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Critique de LoupAlunettes


Une vraie surprise.
Sous sa couverture plutôt légère, romantique et romanesque, l'aventure de Pauline Bordier charmera d'autant plus plusieurs publics par son intrigue simple mais très captivante, par sa dimension historique très instructive.

Qui est Pauline?
Une jeune provinciale qui va tenir une bonne place dans un grand magasin de prestige pour 1866.
Son départ de la Normandie vers la capitale va être pour Pauline une montée inattendue dans l'échelle sociale, la bonne société.
C'est aussi l'excuse pour l'auteure( on lui pardonne, c'est vraiment bien!) pour raconter la révolution d'une époque pour tous les foyers parisiens, copiant de fait un magasin parisien de "légende"dont elle a modifié le nom, "Au Bon Marché" pour " À l'élégance parisienne", la couverture et les adresses citées dans le livre ne détrompent pas.

C'est autour donc de ce magasin et ses idées de vente surprenantes pour son époque, sa dimension paradisiaque de terre d'abondance du beau produit industriel bon marché, que vont s'articuler les aspirations professionnelles, les inquiétudes et les différentes rencontres de Pauline, 16 ans, jeune fille responsable ayant à charge sa petite soeur Ninon, 6 ans.
Sa soeur cadette, Lucille, aura l'âge requis pour trouver un travail et une place à 14 ans dans un autre endroit, elle sera l'héroïne d'un titre dédié.
Pauline a appris à lire, écrire, a profité d'une excellente éducation mais comme bon nombre de jeunes filles de son époque, dans la fiction, a dû commencer à travailler très tôt, se rôdant à la vente dans le commerce familiale des parapluies, un destin tout tracé.
Ne souhaitant plus être une charge pour la famille de son oncle déja bien nombreuse, elle part du Havre, reconnaissante, avec ses soeurs sous le bras.
Son autre objectif sera de trouver un bon travail qui puisse lui permettre de placer Ninon dans une excellente école, lui assurer un avenir de choix.
Si elle grimpe vite dans les rangs de sa profession, les sacrifices se trouvent d'une rigueur implacable. Sa promotion prestigieuse comme seconde du rayon " Confection" l'oblige à choisir entre sa carrière et sa vie de famille, sans tergiversation.
Les employées doivent être célibataires et de bonne réputation, l'un n'allant pas sans l'autre ici pour les vendeuses, critère d'une employée sérieuse, peu frivole et dévouée.
Pauvre destin de vendeuse au paradis de "L'élégance parisienne"!
Pauline va oser suggérer des idées, bravant l'autorité jalouse de Mme Laurent, peu charitable avec les provinciales jugées très naïves. Elle va aussi bon gré et surtout malgré tenter de cacher sa petite soeur dans sa loge au détriment du règlement car la nourrice est malade. Ce qui va lui causer des ennuis sérieux. Elle va se refuser à contre-coeur à la déclaration de Gaspard, chauffeur à "L'élégance parisienne", pour ne pas salir sa réputation en amourette légère et s'offrir toutes les chances de placer Ninon en épargnant de l'argent. le garçon est tout ce qu'il y a de plus sincère mais il n'est pas aisé de faire taire les commérages, les lecteurs le verront à plusieurs reprises.
Pauline fera l'objet des sujets de quolibets dans tout Paris malgré elle et douloureusement.

Sans jamais trop en faire, l'auteure nous émeut avec cette jeune provinciale de courage, au caractère simple mais déterminé. Les moeurs de l'époque devaient être, on l'imagine bien, à l'image de ceux décrits et la comparaison, l'évolution avec notre réalité devrait aussi faire réagir les lecteurs, de la surprise à la consternation. Mais c'était ainsi, un autre temps.
Cet autre temps est en outre merveilleusement planté par l'écriture et les dialogues de Gwenaële Barussaud, de la verve pointu snob de Madame Laurent à la gouaille populaire de la tante de Pauline.
Les jolies restitutions des décors en descriptions précises contribuent aussi énormément, les rues, l'offre pléthorique déballé du magasin, les différentes étoffes chics des vêtements, cela nous replongent bien dans un sentiment de fascination devant ce Paris élégant où tout semblait possible de posséder, d'acheter.
Dépenser et vous posséderez.
Un véritable "El Dorado" pour ces petites gens. Non pas un rêve américain mais un bien français, qui développait aussi nombre de nouveaux emplois par ses nouvelles idées.
Le moyen d'obtenir un excellent travail bien payé ou de bonnes références professionnelles.
Un rêve pour tous en apparence toutefois, puisque quelques personnages, comme le petit Simonin et ses ânes, nous donneront le pendant d'une catégorie encore bien miséreuse et sans le sou. Mais ce petit-là aura bien plus de chance, grâce à Pauline.

Ce roman est vraiment à découvrir pour les ados comme les parents.
Ancrée dans un réel pas si lointain, l'aventure de Pauline reprend un peu le thème de Zola avec son "Au Bonheur des Dames".
C'est une inspiration à une histoire de Paris dont les fondements sont encore un peu érigés fièrement sur place, entre la Rue de Sèvres et la Rue du Bac.
Cela donne envie de partir se promener du côté de la Rue de Sèvres...
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