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Une lecture envoûtante, quelque peu étrange où le lecteur est pris par les récits inachevés.
J'étais prise dans ma lecture dont l'écriture est très belle, prenante et là, bien installée dans le premier récit la phrase se coupe nette, on passe à un autre récit. Étrange oui mais pas dérangeant car ces histoires racontées qui n'aboutissent jamais, comme des paroles suspendues, où l'on avance avec les personnages, tous membres du Parti, tous décédés, dans l'obscurité de la mort, éclairés par la flamme en combustion de la main de Goodmann.
Pas facile de faire cette critique le mieux pour découvrir ce roman est de s'y plonger.
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Illuminer la noirceur.


«Les mots ont le pouvoir d'illuminer la noirceur». Cette célèbre phrase de la correspondance de Samuel Beckett semble épouser parfaitement la nouvelle oeuvre de Lutz Bassmann, «Black Village», paru le 24 août aux éditions Verdier. Les narrateurs du post-exotisme prennent la parole dans des conditions de tragique extrême, prisonniers d'un espace indéterminé, entre vie et mort. «Black Village» débute lorsque Goodmann, qui progresse difficilement et lentement après son décès dans l'espace noir en compagnie de Myriam, Tassili et du narrateur, décide d'allumer une flamme incertaine.

«Très lentement, Goodman fit de la lumière. Il avait sur lui des poudres et des graisses qu'il avait transportées depuis plusieurs années au fond de ses poches, les protégeant de la pluie et de la poussière et jamais ne les échangeant contre de la nourriture même dans les cas de faim extrême. Il les avait préservées du naufrage en prévision de ce moment où l'obscurité ne nous serait plus supportable, et depuis le début du voyage des années plus tôt, il nous en parlait.» (Noir I)

L'éclat fragile de cette petite flamme permet à Goodmann, Myriam, Tassili et au narrateur de se voir à nouveau, après un laps de temps incommensurable passé dans les ténèbres, de se questionner sur l'écoulement du temps qui semble avoir perdu sa continuité, et dont la seule caractéristique permanente semble à présent être l'inachèvement. La lumière permet à la parole d'advenir et aux récits de commencer.

La suite sur mon blog ici :
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Black Village signé Lutz Bassmann est le 42ème opus du mouvement post-exotique formé, outre l'auteur déjà mentionné, par Antoine Volodine, Elli Kronauer, et Manuela Draeger. Quatre voix mais un seul corps. On retrouve dans Black Village les images et les notions familières aux lecteurs de Volodine.

La quatrième de couverture recopiée plus haut décrit si parfaitement l'entame de ce livre que ce n'est pas sans scrupules ni un douloureux sentiment de ne pas pouvoir mieux faire que je me lance dans ce qui ressemble fort à une redite, pas inutile néanmoins si vous souhaitez vous contenter de lire ma critique. Trois personnages se retrouvent après leur mort dans le Bardo, si souvent présent dans les romans post-exotiques. le Bardo est cet état intermédiaire entre la mort et la réincarnation qui dure quelques jours chez les Tibétains mais beaucoup, beaucoup plus longtemps dans Black Village, malheureusement pour les trois personnages qui s'y retrouvent dans une obscurité presque totale.
Le temps n'est plus ce qu'il était dans le monde des vivants. Pour essayer d'en retrouver le contrôle ou du moins la mesure, les trois personnages décident de se raconter des histoires. Ce sont de courts récits (des ‘narrats dans la terminogie post-exotique) et même des ‘interruptats' car les caractéristiques de la dimension temporelle dans le Bardo, fort capricieuse, sont telles qu'il est impossible de mener une narration jusqu'à son terme. Les récits restent à l'état de fragments, brutalement coupés, que le lecteur est invité à compléter à partir du riche matériau généreusement fourni par l'auteur.

Ces narrats/interruptats au nombre de 31 constituent l'essentiel du roman. Celui-ci est construit en 35 chapitres dont 31 d'interruptats, organisés autour du chapitre central (le 18ème). A l'image d'une construction architecturale parfaitement symétrique, les chapitres placés de part et d'autre du noyau de rang 18 se répondent. Quelques exemples pour ne pas perdre les lecteurs que mes explications confuses désemparent : le chapitre 16 (fusillade 1) fait écho avec le chapitre 20 (fusillade 2) avec les mêmes personnages et une forte similitude entre les deux scènes, le chapitre 6 (Clara Schiff 1) fait écho avec le chapitre 30 (Clara Schiff 2) avec un même personnage, un même cadre (un train) mais deux scènes fort différentes, le chapitre 32 (Sarah Agamemnian) est un récit dans lequel le personnage finit par rencontrer le personnage du chapitre 4 (Fischmann) Parfois les résonnances entre les deux récits mis en miroir sont moins explicites et plus ténues. Les chapitres périphériques 1,2, 34 et 35 sont en quelque sorte les fondations de l'ouvrage et ont pour cadre le Bardo.

Les histoires racontées par les trois personnages sont formées à partir de souvenirs, de rêves, d'hallucinations, de leurs obsessions et de leur imagination. On retrouve là les caractéristiques habituelles de la littérature post-exotique. Je pense ici à une citation de Paul Ricoeur : « nous devons sans cesse raconter nos histoires » et il serait intéressant d'analyser l'oeuvre de Volodine à partir de la pensée du philosophe, même si celui-ci utilise les concepts de symbole et de métaphore que ne revendique pas du tout la littérature post-exotique. A partir de ces récits, comme s'il essayait d'interpréter des rêves, le lecteur peut se faire une idée de la réalité vécue par les personnages, en démêlant ce qui relève du réel et ce qui relève de l'imaginaire. On peut imaginer quelles étaient leur activité : agents de services secrets, militants clandestins d'un parti révolutionnaire, terroristes, tueurs ? La réalité à laquelle il est fait référence est très souvent celle des grands traumatismes historiques du XXème siècle (pogroms, guerres, camps), de l'échec des révolutions dans leur tentative de se débarrasser d'un capitalisme monstrueux. Néanmoins, dans Black Village, l'arrière-plan historique me semble plus contemporain que dans d'autres romans de Volodine : nous sommes désormais loin du soviétisme et des camps de concentration mais plus proches des camps de réfugiés et du désastre écologique.

La tonalité est évidemment très onirique mais je trouve que l'onirisme fantastique s'accompagne toujours d'un hyperréalisme dans la technique d'écriture, qui rend le texte très efficace dans sa capacité à y plonger le lecteur. Mention spéciale au traitement des (mauvaises) odeurs et de divers fluides – prendre une douche après avoir refermé le livre !

On peut se demander ce qui différencie la voix de Lutz Bassmann des autres voix post-exotiques. Volodine revendique une référence au cinéma et ses romans génèrent souvent des images que l'on croirait sorties d'un film. Ils renvoient à notre culture visuelle commune issue du cinéma, à des archétypes. Avec Black Village, j'ose dire que l'on se trouve souvent transporté dans un univers un peu à la Tarantino : univers de violence dans lequel les tueurs jouent le premier rôle, d'humour noir d'après le désastre, de film d'action à rythme rapide où les personnages passent d'une scène à l'autre sans transition.

Et pour illustrer la notion d'interruptat, je dirai en forme de conclusion que
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Chronique complète à lire sur le site.

Tassili, Goodmann et Myriam, membres du Parti et poètes désormais décédés, avancent dans l'obscurité de la mort, éclairés par la flamme vacillante procurée par la lente combustion de la main de Goodmann. Ils ne discernent pas le décor qui les entoure et cheminent sans fin – peut-être sans but – dans un temps qui leur échappe. Ils n'ont pour « repère matériel que celui de la parole » et décident « de planter des balises verbales dans la matière fuyante et sombre dont [est] construit le temps autour [d'eux] ». Chacun leur tour, ils content une histoire (fiction ? souvenir ? rêve ?) qui n'aboutit jamais, coupée par une rupture dans la linéarité du temps.
Lien : http://www.undernierlivre.ne..
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Merci à Babelio et les éditions Verdier pour cet ouvrage.
Lorsque je l'ai sélectionné, j'ignorais que Bassmann était un hétéronyme d'Antoine Volodine, dont j'ai tout particulièrement admiré son "Terminus radieux", pur chef d'oeuvre.
La présentation de l'éditeur est trompeuse, on pense suivre 3 personnages dans un lieu étrange après la mort, mais en fait, cela ne dure que quelques pages. de suite on se retrouve dans de courtes histoires de 4 à 6 pages, se terminant abruptement au milieu d'une phrase.
On pourrait se représenter un archéologue qui retrouverait des anciennes photos, jaunies, en partie déchirées ou abîmées, ou des morceaux de films, dans des projecteurs défectueux qui les brûlent au beau milieu d'une action. Les archéologues ne sauraient pas de quelle époque il s'agit, ni de la durée écoulée entre ces précieux trésors de la mémoire, ni l'ordre dans lequel les classer.
Fragments d'images, fragments de poésie, images d'espoir dans le désespoir, volonté du souvenir, de fixer le temps, de subsister un instant encore, ne plus se débattre dans les ténèbres.
Ces courtes histoires, comme des taches de mémoire composent cependant un tableau d'une Terre future, en Russie ou approchant, le monde est en guerre civile, après plusieurs soviets, des luttes contre les capitalistes, les anarchistes, la destruction d'un peuple, les Ybürs.
Comme toujours chez Volodine on parle de mort, de survie après la mort. Tout est noir dans le livre (quand Volodine est d'humeur joyeuse, on arrive à avoir du gris), il pleut très fort, la chaleur est accablante, une mystérieuse organisation fait régner la terreur, quelquefois avec des oiseaux géants qui ressemblent aux humains et se comportent comme eux. Bien sûr, il y a des camps, la faim, le froid, les privations, les exécutions.
Bref, un livre étrange, un patchwork où lorsque l'on avance dans la lecture on se fait une vague idée du monde, sans cependant ne jamais le comprendre. Une histoire qui pourrait être cent fois répétée, un peu comme un mantra, mais en changeant de point de vue constamment. le livre est hypnotique et on a du mal à s'en détacher, il n'arrive cependant pas à concurrencer "Terminus radieux", chef-d'oeuvre de Volodine.
Je ne pourrais pas le conseiller à ceux qui n'aiment que le rationnel, avec des histoires bien construites, il satisfera par contre ceux qui sont attirés par une poésie noire, par une atmosphère et qui accepteront de ne pas tout comprendre et se laisseront bercer par ces fulgurances de l'auteur.
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Avec ce livre, j'ai effectué ma première incursion dans le post-exotisme, ce sera le début d'une longue série de lectures. J'ai donc aimé ce roman mais chose curieuse, je peine à l'expliquer (clairement, simplement du moins) : il y eut de l'étonnement, de l'angoisse, du désespoir, du « c'est horrible mais le pire c'est que ça pourrait arriver », et chose plus étrange, une sorte de détachement et des sourires face à une violence si banale et absurde en même temps.

Dans ce « Black village », il y a des êtres dans le noir le plus total, des êtres peut-être vivants, peut-être morts, cela ne semble pas avoir d'importance. Il y a des oiseaux à taille humaine. Il y a beaucoup de meurtriers, d'armes et de sang. Il y a cette vie d'après la catastrophe, ce monde dévasté et les survivants qui paraissent n'avoir d'autre but que de s'entretuer (ou de sauver leur peau, c'est la même chose). Il y a donc cette normalité de la violence qui force à l'acceptation et finalement au rire… un peu du moins, le désespoir pouvant se transformer en humour.
Lien : https://etsisite.wordpress.c..
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Lutz Bassmann, c'est le combattant du post-exotisme. Personnage discret - mais néanmoins important -, il est l'auteur de cinq romans parus chez Verdier, qui frappent tous par leur forme singulière. Depuis 2008, Antoine Volodine est son “porte-parole” officiel. Dans Black Village, l'obscurité semble avoir englouti l'humanité toute entière. Éclairés par une flamme vacillante, Tassili, Goodmann et Myriam progressent ensemble dans cet espace incertain, noir et discontinu. Pour tenter de poser des repères au coeur des ténèbres, ils se racontent des histoires. le lecteur chemine alors au fil de trente et un récits ou “narrats” - des instantanés de prose - qui ne cessent de s'interrompre en des moments cruciaux, devenant ainsi des ”interruptats”. Entre rêve et cauchemar, ces fragments de visions nous disent une chose : si la catastrophe a bien eu lieu, nulle fin n'est prévisible. La résistance reste obstinée.
Lien : https://balises.bpi.fr/litte..
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« Black village » de Lutz Bassmann alias Antoine Volodine vient ajouter une nouvelle pierre à l'édifice du ‘post-exotisme', mouvement littéraire ou plutôt espace-temps commun à l'oeuvre de cet écrivain singulier, qui avait remporté en 2014 le prix Médicis pour « Terminus radieux ». Comment d'ailleurs ne pas faire le parallèle entre les trois êtres reclus qui racontent des histoires dans ‘Black Village', et les voix multiples de Volodine qui emprunte diverses identités pour signer depuis plus de vingt ans une oeuvre polymorphe, mais très cohérente?
Après leur mort, Tassili, Goodman et Myriam sont enfermés dans l'obscurité et pour ne pas perdre la notion du temps, ils se racontent des histoires, probablement inspirées de leur passé d'activistes, qui toutes, naissent d'une trame commune et retournent brutalement au néant, interrompues.
On retrouve dans ce livre bon nombre de thèmes récurrents chez l'auteur: enfermement, échec des révoltes et toute-puissance des autorités, misère et solitude individuelle. Cependant, malgré l'atmosphère oppressante de cet univers post-apocalyptique, le style très maîtrisé de l'auteur, mêlant mystère, drôlerie, poésie et noirceur rend la lecture très agréable; de plus la structure en miroir (34 textes ‘jumeaux' se répondent autour de l'axe central du chapitre 18) nous met dans la situation des narrateurs, en nous forçant à nous souvenir, à revenir en arrière. J'ai aimé ces interruptions brusques des ‘narrats' (rebaptisés ‘interruptats'), qui laissent le lecteur libre d'imaginer à son gré la suite des histoires – à moins que la fin n'aie déjà été énoncée quelques lignes plus haut, et que ces phrases brisées en plein vol ne soient que des chausse-trappes destinées à nous perdre ? Les noms des personnages résonnent comme des percussions et mériteraient une analyse à eux seuls : Sabakaïev, Kurkovian, Klokov, Sasha Yomoshiguine…et que penser de ces étranges oiseaux survenant en contrepoint de ce récit polyphonique ?
Afin de poursuivre, cliquez sur le lien !
Lien : http://bit.ly/2Aab6wG
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A travers un assemblage d'interruptats sans queue mais pas sans tête, Antoine Volodine (alias Lutz Bassmann) poursuit l'exploration du monde soviétique post-apocalyptique et onirique, pas vraiment dans la vie et pas vraiment dans la mort, qu'il construit depuis plusieurs années.
Chaque histoire nous laisse sur notre fin, nous abandonne alors que quelque chose va se produire. Au début ça agace, et puis on se laisse engloutir. On finit immergés dans cet univers poétique, et à la fin il faut bien reconnaître que
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Je dois lire ce livre pour mes cours car on travaille sur la Rentrée Littéraire de septembre 2017. On nous a présenté une liste de livres et avec mon groupe, nous nous sommes mises d'accord sur celui-ci.

Je ne sais même pas comment le décrire tellement ce livre est particulier. On y parle de la mort, du temps qui passe, le genre post-exotisme. On rencontre beaucoup de personnages particuliers, singuliers…

J'ai eu extrêmement du mal à lire ce livre et du coup, j'ai pris mon temps, lu chapitre par chapitre et j'ai compris qu'à la fin le pourquoi du livre.

C'est un livre assez compliqué et particulier à lire. On ne sait pas vraiment où on va, on change de personnage à chaque chapitre, certains reviennent plus tard, d'autres non.

Je ne sais pas comment en parler, je ne sais si je l'ai aimé ou pas, je suis vraiment mitigée sur ma lecture.

Voilà voilà ^^

Je suis aussi allée rencontrer l'auteur lors d'une dédicace dans une librairie parisienne avec les filles de mon groupe. Lutz Bassmann a parlé de son oeuvre pendant une heure et cela m'a permis de mieux apprécier le livre.

Lien : https://mathildelitteraire.b..
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