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Critique de Bigmammy
L'ouvrage de Daniel Beauvois n'est pas d'un abord facile. C'est un livre qui va dans les moindres détails, n'épargne aucun nom de lieu, de personnage, ni d'événement. Avec la langue polonaise dotée d'une infinité de c,z, et de lettres barrées, c'est encore plus difficile. Pas question de résumer plus de mille ans d'un passé mouvementé, pas tout à fait stabilisé. Je vais tenter de lister mes plus notoires étonnements.
L'élection du roi par les « grands » nobles, malgré la première dynastie des Piast à partir de 966, ne facilite pas la continuité de l'Etat. Konrad de Mazovie, en 1226, fera appel aux Chevaliers Teutoniques. Ainsi naît la future Prusse orientale … La Pologne devient pendant des siècles un espace émietté de duchés parcourus de querelles de succession et tôt menacée par les invasions.
L'Eglise est le premier catalyseur du sentiment national. Mais la Pologne connaît aussi les Hussites, la Réforme, la réunion des Orthodoxes et des catholiques devenus Uniates … elle accueille une importante communauté juive (10% de sa population, très actifs dans les villes et les universités). A son âge d'Or, c'est un immense espace qui réunit la Grande et la Petite Pologne, la Lituanie, l'Ukraine, de la Baltique à la mer Noire. Mais les divisions, les trahisons, les querelles de succession aboutissent à une désagrégation de la puissance royale au profit d'une noblesse pléthorique qui la lui arrache peu à peu, à coup de nouveaux privilèges et exemptions d'impôt, au détriment d'une paysannerie où le servage ne sera levé qu'en 1861.
La République des Magnats est une oligarchie tendant à détruire tout ce qui peut établir un pouvoir fort, ce qui autorise les incursions extérieures. La Pologne, pays intolérant et ingouvernable devient « le gâteau des Rois » partagée par 3 fois, effacée de la carte européenne, paradoxalement renaissante grâce à Napoléon qui crée le Duché de Varsovie (durant 6 ans), laissant derrière lui le mythe d'un dictateur lucide et juste, antidote aux vieilles tendances anarchistes. Un modèle pour d'autres potentats comme Pilsudski …
Mais les malheurs de la Pologne ne s'arrêtent pas là : sitôt reconstituée par le traité de Versailles, nous savons ce qu'il advînt pendant et après la Seconde Guerre mondiale. Ce pays jadis multinational et multiconfessionnel à l'époque des Jagellons, au peuple d'un courage légendaire, qui se révolta sans succès en 1830 et 1863, connut l'anéantissement nazi– mais on découvre que cette idéologie était déjà présente dans les confins autrefois germanisés, puis la mainmise des soviétiques.
La solution finale de la question juive, les camps, la destruction de Varsovie par les Allemands sous les yeux des Russes interrompant leur progression, l'antisémitisme évident de la population polonaise : l'auteur ne passe rien sous silence. Elément important aussi, son analyse des tendances culturelles spécifiquement polonaises.
La description de la mise au pas soviétique à partir de 1949 (p. 400 et suivantes) est proprement hallucinante. Les dernières années nous sont plus familières, avec la naissance de Solidarnosc, le rôle de Jean-Paul II, l'élection de Walesa … Nous devons à la Pologne d'avoir été le premier Etat à secouer le joug communiste et à rejoindre la communauté européenne en 2003. Connaître quelques aspects de son histoire complexe nous aide à comprendre ses réactions d'aujourd'hui et le style parfois déconcertant de ses dirigeants.
Malgré leur complexité, je recommande la lecture des soubresauts de la démocratie polonaise des années post-communistes, qui illustre de façon tragique les dérives de l'ultra-droite conservatrice et les dangers, ici comme ailleurs - de la représentation proportionnelle.
Sur le plan de la forme, l'écriture est fluide, il n'y a pas de notes de bas de page pour en interrompre la lecture, les illustrations sont intégrées au texte, mais la cartographie est peu lisible
Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
L'élection du roi par les « grands » nobles, malgré la première dynastie des Piast à partir de 966, ne facilite pas la continuité de l'Etat. Konrad de Mazovie, en 1226, fera appel aux Chevaliers Teutoniques. Ainsi naît la future Prusse orientale … La Pologne devient pendant des siècles un espace émietté de duchés parcourus de querelles de succession et tôt menacée par les invasions.
L'Eglise est le premier catalyseur du sentiment national. Mais la Pologne connaît aussi les Hussites, la Réforme, la réunion des Orthodoxes et des catholiques devenus Uniates … elle accueille une importante communauté juive (10% de sa population, très actifs dans les villes et les universités). A son âge d'Or, c'est un immense espace qui réunit la Grande et la Petite Pologne, la Lituanie, l'Ukraine, de la Baltique à la mer Noire. Mais les divisions, les trahisons, les querelles de succession aboutissent à une désagrégation de la puissance royale au profit d'une noblesse pléthorique qui la lui arrache peu à peu, à coup de nouveaux privilèges et exemptions d'impôt, au détriment d'une paysannerie où le servage ne sera levé qu'en 1861.
La République des Magnats est une oligarchie tendant à détruire tout ce qui peut établir un pouvoir fort, ce qui autorise les incursions extérieures. La Pologne, pays intolérant et ingouvernable devient « le gâteau des Rois » partagée par 3 fois, effacée de la carte européenne, paradoxalement renaissante grâce à Napoléon qui crée le Duché de Varsovie (durant 6 ans), laissant derrière lui le mythe d'un dictateur lucide et juste, antidote aux vieilles tendances anarchistes. Un modèle pour d'autres potentats comme Pilsudski …
Mais les malheurs de la Pologne ne s'arrêtent pas là : sitôt reconstituée par le traité de Versailles, nous savons ce qu'il advînt pendant et après la Seconde Guerre mondiale. Ce pays jadis multinational et multiconfessionnel à l'époque des Jagellons, au peuple d'un courage légendaire, qui se révolta sans succès en 1830 et 1863, connut l'anéantissement nazi– mais on découvre que cette idéologie était déjà présente dans les confins autrefois germanisés, puis la mainmise des soviétiques.
La solution finale de la question juive, les camps, la destruction de Varsovie par les Allemands sous les yeux des Russes interrompant leur progression, l'antisémitisme évident de la population polonaise : l'auteur ne passe rien sous silence. Elément important aussi, son analyse des tendances culturelles spécifiquement polonaises.
La description de la mise au pas soviétique à partir de 1949 (p. 400 et suivantes) est proprement hallucinante. Les dernières années nous sont plus familières, avec la naissance de Solidarnosc, le rôle de Jean-Paul II, l'élection de Walesa … Nous devons à la Pologne d'avoir été le premier Etat à secouer le joug communiste et à rejoindre la communauté européenne en 2003. Connaître quelques aspects de son histoire complexe nous aide à comprendre ses réactions d'aujourd'hui et le style parfois déconcertant de ses dirigeants.
Malgré leur complexité, je recommande la lecture des soubresauts de la démocratie polonaise des années post-communistes, qui illustre de façon tragique les dérives de l'ultra-droite conservatrice et les dangers, ici comme ailleurs - de la représentation proportionnelle.
Sur le plan de la forme, l'écriture est fluide, il n'y a pas de notes de bas de page pour en interrompre la lecture, les illustrations sont intégrées au texte, mais la cartographie est peu lisible
Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
