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3,49

sur 136 notes

Critiques filtrées sur 1 étoiles  
ISBN : 9782070362172


Si je vous dis que je ne fournirai aucun extrait de ce livre, vous avez déjà tout compris. Non, je n'ai pas du tout aimé "Léon Morin, Prêtre" et à nouveau, je songe à la mémoire des frères Goncourt, lesquels, les malheureux, ne méritaient certes pas qu'on distribuât le prix dont ils sont les fondateurs de façon aussi inconséquente et grotesque. Non que Béatrix Beck ait un style épouvantable ou illisible : d'autres auteurs, plus "modernes", l'ont largement surpassée en la matière, on ne peut le nier. Seulement, j'ai cherché en vain la puissance, l'intérêt de ce roman, ou, à défaut, le caractère novateur qu'il pouvait présenter. J'ai cherché partout, j'ai même poussé ma conscience de lectrice jusqu'à lire à haute voix un texte qui n'est pas fait pour ce genre d'exercice. Je me suis attardée sur certains passages, j'ai fouillé au plus profond des descriptions pour y trouver une parcelle, si petite fût-elle, de poésie. Pour finir, j'ai traqué l'autodérision dans chaque phrase, dans chaque scène mais rien, RIEN, un rien énorme et définitif, voilà tout ce qu'il me reste de cette lecture.

Pour moi, Berthe Bernage, créatrice gnangnan de la non moins gnangnan série des "Brigitte", aurait pu écrire "Léon Morin, Prêtre". C'est de la littérature de patronage, en un style un chouïa plus nerveux et moins classique. le thème : la jeune femme qui tombe amoureuse d'un prêtre, lequel le lui rend, évidemment. Et comme de juste, nos deux tourtereaux, qui sont des gens bien, de "bons chrétiens", loin de s'abandonner dans un fiévreux et démoniaque Paradou à la Zola - Zola, cet horrible suppôt de Satan ! - se séparent sans avoir fauté. Ils se retrouveront au ciel, comme de bien entendu et là, ils s'aimeront, de leurs deux corps désormais glorieux - aucun détail n'est d'ailleurs donné sur la façon de procéder des corps glorieux en question - au milieu des petits anges et des saints avec leurs auréoles. Au-dessus d'eux, il y aura Dieu et Jésus et sans doute aussi le Saint-Esprit et tout en dessous, dans l'Enfer, avec les démons, succubes et incubes, tous ceux - et surtout toutes celles - qui auront passé leur vie terrestre à fauter à coeur joie. Comme nos deux héros seront heureux ! ...

Un détail que je tiens à préciser : c'est évidemment la pseudo héroïne qui induit le noble prêtre, cet homme sacralisé bien que porteur d'une soutane très féminine, au péché de la chair. A la fin du livre, ils se retrouvent dans sa chambre à elle - en tout bien tout honneur, évidemment, de la part du prêtre - et cette Jézabel, cette Dalila, cette Messaline, cette ... cette Isabeau de Bavière ! ose lui dire : "Viens ..." Alors, lui, bien sûr, qui est un type bien - un saint, n'ayons pas peur des mots ! Osons ! - il bondit vers la porte (s'il ne bondit pas, c'est tout comme). C'est qu'elle allait le violer, cette Douze Fois Impure : vous imaginez le drame ? et la contamination du malheureux ? Ah ! vade retro, Satanas ! Recule, femme naturellement impure et dépravée ! ...

Le reste - tout le reste - est à l'avenant : c'est consternant. Il est clair que la Tentatrice, bien que mère d'une petite fille - une fille ! encore une impure ! Jésus-Marie-Joseph ! Préservez-nous ! - est d'abord attirée par les femmes. On ne sait pas très bien pourquoi, un jour, bien qu'élevée à la laïque et même, si j'ai bien saisi, à la laïque communiste , elle éprouve le besoin d'aller se confesser. Elle prétend que c'est pour narguer le curé mais allons donc ! Elle préméditait son coup, voilà tout ! Et dans le confessionnal, elle tombe sur Morin. Il lui fait un effet boeuf - déjà ! dans le noir ! ah ! faut-il que cette femme - et les femmes en général, d'ailleurs - aient du vice ! Elle accepte de lui rendre visite pour discuter Jésus & C° - en tout bien tout honneur, hein, on ne le répètera jamais assez. Et voilà : voilà le roman qui, en 1952, mes amis, reçut le Prix Goncourt ! Je sais bien qu'on a toujours taxé Jules et Edmond de conservatisme aigu, que certains fanatiques actuels les voient même à l'extrême-droite (ils étaient proches d'Alphonse Daudet et, partant, de ses enfants), mais tout de même : ils ne méritaient pas ça ! Ce prix Goncourt 1952 est une tache infâme sur leur mémoire. D'accord, ce n'est ni la première, ni la dernière mais ça ne console pas.

Et le pire peut-être, dans tout ça, c'est que ce summum de misogynie et de glorification de l'Eglise catholique, a été écrit par une femme !

En ce qui concerne le film qui fut tiré de cet ouvrage, avec Belmondo dans le rôle du Saint Homme et Emmanuelle Riva dans celui de la Mauvaise Femme, je ne l'ai pas vu et je ne me permettrai donc pas de porter un jugement. Mais déjà, pour avoir l'idée de faire un film à partir de cette bouillie que la Maison de la Bonne Presse n'aurait pas hésité un instant à éditer tant elle est édifiante, misogyne, réactionnaire, et caetera, et caetera ... il faut, à mon sens, avoir un sacré grain dans la tête. (Sauf si on veut en faire une parodie, bien sûr, mais je ne crois pas que ce fut le cas.)

Mais pour le roman, je suis formelle: prix Goncourt ou pas, vous qui me lisez, vous pouvez passer votre chemin.

A moins que vous ne soyez maso - ou "bon chrétien", vous aussi. Dans ce cas, allez en paix et n'en parlons plus. ;o)
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