« Le rhinocéros qui citait
Nietzsche » est un recueil de cinq nouvelles et d'une novella fortement imprégné de fantastique et de féerie.
On y croise un vieux philosophe esseulé et que la réalité touche peu qui trouvera en la personne d'un rhinocéros indien le confident et l'interlocuteur qu'il attendait depuis longtemps (« Le Professeur Gottesman et le rhinocéros indien »).
Dans « Entrez, lady Death », lady Neville, vieille veuve blasée par la vie décide de pimenter sa dernière réception en invitant la Mort... Évidement, ce ne sera pas sans conséquence...
Avec « Lila le loup-garou », Beagle revisite ce thème classique pour se demander si dans les rapports amoureux, il est vraiment souhaitable de tout connaître sur l'autre. Est-on vraiment capable de tout comprendre et de tout accepter ?
Dans « Le Naga », sans doute la nouvelle la plus romantique du recueil, Beagle se fait le relais d'une histoire de l'antiquité qu'il aurait découverte. Il y est question du souverain du Kampuja qui se désespère de trouver l'amour, jusqu'à ce que celui-ci arrive sous les traits d'une reine nagini. Leurs destins et leurs royaumes scellés, ils avancent dans le vie heureux et leurs royaumes prospèrent. Mais cette alliance secrète ne convient pas à tous et le sort des deux amants les conduit inéluctablement vers leur fin.
La novella « Une danse pour Emilia » synthétise les différents thèmes abordés dans le recueil : le temps qui passe, les regrets, l'amour, l'espoir... la mort. Accablés par la disparition de leur cher ami Sam, Emilia et Jacob se sont rapprochés afin de pouvoir continuer à évoquer leur défunt. Aussi quelle est leur stupeur lorsque deux ans après sa mort, le chat de Sam, Millamant, se met à danser puis à parler comme le disparu. Passée la joie des retrouvailles, il ne fait aucun doute pour les trois amis (et le chat!!) que cette situation ne peut pas durer éternellement. Mais comment laisser mourir pour la seconde fois un ami ?
Au même titre que
Maupassant ou
Poe,
Peter S. Beagle amène sans qu'il s'en rende compte le lecteur vers des mondes fantastiques, légèrement en décalage avec notre réalité. Il s'éloigne pourtant ces auteurs par l'absence totale d'élément angoissant. Ici, le fantastique (ce qui génère « la folie ») ne fait pas peur, bien au contraire : il rassure, il tient compagnie, il console, il aime...
« Le rhinocéros qui citait
Nietzsche » est donc un bon petit moment de lecture : classique dans sa thématique, mais rafraîchissante dans son traitement (même si la novella aurait mérité quelques coupes).
À conseiller aux amoureux du fantastique, et aussi (sans tomber dans la caricature), aux plus jeunes, en parallèle de la lecture du Horla, par exemple.
Parce que je ne sais pas vous, mais malgré mes années de lecture, lire « Écris-moi, s'il te plaît (…) je n'ai que toi à qui parler de lui désormais. » , trouve toujours un écho...