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Critique de JeanLouisBOIS


La musique d’une vie.
Si on demandait aux gens de la rue de citer spontanément des génies de la musique classique, il y a fort à parier que Schubert serait un des grands absents de la liste. Olivier Bellamy, l’animateur d’une émission musicale sur Radio Classique, a voulu essayer de réparer cette injustice. Il s’attaque à cette tâche en nous livrant une biographie thématique du compositeur autrichien du début du 19èmé siècle et sa postérité. En une quarantaine de chapitres, il s’attache à mettre en lumière les différentes facettes du compositeur d’environ mille œuvres, à travers sa musique, ses écrits et les témoignages laissés par ses amis et ses connaissances. Schubert a brillé par ses œuvres pour piano solo, ses symphonies, sa musique de chambre (quatuors, quintettes, octuor, trios avec piano, sonate pour arpeggione et piano) et surtout ses lieder. Olivier Bellamy nous montre que ce qui fait la force et l’originalité de cette musique repose sur la capacité de Schubert à traduire avec un minimum de moyens une palette pratiquement infinie de sentiments et à les évoquer avec une apparente facilité chez l’auditeur. C’est peut-être ce qui explique les résonnances qu’il continue d’entretenir avec nos sensibilités contemporaines.Toute son œuvre laisse filtrer, à travers une certaine légèreté superficielle, la constante expression d’une douleur diffuse et fondamentale. A tel point qu’on peut légitimement définir Schubert comme « le compositeur de la douleur » (p.27). L’auteur utilise toute une analyse musicale relativement précise et technique mais de façon simple et accessible pour mettre en évidence les rapports de la vie de Schubert et de sa musique, les deux apparaissant souvent indissociables, à tel point que chacune vient souvent relayer l’autre sans qu’il soit possible d’établir une préséance. L’art de Schubert consiste à faire porter par sa musique un message universel : celui du déchirement de l’homme devant la beauté du monde et la mort qui le guette. Cette philosophie humaniste transparait particulièrement dans ses lieder, qui constituent « le laboratoire » de sa musique (p.71). C’est dans cette forme musicale associant un chanteur et un piano (sur des poèmes de Goethe, Schiller, Mayrhofer…) qu’il donne toute la mesure de son originalité et de son génie (c’est d’ailleurs lui qui invente le genre). Faisant totalement corps avec son art, Schubert meurt à 31 ans, pratiquement inconnu du grand public et ne sera redécouvert qu'une vingtaine d'années plus tard par le musicien Robert Schumann.
Olivier Bellamy place toute cette histoire belle et pathétique du compositeur viennois à la portée de son lecteur avec beaucoup de talent. La bonne qualité littéraire d’un Hiver avec Schubert permet une lecture agréable et palpitante sur un sujet qui peut apparaître a priori âpre et ardu. Pour autant, le livre ne cède jamais à la facilité.On peut considérer que l’on a affaire ici à un ouvrage de vulgarisation, exigeant et bien construit, qui, sans prétendre à l’exhaustivité, donne une idée assez fouillée de la vie et de l’œuvre de Schubert. Un seul bémol qui pointe ici et là, c’est une discrète tendance à l’hagiographie. Péché véniel qui pourra être facilement pardonné car le sujet s’y prête sincèrement : comment ne pas éprouver de la sympathie pour Schubert et la musique qu’il a composée en si peu de temps ? Inutile donc de vous conseiller chaudement de passer Un Hiver avec Schubert … et certainement un peu plus en réécoutant avec délectation ses œuvres magistrales.

(Livre lu dans le cadre de Masse Critique).
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