Eloge de l'amitié : La Soudure fraternelle

Tahar Ben Jelloun croit en l'amitié et à ses vertus. Il place même l'amitié au dessus de tout. Depuis son enfance à l'école coranique de Tanger jusqu'à Paris où il reçoit le prix Goncourt, il a évidemment été déçu par des hommes (moins par des femmes) qu'il pensait ses amis et qui l'ont trahi. Des blessures profondes et persistantes, mais également de très belles histoires d'amitié fraternelle qu'il raconte avec parfois quelque complaisance envers lui-même — quand il se donne le bon rôle, celui de l'ami inconditionnel et sans faille — compensée fort heureusement par un idéalisme de bon aloi et une réelle sensibilité poétique.

"L'amitié qui se lit sur les visages et dans les gestes devient comme une prairie dessinée par un rêve dans une longue nuit de solitude."

Ce samedi là, après quelques bons 25 kilomètres, porte close chez mon bouquiniste.... je me suis rendue alors dans un dépôt vente, espérant y trouver consolation dans quelques trouvailles.
Ce livre est venu à moi, je ne le cherchais pas.... mon regard s'est posé sur lui au moment de partir.... je n'avais rien trouvé de frénétique, jusque là....
Discret, il était niché parmi de gros livres, mais son titre et sa quatrième de couverture ont attiré mon attention. Là, j'étais sans mot.... j'avais trouvé une pépite !
En effet, je n'avais jamais cherché à lire un livre sur ce sujet ! Pourtant le sujet est rarement abordé de cette façon, sinon qu'au travers de romans.
Tahar Ben Jelloun nous fait alors l'éloge de l'amitié au travers de portraits de ses amis. Il regarde dans le rétroviseur et nous raconte ses histoires d'amitié, toutes uniques, singulières, simples, belles.
Il met l'amitié au rang de vertu du fait de sa rareté.... où sont intégrés le respect, la confiance, la bonne distance, la fidélité, la loyauté, la vérité, la constance.
Elle ne supporte pas la trahison et le mensonge. Elle est fragile.
Comme il le dit si bien : "l'amitié n'est pas dite, elle est vécue, elle est présence.......... sans être pesante."

Chaque amitié nous apporte quelque chose de différent.

La véritable amitié est celle qui résiste aux outrages du temps.

L'ami le vrai, c'est celui qui reste quand tout le monde est parti.....

Ce livre nous renvoie à nos propres vécus :
- à ceux qui sont restés quand cela n'allait pas,
- à ceux qu'on a attendu qui ne sont pas venus,
- à ceux qui sont arrivés que vous n'attendiez pas...

Je pense à tous mes amis (es), ceux qui sont toujours là....et aussi à deux amis virtuels mais bien réels qui ont été là et le sont toujours.
Merci les gars, chapeau bas.....
Ils se reconnaîtront à la lecture de ces mots.

"L'ami aime en tout temps, mais dans l'épreuve il se montre un frère"....(Proverbe biblique)

Je vous recommande cette lecture pleine de douceurs, de vérités....

Ainsi que nous le rappelle le dernier ami commis par Tahar Ben Jelloun en 2005, La soudure fraternelle est fragile,fluctuante,soumise aux courants de la vie,à l'évolution personnelle. Elle peut d'un jour à l'autre se briser et engendrer blessure et souffrance.
La soudure fraternelle est un récit autobiographique dans lequel l'auteur fait un tour d'horizon complet (de l'enfance à nos jours) de ses amis et donne à réfléchir sur les causes d'une cassure (mort,mensonge,manqued'écoute,tyrannie,éloignement,égoïsme,
avarice,trahison,divergences, vérités qui fachent,conjoint possessif,critiques,rivalités,jalousies,mesquineries...) ou d'un renfort des liens (écoute,solidaritégénérosité,intelligence,imagination,goûts communs,fidélité...).
Simplement et honnêtement, il conte tour à tour Hafid de l'école coranique,Nourredine le moqueur,Boulker le cruel,Lofti entre musique et camp disciplinaire, Abdel qu'il admire mais.. et des fidèles comme Odette la presque soeur, Edmond l'attentif...
Conclusion: "Toute vérité n'est pas bonne à dire", l'amitié doit être "toujours pressante, jamais pesante" et parfois "les mots prennent la place de l'ami espéré".
Du vrai de vrai!
Tahar Ben Jelloun, né à Fes, traduit en plusieurs langues dans le monde entier a obtenu en 1987 le prix Goncourt pour La nuit sacrée.

Tahar Ben Jelloun nous décrit ces amitiés avec le comment et le pourquoi. Bien sûr, il y a aussi les amitiés qui se cassent. Lecture agréable, peut-être un peu dépassée par les gens qui y sont décrits puisque ceci a été écrit en 1996.