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sur 84 notes
"Tu te souviens, Léon?"

Une mère, harassée, veillant dans l'ombre son dernier fils, retrace en monologue et incantations de malheurs répétés, les épouvantables années de l'installation familiale comme colons agricoles sur terre algérienne.

Les colons de la première heure: forts de leur bon droit de propriétaires de terres françaises, ils font face hargneusement, armés de courage à revendre, de volonté de se battre et de résister à la chaleur infernale des étés, à la sécheresse, au froid glacial des hivers neigeux et venteux, à la vitrification de leur champs par les sauterelles, au déluge, aux tremblements de terre et aux maladies.

Mais le combat semblait perdu d'avance pour la jeune veuve Emma Picard, et ses quatre fils, venus d'Alsace, confiants dans le discours du gouvernement français du second Empire qui leur offre 20 hectares de terres dans un pays de cocagne.

"Seigneur Dieu qu'avions nous fait nous autres pour être punis de la sorte?"
Un Dieu enragé pour une femme pétrie de culpabilité.

Avec le lyrisme d'une tragédie antique, Mathieu Belezi clôt ici sa trilogie sur l'Algérie Française et fait revivre les débuts de la colonisation, dans les destins bien différents des grands propriétaires terriens venus exploiter le pays. Une vie de chien et de misère assez proche de celle des autochtones, une vie de malheurs due à l'entêtement, à la persévérance destructrice et à l'attachement viscéral à la terre. Une tragédie humaine dans une période où le pays subit famine et catastrophes naturelles majeures.

La narration ne lâche pas un instant le lecteur, oppressante, sans chapitre et paragraphe, partagée entre les souvenirs de femme vieillie avant l'âge, qui ressasse à la frontière de la folie, et le récit vibrant et dramatique du quotidien de la ferme dans les collines.

Dans la nuit africaine, tout est dit... le fils n'a pas prononcé un mot et la femme s'est tue.

Sombre et magnifique!
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« Mais avant de me taire, il faut que je dise dans quel enfer on nous a jetés, nous autres colons, abandonnés à notre sort de crève-la-faim sur des terres qui ne veulent et ne voudront jamais de nous. »
À qui s'adresse Emma ? Tour à tour, à Dieu, aux hommes ? Qui prend-elle à témoin de la vie de misère qu'elle et ses quatre fils connaissent sur cette terre d'Algérie, qu'un jour « un homme à cravate assis derrière son bureau de fonctionnaire » lui a fait miroiter comme la chance de se construire une nouvelle vie ? Vingt hectares dont elle serait propriétaire, elle qui n'a jamais rien possédé, rien décidé : une telle promesse ne se refuse pas, alors qu'il faut qu'elle subvienne seule aux besoins de ses enfants en cette deuxième moitié du XIXe siècle. Mais, dès leur arrivée, les terres révèlent leur hostilité et l'absence d'eau en quantité suffisante pour espérer des récoltes satisfaisantes. Qu'à cela ne tienne, Emma n'a pas traversé la Méditerranée pour baisser les bras. Une lutte à mort s'engage contre les éléments pour faire de son carré de poussière un lieu de vie digne pour ses enfants, aidée en cela par Mékika, l'Arabe qui s'est mis au service de la famille dès le premier jour.
Mais c'est surtout à Léon qu'elle parle, le plus jeune de ses fils, « allongé comme un mort vivant », que son récit semble avoir pour but de maintenir éveillé.
Au fil du roman la voix d'Emma bouscule et bouleverse. Cette femme qui se tient debout pour elle-même, pour ses enfants, malgré la déception, la souffrance, le désespoir et le deuil. Tout au long du livre j'ai eu envie de lui crier de partir, de se mettre à l'abri de toute cette hostilité, de tout ce malheur, mais pour aller où ? Elle, Emma savait bien qu'il lui fallait continuer de tomber et de se relever encore et toujours sur cette terre qu'elle espérait pouvoir faire sienne.

"Un faux pas dans la vie d'Emma Picard" est un grand roman, de ceux dont on ne ressort pas indemne.
Mathieu Belezi nous livre le portrait d'une femme courageuse, forte et vulnérable à la fois, prête à tout pour trouver un peu de sérénité pour elle et ses fils à défaut de bonheur.
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Emma raconte.
Un long, répétitif et douloureux récit.
Une partie de l'Histoire que je ne connaissais pas : l'envoi de français en Algérie par le gouvernement français. Une ferme et une vingtaine d'hectares de terre leur sont offerts. Mais c'est un cadeau empoisonné. C'est sans compter sur la rudesse du climat, la sécheresse, le vent, les vols de sauterelles, les pluies, les tremblements de terre….. mission quasiment impossible.
Du labeur… de la sueur… pour si peu de résultats.
Emma est touchante, pathétique. Quitter son Alsace natale, seule avec ses quatre fils pour cet hypothétique Eldorado ! Que n'a-t-elle enduré !
La forme du récit est particulière. Pas de points, pas de majuscules. Un long monologue entrecoupé de paroles en italique adressées à son fils Léon qui jamais ne répond..
Déstabilisante au début, elle rajoute finalement de la force aux paroles d'Emma. Elle nous tient en haleine pour ne rien perdre de cette désespérance d'une femme vaincue.
C'est un fort beau roman que nous offre là Mathieu Belezi
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Quand ça veut pas, ça veut pas… cela pourrait être un résumé simpliste de la vie d'Emma Picard.
Lorsqu'Emma se retrouve veuve avec ses 4 enfants, le gouvernement français et l'administration coloniale lui offrent 20 hectares de terres à cultiver, là-bas, en Algérie : un rêve inespéré pour une pauvre veuve sans avenir !
Mais le destin est parfois cruel, s'acharne, et les efforts inhumains d'Emma et de ses fils pour rendre fertile une terre aride sous un climat infernal ne seront jamais couronnés de succès : dans une litanie tragique, Emma rappelle au dernier fils qui lui reste l'accumulation implacable de catastrophes dont sa famille a été victime.
Tragique est un doux euphémisme pour décrire le séjour d'Emma Picard sur ces terres algériennes où les colons s'efforcent de bâtir un empire. Certains réussiront, d'autres non. Et Emma fait partie de ceux-là dont le destin était scellé dès le départ par une administration coloniale indifférente au sort des colons qu'elle a expédiés braver la sècheresse, le froid, la canicule, les sauterelles et autres calamités africaines.
Un récit magnifique et puissant qui prend aux tripes et rappelle ce qu'était la colonisation : pas toujours un jackpot pour les heureux gagnants…
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Emma Picard n'a pas eu une vie facile, c'est le moins que l'on puisse dire. Nous sommes dans les années 1860. Seule avec ses quatre fils, elle entreprend un voyage vers l'Algérie où l'attend une ferme de 20 hectares. «La France» a promis à Emma une vie d'apprentie-colon, prospère et heureuse. Une promesse fabuleuse qui se ternira au fur et à mesure du trajet et dont l'infime espoir s'envolera à la vue de sa terre, misérable. Elle nous raconte son périple et ses années algériennes. Pour être plus exacte, elle les rappelle à la mémoire de son plus jeune fils qui agonise sur un lit. Nous sentons très vite qu'elle regrette son choix. Elle se lamente sur cette décision qui a ruiné sa vie. Emma Picard va aller de désastre en désastre, un cercle sans fin rythmé par des saisons impitoyables. Sécheresse, nuage de sauterelles, maladies,.. rien ne lui est épargné.
L'auteur nous offre le portrait d'une femme qui, malgré les coups durs du sort, tente de rester debout. Portée par une opiniâtreté et un besoin de croire en des jours meilleurs, elle avance coûte que coûte, jusqu'où ses forces pourront la porter.
J'ai été touchée par cette héroïne courageuse, par sa voix dure, ses propos fatalistes dans lesquels ne transparaît aucune compassion envers elle-même. Coupable, elle le revendique jusqu'à en perdre la foi.
Le style de l'auteur, à la ponctuation rare, nous aide à écouter cette femme par sa fluidité. C'est un roman que j'ai lu pratiquement d'une traite, emportée par cette triste confession et par l'évocation d'un pays qui se laisse difficilement apprivoisé.

J'ai reçu ce livre dans le cadre de "Masse critique", je remercie Babelio et les éditions Flammarion pour ce cadeau.
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Fin des années 1860. Emma Picard est veuve et mère de quatre fils, auxquels elle veut plus que tout offrir un avenir décent. Pour cela, elle a accepté l'offre du gouvernement français : vingt hectares de terre et une ferme pour reconstruire sa vie avec ses enfants. En Algérie.

C'est à son plus jeune fils, Léon, qu'Emma s'adresse dans un long monologue. Ce récit à la première personne est celui d'une femme épuisée, au coeur brisé. Ce pays qu'elle a rejoint, pleine d'espoir, lui a tout pris. On lui a vendu du rêve, de l'abondance, des terres fertiles. "L'homme à cravate assis derrière son bureau de fonctionnaire ne m'avait-il pas dit que l'Algérie était un pays de cocagne où les pauvres devenaient aussi riches que les riches, pour peu qu'ils ne rechignent pas à courber l'échine dans la pierraille et le marécage (...)". Mais ce que ce fonctionnaire lui a caché, c'est que l'Algérie de la fin du 19e siècle est peu clémente pour les colons pauvres. Une série de cataclysmes s'abat sans relâche sur le pays, ne laissant aucun répit aux cultivateurs de la terre, comme aux autres. Rien ne sera épargné à la famille Picard. Ni les invasions de sauterelles, ni les tremblements de terre, ni les récoltes détruites par la chaleur extrême, qui tarit le lait des vaches, fait mourir les lapins et les poules. Et lorsque la nature semble se calmer, s'apaiser enfin, ce sont les maladies qui prennent le relais. La fièvre jaune, qui ne se combat qu'avec la quinine (un médicament hors de prix à l'époque) et la dysenterie, qui emportent les plus fragiles. Emma a de la volonté, de la hargne même, à revendre. Mais cela ne suffit pas. de par sa situation de femme isolée, elle ne semble jamais faire les bons choix. Pourtant, un homme lui tend la main sur cette terre inhospitalière : Jules Letourneur, un révolutionnaire exalté qui s'est attaché à elle. Elle refusera, obstinément, de suivre ses conseils. Et aux dernières heures, il ne lui restera plus rien, pas même la foi en ce dieu chrétien dont elle implore sans cesse la clémence.

Un faux pas dans la vie d'Emma Picard clôture la trilogie algérienne de Mathieu Belezi, commencée avec C'était notre terre et suivie du roman Les vieux fous. Je dois dire à regret que cette lecture n'a pas rempli toutes mes attentes. Tout d'abord, je voudrais comprendre pourquoi la préface de l'auteur nous donne quasiment la fin de l'histoire ? Être spoilé dès la première page, c'est vraiment contrariant ! Mais je déplore aussi que le style de l'écrivain, si reconnaissable, construit sur des phrases à rallonge, qui semblent écrites dans un seul souffle et que j'avais admiré dans C'était notre terre, soit reproduit à l'identique ici. Je ne sais pas comment l'expliquer, mais je me suis sentie un peu "dupée" en tant que lectrice, par une sensation de déjà-vu si forte que je n'ai pas réussi à la dépasser. Enfin, cette histoire est d'un désespoir crasse. Aucune lueur ne vient éclairer le chemin de cette pauvre héroïne. Son destin est si tragique que j'ai eu du mal à compatir, tant le trait est forcé, tant elle subit, épreuve après épreuve, de nouveaux malheurs. Je ne cherche pas à tout prix le happy end quand je lis un roman. Mais là... cela en devenait presque malsain, je me demandais au fil des pages : que vas-t-il lui arriver après "ça" ? En revanche, je dois concéder que le roman est extrêmement bien documenté. Mathieu Belezi réussit brillamment à nous plonger dans l'atmosphère de l'Algérie de la fin du 19e siècle ; une période moins traitée par les écrivains, plus prolixes sur l'avant et l'après guerre d'Algérie.

Une lecture en demie-teinte donc ; passionnante d'un point de vue documentaire et historique, mais décevante sur le plan littéraire.

http://manoulivres.canalblog.com/
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Emma Picard, veuve courageuse est arrivée en Algérie, terre promise aux colons, en 1860. Dans la nuit noire, portée par le souffle brulant du sirocco, Emma Picard se souvient. Ses mots sont comme le vent, incessants, entêtants, brulants, elle égrène ses souvenirs, parle à son fils Léon, le dernier de ses quatre enfants encore vivant.
Emma Picard se souvient, l'instant fatal où elle a cru ce fonctionnaire moustachu tranquillement installé derrière son bureau, qui lui a garanti vingt hectares de terre et Une vie meilleure. Loin de son pays, loin de la misère, là où tout est possible sur ces terres en friche. Dans la petite ville de Mercier, comme dans d'autres régions d'Algérie, les colons se succèdent pour essayer en vain de faire fructifier ces terres arides.
Emma Picard se souvient, la chaleur écrasante d'un été sans eau, le dur chemin jusqu'à la source pour puiser à peine de quoi survivre, les récolte et les bêtes brulées par la chaleur torride, la neige et l'hiver qui glace les os, encore pire que l'hiver de France, le printemps et les nuages de sauterelles qui anéantissent toutes les cultures, tous leurs efforts, le tremblement de terre qui détruit une partie de la ville.
Emma Picard se souvient, les rares éclats de rire de ses enfants, les bonheurs fugaces qui font croire qu'on peut y arriver, l'éveil de sa peau de femme encore jeune, sous Les caresses de Jules, le révolutionnaire. Elle se souvient du bonheur de voir pousser les cultures, de l'enfant fiévreux qui guérit, de l'aubergiste qui sourit.
Ce roman poignant, intense, montre la vie terrible des colons mais également celle des autochtones qui habitent les gourbis, dans les montagnes, et vivent les mêmes misères. Il décrit aussi l'entêtement de cette femme tellement mal préparée à vivre dans ce pays qui lui échappe et qui ne saura pas quitter à temps ces terres arides si peu faites pour les pauvres.
Comme une litanie, le récit alterne entre le monologue au présent avec Léon, et les souvenirs douloureux de cette vie algérienne. D'une traite, sans chapitre et sans paragraphe, avec peu de ponctuation, peu de majuscule et de point, pour mieux souligner le côté lancinant, ininterrompu, du malheur, comme un souffle gigantesque qui porte Emma vers ses derniers instants. Inspiré du récit « Au soleil » De Maupassant et de la situation dramatique vécue par les colons en Algérie entre 1866 et 1868, ce faux pas dans la vie d'Emma Picard est un beau récit tragique et bouleversant.



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Amateurs de contes de fées passez votre chemin ici on parle de tragédie, et quelle tragédie ! L'histoire coloniale algérienne n'a pas produit que des colons riches et puissants, nombreux ont été ceux qui ont payé cher la quête de l'eldorado promis. C'est son histoire, sa lutte, son désespoir, son accablement et sa culpabilité qu'Emma nous raconte, en bout de course, une nuit de veille de Léon, le seul de ses quatres fils qui est encore près d'elle. Elle ne connaît rien de ce pays d'Afrique et de ses caprices et pour elle, son plus grand adversaire va se révéler être cette terre même qu'elle ne veut lâcher pour rien au monde, son climat et ses catastrophes. Cette terre qui ne veut pas d'elle, et que dire de ce Dieu des chrétiens qui semble l'avoir abandonnée. Quel entêtement, quel aveuglement !

Livre étonnant où l'auteur laisse le personnage prendre le pouvoir et s'abstient de toute intervention. On se demande même si on en est le lecteur ? Ne serait-ce pas la voix d'Emma que l'on entend ? Un long monologue, sans un point sauf le final qui signe une vraie fin.
Un roman poignant qui ne manquera pas de susciter la compassion mais aussi la révolte.
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Emma Picard est veuve et mère de 4 garçons, lorsque, fin des années 1860, le gouvernement français lui propose 20 hectares de terre...en Algérie ! Pour nourrir sa petite famille, Emma accepte ce déracinement, elle accepte d'aller rejoindre la cohorte de colons qui ont migré de la France vers l'Algérie à cette période. Dès lors, commence pour elle le début d'une longue descente aux enfers.

Emma raconte son histoire. Elle nous la raconte, à nous, lecteurs, mais elle la raconte aussi à Léon, le plus jeune de ses fils. Si ce roman nous arrive sous forme écrite, je n'ai de cesse pourtant, d'entendre la voix d'Emma qui raconte son histoire. Mathieu Bélézi écrit comme elle parle. le récit qu'elle nous fait de sa vie en Algérie est entrecoupé d'apartés destinées à son fils. On y découvre l'arrivée de la famille en Algérie, la découverte des terres, les amitiés et amours qui se lient...et les fléaux qui s'abattent. La sécheresse, les sauterelles, la dysenterie, la mort, la famine, l'âpreté du climat, rien ne leur est épargné !

Il n'y a aucun point, aucune majuscule, et pourtant, il y a bien un phrasé. Des pauses, des respirations, jalonnent cette espèce de psalmodie, cette longue plainte d'une femme, d'une mère, épuisée après un long combat contre les élèments pour réussir à maintenir à flot sa famille, pour aider son dernier enfant à survivre, pour ne pas oublier cette histoire, pour que chacun puisse mesurer la complexité de la situation des colons. La rythmique imposé par le flot de parole m'a presque bercée et, en même temps, m'a empêchée de lâcher le livre. Je l'ai lu d'une traite, j'ai écouté la voix de cette femme presque dans un seul souffle.

C'est le premier roman de Mathieu Bélézi que je lis. Visiblement, il en a écrit d'autres sur l'Algérie, je vais courir les découvrir. Une belle rencontre avec cette Emma Picard, âpre, mais belle.
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Peu de romans sont consacrés à la description de la vie des colons dans l'Algérie des années 60, du dix-neuvième siècle .Mathieu Belezi, qui termine par « Un faux pas dans la vie d'Emma Picard » sa trilogie algérienne après C'était notre terre et Les Vieux Fous , y fait parler Emma Picard, veuve qui décide de traverser la Méditerranée, après avoir eu vent de cette proposition du gouvernement français d'allouer des hectares de terre aux colons , pour encourager le peuplement de l'Algérie , lieu de colonisation , nouvel horizon promis à tous les aventuriers tant soit peu audacieux et volontaires .

Dans sa préface, Mathieu Belezi fait allusion, comme source d'écriture de ce récit, à l'ouvrage de l'historien Pierre Darmon : L'Algérie des passions, ouvrage qui révèle ce que furent les conditions de vie dans l'Algérie des années 1860 et suivantes : épidémies, sécheresses, attaques de sauterelles, tremblements de terre …

C'est ce cadre historique que reprend Mathieu Belezi dans son livre, dont l'originalité tient à l'absence partielle de ponctuation entre les phrases, et à l'utilisation systématique de l'apostrophe à l'un des personnages, Léon, l'un des fils d'Emma Picard. Après s'être installée dans sa ferme , non loin du village de Mercier-le-Duc, Emma et ses fils , Charles , Léon , joseph , Eugène , vont de désillusion en désillusion : la terre n'est pas généreuse en Algérie, elle se dérobe, elle est avare .L'eau y est rare , les catastrophes naturelles aussi .Jules Letourneur , un révolutionnaire convaincu , lui apporte quelque assistance, il la seconde dans les tâches quotidiennes .Mékika , domestique arabe, tente lui aussi d'aider Emma Picard, dans sa tentative de créer un domaine agricole prospère .Las , les catastrophes naturelles , l'avarice d'un créancier sans scrupules , la mort de l'un de ses fils, Joseph , ont raison du volontarisme d'Emma Picard , qui finit par maudire cette terre d'Algérie : « parce que devant toi je me sens coupable de vous avoir entraînés dans cette aventure coloniale sans queue ni tête qui ne nous a menés à rien , qui ne nous a rien rapporté, sinon des souffrances quotidiennes (…) coupable d'avoir écouté cet homme à cravate assis derrière son bureau de fonctionnaire , d'avoir cru à son boniment , de vous avoir entraînés sur des terres qui ne veulent et ne voudront jamais de nous . » Pertinente réflexion sur le sens et la trace de l'aventure coloniale, cent trente ans après …

Mathieu Belezi réussit le pari d'éclairer cette période par la fiction romanesque, en décrivant le sort de cette famille, dont on se dit qu'il fut partagé par beaucoup à cette époque, et annonciateur des drames futurs de l'Algérie française.

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