Emmanuelle Arsan

Inspiré d'un roman sulfureux sorti en 1959, le film « Emmanuelle » raconte le séjour d'une jeune femme très libérée à Bangkok et ses aventures sexuelles aux côtés de son mari. Dès sa sortie, ce long métrage a provoqué une déflagration sociale en devenant phénomène de société pour devient LE film francophone à voir à la fin absolument. La sortie du film « Emmanuelle » s'est avéré une telle réussite que de nombreuses suites ont été tournées. Ce succès est dû à plusieurs paramètres. D'abord une autrice qui a longtemps été tenue dans le secret d'un anonymat souhaité pour éviter des problèmes avec la justice pour motif d'outrage aux moeurs, une ambiguïté savamment orchestrée autour de sa personnalité puis une série de questions qui se sont posées concernant sa véritable implication dans l'écriture puisque plusieurs personnes se sont mises à affirmer qu'elle n'était pas celle qui écrivait vraiment et qu'elle servait uniquement de prête-nom. Puis, il y a eu la révélation Silvia Kristel, une actrice sortie des cartons et qui a irradié sur la toile durant une décennie avant de connaître une lente descente au purgatoire. Ce petit livre ne juge pas le film ni ceux qui l'ont mis en chantier ainsi que le roman. Il se contente de revenir sur le phénomène de librairie qu'il a suscité et son succès fulgurant dans les salles obscures. La seconde moitié des années 70 a vraiment été celle d'Emmanuelle, icone qui suscite toujours des engouements et des fantasmes et que la jeunesse actuelle a souvent du mal à saisir parce qu'incapable de se plonger dans une époque moyennement lointaine. Presque cinquante ans, cela équivaut presque à deux générations !

Le roman Emmanuelle traînait dans ma bibliothèque depuis des lustres, car l'envie de le lire n'était pas vraiment là alors il prenait la poussière. Finalement je me suis décidé à le lire, plutôt pour m'en débarrasser que par réelle envie. Je ne le fais jamais habituellement mais cette fois-ci j'ai lu quelques avis au sujet de ce roman avant d'écrire mon avis. Comme je m'y attendais, les avis sont partagés mais j'ai été interpellé par les critiques négatives. La plupart du temps, l'opinion négative des lecteurs vis-à-vis du roman tenait au sujet même du récit, à l'aspect très libre de l'héroïne. Puis, pour parfaire mon avis, j'ai acheté ce petit livre sorti chez Lamiroy pour mieux comprendre. Finalement, il y a énormément d'incompréhension sur cet ouvrage que certains trouveront choquant. Quant aux fantasmes d'Emmanuelle, ils ont été banalisés au cinéma et sont même assez répandus. Si mes attentes d'émois sensuels n'ont pas été totalement comblées mes attentes littéraires l'ont été encore moins. Car oui, j'avais aussi des attentes littéraires vis-à-vis d'De cet ouvrage présenté comme un classique Après tout, le roman, s'il a été éreinté par certains en raison de son sujet, a globalement plutôt une bonne réputation auprès des amateurs. Je n'ai pas du tout été séduit par l'écriture en tant que telle, puisqu'elle n'est selon mes critères jamais vulgaire, c'est là la seule qualité littéraire que je lui trouve, mais reste en dessous de tout en ce qui concerne le récit. Une femme rêve de s'envoyer en l'air et succombe à Bee, à Mario un vieil initiateur et passe entre les mains de différentes personnes à laquelle elle a été offerte, avant de regagner le giron conjugal. En dehors de ça, c'est à peine un roman, le pire étant le côté stéréotype des personnages.

A l'origine, il y eut un livre, Emmanuelle (1959), publié par le frondeur Eric Losfeld, écrit par Emmanuelle Arsan, le pseudonyme de la Thaïlandaise Marayat Bibidh, devenue Marayat Rollet-Andriane par son mariage avec un diplomate français. Selon les uns, elle l'aurait écrit seule ; pour d'autres, il aurait été rédigé à quatre mains, voire exclusivement par son époux. Au début des années 1970, une période encore coincée mais qui se libère, Yves Rousset-Rouard tente, pour ses premiers pas dans le métier de producteur de cinéma, de « faire beaucoup d'argent avec un petit financement ». Il veut acheter les droits d'adaptation du livre, mais ils sont déjà réservés par les frères Robert et Raymond Hakim, deux grands noms de la profession. Par chance, ceux-ci n'ont pas prorogé la période de préemption. Rousset-Rouard engage Jean-Louis Richard, coscénariste de François Truffaut, et charge de la réalisation le photographe Just Jaeckin, dont il a vu et aimé les images. le hasard les fait tomber sur la jeune Hollandaise Sylvia Kristel, encore inconnue, « un grand échalas blond » à la fraîcheur et au naturel séduisants. Un petit livre bien écrit qui revient sur celle qui a donné naissance au plus grand fantasme du cinéma hexagonal !

Paru pour la première fois en 1965 de manière anonyme et sans mention d'éditeur, le roman ‘Emmanuelle' a été réédité deux ans plus tard aux Editions du Terrain Vague, gérées par Eric Losfeld. En quelques années, les ventes ont explosé, poussant jusqu'à 10000 exemplaires écoulés. Comment expliquer ce succès ? Incombe-t-il seulement à son caractère érotique ? Ce qui entraîne la question de définir l'érotisme. le roman compte 135 pages et est dominé par le personnage tutélaire de Mario, qui transforme ses désirs en raison de vivre. Ce dernier se charge d'initier la jeune femme et de l'ouvrir à l'amour sans aucune restriction, suggérant des thèses essentielles au libertinage. La philosophie de Mario se base sur le rationnel et la quête des sens. Selon lui, cette quête se situe dans la recherche d'absolu si chère à tout un chacun, laissant cohabiter insolite, singularité et attraction charnelle. L'érotisme en devient l'expression de la société, avec ses valeurs, ses codes et ses limites. du coup, Emmanuelle Arsan se fait philosophe et dote son récit de leçons de vie qui s'éloignent des textes du genre rédigés par ses consoeurs et confrères. Voilà sans doute une des nombreuses raisons du plébiscite de cette intronisation dans l'univers des plaisirs d'une oie blanche appelée à devenir amante et maîtresse de sa vie autant que de ses pulsions. Emmanuelle, bien sûr, plus qu'un prénom !

Autrice qui s'affuble de différents noms, elle est surtout connue pour avoir créé le personnage d'Emmanuelle, si bien incarné à l'écran par Sylvia Kristel. Elle commence sa carrière avec un véritable succès littéraire, un roman pseudo-autobiographique et érotique paru chez l'éditeur Éric Losfeld. Véritable succès planétaire, il est néanmoins interdit par les ciseaux de la censure. Polémique sur cet ouvrage, elle n'en serait pas l'artisane, mais son mari féru de belles lettres. D'autres titres sont ensuite écrits. Tous pour adultes. Elle se lance dans le cinéma avec le rôle de Maily dans la Canonnière du Yang-Tsé de Robert Wise. Elle y a la chance de jouer aux côtés de Steve McQueen et de Richard Attenborough. Elle est aussi l'auteure du scénario du film Laure, où elle intervient à la fois comme actrice et comme metteur en scène. Aux commandes, c'est pourtant son époux qui se distingue lorsqu'il s'agit de commander les technicien de plateau, de peaufiner les jeu des acteurs, alors qu'elle reste en retrait.
Emmanuelle Arsan méritait bien qu'on revienne sur son travail, qu'on s'interroge sur son identité et surtout à la part réelle qu'elle a réellement joué dans l'entreprise littéraire. Un livre qui déverrouille une à une toutes les serrures ...