Chaque livre possède deux poids différents : d'une part, un poids physique et, d'autre part, un poids subjectif qui se rapporte au contenu du livre, voire à son importance. Combien de fois nous retrouvons-nous, en quittant un lieu, devant ces décisions difficiles : quels livres aimerions-nous ou pourrions-nous emporter ? (p. 7)
Je déballe ma bibliothèque. Voilà. Elle n'est donc pas encore dressée sur les étagères, le léger ennui du classement ne l'a pas encore développée. je ne peux non plus marcher le long de ses rangées pour les passer en revue, accompagné d'auditeurs amis. Tout cela, donc, vous n'avez pas à le redouter. Me voici réduit à vous prier de vous transporter avec moi dans le désordre de caisses éventrées, dans une atmosphère saturée de poudre de bois, sur un sol jonché de papiers déchirés, au milieu de piles de volumes exhumés depuis peu à la lumière du jour après deux années d'obscurité, pour que d'entrée de jeu vous partagiez un peu l'humeur, nullement élégiaque mais au contraire impatiente, qu'ils éveillent chez l'authentique collectionneur. (p.41)
Les collectionneurs sont des individus pourvus d'instinct tactique; d'après leur expérience, lorsqu'ils conquièrent une ville étrangère, le magasins de livres anciens le plus minuscule peut signifier un fort,
la papeterie la plus éloignée une position clé. Combien de villes ne se sont elles pas ouvertes devant moi
au cours des marches avec lesquelles je partais à la conquêtes de livres.
On n'en a nullement fini, dans l'acquisition des livres, avec l'argent seul ou avec la compétence seul. Et même les deux ensemble ne suffisent pas pour fonder une authentique bibliothèque, qui garde toujours quelque chose d'impénétrable et d'incomparable en même temps.
Parmi toutes les façons de se procurer des livres, la plus glorieuse, considère-t-on, est de les écrire soi-même
Par Delphine Minoui, grand reporter, lauréate du Prix Albert Londres 2006
Tout public, à partir de 10 ans
« Lumières pour enfants », c'était le titre donné par Walter Benjamin aux émissions de radio destinées à la jeunesse qu'il assura avant la montée du nazisme. Ce titre, Gilberte Tsaï l'a repris pour les Petites conférences qu'elle programme depuis 2001 dans différents établissements culturels.
Elles reposent sur le pari que ni les grandes questions, ni les espaces du savoir, ne sont étrangères au monde des enfants et qu'au contraire elles font partie de leur souci, formant un monde d'interrogations restant trop souvent sans réponses.
La règle du jeu en est la suivante : un spécialiste d'une matière ou d'un domaine accepte de s'adresser à un public composé d'enfants mais aussi d'adultes, et de répondre à leurs questions. À chaque fois, il n'est question que d'éclairer, d'éveiller : en prenant les sujets au sérieux et en les traitant de façon vivante, hors des sentiers battus.
Programme de la Petite conférence #2 – « Raconter la guerre, dessiner la paix, 25 ans de reportages au Moyen-Orient » par Delphine Minoui :
Rien ne prédestinait l'enfant timide, née à Paris d'une mère française et d'un père iranien, à devenir reporter de guerre. Quand elle s'envole pour Téhéran, en 1997, c'est avec l'envie d'y raconter le quotidien des jeunes de son âge, épris d'ouverture. Mais l'après 11-septembre 2001 chamboule tout. Elle se retrouve en Afghanistan, puis en Irak, pour suivre l'invasion américaine et ses conséquences sur la région. Depuis, les soubresauts s'enchaînent : révolutions du printemps arabe, attentats de Daech, crise des réfugiés syriens, putsch raté en Turquie, retour des Taliban à Kaboul. Mais Delphine ne perd jamais espoir. Sensible à l'humain au milieu du chaos, elle navigue entre ses articles et ses livres pour faire parler la paix, encore et toujours, en racontant le combat des héros anonymes croisés sur son chemin.
Entre anecdotes et confidences, la conférence donnera à voir les coulisses du reportage, où le journaliste n'est ni un super héros ni un agent du « fake news » au service d'un grand complot, mais un témoin d'exception, porteur de lumière, même au coeur de l'obscurité.
Le terrain est la colonne vertébrale de son écriture. Correspondante au Moyen-Orient pour France Inter et France Info dès 1999 puis pour Le Figaro depuis 2002, Delphine Minoui a consacré la moitié de sa vie à cette partie du monde synonyme de révolutions, coups d'État et conflits.
À lire – « Les petites conférences » sont devenues une collection aux éditions Bayard.
Delphine Minoui, L'alphabet du silence, l'Iconoclaste, 2023
Les Passeurs de livres de Daraya, Seuil, 2017
Je vous écris de Téhéran, Seuil, 2015
Conception et programmation : Gilberte Tsaï – Production : l'Équipée.
+ Lire la suite