Citations sur Oeuvres, tome 3 (72)
Les témoignages de la gentillesse du monde nous sont apportés aux moments les plus durs de l’existence : à la naissance, lors du premier pas dans la vie, et lors du dernier, au moment de la quitter. Voilà le programme minimum de la sollicitude humaine.
Dans le culte du souvenir dédié aux êtres chers, éloignés ou disparus, la valeur cultuelle de l’image trouve son dernier refuge. Dans l’expression fugitive d’un visage d’homme, sur les anciennes photographies, l’aura nous fait signe, une dernière fois. C’est ce qui fait leur incomparable beauté, pleine de mélancolie.
La réception par la distraction, de plus en plus sensible aujourd’hui dans tous les domaines de l’art, et symptôme elle-même d’importantes mutations de la perception, a trouvé sa place centrale au cinéma.
L’individu, en essayant d’affronter la technique avec les seules armes de l’intériorité, court à sa perte.
Aucune ville n'est liée aussi intimement au livre que Paris.
Si Giraudoux a raison quand il dit que l'homme a le plus haut sentiment de liberté en flânant le long d'un fleuve, la flânerie la plus achevée, par conséquent la plus heureuse, conduit ici encore vers le livre, et dans le livre. Car depuis des siècles le lierre des feuilles savantes s'est attaché sur les quais de la Seine : Paris est la grande salle de lecture d'une bibliothèque que traverse la Seine.
L’important, dans le roman, ce n’est donc pas qu’il nous instruit en nous présentant un destin étranger, mais que ce destin étranger, par la flamme qui le consume, nous procure une chaleur que nous ne trouverions jamais dans notre propre vie. Ce qui attire le lecteur vers le roman, c’est l’espérance de réchauffer sa vie transie à la flamme d’une mort dont il lit le récit.
Chaque époque ne rêve pas seulement la suivante : en rêvant, elle tend aussi vers le réveil.
L’historien matérialiste ne saurait renoncer au concept d’un présent qui n’est point passage, mais arrêt et blocage du temps. Car un tel concept définit justement le présent dans lequel, pour sa part, il écrit l’histoire. L’historicisme compose l’image « éternelle » du passé, le matérialisme historique dépeint l’expérience unique de la rencontre avec ce passé. Il laisse d’autres se dépenser dans le bordel de l’historicisme avec la putain « Il était une fois ». Il reste maître de ses forces: assez viril pour faire éclater le continuum de l’histoire.
S’effarer que les événements que nous vivons soient « encore » possible au XXe siècle c’est marquer un étonnement qui n’a rien de philosophique. Un tel étonnement ne mène à aucune connaissance, si ce n’est à comprendre que la conception de l’histoire d’où il découle n’est pas tenable.
Au recueillement, qui est devenu pour une bourgeoisie dégénérée l’école du comportement asocial, s’oppose ici la distraction en tant que modalité de comportement social.