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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
« Pour avoir manifesté calmement, pacifiquement, pour un peu de démocratie, j'ai été puni. Pendant des mois, je n'ai plus été qu'un matricule, le matricule 10 366. Un jour, alors que je ne m'y attendais plus, j'ai retrouvé la liberté. J'ai pu enfin, comme je le rêvais, aimer, voyager, écrire, publier de nombreux livres. Mais pour écrire La Punition, pour oser revenir à cette histoire, en trouver les mots, il m'aura fallu près de cinquante ans. » ainsi se termine le récit d'un enfermement, d'une humiliation, d'une détresse. Qui a-t-il de pire pour un étudiant en philosophie que de se retrouver privé de ce qui lui est essentiel : la liberté. Mais ce sont dans ces circonstances que, pour un prisonnier, la poésie prend tout son sens et laisse dégager une odeur de liberté. Ecrire, penser, créer, c'est être libre, c'est se libérer, c'est donner à être libre. Grâce à sa mémoire, l'aidant à se souvenir des auteurs qu'il a lus, il survit à la pire des punitions. Tahar Ben Jelloun raconte ici sa propre « réclusion solitaire ». Il passe du camp d'El Hajeb à celui d'Erhmoumou en gardant l'espoir de sortir bientôt de cet enfer.
 
Au Maroc, les années noires de l'époque Hassan II ont fait couler bien plus de sang et de larmes que d'encre. Ces années de plomb et de répression à partir de 1963 ne diminueront qu'à la mort du roi en 1999. Les figures emblématiques de cette terreur sont le général Oufkir (le militaire) et Driss Basri (le commissaire). Ce dernier s'installera bien plus tard au ministère de l'intérieur en maintenant une politique dictatoriale dans le pays.
Pendant les dix-huit mois de captivité, Tahar Ben Jelloun a affaire au commandant Ababou et à son homme de main Aqqa (il s'agit en réalité de l'adjudant-chef Harrouch Akka). Ababou et Aqqa préparaient le putsch de Skhirat du 10 juillet 1971 contre le roi Hassan II. Il s'en sortira vivant et exécutera les militaires, dont Ababou. C'est alors que la répression contre les opposants politiques se durcit. Une nouvelle prison voit le jour pour les prisonniers politiques et tous ceux qui gênent le pouvoir royal: Tazmamart.
 
Dans ce livre écrit avec beaucoup d'émotions, Tahar Ben Jelloun apporte son témoignage sur une période du Maroc qu'il ne pourra jamais oublier, comme le poète Abdellatif Laâbi ou d'autres écrivains et intellectuels marocains obligés de s'exiler pour survivre. On se souvient du livre de Gilles Perrault, Notre ami le Roi (Gallimard, 1990). Ce journaliste avait retracé la trajectoire du roi Hassan II et dénoncé la corruption galopante, la cruauté du régime et l'absence totale des droits de l'Homme au Maroc.
 
Depuis, le Maroc a certes bien changé. Mais la pauvreté, l'illettrisme, l'analphabétisme, les inégalités et la corruption font encore de cette nation un pays qui peine à sortir du Tiers-monde.
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Maroc, 1965, Tahar Ben Jelloun alors âgé de 18 ans, participe avec d'autres étudiants à une manifestation pacifique pour la démocratie. C'est à partir de ce jour que sa vie a basculé. En effet, comme 94 autres étudiants il est arrêté et envoyé comme punition dans un camp pour soi-disant suivre un service militaire. En réalité, pendant 19 mois Tahar va subir l'humiliation, la torture tant physique que psychologique. Face à cette punition, un sentiment d'injustice, d'incompréhension accentue encore l'horreur vécue au quotidien. Tahar nous décrit avec précision les atrocités qu'il a vues et subies de la part de ces militaires au comportement psychopathe. Chacun se soumet en silence aux ordres de ces hommes que rien n'arrêtent. Personne ne sait ce que ces jeunes vivent chaque jour. D'ailleurs, la peur d'être éliminé ne les quitte pas car qui serait au courant, qui s'inquiéterait ?
Pour survivre, pour surmonter tant de cruauté Tahar se réfugie dans la poésie. Il se rappelle certains poèmes de Rimbaud et commence à écrire quelques vers. C'est ainsi qu'il a commencé à être écrivain. Il lui faudra, cependant, attendre 50 ans pour rédiger ce témoignage. Il a choisi de raconter cet épisode de sa vie au présent, donnant aux lecteurs l'impression de vivre ce cauchemar avec lui. Cette punition l'a marquée au plus profond de lui-même et a certainement contribué à être l'homme qu'il est aujourd'hui. Un livre qui montre comment l'appât du pouvoir peut mener certains hommes à commettre l'inimaginable.
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La punition ou un camp d'emprisonnement dont les méthodes s'apparentent aux camps de concentration de la seconde guerre mondiale.

Pour avoir manifesté pacifiquement, Tahar Ben Jelloum est convoqué au camps d'El Hajeb. Une convocation remise en main propre par des hommes venus en jeep chez lui. Ce n'est que le début des intimidations, de la violence, de l'humiliation et de la déshumanisation. Leur crime : être cultivés et se réunir pour échanger sur la politique.

Les internés du camp ont un matricule et ne sont plus appelés par leur nom ou prénom.
Une sélection par des médecins, même si on constatera que l'avis n'a finalement que peu d'importance. Il peut même parfois empirer la situation.
Des travaux forcés pendant lesquels les "punis" doivent porter 20 à 30 kilos de pierre sous une chaleur suffocante sans avoir le droit de s'hydrater, la nourriture à base de graisse de chameau avec des produits avariés. Bien sûr, à la moindre faiblesse des hommes, ils sont doublement frappés. Il est interdit de se comporter en "femmelette".
Un fonctionnement qui rappelle tristement les camps nazis.

Un récit où règne la bêtise humaine, l'idiotie et l'absurdité des hommes incultes qui ne jurent que par leur propre définition de la virilité et de ce qu'est "être un homme".
L'horreur des hommes n'a pas de limite. La force et la violence sont plus fortes que l'érudition.

Un témoignage poignant et puissant.
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En mars 1965, dans les grandes villes marocaines des étudiants et professeurs manifestent pacifiquement contre une réforme de l'éducation. Quatre-vingt-quatorze  d'entre eux vont être arrêtés et enfermés pendant dix-neuf mois. Sous couvert de service militaire, ces jeunes sont parqués dans une caserne, dirigés par une poignée de militaires psychopathes qui s'en donnent à coeur-joie pour les détruire. Tout est bon pour en faire des animaux : humiliations, sous-alimentation, tortures physiques et psychologiques, sans explication car il n'y a pas de raison valable. Tahar Ben Jelloun était l'un des quatre-vingt-quatorze, étudiant en philosophie il manifestait pour plus de démocratie et de liberté... Cinquante ans après les faits il lève le voile sur cette sombre histoire du règne d'Hassan II.

Parler de ce livre n'est pas aisé, d'autant plus qu'il s'agit d'un récit autobiographique. Je l'ai lu en apnée, je voulais en finir, vite, ne pas être spectatrice de cette souffrance trop longtemps. Et pourtant, quelques jours après je l'ai encore en tête, il ne m'a pas encore quittée... Bien sûr la souffrance et la peur sont omniprésentes, l'auteur n'aurait pu nous expliquer ces mois d'horreur sans, mais j'ai trouvé ce livre lumineux. La culture, le cinéma, la littérature, la poésie, l'amour, les souvenirs ont sauvé ce jeune homme. Avec pour seul étendard la liberté, il ne fléchit pas. Cette soif de liberté il l'a payé au prix fort mais elle toujours là, présente au plus profond et indispensable pour sa survie.

L'homme est capable du pire mais aussi du meilleur, d'échapper au pire atrocité grâce à la seule force de l'esprit. C'est en cela que les bourreaux de Tahar Ben Jelloun et ses co-détenus ont échoué dans leur entreprise. Avec des mots sobres et de la pudeur Tahar Ben Jelloun a sorti ses tripes !
Lien : https://lesmotschocolat.word..
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50 ans après les faits, Tahar Ben Jelloun livre le récit de 18 mois d'emprisonnement arbitraire, punition imposée à 94 étudiants en représailles à une manifestation pacifique du 23 mars 1965 dans les grandes villes marocaines...
Sous couvert de service militaire, ces 94 jeunes gens sont ôtés à leur famille et auront à subir outrages, humiliations et sévices sans que nul n'en soit informé.
C'est lors de son enfermement que monsieur Ben Jelloun commence à écrire, écrire pour survivre, écrire pour garder la raison et ne pas perdre espoir.
Car certains y ont laissé la vie, d'autres ont perdu la raison, comment survivre à l'arbitraire, aux mauvais traitements en ignorant si, un jour, vous pourrez à nouveau respirer la liberté.
Ces faits qui l'ont fait naître écrivain l'ont marqué à jamais et comme il le dit si bien à la fin de ce livre : « … pour oser revenir à cette histoire, en trouver les mots, il m'aura fallu près de 50 ans. »
Les mots sont judicieusement choisis pour permettre au lecteur de ressentir l'incompréhension, la peur, l'angoisse de ces détenus ainsi que pour partager les souvenirs, les pensées, les passions qui ont alimenté la résistance morale de l'auteur.
Merci de votre témoignage monsieur Ben Jelloun qui laisse espérer que le meilleur de l'humanité peut triompher du pire.
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Nouvel ouvrage du prix Goncourt 1987, Tahar ben Jelloul, cette année, sur un épisode jusqu'à présent resté dans l'indifférence de l'Histoire du Maroc, à savoir l'envoi en caserne , soit-disant pour service militaire obligatoire, de 94 jeunes manifestant pacifistes, sous le règne d'Hassan II, en 1965, mais qui sera, en réalité, une mise en véritable « camp » où ces jeunes intellectuels subiront toutes les violences, jusqu'à la mort pour certains, infligées par des soldats choisis du fait de leur ignorance, leur brutalité et leur haine de l'intellectuel.

Cependant ce n'est pas une « docu-fiction » que Tahar Ben Jelloul ne nous livre là, mais ni plus ni moins qu'une partie extrêmement douloureuse de son propre vécu, lui qui était l'un de ces 94 condamnés par le régime totalitaire de l'époque, alors qu'il n'était âgé que de 18 ans et pour dont qu'il n'a réussi à trouver la force de les faire connaître seulement 52 ans plus tard...mais écrit, exclusivement au présent.

Christian Estevez

Critique réalisée pour le média algérien "Salama Magazine" - Numéro Juin 2018.
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Livre intense et sujet grave. Récit court et précis sur la condition d'être au Maroc, dans les années 1965-1966. L'auteur nous livre une "petite" partie de sa jeune vie d'adulte.
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L'auteur revient ici sur des faits qui se sont déroulés il y a plus de 50 ans. Pourtant, on y plonge comme si c'était hier.
L'écriture est fluide et d'une justesse remarquable. L'auteur nous entraîne dans son calvaire, sa solitude et ses moments d'espoirs.
Une lecture qui m'a définitivement touchée.
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Bonjour les lecteurs ...

ATTENTION … COUP DE COEUR !

Je ne le dirai jamais assez .. Découvre, lisez Tahar Ben Jelloun. Chacun de ses récits est une pépite.

Ce livre est un témoignage .. celui de l'auteur qui s'est retrouvé 19 mois en détentions dans des camps militaires sous le règne d'Hassan II roi du Maroc.
Les faits se déroulent en 1965, 94 étudiants vont être "puni" ( le terme est doux, trop doux) pour avoir manifesté pacifiquement.
L'enfermement dans les casernes va se révéler être cauchemardesque, la violence subie n'ayant d'égal que la bêtise des geôliers ne supportant pas ces jeunes intellectuels.
Ils vont tout endurer, vexations, privations, violence.
Leur libération sera précipitée grâce à la préparation d'un coup d'Etat par l'armée.
Après, il va falloir réapprendre à vivre, oublier est impossible, mais il faut avancer et se focaliser sur autre chose.
Tahar Ben Jelloun va continuer ses études de philosophie, écrire .. beaucoup, sur toutes sortes de sujets .
Mais il mettra plus de 50 ans avant de trouver les mots et de coucher sur le papier ces 19 mois de douleur qui l'on transformé à tout jamais.

Voici un livre qui fait mal et qu'on referme la boule au ventre.
On savait que le Maroc des années 60 n'était pas un pays de bisounours, mais lire ce récit ne peut laisser indifférent.
Que de souffrances, de vie gâchées, d'hommes devenus fous sous le règne tyrannique d' Hassan et de ses sbires.

Un témoignage qu'il faut avoir lu.
Tahar Ben Jelloun est une belle personne, tous ses récits sont fascinants, intelligents, indispensables.

Bref vous l'aurez compris.. ne passez pas à côté de ce récit et des autres !
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