Le théâtre de
Samuel Beckett, auteur avant-gardiste d'un théâtre de l'absurde, a de quoi dérouter. Il n'est
pas aisé de comprendre où l'auteur veut en venir lors de la première lecture de cette pièce. Une analyse approfondie et une seconde relecture plus attentive est nécessaire pour dénicher les détails omis lors de la première rencontre avec le texte.
Cette pièce en deux actes ne met en scène que deux personnages, Winnie et Willie, dans un décor exceptionnellement étrange, qui semble clos, obscur, déserté par les êtres humains, étouffant et surprennant. Winnie est enterrée à demi jusqu'au buste dans le sol, sur un mamelon, tandis que Willie est caché à l'arrière de la scène, de façon à ce que Winnie et le spectateur ne puisse voir seulement que des bouts de son être, imprécis, camouflé (derrière un journal, par exemple). En survolant le texte, on peut décemment voir une multitude de didascalie, notamment la répétition incessante de "Un temps", didascalies qui servent à une représentation facilité de la pièce sur scène, pièce qui doit être lue et vue représentée pour être complètement appréciée.
Winnie, dans un monologue presque infini, essaie de meubler sa journée, de combattre le temps éternel, qui revient chaque jour, de la même manière. Elle essaie de casser cette monotonie, de déjouer le cours de sa vie... sans succès, comme le prouve les nombreuses répliques répétitives qu'elle récite et les actions identiques qu'elle effective (notamment au niveau de son sac). Ce personnage en devient tragique, douloureusement attendrissant pour le spectateur, qui s'émeut de l'énergie et de l'obstination dont fait preuve la vieille femme pour survivre. Mais sa perte de mémoire, combiné à la perte de ses jambes, à sa vue qui baisse et au peu de retour qu'elle obtient de son mari, mènent irrésistiblement vers la mort qui lui sera fatale.
Outre le tragique de la pièce, le lyrisme amoureux, très présent dans
Oh les beaux jours, met en avant les sentiments décuplés et attendrissant de la vieille femme pour son mari. Prenant soin de lui sans cesse, s'inquiétant pour son état, lui parlant sans discontinuer, attendant des réponses qui ne viendront
pas, elle ne se laisse
pas décourager par ces retours silencieux et continuent à espérer le retour de son mari déchu, qui brille, si majestueux, dans le peu de souvenir qu'il lui reste. Ce genre de parallèle est également perspectible dans une autre pièce de
Samuel Beckett dans
Fin de Partie entre Nagg et Nell, vieux couple au destin identique, touchant dans leur situation et fou amoureux, malgré les difficultés de la vie.
Je ne fais qu'une courte chronique pour présenter brièvement les principaux thèmes qui recouvrent
Oh les beaux jours, mais sachez qu'après des mois d'analyses et de travail sur cette pièce en cours de littérature française, je puis vous dire qu'il y a énormément de choses à déchiffrer à travers ces lignes.
Samuel Beckett était un auteur bien mystérieux, qui a laissé l'entière responsabilité aux lecteurs de s'approprier ses textes pour en faire la conclusion qu'ils souhaitaient.
Au début de l'étude de cette oeuvre, j'avoue ne
pas avoir été
passionnée par ce livre (très original, je n'avais rien lu de tel jusqu'alors ; les didascalies très abondantes me dérangées, le style de l'auteur était énigmatique, aucune intrigue ne venait s'ajouter aux phrasés des personnages... tout cela me paraissait bien étrange). Néanmoins, après plusieurs relectures et une réflexion plus poussée sur le contenu d'
Oh les beaux jours, je me suis prise à entrer dans le jeu de l'auteur, à trouver des significations aux personnages, à leurs paroles... et à aimer un temps soit peu ce récit.
Erudit ou non de pièces de théâtre, aux curieux qui souhaitent bouleverser leurs genres de lectures habituelles, aux originaux qui veulent découvrir une plume hors du commun, ou à tous ceux dont j'ai donné l'envie de découvrir ce récit... n'hésitez
pas. Laissez-vous plonger dans l'univers oppressant de
Samuel Beckett et laissez grand ouvert votre imagination, sans quoi la pièce se retrouverait sans saveur.
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