Quand j'ai vu que
François Bégaudeau partageait un entretien avec
Iegor Gran dans l'Obs' - parce que leurs livres ont en commun la critique du milieu littéraire (ce qui n'est pas tout à fait le cas de
la revanche de Kevin de
Iegor Gran à vrai dire, c'est plus fin que ça) -, je me suis précipité sur La Promesse. Au fil des presque 300 pages, l'auteur fait la chronique du milieu du livre auquel il prend part, ou essaie de prendre part, s'y perd ou s'en détache tout en y participant pleinement (c'est parfois difficile à savoir ou à comprendre). Il y a des pages radicales, parfois drôles, de beaux passages aussi (notamment sa rencontre avec
Edouard Levé), quelques erreurs (il dit écouter Benjamin Biolay mais retranscrit les paroles de la Forêt de Lescop?!?) ; sa prise avec le réel, l'absence de fiction (pour les deux premiers tiers du roman), son cynisme exacerbé laissent peu de place à l'empathie, et parfois conduisent jusqu'au malaise... Au même titre que Despentes et
Houellebecq, auquels je préférerais quand même
Eric Laurrent (
Les découvertes) ou
Nicolas Fargues (
La ligne de courtoisie),
François Bégaudeau est un observateur de son époque (la nôtre), et en cela : vaut la peine d'être lu, même si - bémol -, le livre est pesant sur la longueur. Pourtant, ce livre n'est pas uniquement centré sur le monde du livre (plus que sur le monde littéraire d'ailleurs), il est aussi une bonne réflexion sur le "travail", ses valeurs actuelles. Et puis reste des pages où l'encre est remplacée par de l'acide, ou bien ces quelques passages qui font allusions au revenu de base, qui permettrait à ceux n'ayant pas envie de travailler de ne rien faire, ou faire ce qu'ils veulent (!), discussion autour de ce thème qui battait son plein à la même période, en Suisse ; et j'acquiesce totalement quand Bégaudeau, lucide, déclare (dans l'entretien), au sujet des salons et foires et autres fêtes du sl... livres, pardon : "Dans un autre livre, j'ai appelé ça TSL: tout sauf les livres. On est dans l'apologie du livre comme point de résistance face à la barbarie. Mais le contenu, c'est le grand absent."