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Citations sur Un homme louche (9)

“L’homme est né libre, et partout il est dans les fers” (ou dans le cuir pour un fétichiste).
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Il ne faut jamais décourager personne à quoi que ce soit. Il n'y a que les projets qui font vivre. Ce n'est pas tout de mettre l'homme en cage. Pour qu'il y reste, il faut aussi lui laisser faire les plans d'évasion et rédiger la notice d'utilisation. Sinon il se laisse mourir.
p.239
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Tu sais qu'avant j'allais à l'église, me dit-il. Bien sûr de temps en temps. Maintenant je vais dans la nature. Tout ce qu'il y a autour que tu vois, les arbres, les forêts, les météorites, les fleuves, tout ça c'est Dieu. Pas autre chose. Dieu, je ne peux pas lui parler, mais l'arbre si. Il me répond. Je m'allonge et je regarde les branches et les feuilles des branches. Comme ça bouge. S'il y avait un peu plus de vent dans ces putains d'églises, je te jure qu'il se passerait plus de choses.
p.239
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Je n'arrive pas à croire que la terre s'est couverte de bitume. Je voudrais faire un planisphère des traînées de goudron, des vallées d'autoroute. Une carte chaque année puis chaque mois des avancées du bitume depuis son invention. Pour mieux saisir la dimension du phénomène. Passer et repasser les machines sur la terre broyée en petits graviers. Construire des voies incultes.
Le sol ne respire plus. Comment un sol si fertile par endroits peut-il accepter pareil sort? L'homme veut nous couvrir d'asphalte. Il veut un monde lisse et propre, sans mauvaises herbes. Un monde qu'il contrôle au péage, qu'il maîtrise aux frontières. Mais les racines et les bombes vont déchirer l'asphalte. Il n'y a pas que des hommes sur cette terre, il y a aussi des voisins, des arbres, des familles, des sociétés, des ennemis.
p.178
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Depuis le temps que j'observe le fonctionnement de mes établissements scolaires, je me rends compte qu'ils s'inspirent tous directement de la grande salle d'équarrissage. Le collège est une machine à transformer des vertébrés en steaks obéissants. A réduire les élèves en un petit tas de viande à bourguignon, plaqués à des chaises en cellophane, coincés derrière un bureau en carton. Les professeurs évaluent au poids la valeur du cheptel, et goutte à goutte la sueur de nos esprits critiques. Ils ne voient pas que je suis une bombe à retardement. Toutes les armes bientôt à portée de main, mes disques bien rangés
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Grâce à mes superpouvoirs, j’entre à nouveau dans le cerveau de ma sœur et m’installe au fond d’un œil. Soudain Emma voit la terre entière. De loin. Elle est dans l’espace inconnu. Elle regarde la Terre, éclairée. Que peut-elle faire là ? se dit-elle. […]
Elle se demande comment le tout-puissant a pu lui choisir pareil bled, sous quel prétexte il a décrété que ce serait ce chalet, pas un autre, et qu’il lui faudrait partager son espace vital avec cette famille de cons ! Elle se sent défaillir sous le poids de son sort.
Dehors la pluie, les autres chalets. La joue plaquée sur la vitre froide de l’aquarium, elle regarde dans le vide. Ou bien plutôt nulle part, vers un endroit parfaitement sans terre et sans vague. Et enfin elle s’endort.
[…]
Nous sommes encore plongés dans le noir, par ma divine volonté. Je fais le jour et la nuit. Je fais sauter les plombs du monde.
[…]
J’ai allumé mes bougies et je regarde par la fenêtre. Il fait tout à fait nuit. Les voisins eux aussi ont allumé leurs bougies. Un maigre croissant de lune. Ce nouvel éclairage me remplit de paix. La douceur, l’intimité d’une flamme près du bois. Un moment de repos, de bien-être. Emma a cessé de geindre. Les gens attendent, couchés, les yeux au plafond. Ils observent les ombres. Je me dis que je devrais faire sauter les plombs plus souvent. Et pas seulement quand je n’en peux plus de sentir le monde s’agiter autour de moi, gesticuler dans le vide, vendre, acheter, se nourrir, se loger. Tout le monde devrait avoir droit à une pause, de temps en temps. S’allonger sur son lit et regarder les ombres de la bougie.
[…]
Le jour et la nuit. La lumière électrique a faussé l’alternance. Ne plus jamais disparaître. Même endormi refléter sa propre image quelque part. Vivre sa vie d’esclave du temps omniprésent.
J’entends Emma ronger sa couette. Elle n’est pas bien. Elle pagaye elle aussi dans la sève du monde. Une mer rouge harissa.
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Maman, dit Emma, sortant de sa chambre comme une furie, en soutien-gorge et culotte, les mains chargées d’habits, je ne vais quand même pas rester nue toute ma vie ?
[…]
Il m’a fallu du temps pour comprendre. Ma sœur se sert de ses habits comme de fétiches protecteurs. A mesure qu’ils sont lavés, les vêtements perdent leur pouvoir magique. Leur aura s’use. Depuis bientôt dix jours elle ne s’est rien acheté de neuf, et elle sent sa magie faiblir. Il faut qu’elle trouve un moyen de se faire financer une nouvelle jupe au plus vite, sinon elle va se faire marabouter.
[…)
« Rester branché ». Cette expression m’a mis la puce à l’oreille. Pour ma sœur il est vital de ne pas perdre le contact avec ce que j’appellerai un système d’échanges électriques complexes qui procurent à l’individu les stimuli nécessaires à son fonctionnement social.
[…]
Note : J’espère arriver à une description plus précise de ces interactions dans les années à venir, quand mon âge me permettra de m’aventurer plus au fond de la machine à broyer les êtres que la société a mise en place. Mon peu d’expérience dans la vie implique quelques erreurs d’appréciation.
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Ma mère Marise ferme les yeux. Ses paupières parfaites portent encore d’infimes traces de maquillage. Les cils entrecroisés tels les cils d’une plante carnivore après la capture. Ses souvenirs remontent. La nuit un long souvenir pour elle. Elle s’endort car demain elle sait qu’il y a tant de choses à faire, et si peu de temps pour regarder à l’envers.
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Essais de synthèse: L'homme louche est celui qui sait arrêter son regard sur l'essentiel, qui s'intéresse plus à la merde qu'au chien.
L'homme louche est celui qui regarde de si près les publicités que la trame d'impression sur le papier s'impose à lui en deçà de l'image. Il est devant un slip Dim, mais il voit des étoiles de neige, des boules de couleur mélangées dans l'espace, des atomes en désordre.
p.276
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