franz Bartelt que de nom,et le savais très attaché à ses Ardennes.Mais les nouvelles du Bar des habitudes,si elles se passent dans une ville ardennaise,on ne peut pas ne pas penser à Charleville,tant honnie par Rimbaud,vont bien au delà de la vallée de la Meuse.Des petites gens,souvent un bistrot,des hommes et des femmes sans importance.Une petite musique parfois cocasse,parfois désespérante.Un peu de bière qui illumine,un peu trop de bière qui abrutit,des personnages au destin proche du vide et qui la plupart du temps finit par y sombrer.Un bel auteur loin de la scène mais qui conte des bouts de vie pas terribles,infiniment proches.Et la nôtre de vie,terrible?Et quel titre,Le bar des habitudes,si dérisoire,si peu engageant.Et pourtant la vie...
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Se prendre d'affection pour un tueur en série de femmes de notaires, qui pousse le crime à se considérer comme un artiste, qui aime à éveiller l'âme des foules, être considéré pour ses oeuvres et non plus des cadavres, être reconnu pour son talent. Et, le jour où il décide d'innover un peu, il n'est plus reconnu. C'est la grosse déprime, il lui faut remettre son ancienne technique au goût du jour.

Un couple aussi mou que le canapé dans lequel ils passeront mollement l'éternité, juste après que la télé a agonisé d'avoir éclairé 24/24h leurs pupilles et leurs paupières.

Une carrière de chanteuse, une vie brisée net par une simple couverture de magazine sur laquelle figure le nom de jeune fille de la star, nom qu'elle avait fui de tout son être

Un train qui n'en finit pas d'arriver à destination, encore faut-il en avoir une, de destination, tout du moins la fin de l'histoire

Que de destins d'inconnus, d'individus en apparence banals, au quotidien routinier, rouillé, voire triste, usé, et qui volent en éclat au moindre choc, au moindre mouvement inhabituel du temps, des éléments. Nouvelles aux allures de roman, elles se lisent sans discontinuer avec une facilité déconcertante. C'est surtout que, au fil des pages, l'on se demande si l'auteur va pouvoir faire encore mieux à la prochaine...

Encore un auteur à suivre, qui vous mène par le goût des mots et surtout par une imagination débordante, et contagieuse. Affreusement burlesque..


Lien : http://www.listesratures.fr/..
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Avez-vous comme moi, un café où vous aimez passer quelques heures?
Vous savez, ces lieux où les visages vous sont familiers; où les serveurs savent ce que vous allez commander.
Un endroit où il fait bon lire, au milieu du bruit ambiant et des volutes de cigarettes? Franz Bartlet réunit dans ce recueil seize histoires, dont certaines parlent de ces endroits typiquement français.

Le bar des habitudes est en fait le titre de la première nouvelle de ce livre : Balmont entre comme tous les matins dans le troquet de son quartier. Mais ce matin-là, rien ne se passera comme à l'habitude.
Mauvais rêve : Malone se surprend un matin à avoir envie de tuer sa femme. Cette envie est si intense qu'il a peur pour elle.
*
Ma tournée : Nadège est serveuse. Un jour elle voit l'homme de sa vie entrer dans le bar.
*
La tourte : alors que toute la famille est attablée pour déguster la tourte, un SDF entre dans la salle à manger.
*
Date limite de consommation : quand une jeune fille de 19 ans décide de se tatouer sur le ventre "date limite de consommation" avec la date d'anniversaire de ses 50 ans.
*
Histoire molle : à quoi ressemble la vie d'un couple de mous?
*
Le souvenir de Fred : En allant chercher son pain comme tous les jours, Tony croise son ami Fred. Mais celui-ci a changé, sa peau est devenue noire comme de l'ébène.
*
Un parcours sans fautes : c'est l'histoire de Mme Belvaux, dont le mari, professeur de français, la reprend sans cesse sur son élocution.
*
Lili : Lili n'aime pas son nom. Elle fera tout pour en changer.
*
Un mauvais joueur : Protone aime bien aller dans les bars et lancer des paris sur son poids. Qui devinera, à cinquante kilos près, combien il pèse?
*
Tueur en série : et si c'était une vocation, comme plombier ou dentiste? Si on ressentait le même amour du travail bien fait?
*
Le sixième commandement : quelle peut-être l'issue pour un époux terriblement jaloux?
*
Dans le train : un homme prend le train pour retrouver sa région natale. Mais le train roule et ne s'arrête jamais.Testament d'un homme trop aimé : tout est dit dans le titre.
*
Un voisin redoutable : Pedro est au désespoir, de nouveaux voisins viennent de s'installer à côté de chez lui, et ils sont aussi stupides que fachos.
*
Ta tête d'assassin : Jeff aime bien faire sa tête d'assassin pendant les repas de famille. Cela amuse ses neveux et nièces. Mais jamais il n'aurait imaginer jusqu'où cela pourrait l'emmener.
*
Ce sont des récits très différents les uns des autres: tendres, cruels, drôles, réalistes, surnaturels... Pourtant toutes ces histoires ont en commun le grain de sable qui vient enrayer la machine. Comment réagit-on quand l'inatendu frappe à notre porte?
*
L'écriture de Franz Bartlet est très simple, épurée, au service de ses personnages et histoires. Ma lecture s'est faite en apesanteur, hors du temps, avec un sentiment d'irréalité et de bien être.



Dans les rades du Nord, mieux que chez soi




Franz Bartelt fait basculer le quotidien et livre seize nouvelles douces et décalées.
Au Bar des habitudes, il suffit d'un détail pour que tout se grippe et glisse dans la confusion: une cliente qui n'est pas à l'heure, un homme refusant de quitter le zinc, un absent pour faire le quatrième à la belote coinchée.
A la maison, même topo. le mari se met à rêver qu'il tue sa femme, et les années de mariage sans le plus petit nuage se transforment en minutes de cauchemar. Un clochard joue les invités surprises dans une famille bien sous tous rapports et c'est l'hallali.
En seize nouvelles, Franz Bartelt découpe ainsi le quotidien, le pousse dans ses retranchements, joue sur un mot, un sentiment, une situation et plonge dans l'incongru, dans une dérive qui fait tomber les masques, comme s'il faisait du saut à l'élastique avec ses personnages pour s'en rapprocher, s'en éloigner, s'en rapprocher encore.


Qu'il écrive des romans, des récits, des textes courts ou des polars, Franz Bartelt reste un oulipien du fantastique, un obsédé du minuscule comme ces piliers de bar qui s'installent dans le même coin obscur, se font oublier des pékins facilement envapés pour surprendre les nouvelles du dehors.
Dans les bistrots du nord de la France où l'écrivain a ses quartiers, il croise des couples mous qui s'abandonnent au plaisir, meurent comme ils respirent, dans un double contentement muet. Un jour, il prend un train qui mène à ses souvenirs d'enfance mais ne s'arrête à aucune gare convenue.

Plusieurs fois, Franz Bartelt a mis ses pas dans ceux des poètes. Il a suivi Verlaine et Rimbaud dans des paysages d'Ardenne où le noir et blanc est une tenue de rigueur.
Il a également accompagné l'oeuvre d'André Dhôtel dans un texte quasiment initiatique (Aux pays d'André Dhôtel, aux éditions Traverses).
De toutes ces influences, il a fait son miel, le nez dans la mousse de bière et les yeux dans les nuages. Désormais, le bar des habitudes est un lieu de rendez-vous obligatoire, le détour nécessaire pour passer de l'autre côté d'un miroir un peu piqué, celui que l'on scrute les soirs de solitude: il vous renvoie votre visage, juste derrière le comptoir, quand on se dit qu'il faudrait prendre le chemin du retour, rentrer chez soi, là où personne ne vous attend. (lire)
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Hélas je suis sévère avec FB mais ayant bien apprécié quelques romans, ces petits morceaux de vie sont tellement inégaux en qualité que je ne le retrouve pas. Les quelques lignes de plaisirs et de bons mots ont du mal à cacher la gène de nombreuses autres. C'est parfois tellement mal écrit ou niais que j'aurais pu l'écrire moi-même, c'est dire. On pourrait aussi croire que ces petites choses furent écrites sous l'empire d'un état mais dans ce cas, qu'a fait l'éditeur lors de sa relecture ? Ah oui, il devait en tenir une bonne aussi ! Santé Franz, au plaisir de se recroiser dans des bars mieux fréquentés !
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16 nouvelles savoureuses et souvent colorées d'un humour triste ou, si l'on préfère, tendre. Quand l'imprévu vient modifier le cours d'une existence... On lit ces nouvelles avec jubilation.
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Je vais enfoncer des portes ouvertes, mais être publié chez Gallimard est tout de même, quoi que l'on pense du petit et consanguin monde de l'édition, gage de qualité.

Alors, quand le noir s'allie au Gallimard, il y a peu de chances que cela me déplaise, surtout lorsque mon cousin avec lequel je partage de nombreux goûts me dit que cet auteur est hallucinant, j'y vais la fleur au fusil.

Allez, on pourra juste arguer que c'est un chouia inégal, un chouia hein (le moins bon étant déjà extraordinaire), et puis affirmer haut et fort que Bartelt est aussi un brillant novéliste, comme s'il avait besoin, en plus, de cela...
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