Watt il n'est
pas riche, il n'est
pas beau, il n'est
pas jeune, il n'est
pas méchant, il n'est
pas causant, il est hésitant, il sourit bizarrement et il se fait embaucher comme domestique chez monsieur Knott. La maison de monsieur Knott possède deux étages et il emploie un domestique pour le rez-de-chaussée et un autre pour le premier étage. La promotion de
Watt du rez-de-chaussée à l'étage est au centre du roman.
Lire «
Watt », c'est une expérience. Parce que ça parait long et qu'on tourne en rond. On tourne en rond comme d'habitude avec
Beckett, mais c'est plus long qu'une pièce de théâtre. Il arrive qu'on rit, comme souvent avec
Beckett, d'un rire qui n'est peut-être
pas toujours innocent. Un rire de désappointement.
A lire les logorrhées du narrateur sur tout et surtout rien – son incontestable volonté d'épuiser toutes les possibilités -, il arrive aussi souvent qu'on fasse la grande expérience du lecteur, celle de l'ennui de l'ennui : suivre des yeux les lignes tout en pensant à autre chose (ses aigreurs d'estomac ou le collègue imbuvable qui les accompagne), quand les mots se perdent quelque part entre l'oeil et l'aire de Wernicke. Pendant cet ersatz de lecture, tout en captant des bribes de phrases au hasard, je me suis interrogé sur la lecture et cet ennui au carré qu'est l'ennui de lire. Et je ne sais par quel tortueux chemin de l'esprit, j'ai fini par subir cet étrange phénomène qui sauve toute lecture : le phénomène d'identification. Aussi incroyable que cela puisse paraître j'ai ressenti de la com
passion pour
Watt, ce personnage questionnant qui s'étonne de rien. Face à rien il n'y a
pas de « quoi ? » qui tienne alors j'ai arrêté de chercher un sens à tout ça. de là à dire que l'ennui et la recherche de signification ont un rapport de cause à effet, c'est un processus de la pensée auquel je n'ose même plus m'exercer après la lecture de ce roman du non-sens.