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Livre très dense avec beaucoup d'anecdotes, à l'américaine, où on finit par voir de la traduction un peu partout au point que certains raisonnements laissent sceptique. Qu'importe, la conclusion a le mérite d'être claire : « Il faut traduire. Encore et toujours plus. On ne le fera jamais assez. »
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David Bellos est professeur de littérature française et comparée à Princeton University (USA), où il dirige le programme de traduction et communication interculturelle. Il est titulaire d'un doctorat de l'université d'Oxford et a enseigné à Oxford, Édimbourg, Southampton et Manchester. Auteur de nombreux livres et articles sur l'oeuvre De Balzac, ainsi que de deux biographies, de Georges Perec (1994) et de Jacques Tati (2002). David Bellos est aussi traducteur. Parmi ses travaux, les versions anglaises de la Vie mode d'emploi de Georges Perec, L'Histoire universelle des chiffres de Georges Ifrah, et plusieurs romans d'Ismail Kadare. Son essai, le Poisson et le bananier. Une histoire fabuleuse de la traduction, est paru en 2012.
Très intéressé par la problématique de la traduction littéraire, quand une aimable bloggeuse m'a signalé cet ouvrage, je n'ai pas manqué de l'inscrire sur ma liste des livres à lire. Et c'est vrai que le bouquin est passionnant.
David Bellos envisage la traduction dans différents domaines d'activité, non seulement littéraire mais aussi dans le cinéma (doublage et sous-titres), dans le milieu juridique et législatif, ainsi que le rôle des interprètes dans les réunions internationales comme à l'ONU par exemple. Chaque activité impose ses propres contraintes et les conséquences en seront diverses comme on l'imagine. La mise par écrit de textes juridiques internationaux en plusieurs langues ou dans un genre plus ludique, la traduction d'une BD avec l'entrave physique de la bulle qui interdit de dépasser la place allouée au texte, sont des exemples extrêmes des problèmes rencontrés par les traducteurs.
Globalement le bouquin est passionnant à plus d'un titre. L'auteur signale des idées fausses « les Esquimaux ont une centaine de mots pour dire « neige » [une idée] réfutée depuis bien des années », des contre-vérités « l'anglais serait plus simple que les autres langues » ou bien soulève des paradoxes réjouissants « Il existe actuellement environ sept mille langues parlées à travers le monde (…) pour communiquer avec la plupart des habitants de la Terre, il vous suffirait d'en connaitre neuf ». Il défend même une théorie iconoclaste ( ?) « … la parole n'est pas apparue pour permettre de communiquer avec des membres d'autres groupes de congénères (…) ou pour favoriser la communication entre membres d'un même groupe » Ca c'est ce que l'école nous apprend, « selon toute vraisemblance, l'utilité première de la parole humaine fut d'affirmer la différence, non l'identité. » Et bing sur la tour de Babel !
Le texte est écrit « simplement », sans excès de mots complexe et sur le ton du roman, avec un léger humour même ; nous sommes loin d'un essai universitaire pompeux et froid, alignant des phrases incompréhensibles pour le non-spécialiste.
Il y a néanmoins des aspects négatifs au bouquin qu'il faut prendre en compte, car il n'est pas donné (absent à ma bibliothèque municipale, j'ai attendu d'en trouver un exemplaire d'occasion consulté au préalable avant de l'acheter). On ne peut échapper à quelques passages abscons ou sibyllins et ça tire en longueur souvent, j'ai même trouvé des pages carrément chiantes à lire, il faut quand même le dire ! La construction peut aussi agacer, David Bellos avance des faits qui confortent les idées reçues du lecteur lambda avant de les réfuter plus tard, cet effet de « dévoilement différé » ridiculise un peu le lecteur… Autre critique, David Bellos ne donne jamais son avis sur ce qui ressemble à des critiques ou à tout le moins, des paradoxes qui mériteraient d'évoluer.
Donc vous l'aurez compris, un bouquin qui ne s'adresse pas à tout le monde obligatoirement. J'ai essayé d'en donner le pour et le contre afin que chacun puisse juger par lui-même mais je le crois assez riche pour que tous y butinent ici ou là, matière à intérêt.
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Il se trouve que « tercüman », l'un des substantifs du turc pour indiquer le traducteur, qui a donné en anglais « dragoman », en français « truchement », et qui entretient des liens de fraternité avec le mot équivalent dans une douzaine de langues : « mutarjim » en arabe, « metargem » en hébreux, « motarjem » en perse, « tarjomân » en dari, « таржимон » en ouzbek, « tǝrcümǝçi » en azerbaïdjanais, etc. etc., est l'un des mots quasi inaltérés les plus anciens du monde, puisqu'il remonte à l'akkadien « targumannu » attesté en Mésopotamie au IIIe millénaire avant J.-Ch. Un mot de cinq mille ans. Si nous refusons le mythe biblique hautement improbable d'une langue antébabélienne unique, il est légitime de penser qu'il se réfère, entre les quelques siècles de la traduction écrite et les nombreux millénaires de l'interprétariat oral, à l'une des activités humaines les plus archaïques en absolu, dont le contenu a si peu voire pas du tout évolué.
Au cours de e laps de temps, nombreuses sont les pensées que l'on en a conçues, y compris les concepts courants des études traductologiques qui, à l'évidence, souvent « ne sont que des extensions métaphoriques - des élaborations de la métaphore implicite dans la formation étymologique du mot "traduction" lui-même. » (p. 41)
Dès lors, que faire de l'héritage intellectuel de l'auteur, traducteur du français (notamment de Perec) et professeur de traduction de son état, succédant à un certain Roy Harris qui « avait refusé d'ouvrir un séminaire sur la traduction sous prétexte qu'il ne savait pas ce que [elle] pouvait bien être » ? (p. 11)

Voilà donc 360 pages sur une fonction cérébrale, une activité intellectuelle, une pratique sociale, une nécessité juridique, une production artistique aussi vieille que la maîtrise du feu (grosso modo) pour démonter qu'il est insensé de la définir, et que presque tout ce que nous en savons - d'elle, des langues, de la linguistique voire de la sociolinguistique et de bon nombre de disciplines afférentes - est faux, ou inutile, ou peu pertinent, en tout cas incapable de résister à la preuve du contraire. Une véritable maïeutique socratique. Et cet exposé n'est aucunement une démonstration scientifique ou académique structurée, annotée, référencée, inattaquable, mais une succession d'anecdotes, d'exemples, de citations, de préciosités très doctes et de facéties subtiles et légèrement humoristiques où s'alternent les bédés d'Asterix et le procès de Nuremberg, le « jazzercise » à traduire en araméen et le film Avatar, sans oublier la Grande Escroquerie du Lexique Étendu Esquimau (G.E.L.É.E) (les Esquimaux ont une centaine de mots pour dire « neige ») ni la genèse du « traduttore, traditore ».
À s'en tenir au premier degré de lecture, le livre n'est que ça, une série d'anecdotes regroupées un peu arbitrairement sous des titres amusants, au cours de laquelle on se demande souvent où l'auteur veut bien en venir. Mais bon, chacun le sait bien, les degrés de lecture sont multiples... à l'instar des étapes de la prise de conscience du « je sais que je ne sais rien » (que Bellos a l'humilité de ne pas citer, Socrate ne figurant même pas dans son index, ce qui m'épargne le labeur de transcrire la phrase grecque toute en symboles insérés un à un...).
Correction : vers la p. 320 certaines « vérités » commencent à nous être soumises sub specie de « Ce que font les traducteurs » ; et progressivement, une nouvelle métaphore voit le jour, non dépourvue d'un fond socratique évident :

« les traducteurs, eux, sont en quelque sorte des marieurs d'un genre particulier. Mais il serait trop simple de parler d'union du fond et de la forme. C'est comme quand nous devons établir une correspondance entre des visages et des portraits : nous nous fondons sur de multiples dimensions et qualités pour juger s'il y a eu, oui ou non, traduction.
[…]
Les traducteurs exercent cette capacité, le PMS ou pattern-matching-skill, dans les domaines spécifiques de l'expression orale et écrite en langue étrangère. » (p. 344)

Comment ne pourrais-je pas adorer un tel livre, d'autant plus que son incipit cite Douglas Hofstadter et que son excipit est l'exhortation : « Il faut traduire. Encore et toujours plus. On ne le fera jamais assez. »
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Un titre étrange et amusant qui révèle en réalité une réflexion originale autour de la thématique de la traduction, à travers cet essai qui se présente, non pas comme un manuel de traduction avec ses techniques et méthodes, mais comme un guide de voyage.
Voyage à travers son histoire, ses conventions, son évolution, ses fonctions, avec des exemples et anecdotes tirés des quatre coins du monde et de tous les domaines où elle intervient (BD, sous-titrage, diplomatie, tourisme, littérature, humour, traduction automatique - j'ai été bluffée par la découverte du fonctionnement de Google Translate - épatant!).

Agréablement instructif, cet ouvrage est riche de révélations surprenantes qui vont au-delà de l'anecdotique et suscitent plein de réflexions, car l'auteur pose des questions auxquelles on ne réfléchit pas vraiment (que fait la traduction, et non, qu'est-ce?). Il bouscule ainsi quelques idées préconçues, clichés ou erreurs convenues dans l'univers de la traduction.
Cela m'a ouvert les yeux sur beaucoup de choses, et même si j'ai toujours été admirative de la profession et que j'ai toujours reconnu la difficulté de ce travail, ça m'a amenée à revoir certains de mes réflexes, positionnements et certitudes vis-à-vis de la traduction.

Cet essai bien documenté et argumenté est relativement conséquent, quelques 350 pages qui semblent une broutille évoquées ainsi, mais le format est grand et la police bien tassée, occupant quasi tout l'espace de la page. Sérieusement, je pense que dans un autre format et une mise en page plus aérée, ce livre pourrait faire facilement le double, voire plus.
Heureusement, le propos est passionnant, diversifié, et relativement tout public. Je dis "relativement" car à travers des anecdotes qu'on ressortirait bien volontiers lors d'un dîner, non pas mondain, mais convivial, chacun peut y trouver son compte, cela dit, par moment, la lecture n'était vraiment pas aisée pour moi, requérant toute ma concentration sur certains passages aux phrases trop subtiles, surtout quand l'auteur se lançait dans des démonstrations et réfutations.
Je réfléchis encore à cette phrase par exemple:

"La traduction présuppose non pas la perte de l'indicible au cours d'un acte donné de médiation interlinguistique (tel que la traduction d'un poème), mais le caractère non pertinent de l'indicible en matière d'actes de communication."


A noter également que cet ouvrage en français a été spécialement adapté pour les lecteurs français, et que l'auteur a publié deux versions anglaises de ce livre, une pour le public américain, une autre pour le public anglais. Ceci en dit long encore une fois sur la porosité du domaine de la traduction qui, au-delà de la traduction du sens, peut avoir à s'adapter à un contexte culturel pour faire sens justement !

Une petite réflexion perso que je m'étais faite après lecture: ce livre est très complet tellement il brosse de langues et de siècles, et l'auteur a minutieusement étudié tous les domaines d'intervention de la traduction, mais il en a omis un (possiblement volontairement) qui a de l'importance à mes yeux. Hé oui, la langue des signes, qu'en fait-il?
Lien : http://lecture-sans-frontier..
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"Que font réellement les traducteurs? Combien y a-t'il de modes différents du traduire? (phrase assez incompréhensible, j'ai dû mal recopier, mais n'ai plus l'exemplaire) Qu'est-ce que les emplois de cette mystérieuse capacité nous apprennent sur les sociétés humaines d'hier et d'aujourd'hui? Comment les faits de la traduction sont-ils liés à l'usage de la langue en général - et à nos conceptions de ce qu'est une langue?"

Avec un menu pareil, autant dire que je me suis régalée, que j'ai parfois écarquillé les yeux, que j'ai beaucoup appris, que je me suis interrogée...

La traduction, ce n'est pas seulement réservé à mes chouchous anglais, mais aussi aux titres et dialogues de films, aux journaux, aux lois, aux procès (en 2011, traduire une conversation téléphonique du fulani?), aux conférences internationales, aux recettes de cuisine, à l'humour, etc... La traduction existe depuis aussi longtemps que les hommes ont voulu communiquer et l'histoire de la traduction est évoquée par petites touches.

L'auteur, professeur de littérature française et traducteur de Perec, Kadaré, .. sait de quoi il parle et a mûrement réfléchi sur son art. Bien sûr, il défend avec passion son métier et s'élève contre les critiques habituelles sur la traduction de la poésie, la "bonne" traduction prétendue impossible, la fidélité à la source, l'équivalence, le sens...
Je signale cependant à l'auteur qu'il existe des traductions de Guerre et Paix en français où le passages en français dans l'original sont en italique ( d'accord, ce n'est pas un moyen purement linguistique de distinction de ces phrases, mais typographique, cependant fort satisfaisant à mon goût) (p 216)

350 pages assez denses, c'est sûr, mais toujours émaillées d'exemples passionnants. Je n'ai pas tout compris sur la traduction simultanée, mais ai découvert comment fonctionne Google Translate! (trop fort!). En prime j'ai fait une révision sur le langage humain, forcément la base de presque tout! Et saviez-vous que le latin a droit chaque jour à une demi-heure de nouvelles diffusées depuis Helsinki?

Au final, je suis frustrée de ne pouvoir rendre compte de la richesse de ce livre, qui doit évidemment être découvert!

Lien : http://enlisantenvoyageant.b..
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Qui étaient les drogmans ? Comment sous-titrer un film ? Dans quelle langue écrire votre livre si vous souhaiter le diffuser dans le plus grand nombre de pays possible ? Existe-t-il une langue originelle, ancêtre de toutes les langues du monde ? Est-il possible de traduire la poésie ? Ce sont quelques-unes des questions qu'étudie David Bellos dans ce brillant essai sur la traduction, justement traduit avec beaucoup de talent (et le concours de l'auteur) par Daniel Loayza.

Le poisson et le bananier ? le titre peut paraître curieux, mais renvoie à une anecdote inédite au sujet de la traduction de la Bible dans une langue asiatique, destinée à l'usage de personnes n'ayant jamais vu un figuier de leur vie. Comment traduire alors une parabole pour laquelle il n'existe pas de mot équivalent ? En remplaçant le mot « figuier » par celui de « bananier ». Enfantin, non ? Cette histoire n'est qu'un exemple parmi les centaines d'anecdotes choisies avec soin, vivantes, souvent drôles et toujours intéressantes que David Bellos emploie pour illustrer son essai. le tout raconté avec un style jamais trop didactique et pourtant accessible à tous, citant des dizaines d'auteurs qu'il nous donne envie de découvrir…
Bref, oubliez vos cauchemars de cours de langues ! Si vous vous intéressez un tant soit peu au problème de la traduction, cet ouvrage vous en apprendra beaucoup sans jamais vous ennuyer.
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Lu en VO (Is that a fish in your ear?).
Lu en deux fois mais toujours pas terminé, ce livre est pourtant intéressant. Mais malgré sa volonté de rendre la linguistique "fun", l'auteur n'a pas réussi à me faire rire, mais plutôt à m'assomer par moments. Si ce livre a été d'un apport concret sur certaines notions, je le trouve globalement trop "scientifique" ou technique pour atteindre les objectifs de légèreté qu'il se fixe.
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Une défense et illustration de l'art de traduire.
Lien : http://www.pavillonblanc-col..
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