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4,19

sur 85 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Emma raconte.
Un long, répétitif et douloureux récit.
Une partie de l'Histoire que je ne connaissais pas : l'envoi de français en Algérie par le gouvernement français. Une ferme et une vingtaine d'hectares de terre leur sont offerts. Mais c'est un cadeau empoisonné. C'est sans compter sur la rudesse du climat, la sécheresse, le vent, les vols de sauterelles, les pluies, les tremblements de terre….. mission quasiment impossible.
Du labeur… de la sueur… pour si peu de résultats.
Emma est touchante, pathétique. Quitter son Alsace natale, seule avec ses quatre fils pour cet hypothétique Eldorado ! Que n'a-t-elle enduré !
La forme du récit est particulière. Pas de points, pas de majuscules. Un long monologue entrecoupé de paroles en italique adressées à son fils Léon qui jamais ne répond..
Déstabilisante au début, elle rajoute finalement de la force aux paroles d'Emma. Elle nous tient en haleine pour ne rien perdre de cette désespérance d'une femme vaincue.
C'est un fort beau roman que nous offre là Mathieu Belezi
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Emma Picard, veuve courageuse est arrivée en Algérie, terre promise aux colons, en 1860. Dans la nuit noire, portée par le souffle brulant du sirocco, Emma Picard se souvient. Ses mots sont comme le vent, incessants, entêtants, brulants, elle égrène ses souvenirs, parle à son fils Léon, le dernier de ses quatre enfants encore vivant.
Emma Picard se souvient, l'instant fatal où elle a cru ce fonctionnaire moustachu tranquillement installé derrière son bureau, qui lui a garanti vingt hectares de terre et Une vie meilleure. Loin de son pays, loin de la misère, là où tout est possible sur ces terres en friche. Dans la petite ville de Mercier, comme dans d'autres régions d'Algérie, les colons se succèdent pour essayer en vain de faire fructifier ces terres arides.
Emma Picard se souvient, la chaleur écrasante d'un été sans eau, le dur chemin jusqu'à la source pour puiser à peine de quoi survivre, les récolte et les bêtes brulées par la chaleur torride, la neige et l'hiver qui glace les os, encore pire que l'hiver de France, le printemps et les nuages de sauterelles qui anéantissent toutes les cultures, tous leurs efforts, le tremblement de terre qui détruit une partie de la ville.
Emma Picard se souvient, les rares éclats de rire de ses enfants, les bonheurs fugaces qui font croire qu'on peut y arriver, l'éveil de sa peau de femme encore jeune, sous Les caresses de Jules, le révolutionnaire. Elle se souvient du bonheur de voir pousser les cultures, de l'enfant fiévreux qui guérit, de l'aubergiste qui sourit.
Ce roman poignant, intense, montre la vie terrible des colons mais également celle des autochtones qui habitent les gourbis, dans les montagnes, et vivent les mêmes misères. Il décrit aussi l'entêtement de cette femme tellement mal préparée à vivre dans ce pays qui lui échappe et qui ne saura pas quitter à temps ces terres arides si peu faites pour les pauvres.
Comme une litanie, le récit alterne entre le monologue au présent avec Léon, et les souvenirs douloureux de cette vie algérienne. D'une traite, sans chapitre et sans paragraphe, avec peu de ponctuation, peu de majuscule et de point, pour mieux souligner le côté lancinant, ininterrompu, du malheur, comme un souffle gigantesque qui porte Emma vers ses derniers instants. Inspiré du récit « Au soleil » De Maupassant et de la situation dramatique vécue par les colons en Algérie entre 1866 et 1868, ce faux pas dans la vie d'Emma Picard est un beau récit tragique et bouleversant.



Lien : https://domiclire.wordpress...
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Amateurs de contes de fées passez votre chemin ici on parle de tragédie, et quelle tragédie ! L'histoire coloniale algérienne n'a pas produit que des colons riches et puissants, nombreux ont été ceux qui ont payé cher la quête de l'eldorado promis. C'est son histoire, sa lutte, son désespoir, son accablement et sa culpabilité qu'Emma nous raconte, en bout de course, une nuit de veille de Léon, le seul de ses quatres fils qui est encore près d'elle. Elle ne connaît rien de ce pays d'Afrique et de ses caprices et pour elle, son plus grand adversaire va se révéler être cette terre même qu'elle ne veut lâcher pour rien au monde, son climat et ses catastrophes. Cette terre qui ne veut pas d'elle, et que dire de ce Dieu des chrétiens qui semble l'avoir abandonnée. Quel entêtement, quel aveuglement !

Livre étonnant où l'auteur laisse le personnage prendre le pouvoir et s'abstient de toute intervention. On se demande même si on en est le lecteur ? Ne serait-ce pas la voix d'Emma que l'on entend ? Un long monologue, sans un point sauf le final qui signe une vraie fin.
Un roman poignant qui ne manquera pas de susciter la compassion mais aussi la révolte.
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Emma Picard est veuve et mère de 4 garçons, lorsque, fin des années 1860, le gouvernement français lui propose 20 hectares de terre...en Algérie ! Pour nourrir sa petite famille, Emma accepte ce déracinement, elle accepte d'aller rejoindre la cohorte de colons qui ont migré de la France vers l'Algérie à cette période. Dès lors, commence pour elle le début d'une longue descente aux enfers.

Emma raconte son histoire. Elle nous la raconte, à nous, lecteurs, mais elle la raconte aussi à Léon, le plus jeune de ses fils. Si ce roman nous arrive sous forme écrite, je n'ai de cesse pourtant, d'entendre la voix d'Emma qui raconte son histoire. Mathieu Bélézi écrit comme elle parle. le récit qu'elle nous fait de sa vie en Algérie est entrecoupé d'apartés destinées à son fils. On y découvre l'arrivée de la famille en Algérie, la découverte des terres, les amitiés et amours qui se lient...et les fléaux qui s'abattent. La sécheresse, les sauterelles, la dysenterie, la mort, la famine, l'âpreté du climat, rien ne leur est épargné !

Il n'y a aucun point, aucune majuscule, et pourtant, il y a bien un phrasé. Des pauses, des respirations, jalonnent cette espèce de psalmodie, cette longue plainte d'une femme, d'une mère, épuisée après un long combat contre les élèments pour réussir à maintenir à flot sa famille, pour aider son dernier enfant à survivre, pour ne pas oublier cette histoire, pour que chacun puisse mesurer la complexité de la situation des colons. La rythmique imposé par le flot de parole m'a presque bercée et, en même temps, m'a empêchée de lâcher le livre. Je l'ai lu d'une traite, j'ai écouté la voix de cette femme presque dans un seul souffle.

C'est le premier roman de Mathieu Bélézi que je lis. Visiblement, il en a écrit d'autres sur l'Algérie, je vais courir les découvrir. Une belle rencontre avec cette Emma Picard, âpre, mais belle.
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Peu de romans sont consacrés à la description de la vie des colons dans l'Algérie des années 60, du dix-neuvième siècle .Mathieu Belezi, qui termine par « Un faux pas dans la vie d'Emma Picard » sa trilogie algérienne après C'était notre terre et Les Vieux Fous , y fait parler Emma Picard, veuve qui décide de traverser la Méditerranée, après avoir eu vent de cette proposition du gouvernement français d'allouer des hectares de terre aux colons , pour encourager le peuplement de l'Algérie , lieu de colonisation , nouvel horizon promis à tous les aventuriers tant soit peu audacieux et volontaires .

Dans sa préface, Mathieu Belezi fait allusion, comme source d'écriture de ce récit, à l'ouvrage de l'historien Pierre Darmon : L'Algérie des passions, ouvrage qui révèle ce que furent les conditions de vie dans l'Algérie des années 1860 et suivantes : épidémies, sécheresses, attaques de sauterelles, tremblements de terre …

C'est ce cadre historique que reprend Mathieu Belezi dans son livre, dont l'originalité tient à l'absence partielle de ponctuation entre les phrases, et à l'utilisation systématique de l'apostrophe à l'un des personnages, Léon, l'un des fils d'Emma Picard. Après s'être installée dans sa ferme , non loin du village de Mercier-le-Duc, Emma et ses fils , Charles , Léon , joseph , Eugène , vont de désillusion en désillusion : la terre n'est pas généreuse en Algérie, elle se dérobe, elle est avare .L'eau y est rare , les catastrophes naturelles aussi .Jules Letourneur , un révolutionnaire convaincu , lui apporte quelque assistance, il la seconde dans les tâches quotidiennes .Mékika , domestique arabe, tente lui aussi d'aider Emma Picard, dans sa tentative de créer un domaine agricole prospère .Las , les catastrophes naturelles , l'avarice d'un créancier sans scrupules , la mort de l'un de ses fils, Joseph , ont raison du volontarisme d'Emma Picard , qui finit par maudire cette terre d'Algérie : « parce que devant toi je me sens coupable de vous avoir entraînés dans cette aventure coloniale sans queue ni tête qui ne nous a menés à rien , qui ne nous a rien rapporté, sinon des souffrances quotidiennes (…) coupable d'avoir écouté cet homme à cravate assis derrière son bureau de fonctionnaire , d'avoir cru à son boniment , de vous avoir entraînés sur des terres qui ne veulent et ne voudront jamais de nous . » Pertinente réflexion sur le sens et la trace de l'aventure coloniale, cent trente ans après …

Mathieu Belezi réussit le pari d'éclairer cette période par la fiction romanesque, en décrivant le sort de cette famille, dont on se dit qu'il fut partagé par beaucoup à cette époque, et annonciateur des drames futurs de l'Algérie française.

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Fin des 1860. Emma Picard se voit offrir par le gouvernement français vingt hectares en Algérie. L'homme derrière son bureau lui décrit l'Algérie comme un pays d'abondances. Cette veuve quarantaine mère de quatre fils ne refuse pas et traverse la Méditerranée avec ses fils. Les terres se situent entre Mascara et Sidi Bel Abbès.

Emma raconte à son Léon le seul fils qu'il lui reste ces années de labeur, de peines, de douleur. Et elle lui rappelle comment ils n'ont pas ménagé leurs peines aidés par Makika qui travaillait pour les anciens colons de cette ferme avant eux. Vingt hectares d'une terre aride aux entrailles stériles et il faut aller chercher l'eau à dos d'âne très loin. Ils défrichent, sèment, espérant des récoltes prometteuses. Comme d'autres colons arrivés avant eux et comme ceux qui continuent chaque semaine d'arriver de France car l'Algérie est une colonie de peuplement. Mais le fonctionnaire de l'état n'a dit aucun mot sur ce sujet. Il faudra affronter l'été caniculaire où animaux et cultures mourront, les sauterelles qui anéantiront tout, les maladies, l'hiver.
Emma doute, se sent dupée mais elle doit continuer à se battre contre cette terre. Et ils le font malgré les ventres tenaillés par la faim. La dysenterie emporte un de ses fils et l'argent manque. Qu'ont-ils fait pour mériter cela? Elle renie son Dieu de lui infliger tant de souffrances malgré les bonnes paroles du curé.
Son monologue est un cri, elle se reproche d'avoir entraîné ses fils dans cette descente aux enfers, d'avoir cru à ce qu'on lui promettait. Et les dernières pages où la colère côtoie la folie engendrée par le désespoir et la culpabilité de mère font affreusement mal.

A travers Emma Picard, Mathieu Belezi nous raconte un pan peu glorieux de l'histoire de France. Des hommes et des femmes trompées et sacrifiés au nom de la colonisation à qui il rend hommage.
Un roman bouleversant qui jamais ne verse dans les excès mais explore très justement les pensées d'Emma. A lire absolument !
Lien : http://claraetlesmots.blogsp..
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Un récit dépouillé- et j'aurais envie de dire dépouillant- de la vie de colon au XIXe dans une Algérie dévastatrice.... Difficile de refermer ce roman sans une forte sensation d'inéluctable. Belezi, pour cela, a savamment choisi un style simple, percutant, sous forme d'un monologue dont on sait dès le départ qu'il ne peut s'achever qu'avec le dernier souffle. Un récit beau et poignant, à couper le souffle !
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Je pense que ce live est de loin le plus dépriment que je n'ai jamais lut, et pourtant je l'ai lut d'une traite et j'ai été passionnée par le combat de cette femme courageuse.
Le style est fluide, malgré l'absence de points qui m'a un peu déroutée au début de ma lecture. Au fils des pages, tel une longue plainte Emma Picard nous emporte dans sa spirale tragique sans pour autant tomber dans le mélo, et faire couler les larmes. Elle raconte à son fils leur histoire, et on sent chez Emma l'urgence de témoigner en toute sincérité, sans rien cacher à son fils et au lecteur, a la fin l'urgence se fait de plus en plus pressante voir oppressante.
Même s'il n'est pas un livre historique en soit, "Un faux pas dans la vie d'Emma Picard" relate de façon romanesque une période peu connu de la colonisation de l'Algérie. La France aillant besoin de colons sur place promet monts et merveilles à des familles pauvres et en détresses. En réalité ce n'est pas l'Eldorado qui attend les colons la-bas mais une terre aride, incultivable et la misère, bien pire que celle qu'ils ont put vivre en France.
Même si elle peu déranger, on ne peu sortir indemne et oublier cette lecture tant elle est profondément bouleversante. Un livre à lire absolument, et moi, je remercie les éditions Flammarion et Babelio qui m'ont permis de découvrir ce livre.
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Dans ce long monologue Emma Picard raconte sa vie de colon en Algérie dans les années 1860. Un monologue qu'elle interrompt régulièrement pour s'adresser directement à son dernier fils malade. Elle raconte l'espoir d'une vie meilleure et la désillusion, elle raconte le travail harassant, la misère, la famine, la maladie, la nature hostile. Emma est une femme au bord de l'abîme qui a tout perdu. Raconter lui permet d'exorciser ces années de malheur, car l'Algérie ne lui aura offert que cela. C'est un texte bouleversant. L'alternance du discours d'Emma et ces interpellations à son fils donnent un texte rythmé.

Emma est une mère avant tout. Elle est coupable selon elle. Coupable d'avoir cru en l'avenir, coupable d'avoir cru en une vie meilleure, coupable d'avoir provoqué le destin. Elle nous livre sa confession sans fard.


J'ai tout de même un souci avec ce texte : les phrases se succèdent sans ponctuation (en tout cas sans point) ni majuscules. D'un côté je comprends que cela donne le rythme d'une litanie au texte. Mais tout de même, je n'en ai pas compris l'intérêt. C'est une mode ou quoi ? Au cours des derniers mois je crois en avoir lu au moins quatre. Si parfois cela semble en adéquation avec le narrateur (La couleur du lait de Leyshon Nell où la narratrice est une jeune domestique sachant à peine lire et écrire et qui écrit son histoire) dans d'autre cas comme dans Charlotte je n'en vois pas du tout l'intérêt.


J'ai par ailleurs aimé découvrir l'histoire de ces colons arrivés en Algérie un peu par hasard au cours du 19ème siècle. Des paysans, des travailleurs dans la misère à qui l'on faisait miroiter un avenir meilleur et qui sont partis des rêves pleins la tête pour se retrouver confrontés à une réalité bien différente de ce qu'ils avaient imaginé. A cette époque, l'Algérie est une terre française et on le ressent bien dans le texte de Mathieu Belezi, Emma ne côtoie que des colons et les Algériens sont au mieux employés par les Français et le plus souvent écartés dans la montagne et condamnés à une vie misérable.


Un texte puissant et émouvant que je recommande.
Lien : http://tantquilyauradeslivre..
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L'héroïne, Emma Picard, est un personnage très intéressant et remarquablement décrit. Le roman met en valeur l'humanité de cette femme, à la fois forte et fragile, confrontée à des situations très difficiles. L'action se passe vers 1860, peu après la "pacification" de l'Algérie. Le gouvernement a "offert" à cette veuve encore jeune, pourvue de quatre enfants, une grande parcelle dans l'Ouest du pays. Elle arrive avec beaucoup de courage pour faire fructifier cette terre pauvre et aride, avec l'aide de ses fils aînés, sans se douter des difficultés qu'elle va rencontrer: le froid rigoureux en hiver, la chaleur extrême en été, le tarissement des puits pendant la sècheresse, les fièvres, les nuées de sauterelles qui ne laissent rien après leur passage, etc… Rien ne lui est épargné, même pas un tremblement de terre !

Ce roman est plus qu'un beau portrait de femme. Mathieu Belezi évoque ici l'époque du début de la colonisation française, qui est très méconnue. Combien de Français de métropole sont alors venus en Algérie, pauvres mais ambitieux, convaincus de mettre en valeur les terres qui leur étaient allouées ? Et combien ont échoué et ne sont jamais devenus des "gros colons" (ceux qu'on a dénoncés, parfois injustement, au XXème siècle) ?

Mais il y a aussi le style inimitable de Mathieu Belezi, que j'ai découvert il y a quelques années, avec un livre très remarquable, intitulé "C'était notre terre". Dans le présent roman, le style me semble un peu moins lyrique et incantatoire. Mais la narration - par Emma elle-même - est très particulière: elle avance assez lentement, avec des incises, avec des répétitions lancinantes, des redondances volontaires, comme pourrait parler un paysan. La langue est parfois poétique, parfois prosaïque. A ce récit un peu décousu, se juxtaposent des interpellations fréquentes et répétitives de la mère à son plus jeune fils (Léon), dont on connaitra la vraie signification à la fin du roman.

Un roman très particulier, magnifique, solaire et pourtant sombre, écrit par un auteur qui, curieusement, n'a aucune racine familiale en Algérie.
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