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sur 726 notes
Pourquoi ai-je lu ce livre ? Surtout après l'excellent " Les putes voilées n'iront jamais au paradis" de Chahdortt Djanvann ?

Je l'ai lu parce que j'avais zappé devant ma télé, étais tombée sur la Grande librairie, ils finissaient de le présenter, et je m'étais dit " Les paroles de prostituées permettent sûrement de prendre la température sociale actuelle dans ce domaine " en Allemagne en tout cas.

Flammarion et son titre me faisaient de l'oeil.

Je trouvais la démarche d' Emma Becker, écrivaine dont j'ignorais tout, à la fois curieuse et courageuse, même si je ne l'approuvais pas. S'enfermer deux ans dans une maison close pour écrire sur le sujet, il fallait quand même être motivée.

Dès les premières pages, j'ai failli abandonner : je n'avais pas demandé à lire un porno. ( Je comprends mieux la tête de ma bibliothécaire !) Et puis j'ai vite compris, puisqu'elle écrit sur ses aventures amoureuses, qu'elle était très encline à des pratiques particulières et libertines, , et jeune déjà n'avait pas hésité à recourir aux services d'une femme en la monnayant, pour faire plaisir à son chéri. (Je spoile si peu).

Je ne juge pas, mais j'ai compris qu'elle avait déjà des aptitudes et des appétences pour le commerce du sexe, ce qui changeait un peu la donne.

Le recours à l'alcool et à des substances illicites est souvent de la partie, de jambes en l'air mais pas seulement. Elle doit bien se donner un peu de courage, elle aussi. Car tout client n'est pas tiré à quatre épingles, tant s'en faut !

……J'ai repris cette lecture après une pause et hésitation, mais au final, cette dame qui a écrit en sautant parfois du coq à l'âne,( euh !) une histoire qui semble par moment n'avoir ni queue ni tête, et j'arrête là les jeux de mots, se défend de faire l'apologie de la prostitution, mais on peut se poser la question.
Certes, elle dresse des portraits attachants, de femmes apparemment libres d'ouvrir ou de refermer leurs cuisses si monsieur ouvre le porte-feuille, mais est-ce la majorité ?

Quand on sait le nombre de femmes prostituées contre leur gré, qui en meurent parfois, et qui n'ont pas d'autre choix que de continuer, droguées à mort sous le joug de proxénètes mafieux, on se dit qu'elle, elle a fait une petite expérience bien cadrée, dont elle se targue, mais elle a vite pu quitter la vilaine maison qui ne sentait pas bon, quand les copines ont dû y rester, et savait dès le départ qu'elle arrêterait quand elle voudrait.

En somme, elle s'est fait plaisir, non ?
Le livre n'était-il pas simplement prétexte à assouvir un fantasme, et là je vais peut-être loin, mais la question peut être posée, même si elle a raconté ces quelques prostituées et amies.

Son style m'a semblé très inégal, comme la réalité dans la prostitution, y compris celle des maisons closes légales.

Quant à certains hommes, les siècles passent, mais pas leurs besoins ni leurs obsessions !
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Emma Becker, rencontrée grâce à la Librairie La Parenthèse, à Annonay (Ardèche), est forte d'un courage extraordinaire, courage qu'elle exprime au travers d'une écriture sensible, précise et sincère. La Maison, son troisième livre publié, est une autofiction, pas un roman et son récit n'est pas linéaire.
Pendant deux ans, elle a exercé le métier de pute, mot qu'elle revendique, même si, chez nous, il est complètement dévoyé. Ce mot qu'elle préfère, de loin, à prostituée, elle le trouve d'autant plus tendre qu'il inspire une certaine terreur aux hommes.

Dès le début, elle tresse des louanges à la Maison, ce bordel berlinois démoli depuis, où elle a trouvé un accueil, une compréhension, une humanité qui lui ont permis de vivre une expérience qu'elle nous fait partager avec talent. Elle se livre avec beaucoup de franchise, nommant tout par son nom, sans faux semblant. Ce qu'elle raconte est donc cru mais jamais vulgaire car elle détaille quantité d'aspects de notre nature humaine dont le sexe constitue une base souvent méprisée ou galvaudée mais pourtant essentielle.
Contrairement à ce que peuvent prétendre ceux qui n'ont pas lu son livre, La Maison n'est pas une apologie de la prostitution. Souvent, Emma Becker dénonce ses abus, ses déviations, l'exploitation de ces filles, tout juste majeures, amenée de gré ou de force depuis les pays de l'est : Ukraine, Bulgarie…
C'est dans le premier bordel où elle a travaillé, le Manège, qu'elle a vécu la terreur des filles, abusées par la perspective de gains mirobolants, se retrouvant prisonnières d'un système qui les écrase. Emma Becker parle aussi des putes qui travaillent dans la rue car elle les a observées longuement avant de sauter le pas. Elle détaille les tenues obligatoires, le froid, l'attente, le plaisir vendu à la sauvette, dans un recoin, une voiture ou une pièce sordide.
Puis, c'est le Manège et la terreur que lui inspirent les hommes qui en assurent la sécurité et pourraient la retrouver lorsqu'elle décide de partir. Avec infiniment de tendresse, elle parle des filles qui travaillent dans ce cadre légal en Allemagne, contrairement à la France. Elle précise d'ailleurs que le fisc y trouve son compte.
Enfin, il faut parler des hommes dont elle détaille les demandes, les perversions ou les exigences parfois dangereuses mais c'est toujours une solitude, une frustration sexuelle qui ressortent au fil de chapitres dont une chanson et le nom de l'interprète sert de titre mais je dois avouer ma quasi ignorance du monde musical anglo-saxon… Seuls Donovan, The Bee Gees, Janis Joplin, The Mamas and the Papas m'évoquent des souvenirs alors que Téléphone avec Au coeur de la nuit sauve l'honneur francophone. Par contre, l'auteure le précise plusieurs fois, les Françaises ont la cote dans les bordels berlinois.

Emma Becker ne veut pas être jugée mais, enrichie par l'expérience, elle rend hommage à la féminité, à la complexité du plaisir féminin et à sa richesse. Elle a ressenti au fond d'elle-même ce que la prostitution produit dans l'esprit d'une femme et j'admire la franchise dont elle fait preuve dans ce livre réussi aussi sur le plan littéraire.






Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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Pour bien écrire sur un métier, il faut le vivre de l'intérieur : ce précepte qu'on prête à Hunter S. Thompson, l'inventeur du gonzo- journalisme mis en avant il y a quelques années par Terry Gilliam et Johnny Depp, n'en finit pas de faire des émules même auprès de jeunes diplômées de lettres françaises qu'on aurait pas forcément vu sur ce terrain là.

Et pourtant, Emma Becker, après deux premiers romans sortis plutôt discrètement, fait beaucoup parler d'elle en cette rentrée littéraire grâce à une technique largement influencée par gonzo -journalisme.
En effet, à 25 ans à peine, elle a décidé de partir il y a quelques années à Berlin, où, contrairement en France, les maisons closes sont autorisées, pour faire commerce de son corps dans deux établissements différents, d'abord le Manège, lieu sordide et peu avenant, puis à la Maison, qui donne son titre au roman et dont elle a ( elle l'assume totalement; on a donc envie de la croire) totalement apprécié l'experience.

Désirant tenter l'expérience de la prostitution dans un bordel allemand, et fasciné par ses personnalités hautes en couleur qu'elle a pu croiser notamment dans les romans de Louis Calaferte, Emma Becker évite largement le coté journalistique, frontal de son investigation.

Elle parvient à faire de son enquête immersive un objet littéraire d'une très grande beauté, enchaînant les portraits de femmes , dotée d'une vision très romantique - qui va totalement en opposition avec le coté glauque et sordide qu'on devrait attendre d'un tel sujet .
Endroit chargé d'odeurs, aux lumières tamisées et aux chambres poudrées, la Maison est le lieu de tous les fantasmes.

On suppose que tous les très beaux portraits dessinés par Emma Becker s'arrangent parfois avec la réalité, mais en les découvrant, on comprend un peu mieux la misère sexuelle des hommes et leurs grandes vulnérabilité et la féminité exacerbée de la figure de la prostituée qui en marchandant son corps, se met parfois en position de risque insensé (certaines situations décrites dans le livre font froid dans le dos) .

Cependant, celle ci se retrouve souvent avec un pouvoir énorme, celui de donner du plaisir et un peu de joie à des hommes qui en manquent cruellement ..

En explorant de fort belle manière la complexité des désirs et du rapport hommes femmes, ce roman aussi décomplexé que complexe est assurément un des grands livres de cette rentrée littéraire !
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Qu'est ce qui peut donc bien pousser une jeune femme sans souci financier à exercer le "plus vieux métier du monde" ? L'envie d'assouvir un fantasme ou la tentation de vivre une expérience extrême sous prétexte d'écrire un livre sur la prostitution ?
Du fantasme au passage à la réalité, il y a un gouffre qu'Emma Becker, apparemment très portée sur le sexe et de son propre aveu sujette aux "idées à la con", n'a pas hésité à franchir en travaillant pendant deux ans dans une maison close.
Alors qu'elle s'envisage impératrice de l'amour, la voici devenue ouvrière à la chaîne découvrant la face obscure du désir et qui, pour examiner au plus près la mécanique érotique et sexuelle, doit baisser sa culotte dix fois par jour pour un salaire horaire quand même très largement supérieur à celui du SMIC.
Après une entrée en matière au style assez soutenu et élégant dans laquelle l'auteure explique son rapport à l'érotisme et les raisons de sa démarche assez singulière , le récit devient moins captivant quand elle décrit son expérience proprement dite.
Dans une langue plutôt familière, faisant fi de toute fausse pudeur et n'hésitant pas à appeler un chat une chatte, les anecdotes concernant les pensionnaires et clients de la maison close se succèdent de façon assez monotone, au rythme ennuyeux des passes, émoussant sérieusement l'intérêt éveillé dans les premières pages. Arrivée au 3/4 du livre j'en ai eu plus qu'assez de cette surabondance de chair triste et j'ai laissé tomber cette lecture qui ne m'apportait rien : pas le moindre plaisir et pas la moindre piste de réflexion. Avant de refermer définitivement la porte de la maison, j'ai quand même jeté un coup d'oeil à la conclusion qui m'a laissée... perplexe.
Si l'expérience d'Emma Becker est assez "soft", donc forcément réductrice, il ne faudrait pas en oublier pour autant que pour un petit nombre de femmes qui se prostituent de leur plein gré, choisissent leurs clients, en apprécient certains et à qui cette vie convient, beaucoup trop d’autres se retrouvent prisonnières de réseaux de proxénétisme, condamnées à une vie de misère et de violence.
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“Une nymphomane est une femme aussi obsédée par le sexe que l'homme moyen.”
Ces mots légers et plutôt souriants de Mignon McLaughlin pour donner d'emblée le ton de cette présentation du livre d'Emma Becker, présentation qui me pose plus d'une question et m'oblige à reconnaître que le nombre de mes réponses est si maigre et si enclin à un doute insistant qu'il est préférable de pas m'avancer masqué et de ne surtout pas chercher à faire le malin.
Lorsque cette jeune femme m'est apparue pour la première fois dans l'émission de François Busnel, La Grande Librairie, je me suis dit, mon sexe étant devenu à cet instant mon premier organe préféré avant mon cerveau : " encore une qui, sous l'alibi littéraire, vient nous raconter la énième histoire de c.., dont, je le reconnais, j'ai été un lecteur fidèle à ces prédécesseures depuis au moins cinquante ans..."
J'eus dès lors comme résolution de faire l'impasse sur ce nouvel exhibitionnisme en lice pour des prix littéraires... souvent, on nous fait le coup ; ça fait grimper les ventes et l'audimat des émissions de télé qui aiment s'encanailler et augmenter dans le même temps les tarifs de leurs publicités.
Son livre au final n'a obtenu que des prix réputés mineurs, dont celui du roman des étudiants, de France Culture, le prix Blù-Jean-Marc-Roberts et celui du Roman News... Mais il ne faut pas trop se fier à ce qui ressemble surtout à de mauvaises réputations !
J'ai laissé passer du temps et j'ai été l'un des nombreux téléspectateurs et auditeurs de quelques-unes de ses prestations télévisées et radiophoniques.
J'ai trouvé la demoiselle alerte, vive, intelligente et cultivée.
Alors je me suis dit... pourquoi pas ?
J'ai franchi le pas et je me suis retrouvé au bordel à Berlin.
Car, ce n'est un scoop pour personne : Emma Becker a travaillé, oui travaillé comme travaille n'importe quel travailleur du sexe dans un pays où cette activité n'est pas criminalisée, pendant deux ans et demi dans deux bordels berlinois : le Manège, où elle a officié quinze jours avant de prendre la poudre ( non, pas la coke... !) d'escampette et La Maison, où elle est restée deux ans et demi... c'est-à-dire jusqu'à la fermeture définitive de l'établissement et conjointement le début de sa grossesse.
De cette expérience et de ce travail, elle a fait un livre, sorte d'enquête journalistique, sociologique, anthropologique, psychologique et accessoirement ouvrage littéraire, dans lequel se mêlent de manière non linéaire, des anecdotes vécues par elles, ses compagnes de travail, l'encadrement des maisons, et les clients.
Si une part non négligeable du livre s'accorde à raconter l'épisode du Manège, le type même du bordel infréquentable... les patrons sont des Albanais plus ou moins maquereaux, plus ou moins trafiquants de drogue, plus ou moins mafieux, force est de constater que l'essentiel de l'ouvrage est centré sur La Maison, sacré bordel ou bordel sacré, havre de tolérance, de bienveillance, ilot d'humanité, d'amitié et de civilité, subsistant au milieu de l'asphalte jungle et des maisons closes où le maître mot est l'abattage, la rentabilité minutée à la seconde près.
La Maison nous est donc présentée comme ce qui devrait être l'idéal rêvé par les travailleurs du sexe. Idéal pour les conditions de travail que permet cet établissement, et idéal de vie au travail ; les cinquante ou soixante "pensionnaires", ces filles dites publiques, deviennent en ce lieu privé des camarades, des amies.
C'est un hymne à la sororité et à la famille recomposée.
Il y a dans le livre de Justine-Emma Becker le côté sombre de cette activité et un côté plus humain, le bordel du XIXème siècle débarrassé des craintes des maladies vénériennes et où les putes sont des travailleuses indépendantes en butte aux mêmes tracas du quotidien que les femmes dites "respectables"... pas plus, pas moins.
Je ne connaissais donc pas l'auteure avant - La Maison -, qui est son troisième livre ; le premier - Mr - aborde le thème de l'emprise érotique et passionnelle de sa protagoniste amoureuse pendant plus d'un an d'un chirurgien ami de ses parents et de son oncle... le second - Alice - " traite de la difficulté à s'extraire d'une relation d'amour étouffante avec des parents post-soixante-huitards envahissants, tout en analysant son propre rapport aux hommes, à travers la relation contrariée entretenue avec un amant de vingt ans son aîné."
Pas besoin d'être un grand "déducteur" pour comprendre qu'Emma Becker a centré son travail d'écrivaine sur la thématique de la mécanique du désir des femmes... et des hommes.
Où cela la mènera-t-il ? Trop tôt pour le dire.
Je dois admettre que - La Maison - est un livre que la plume fluide de l'auteure sait rendre attractif, facile et intéressant à lire ; sa nuit de défonce et de paranoïa au Manège, la scène du parc où Hildie jouit comme jamais, l'heure de cours d'éducation sexuelle donnée à un avocat et la mallette magique de Gerd sont parmi les chapitres les plus "intenses" et souvent jubilatoires de cette enquête qui, tout en voulant ne pas en être une, nous révèle bien des choses ignorées sur la condition humaine... c'est à dire sur vous et moi.
Je tiens à ajouter qu'il m'importe peu qu'Emma Becker aime le sexe ; on ne juge pas une femme sur la vie débridée de ses hormones et de ses neurones.
Je n'ai pas, me semble-t-il à juger non plus son tabagisme, son rapport aux stups à l'aune de mes totems et de mes tabous. Ou alors il me faut dès maintenant vider les trois quarts de ma bibliothèque... ce que je ne ferai pas ; je ne voudrais pour rien au monde me priver de Baudelaire, De Balzac, de Gautier, de Dumas, De Maupassant, d'Apollinaire, de Jules Verne, de Cocteau, de Radiguet et autres artistes addicts.
Par ailleurs, en ce dimanche de Pâques, je vous invite à songer qu'il serait sacrilège de ne pas "goûter au fruit d'Ève fendu".
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Pour de nombreux lecteurs, l'imaginaire de la maison close est celui De Maupassant : de Boule-de-Suif à la Maison Tellier. Les maisons de tolérance étant interdites en France depuis la fin des années 40, il n'y a plus guère de littérature à ce sujet. Mais il y a des débats, qui reviennent régulièrement, avec leur lot de polémistes, moralistes et autres éditorialistes pour nous livrer leur avis sur la question : doit-on autoriser des bordels en France ?
Emma Becker est une écrivaine en immersion. Pendant 2 ans, elle s'est prostituée dans une maison close de Berlin. Mais pas n'importe laquelle. La Maison. Petite entreprise familiale où les filles sont travailleuses indépendantes, décident de leurs horaires, de leurs tenues et parfois même de leurs clients. La narratrice est arrivée dans ce lieu par défi après une conversation avec son amant, et elle y est restée 2 ans parce qu'elle y était bien.
C'est un lieu féminin où l'on accueille des hommes. Ce qui donne un livre sur les femmes bien plus que sur les hommes. Parce que si l'on connaît dans les grandes lignes ce pourquoi les hommes franchissent la porte, on connaît beaucoup moins ce qui se passe entre les passes.
Pas d'apologie béate de la prostitution, mais un récit très personnel, bien écrit (et pourtant il n'est pas si simple de parler de sexe pendant 300 pages sans tomber dans la vulgarité ou dans une forme de monotonie), et qui se lit avec passion. Mention spéciale pour les dernières pages, notamment quand Emma Becker s'imagine dans la peau d'un homme et ce qu'elle ferait alors dans la chambre. le tout est émaillé d'une bonne playlist qui accompagne parfaitement la lecture du roman.
La part belle est donnée à la sororité et c'est plaisant de lire des pages sur la prostitution écrites par une femme. Parce que ce sujet nous appartient tout autant et qu'il est temps de livrer un regard féminin et contemporain sur nos soeurs du pavé.
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Vivre de l'intérieur pour ressentir au plus profond de soi ce que peut ressentir une femme qui exerce le plus vieux métier du monde et décrire ce métier au plus près de la réalité. C'est ce qu'a fait Emma Becker, sous le pseudonyme de Justine. Elle a vécu et fait commerce de son corps pendant deux ans, dans deux maisons closes de Berlin, autorisées en Allemagne. le deuxième établissement, La maison, donne son nom au roman.

Une immersion dans une maison close réussie à mon avis, un documentaire sociologique dense et intéressant sur la sexualité, le désir, les fantasmes, les rapports de domination et la psychologie sexuelle des hommes.

« [...] il faudrait en faire un bouquin. Ça, c'est une lecture qui me ferait rire. Qui ferait rire toutes les putes. Et toutes les autres, parce que le bordel, au fond, ce n'est qu'un miroir grossissant où tous les défauts, tous les vices des hommes tempérés par le quotidien deviennent assourdissants. »

J'ai regretté néanmoins les digressions sur l'écriture de son roman, sur son "métier de passage", sur son rôle d'écrivain, qui ont, à mon goût, alourdi la lecture de ce récit, et l'ont rendue de ce fait moins captivante par moment. Trop de longueurs.
Je n'ai également que très rarement compris le lien entre les titres musicaux cités en début de certains chapitres et la teneur de ces chapitres en question...un effet de style ?

Néanmoins une autofiction courageuse, audacieuse sur un sujet délicat, une plume savante et esthétique, des passages saisissants notamment les portraits de ses collègues, de ce

« nid de femmes et de filles, de mères et d'épouses, se confortant toutes dans la conscience d'oeuvrer aussi un peu, avec leur chair et leur infinie patience, pour le bien des individus qui composent cette société ».

Dans La maison, les femmes choisissent d'exercer ce métier, elles choisissent même leurs clients...

« Ceci n'est pas une apologie de la prostitution. Si c'est une apologie, c'est celle de la Maison, celle des femmes qui y travaillaient, celle de la bienveillance. On n'écrit pas assez de livres sur le soin que les gens prennent de leurs semblables. »

Même s'il en est autrement pour tant de femmes qui se retrouvent sous le joue d'un proxénète, et dont la vie est loin d'être celle "heureuse" décrite dans ce récit. Emma Becker mentionne d'ailleurs au début du livre, un autre bordel "Le manège" qui exploite les femmes et qu'elle a fui.
Le modèle prohibitionniste français envers la prostitution n'est-il pas paradoxal ? La loi pénalise les clients, mais ne donne aucun droit ni protection aux prostituées.

Un récit empreint de beaucoup d'humanité et de sincérité, c'est ce que je retiens avant tout, de cette lecture.

« Je parle d'un monde où les putes pouvaient choisir d'être des princesses, des elfes, des fées, des sirènes, des petites filles, des femmes fatales. je parle d'une maison qui prenait les dimensions d'un palais, les douceurs d'un havre.
Maintenant le reste du monde, pour les filles, c'est un abattoir. »
Lien : https://seriallectrice.blogs..
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Manqué à sa sortie lors de la dernière rentrée littéraire, le jury du prix de l'Armitière me donne l'occasion de rattraper la lecture de la maison d'Emma Becker. Mais mon intérêt initial s'est très rapidement éteint au fil des pages, se transformant même en ennui dès la deuxième moitié.

Ce n'est pas tant cette plongée en forme de reportage vécu au coeur d'une maison close allemande, ni le langage réaliste, direct et cru qui m'ont déplu, car s'il faut bien appeler un chat un chat, il semble évident qu'il faut ici appeler une chatte une chatte. de même, rien de masculin dans cette lecture manquée, étant depuis longtemps convaincu qu'il ne peut y avoir d'appréciation genrée différenciée de la littérature.

J'ai juste été frappé pendant toute ma lecture de la tristesse de la chair qui émanait de ce récit, m'en tenant à distance très lointaine. L'auteure dit pourtant bien le contraire, assumant son expérience, défendant avec raison le libre choix des femmes et l'ambiance particulière de la Maison comparée à l'abattage réalisé dans d'autres bordels « concurrents ». Avec courage et sincérité, sans aucun doute.

Mais ce ne fut pas suffisant pour me faire entrer en empathie avec ces femmes ni partager les enseignements de l'expérience d'Emma Backer. Pourtant, sur le même thème, Les putes voilées n'iront jamais au Paradis ! de Chahdortt Djavann m'avait embarqué. Une nouvelle fois, un livre ne fait pas l'autre…
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Elle me fait un de peine Emma Becker car elle a fait une grande arrivée dans cette rentrée littéraire, en lice pour plusieurs prix prestigieux et puis... rien, sinon des critiques assez sévères...
Est si difficile à accepter qu'une jeune femme puisse choisir de devenir prostituée, aimer ce métier et parfois en retirer de la jouissance?
Car oui, elle casse les images que l'on a de la prostituée exploitée comme une semi esclave.
Mais il faut dire qu'à Berlin où elle a exercé, les maisons closes sont légales et leurs pensionnaires ont le statut de travailleuses indépendantes et sont donc assez protégées.
Dans le but d'écrire un roman sur cette activité qui l'a toujours fascinée, Emma Becker choisit de travailler à la «Maison » durant 2 ans.
Elle nous décrit tous les aspects de cette profession, les bons, les moins bons, elle nous parle du désir, celui des hommes mais elle s'attarde surtout sur celui des femmes qu'elle interroge dans sa profondeur et sa complexité.
Elle évoque la féminité et surtout la sororité, cette complicité des prostituées entre elles.
Lorsque la Maison fermera, ce sera un grand vide et une profonde nostalgie d'une expérience qui lui aura été positive et formatrice.
Alors oui, le sujet est choquant, exprimé avec des images et des mots crus, mais c'est un témoignage honnête et sincère sur un sujet beaucoup trop tabou.
Alors respect Emma Becker.
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Bordel, enfin ! J'ai mis 3 mois à lire ce livre.
Alors, pour vous mettre dans le contexte, l'auteure du livre, Emma Becker, décide de se prostituer et d'écrire un livre sur son expérience de pute dans les bordels de Berlin, et c'est super interessant.

La Maison est un livre fort et qui peut être dérangeant, surtout si l'ouverture d'esprit n'est pas votre fort.
Derrière ses dessous humoristiques, La Maison est un récit très humain qui cache sous ses airs « légers » une réflexion profonde et intelligente sur les femmes, leur condition ou sur l'idée que nous nous faisons d'elles.
La sexualité féminine, le désirs et cette liberté sans cesse à conquérir (acquérir?). Bien loin de l'autofiction racoleuse et provocante que d'autres voudraient y voir, ce livre tout en poésie en séduira plus d'un.
Si j'ai beaucoup aimé La Maison c'est parce qu'il est, je pense, d'un genre nouveau. C'est à dire de ceux qui laisse les femmes s'exprimé en paix et qui ne les censure pas. Mais si je n'ai pas mis toute les étoiles c'est pour une raison. le livre est un peu trop long à mon goût. Certes il y a matière à réfléchir mais parfois trop de détails, trop de phrases m'ont encombré l'esprit pendant ma lecture. Bref, je recommande.
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