Pour être honnête, je n'ai pas terminé ce roman. Fait assez rare car je me force généralement à finir mes lectures avant de donner un avis définitif sur celles-ci.
J'ai adoré "Mr.", le premier roman d'Emma Becker, très pertinent dans sa forme et dans son fond. Pour "
La Maison", son troisième roman et deuxième autobiographie, j'ai été charmée par la forme mais incertaine sur le fond. Pour "
Alice", sa deuxième oeuvre, je suis restée totalement imperméable vis à vis du fond et de la forme.
L'écriture de l'autrice demeure de grande qualité, avec une prose à la fois fluide, lyrique et très personnelle. Toutefois, le récit m'a semblé décousu du début jusqu'à la fin. Je n'ai pas compris vers où cette histoire voulait m'emmener. La quatrième de couverture est, à ce titre, assez mensongère tant je n'ai pas retrouvé grand chose des promesses affichées.
Sur le fond, je ne me suis pas attachée à la jeune
Alice. Jeune car elle est supposée avoir 21 ans mais parait sans âge tant elle est coincée dans un rôle de femme-enfant parmi les plus clichés qui soit. Là où Ellie Becker était touchante par sa justesse dans la représentation de la fin de l'adolescence, et m'avait semblée être "tangible", je suis restée mal à l'aise de bout en bout avec
Alice, qui pour le coup est une femme d'une vingtaine d'années peu crédible. Sa "personnalité" n'évolue jamais au delà du cliché : elle est jolie, jeune, sensuelle, elle aime faire tourner les têtes, pleure souvent, se contredit d'une page à l'autre car au fond, elle ne sait pas ce qu'elle veut et cela la rend folle, la pousse à des décisions déraisonnables. C'est une enfant perdue et blessée par la vie malgré ses apparences d'éternelle jeunette qui vit dans l'érotisme permanent et la sexualité débridée. Soit. Je n'ai rien contre les clichés car je pense que n'importe quel cliché, avec le bon auteur et dans le bon récit, peut émouvoir et être pertinent. Ici, cela n'a pas été le cas à mes yeux.
La "romance" et la sexualité agressive qui l'accompagne m'ont semblées artificielles et peu organiques également. Si je peux ressentir une certaine fascination pour
Alice malgré ses défauts d'écriture, Emmanuel m'est apparu comme un homme moyen voire médiocre dès les premières pages, ce qui n'aide pas à mettre en avant une quelconque sensualité ou alchimie entre les deux personnages, et encore moins de l'érotisme. Là où le Mr du roman éponyme dégageait du charme, et ce, alors même que le lecteur se doute dès le début que ce n'est qu'un pauvre type infidèle pour qui la narratrice se berce d'illusions, cet Emmanuel quarantenaire ne dégage ni magnétisme, ni séduction... J'ai bien compris qu'il était supposé représenter une sorte de fantasme du père mais force est de constater que je suis franchement passée à côté.
Sur la thématique de la filiation, j'ai été déçue également. Quelques passages sont très bien écrits et poignants sur le sujet mais cela reste "convenu" et j'aurais préféré une introspection plus importante autour d'
Alice (une écriture à la première personne, comme pour les autres romans de l'autrice, aurait peut être aidé à cela ?).
Je ne recommande pas ce roman, qui est le moins intéressant des écrits d'Emma Becker à ce jour. Je ne cesserai jamais de conseiller la lecture de "Mr." qui, dans un style similaire (érotico-vulgaire dirons certains) est beaucoup plus pertinent et profond que ce qui nous est proposé dans "
Alice".