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Critique de 5Arabella


C'est la seconde tragédie française imitée du théâtre antique, issue du milieu lettré parisien. L'auteur fait partie de la première Pléiade ( la Brigade) et il a même joué dans Cléopâtre captive d'Etienne Jodelle à sa création. La pièce survivra à la mort prématurée de son auteur à 25 ans, sans doute de la peste, ses amis la publieront en 1556, après sa disparition. Une représentation fastueuse est encore mentionnée en 1572 à Parthenay, avec feux d'artifices et machineries. L'oeuvre est inspirée d'Euripide, mais surtout de Sénèque, dont l'esthétique de la fureur est considérée comme définissant la tonalité tragique par excellence par les écrivains humanistes.

Le premier acte débute par les imprécations de Médée, qui appelle les châtiments divins sur Jason, sa nouvelle femme, et le roi. La nourrice l'adjoint à plus de mesure, pour ne pas redoubler encore ses malheurs. Un message vient lui ordonner de la part du roi de partir au plus vite avec ses deux fils. Les imprécations de Médée redoublent.

Dans le deuxième acte, le gouverneur des enfants est inquiet pour eux, il craint les réactions de leur mère. Survient Médée, devant ses fureurs, le gouverneur fuit avec les enfants.

Au troisième acte, a lieu la confrontation entre le roi Créon et Médée. Il se méfie d'elle, elle tente de le persuader de ne pas la chasser, de justifier en partie sa conduite. Il reste inflexible.

Le quatrième acte voit la rencontre entre Médée et Jason. Elle lui reproche sa conduite, il est sans vergogne et sans regrets. Médée ruse : elle promet d'envoyer une belle couronne à Glauque, la nouvelle épouse de Jason, pour permettre à ses enfants de rester avec leur père. Jason est enchanté de l'idée. Jason parti, Médée dévoile son plan : la couronne enflammera celle qui la porte, et tous ceux qui voudront lui porter secours. Sa vengeance est prête.

Dans le cinquième acte, le messager raconte la mort de Glauque et de Créon, ainsi que l'incendie du palais provoqué par la fatale couronne. Médée projette la mort de ses fils. Lorsque survient Jason pour venger la mort de Glauque et Creon, Médée lui jette les cadavres, et part sur un chariot ailé, en persiflant Jason.

Nous sommes vraiment dans les premières tentatives de produire des oeuvres de théâtre complètement différentes de celles qui étaient pratiquées au moyen-âge. Malgré les modèles antiques, les auteurs cherchent une nouvelle esthétique, à créer quelque chose d'original. La Péruse, comme ses amis de la Brigade, sont des hommes de lettres, pour qui le texte est le plus essentiel. Ils n'ont pas réellement de pratique théâtrale, la représentation est seconde par rapport au texte, elle peut même ne pas avoir lieu sans remettre en cause la qualité de la pièce. D'où sans doute un côté quelque peu statique, accentué par les interventions du choeur à la fin de chaque acte. Il y a une forme de répétitions dans les imprécations de Médée, qui sont un peu superposables. le personnage est tout d'une pièce, il n'y a aucun regret de la mort de ses enfants, aucune hésitation. Un peu plus intéressant, une sorte de folie prend place à la fin de la pièce, lorsqu'elle croit voir son frère mort. Glauque n'apparaît même pas, Créon et Jason sont très simples aussi, le premier dans une forme de rejet violent, le deuxième dans une sorte de veulerie, Médée ne lui étant plus utile, il prend une autre femme. Aucun amour ni tendresse ne s'expriment.

Si les morts de Glauque et Créon sont uniquement racontées, en revanche nous avons droit à la mort des enfants en direct, ce qui rapproche la pièce du théâtre romain, très friand de l'action violente sur scène. Il y a aussi un côté très spectaculaire, avec le chariot qui amène Médée. La pièce ne donne pas dans la demie mesure : entre violence verbale et physique, et le grand spectacle à machines. Nous assistons à une escalade dans la violence, dans « la fureur » c'est le moteur de la pièce. C'est un théâtre de la démesure, qui sera exclue progressivement des scènes par les conventions tragiques qui vont se construire.

Un maillon intéressant du théâtre humaniste français.
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