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les maîtres enlumineurs (The Found... tome 1 sur 3
EAN : 9782253106999
768 pages
Le Livre de Poche (21/02/2024)
4.24/5   461 notes
Résumé :
Toute l’économie de l’opulente cité de Tevanne repose sur une puissante magie : l’enluminure. À l’aide de sceaux complexes, les maîtres enlumineurs donnent aux objets des pouvoirs insoupçonnés et contournent les lois de la physique. Sancia Grado est une jeune voleuse qui a le don de revivre le passé des objets et d’écouter chuchoter leurs enluminures. Engagée par une des grandes familles de la cité pour dérober une étrange clé dans un entrepôt sous très haute survei... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (126) Voir plus Ajouter une critique
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Mesdames, messieurs, très chers lecteurs, installez vous dans ma carriole, je vous invite à venir visiter Tevanne.
Comment Monsieur ? La carriole n'a pas de moteur, ne fait pas de bruit et n'a pas d'attelage !? C'est une première fois par chez nous à ce que je vois. Prenez place, je vais vous expliquer le prodige qui nous permet de nous mouvoir.
Voyez-vous, ce véhicule, dans lequel nous arpentons les rues de Tevanne, est mû par la force des “Siggilums” appelé également “Sceau” mais ce que la majorité des habitants ici appelle des Enluminures. Il s'agit de petites inscriptions au reflet argenté qui confère à l'objet sur lequel il est écrit des propriétés nouvelles. Prenez par exemple cette carriole dans laquelle nous sommes, sur ses roues lui ont été indiqué comme une force de poussée, ce qui lui permet de penser qu'elle est tiré vers l'avant et de ce fait avance ; génial non ?
Oh ! L'emploi des enluminures est multiple, vous n'avez pas idée de ce qui peut-être accomplie avec.
Mais je ne vais pas vous assommer de nomenclature, à la fin de notre bref parcours, je vous laisserais à la taverna, entre les mains de maître Robert Jackson Bennet, qui vous contera l'histoire de Tevanne.
Sachez tout d'abord que Tevanne est constitué à 80 % de maisons marchande aux nombres de 4 et les 20% restants sont appelés les communes, si vous voulez mon avis, un endroit peu ragoûtant. Les maisons marchandes vivent dans la prospérité, tandis que les communes sont un peu en reste de la société, ceux qui n'ont pas trouvé leur place dans les maisons marchandes végètent dans ces bas-fonds et n'ont que peu d'avenir, ces endroits sont peu surs, dangereux et puant.
Les maisons marchandes se développent en commerçant les objets qu'elles enluminent, chacune à des spécialités si je puis dire. Une certaine course à l'ingéniosité et à la nouveauté anime une concurrence qui pousse chaque Hypathus de chaque maison à se surpasser. Les Hypathus sont en quelque sorte les maîtres à penser de l'enluminure certains diront des génies ; je ne pousserais pas si loin que ça.
Approchez-vous, que je ne parle pas trop fort. Mais sachez qu'avant que les maîtres enlumineurs ne produisent actuellement ce qui agrément nos vies, il existait, selon les légendes, des géants ! On les appelait les Occidentaux, vous devinerez pourquoi hein. Ces Occidentaux avaient poussé l'art de l'enluminure à des niveaux ahurissants. Mais à vouloir plus, il paraît qu'ils se sont détruits eux-mêmes. Ah ! Les légendes, comment savoir si tout cela est vrai ?
Ah, nous arrivons, voici notre conteur Monsieur Bennet, il va vous raconter l'histoire de Sancia, régalez-vous.

Je suis toujours emprunté pour parler de fantasy, toujours peur de spoiler, mais sachez que j'ai réellement apprécié cette lecture.

Le système de magie, que les plus grossiers appeleront des runes, est tout à fait sympa et novateur. Ces enluminures, comme vous expliquait votre chauffeur, modifient en quelques sortes la nature des objets, comme par exemple, persuader du bois qu'il est aussi fort et imputrescible que la pierre. Au début, on ne saisit pas la portée des enluminures, mais plus le roman avance, plus on se rend compte que les possibilités sont quasi-infini. le pire, c'est que l'auteur prend la peine de vous expliquer le fonctionnement des modifications apportés, comme pour vous ôter du doute que “c'est magique et c'est comme ça, je l'ai décidé”. Certains diront que parfois, c'est trop d'explications. J'avoue qu'avant de lire d'autres critiques, je n'avais pas remarqué ce point, pour moi, c'était fluide et utile. La magie “magique ”, c'est bien, mais étayée, c'est pas mal aussi. C'est d'ailleurs par le biais de cette magie que le roman prend un ton steampunk, parce qu'au même titre que la carriole qui vous a mené ici, les objets acquièrent des automatismes dictés par les enluminures qui permettent au final disons le, des chaînes de productions.
On ne va pas se mentir, ça reste de la fantasy, épées arbalète, armure et tout le toutim.

Alors une fois, l'univers dressé, de quoi va nous parler l'auteur ? de l'histoire de Sancia, une jeune femme qui fait office de voleuse issue des communes. le roman ouvre in médias res sur un de ses larcins pour le moins risqué. Ça donne le ton tout de suite, l'univers, notre personnage assez brut de décoffrage, un langage pas toujours châtié et de l'action.
De ce côté-là, on sera servi, ça ne retombe jamais, une montée dramatique qui ne cesse de nous emmener plus loin dans les complots, les possibilités de l'enluminure, l'histoire précédente l'époque à laquelle nous sommes dans le roman. Et cette histoire avec un grand H, va prendre de l'importance au fil du roman.

Alors Sancia n'occupera pas seul le haut de l'affiche, elle va rencontrer d'autres personnes au fil de ses péripéties, et devra des fois s'allier à des personnes avec lesquelles aucune accointance n'aurait pu se faire en temps normal.

J'ai apprécié l'intrigue en elle-même, bien construite, bien dosée, les éléments s'agglomèrent progressivement pour venir épaissir le tout. Les personnages sont agréables et bien définis, avec une histoire personnelle utile à l'intrigue. le seul petit point négatif, c'est leur grossièreté pour la plupart, mais certaines réactions sont savoureuse et amènent parfois des échanges qui font rire pour leurs côtés acerbes.

Le coeur de l'intrigue c'est ce premier vol que commettra Sancia, elle se retrouveras en possession d'une clef, mais pas une clef bannale, non, juste “Clef” avec des capacités particulières. Je ne peux pas en dire plus : désolé, il faut le lire :)

Il s'agit d'une trilogie, j'ai hâte de la sortie poche des tomes suivants, voir ou tous cela va nous mener.
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Je ne vais pas me démarquer des avis flatteurs que j'ai lus à droite à gauche à propos des Maîtres enlumineurs. Ce roman est captivant du début à la fin et cela, de façon très intelligente.

La cité de Tevanne est riche et vaste, mais, comme de bien entendu, recèle des inégalités flagrantes : quatre familles se partagent le pouvoir et les plus beaux quartiers, laissant au peuple misérable les miettes. Les Communes, les Verts accueillent les plus miséreux dans des conditions lamentables, pendant que les plus aisés se pavanent dans leurs enclaves luxueuses. Et ce partage ne risque pas d'être remis en question grâce à la magie des enluminures. Trouvaille très réussie de Robert Jackson Bennett (et point de contact, comme le remarquent plusieurs critiques et auteurs, avec le genre cyberpunk – et ça tombe bien, j'adore le cyberpunk) que ce système de magie à la limite de la technologie. Les pouvoirs ne tombent pas du ciel, ici. Non, en fait, c'est plus une science : les maîtres enlumineurs inventent des formules qui « convainquent » les objets d'agir autrement qu'ils devraient. Ils peuvent ainsi convaincre une flèche d'aller plus vite, car la formule la trompe sur la gravité. Ou persuader une voiture d'avancer seule, sans moyen de locomotion. Les effets pourraient être infinis, mais plus la tromperie est grande plus les lignes de code de la formule doivent être nombreuses. On en arrive à des volumes entiers. On se croirait presque devant un ordinateur, avec ses étagères bourrées de disques durs stockant des informations. Et tout cela dans un monde typique du médiéval fantastique. L'équilibre est parfaitement trouvé et on adhère sans hésiter à ce système, qui ouvre, de surcroît, de nombreuses possibilités pour la suite. Sans parler de ces mystérieux hiérophantes, qui maîtrisaient, d'après les légendes, les enluminures à un niveau inégalé depuis leur disparition. Et des mystérieux artefacts qu'ils ont laissés derrière eux, source de convoitise et d'interrogations. Un classique des romans d'aventure habilement intégré à une histoire déjà riche.

Mais une belle trouvaille ne suffit pas à faire un bon roman. Or, Robert Jackson Bennett est décidément un auteur de talent (il suffit de relire la novella Vigilance, parue dans la collection UHL, efficace comme un coup de poing dans l'estomac). Dans ces Maîtres enlumineurs, il s'offre les services d'un groupe de personnages horriblement attachants. Et divers, cela va de soi, afin d'attirer un plus grand nombre de lecteurs. L'héroïne centrale, Sancia, est une voleuse au passé lourd, qui en fait un être spécial, mais blessé au plus profond de sa chair et, en réaction, doté d'une volonté à toute épreuve. Sans parler de ses capacités physiques proprement ahurissantes. Pour l'épauler, autre bonne trouvaille, un artefact exceptionnel dont on découvre l'image sur la couverture (splendide, il est bon de le préciser : encore un réussite du talentueux Didier Graffet) : une clé, dont on va découvrir peu à peu l'étendue des pouvoirs. Et qui a entre autres la possibilité de parler. Ce procédé n'est pas sans rappeler, par exemple, le vaisseau découvert par Spensa, l'héroïne du Voyage vers les étoiles de Brandon Sanderson, qui, lui aussi, présente une certaine intelligence et peut servir de confident à une héroïne isolée. Peu à peu, Sancia va devoir s'acoquiner avec d'autres habitants de Tevanne, pas nécessairement issus de son milieu social et pas vraiment amicaux au premier abord. Mais qui qu'ils soient et d'où qu'ils viennent, ils finissent tous par nous toucher, d'une manière ou d'une autre. Chacun a ses faiblesses, ses doutes, ses passions. Chacun, malgré sa froideur apparente, malgré sa carapace bien nécessaire pour survivre dans une telle société, cache une humanité qui va nous le rendre sympathique, à un moment ou à un autre.

Enfin, pour entraîner son lecteur pendant plus de six cents pages sans le lasser en cours de route, il faut un scénario bien ficelé et de multiples rebondissements. Pas de souci à se faire de ce côté non plus. Robert Jackson Bennett est à l'aise dans la multiplication des rebondissements, l'enchâssement des intrigues, l'apparition de protagonistes qu'on n'imaginait pas voir débarquer ainsi à cette place. le rythme est trépidant et ne nous laisse pas vraiment le temps de souffler. D'ailleurs, les combats sont souvent éblouissants de virtuosité et d'inventivité. Car l'auteur sait user des possibilités offertes par le système des enluminures pour rendre les affrontements explosifs et jamais répétitifs. À chaque nouvelle lutte, des inventions qui la rendent différente de la précédente. Ce qui me fait penser à Ken Liu, dans la série de la Dynastie Dent de Lion. Lui aussi sait rendre un combat imprévisible grâce à une surprise de derrière les fagots. Alors O.K., le but ultime de cet ouvrage n'est pas à proprement parler original : sauver le monde. Mais on s'en moque. C'est la manière qui compte. Et elle est là. Bruce Willis peut aller se rhabiller (enfin, je crois qu'il l'a déjà fait depuis quelques années) : il n'arrive pas à la cheville de Sancia !

Est-il besoin de préciser, pour conclure, que j'ai vraiment beaucoup aimé la lecture des Maîtres enlumineurs et que j'attends avec impatience la traduction de Shorefall, le deuxième tome de cette ambitieuse trilogie ?
Lien : https://lenocherdeslivres.wo..
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Après avoir pu découvrir ce dont Robert Jackson Bennett était capable en fantastique et en SF, voilà que l'occasion est donnée au lectorat français d'expérimenter le volet « fantasy » de l'auteur avec ce premier tome des « Maîtres enlumineurs ». « American Elsewhere » m'avait intéressée sans plus, « Vigilance » m'avait bien accroché, mais c'est sans commune mesure avec ce nouveau roman qui mérite bien tous les éloges qui lui sont fait depuis sa parution. L'auteur y met en scène une jeune femme, Sancia, embauchée par un mystérieux commanditaire pour voler un objet particulièrement bien gardé. Bien que périlleuse, la mission se passe sans trop d'accrocs, si bien que notre voleuse parvient à regagner son repaire avec son butin, dont elle ignore tout. Un pressentiment va la pousser à fouiner dans la boite subtilisée pour découvrir avec surprise qu'elle ne contient en tout et pour tout qu'une clé. Cette dernière n'a toutefois rien d'ordinaire, et sa curiosité va, certes, lui sauver la vie mais aussi rendre celle-ci beaucoup plus compliquée. La sauver parce que, compte tenu de la puissance de l'objet en question, il est évident que son employeur ne l'aurait jamais laissé en vie après qu'elle le lui eut remis. La compliquer parce que, maintenant que la clé se retrouve en sa possession, les personnes au courant de son existence vont tout faire pour la récupérer. Et, compte tenu de la somme qu'ils étaient prêts à débourser pour la réussite de sa mission, ils disposent de moyens assez conséquents. La jeune femme n'est d'ailleurs pas au bout de ses peines puisqu'elle ignore que, en plus de ses commanditaires, un autre adversaire redoutable s'est lancé à sa poursuite : l'officier responsable de la surveillance de l'endroit dans lequel elle s'est introduite avec fracas pour récupérer la clé. Heureusement, Sancia dispose aussi de pas mal d'atouts. D'abord, son mode de vie l'a habitué à vivre de manière minimaliste et avec la crainte permanente d'être traquée, ce qui lui a valu d'acquérir pas mal de bons réflexes. Ensuite, notre héroïne a une particularité exceptionnelle qui lui permet de ressentir les objets qui lui livrent, par un simple toucher, tous leurs secrets. Enfin il y a Clé, mystérieux artefact avec lequel elle est parvenu à entrer en contact plus intimement qu'avec n'importe quel objet auparavant et qui, lui aussi, possède un pouvoir peu commun et bien pratique.

Parmi la multitude d'atouts que possède le roman, la qualité de l'univers en général, et du système de magie élaboré en particulier, est à saluer. L'action prend place à Tevanne, sorte de cité-état impérialiste dominée par des maisons-marchandes à la tête desquelles on trouve quatre grandes familles, véritables dynasties ayant accaparés pouvoir et richesse depuis des années. Chacune exerce son autorité sur un territoire qui forme une enclave au sein de la cité dont ces « campos » occupent la majeure partie. Les 20% restants composent ce qu'on appelle les Communes, zone de non droit dans laquelle réside les individus n'ayant pas été jugé dignes d'être intégré au personnel des maisons-marchandes : pauvres, marginaux, repris de justice, femmes… C'est dans ce quartier que vit notre voleuse, et c'est là que va se dérouler la première partie de l'intrigue, entre courses-poursuites, jeux du chat et de la souris et bastonnades sacrément musclées. La plus grande originalité du roman vient de son système de magie qui repose, comme l'indique le titre, sur les enluminures, sorte d'écriture inventée par une race mythique ayant vécu il y a longtemps et dont il ne reste aucune autre trace aujourd'hui, si ce n'est quelques objets que les spécialistes s'arrachent et une poignée d'archives. Pour faire simple, une enluminure est un assemblage de sceaux qui, en fonction de la manière dont ils sont agencés, permettent de tordre légèrement la réalité afin de faire faire à un objet une action qu'il aurait, en temps normal, été bien incapable de réaliser. Correctement utilisé, ce savoir permet de bénéficier de technologies sophistiquées utilisables aussi bien pour le transport, l'éclairage ou encore l'armement. Jalousement gardé par les différentes maisons-marchandes, qui rivalisent d'ingéniosité pour repousser toujours un peu plus les limites de l'enluminure, le secret de fabrication des gabarits d'enluminure a toutefois indéniablement fini par fuiter et est exploité par ceux que l'on appelle les Ferailleurs, des individus rejetés par les maisons-marchandes mais suffisamment dégourdis pour proposer à ceux des Communes quelques objets enchantés de qualité variable. Tout cela nous est expliqué de manière très ludique, sans qu'à aucun moment l'auteur ne se perde dans des explications techniques interminables et laborieuses. le procédé est suffisamment simple pour qu'on comprenne tout de suite la manière dont il fonctionne, mais aussi suffisamment sophistiqué pour que de nouvelles découvertes viennent sans arrêt élargir le champ des possibles aux yeux du lecteur.

A la lecture de cet élaboré système, on est évidemment tenté de penser aux romans de Brandon Sanderson (et notamment à sa trilogie « Fils-des-brumes ») puisqu'on y retrouve le même soin apporté à la cohérence du système magique et la même simplicité. Je me suis également prise à penser à plusieurs reprises à d'autres oeuvres de fantasy, sans pour autant avoir l'impression de découvrir une resucée de telle ou telle autre oeuvre (la capacité de Sancia d'apprendre des objets en les touchant m'a beaucoup fait penser à « La Passe-Miroir » tandis que le lien qui se tisse progressivement entre l'héroïne et Clé m'a aussitôt rappelée la relation entre Crispin et Linon dans « La Mosaïque de Sarance » de Guy Gavriel Kay). le roman séduit, aussi, grâce au rythme échevelé auquel sont contraints les personnages qui n'ont que peu de temps pour tergiverser. Les scènes d'action s'enchaînent et durent pour certaines assez longtemps, sans que jamais l'auteur ne laisse à la moindre lassitude la chance de s'installer. On est constamment surpris et intrigué, si bien que la frénésie qui s'empare des personnages devient rapidement communicative et qu'on se prend à dévorer ce pavé de six cents pages en un temps record. L'écriture y est aussi pour beaucoup, l'auteur possédant une plume fluide et agréable qui permet de bien visualiser les scènes d'action et qui sait se faire plus incisive lors des dialogues mettant en avant la gouaille ou le mordant des personnages. Un mot, pour terminer, sur ces derniers qui, comme tout le reste, ont été particulièrement soignés par l'auteur. Sancia est une héroïne attachante et qui s'éloigne de plus en plus au fil de la lecture des stéréotypes propres à ce type de profil en fantasy. Les personnages secondaires ne sont pas en reste et bénéficient tous d'un traitement soigné et d'une personnalité ambivalente, qu'il s'agisse du rigide Gregor ou du génial mais cynique Orso. La conclusion du roman est, pour sa part, tout à fait satisfaisante puisqu'elle clôt d'une certaine manière l'arc narratif amorcé dans ce premier tome tout en ouvrant des pistes prometteuses pour la suite.

Unanimement salué par le public, ce premier tome des « Maîtres enlumineurs » est un vrai petit bijou qui possède toutes les qualités requises d'un bon roman de fantasy : des personnages fouillés et attachants, une intrigue trépidante, un système de magie simple et élégant, sans oublier un univers prometteur qu'on ne demande qu'à explorer plus avant. Un ouvrage à ne pas rater !
Lien : https://lebibliocosme.fr/202..
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La méthode Coué de la magie.

Une voleuse, curiosité aidant, ouvre une petite boîte qu'elle vient de subtiliser de manière peu orthodoxe. Elle découvre une clef qui permet d'ouvrir toutes les serrures et même plus encore. Et en outre, c'est une clef qui parle ! 🧐

Il y a des livres qui à peine commencé vous donne envie de meurtre, d'autres, plus rares, vous donnent envie de ne faire qu'une chose : lire lire et lire.
Malheureusement Les Maîtres enlumineurs font partie d'une tout autre catégorie : lire jusqu'à plus soif, en oubliant tout ce qui se passe autour de vous, ce que vous avez à faire pour vous immerger complètement, profondément, dans son univers.

Je pourrais vous parler de ce choc culturel entre la plèbe et la Haute, la banlieue et la ville;
Je pourrais vous parler de cette idée à la liberté à la justice;
Je pourrais vous dire aussi que c'est un roman drôle, la politesse du désespoir;
Je pourrais vous dire que vous allez y apprendre plein d'expressions imagées et grossières;
Je pourrais vous dire qu'il est aussi une fantasy cyberpunk et hopepunk;
Je pourrais vous dire qu'on y parle du rôle de la femme, que le héros est une héroïne;
Je pourrais vous dire dire qu'il est très bien construit, sans lourdeur, que la SF et la fantasy s'y imbriquent de manière surnaturelle, mais parfaite;
Je pourrais aussi vous dire que c'est un roman divertissant et intelligent;
Je pourrais vous dire que c'est une curain de putain de bon bouquin;
Je pourrais vous dire que le plus spectaculaire est que ce roman plaira sûrement au novice comme à l'amateur;
Mais tout ce que je pourrais vous dire ne parviendra jamais à vous faire comprendre combien j'ai apprécié ce roman;
Car je ne suis qu'un simple blogueur, pas un écrivain talentueux;

La seule question que tu dois te poser : Te laisseras-tu embobiner par les maitres embobineurs ?
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Premier tome d'une trilogie de Fantasy aux couvertures aguichantes, j'ai trouvé ce roman plutôt bon, sans plus.
Dans la même collection, je pense à La marche du Levant, de Leafar Izen, qui avec ses propres défauts m'a davantage convaincu, autant pour l'originalité que pour le style.

Nous suivons la jeune Sancia Grado, qui évolue dans les quartiers miséreux de Tevanne, la cité où se déroule entièrement l'action.

Tevanne fait très Renaissance. Les patronymes sont italiens et la cité, avec ses nombreux canaux, évoque furieusement Venise. Les références historiques sont nombreuses aussi, à commencer par le terme d'enluminure. Si l'univers ne semble pas relié explicitement à notre monde, la culture, la sociologie, la technologie (métaux, inventions), l'économie (grands marchands)..., tout ressemble quand même beaucoup à ce qu'a connu l'Europe durant la Rennaissance.


Classer ce roman est plus difficile qu'il n'y paraît.

Pas de race exotique ici : exit les nains forgerons et les efles détenteurs du savoir ancestral. Non, uniquement des humains. Certes, les personnages se réfèrent souvent au passé et aux créatures quasi divines qui ont livré des batailles titanesques et laissé le monde tel qu'il est. Mais cela reste des légendes comparables aux grands mythes gréco-romains. du moins dans ce premier tome. Il y a bien un ou deux personnages dont la nature pose question, mais rien n'indique une essence non humaine.

La magie est clairement mise en avant dans ce roman. « Le meilleur système de magie de toute l'histoire de la Fantasy », nous vend-on.
J'aurais tendance à relativiser cette description. Mais quoi qu'il en soit, le « sytème » est tellement au coeur du roman qu'il mérite bien qu'on s'y attarde. Et comme il est expliqué dès les premières pages, ce ne sera pas du spoil !
L'auteur reprend l'idée ultra classique des runes (les fameuses enluminures) qui, gravées selon un certain protocole sur des objets faits de matériaux précieux, leur confèrent des pouvoirs magiques. C'est le cas par exemple de certains objets dans les romans de Tolkien, à commencer par l'Anneau Unique.
Mais ce qu'il fait de cette idée est moins commun : il tente d'expliquer – avec force détails – les mécanismes qui confèrent à ces objets leurs propriétés surnaturelles. Et tout y passe : choix des matériaux, technique de l'enluminure, son alphabet, technique de fonderie, puis description des effets de ces « runes », pourquoi cela marche.
Je pense que dans la Fantasy, de manière générale, tenter d'expliquer la magie (et a fortiori y passer beaucoup de temps) est une erreur. Tout simplement à cause du paradoxe : la magie, par définition n'existe pas et donc ne peut s'expliquer. Ce n'est en rien un problème pour le genre en question, puisque le lecteur de Fantasy accepte facilement et tacitement cette entorse à la réalité. Mais l'auteur qui s'entête à expliquer la magie s'expose avant tout à la lourdeur et au contresens. La magie ne s'explique pas, elle s'accepte.
Mais le cas de Les Maîtres enlumineurs est plus retors. Car si on y regarde de plus près, contrairement à ce qui est vendu ou attendu, il n'y a pas de magie dans ce roman !
Plus précisément, il y a magie dans le sens où les objets enluminés se comportent d'une façon qui semble contrevenir aux lois la physique, au lecteur comme aux personnages.
Mais d'un autre côté, tout, dans le traitement fait par l'auteur de cette dimension, vise à remplacer le prisme de la magie par celui de la science :
- le vocabulaire : le mot magie n'est pas employé, non plus que son champ lexical. Plutôt que de « runes » (aux connotations druidiques et surnaturelles), on parle d' « enluminures », qui se réfèrent à tout un pan de notre histoire qui n'a rien d'imaginaire.
- Les acteurs : plutôt que d'une caste mystérieuse, crainte ou vénérée (les magiciens, druides, chamans), on parle d'enlumineurs : une profession comme une autre qui ne connais que les secrets... industriels.
- La technique : celle-ci est décrite en long et en large, elle est rationalisée en étapes, en corps de métiers. En un mot, elle fait l'objet d'une science. Certes, une science que ne maîtrisent ni ne comprennent totalement même les meilleurs enlumineurs. En cela ce sont peut-être davantage des artisans.
- La société : l'exploitation de la technique d'enluminure transforme radicalement la société, la remodelant ainsi que son environnement. C'est une révolution industrielle, guidée par la science.
En cela, R. J. Bennett brouille magistralement les cartes (et les genres). Sa façon de travestir la magie, si chère à la Fantasy, derrière le rouleau compresseur de la science, en apparence du moins, rappelle irrésistiblement la célèbre formule « Toute technologie suffisamment avancée est indiscernable de la magie. » qu'on doit au faiseur de SF Arthur C. Clarke.
Au passage, le thème des Tevannois qui découvrent, collectent et convoitent les artefacts « occidentaux », legs technologique d'une civilisation supérieure d'un autre âge, constitue un thème classique de la SF (Stalkers, le Déchronologue...).


Alors, s'il n'y a pas d'elfes, s'il y a plus de tôles que d'arbres, plus de science que de magie, où est la Fantasy ?
La Fantasy est en réalité très présente, et ce de manière typique, dans la forme du récit, les personnages, le worldbuilding, les intrigues.
Je dirais que dès les premières lignes du roman, le portrait fait de Sancia – une « voleuse » – signe à lui seul l'appartenance au genre.


L'écriture ne pose pas de problèmes. le style un très simple, rien de transcendant. le registre est un brin vulgaire, sous l'impulsion de l'héroïne principalement. Faut aimer. Personnellement j'ai eu du mal, notamment avec cette trouvaille de « curain », pourtant expliqué, mais qui m'a fait dérailler cent fois. Ça ne fait donc pas dans la dentelle, mais au moins ça se lit vite. Très vite même. C'est un point fort de l'écriture : l'auteur déroule le récit avec une aisance certaine, et bien que celui-ci soit archilinéaire, sans grand effet de suspense, avec quasiment pas d'alternance, on se surprend à dévorer les pages, ce qui n'est pas un luxe avec un tel pavé !

Les personnages sont des modèles types de la Fantasy. Je ne m'y suis pas spécialement attaché, à part le guerrier. Ils sont assez variés. Parfois des comportements peu crédibles.
Au bout d'un moment, on se retrouve à suivre une petite équipe (un des grands tropes de la Fantasy) qui se stabilise, mais cela sonne faux, un peu contre nature. Des caractères et des intérêts incompatibles qui comme par magie finissent pas s'accorder. de cette équipe transparait bientôt un esprit « bon enfant » qui tranche avec certains traits de caractère et avec la dureté de l'univers.

Le monde de Tevanne est purement urbain.
Quatre Maisons marchandes se partagent l'essentiel de la cité (chacune a son propre territoire).
Dans le reste s'entassent les miséreux et les voleurs, dans l'insécurité et l'insalubrité la plus totale. Sancia est issue de ce milieu.
Je trouvé ce monde à la fois très typique d'une Fantasy « Renaissance », et trop schématique, à peine esquissée. Des auberges, des fonderies, des habitations et des palais, c'est à peu près tout. J'attendais de l'action sur des bateaux, même pas. de plus, des quatre Maisons marchandes, seules deux sont mises en scène. Bon, on va dire que cela laisse de la matière pour les tomes suivants !


Avec cette opposition entre nantis et miséreux dans le worldbuilding, mais aussi avec le parcours de l'héroïne, éternelle révoltée issue des bas-fonds, l'auteur surfe sur les tropes de la dystopie. La critique de notre société et du capitalisme est récurrente et assez vive, ce qui est plus courant dans la SF.
Plus généralement, il revisite un peu tous les champs de l'intersectionnalité, concept en vogue ces dernières années.
L'exemple le plus saillant est certainement la touche « girl power » : les quatre personnages les plus valorisés sont des femmes. Dans cet exercice difficile, Bennett ne s'en sort pas si mal je trouve, même si on est loin de la démonstration d'un John Scalzi dans L'interdépendance, ou de la finesse d'un McDowell dans Les Aiguilles d'or.

Enfin, je signalerais le thème du transhumanisme, assez développé.


Le grand point fort du roman, pour moi, reste l'action. Même si la réflexion est présente, le divertissement reste toujours au premier plan, servi par l'écriture fluide.
Les actions sont nombreuses, variées et détaillées. Elles sont visuelles, logiques. Elles mettent en exergue les forces et les capacités spéciales des personnages, mais aussi leurs faiblesses.
Sancia a le pouvoir de faire parler les lieux et les objets enluminés (soit la plupart). J'ai adoré la voir en tirer parti, de façon différente selon les situations. Découvrir les fonctionnements détournés des objets enluminés est aussi très sympa. Mais cet aspect devient parfois un défaut : certains comportements tirent trop sur le côté « magique ». Je pense que l'auteur aurait dû restreindre davantage les possibilités de la technologie pour rester cohérent avec l'esprit « science ».


Parmi ces objets enluminés, Sancia en découvre un particulièrement puissant. Une clef nommée... Clef. Ça ne s'invente pas ! Clef semble doté d'une conscience propre, peut communiquer avec elle, et devient un personnage à part entière, rendant de nombreux services à notre héroïne.
Un clin d'oeil à la princesse Fantagaro et son fidèle compagnon... Pierre ? Pas certain, même si celles et ceux qui connaissent la référence incontournable de la Fantasy italienne feront le lien facilement :)


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critiques presse (3)
Syfantasy
04 juillet 2023
Pour résumer, que ce soient les personnages, l’univers ou l’intrigue, tout est parfaitement millimétré pour produire un roman (puis une saga) équilibrée et particulièrement réussie.
Lire la critique sur le site : Syfantasy
Telerama
19 mai 2021
Avec le premier tome de ses “Maîtres enlumineurs”, enfin traduit en français, l’écrivain louisianais s’impose comme une des grandes plumes de l’heroic fantasy. L’occasion de découvrir le reste de son œuvre, entre horreur lovecraftienne et SF incisive.
Lire la critique sur le site : Telerama
Elbakin.net
30 mars 2021
Une chose est sûre : avec ce roman, Robert Jackson Bennett confirme son statut d’étoile montante du genre et le fait briller de plus belle.
Lire la critique sur le site : Elbakin.net
Citations et extraits (38) Voir plus Ajouter une citation
Toute innovation - technologique, sociologique ou autre - naît sous la forme d'une croisade, puis s'organise à l'instar d'une entreprise pratique et enfin, avec le temps, se dégrade pour virer à l'exploitation ordinaire. Tel est, simplement, le cycle vital de l'ingéniosité humaine telle qu'elle se manifeste dans le monde matériel.
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Voir quelqu'un jongler maladroitement avec les mots et les idées, tel un écolier essayant de s'orienter sous une jupe, lui faisait l'effet d'avaler une poignée de verre pilé.
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Sancia n'avait aucune formation dans l'art d'enluminer, mais tout le monde savait comment fonctionnaient les carrioles enluminées à Tevanne : les injonctions inscrites sur les roues les persuadaient qu'elles se trouvaient sur une pente. Les roues y croyaient dur comme fer et se sentaient ainsi obligées de descendre ladite pente, même s'il n'y avait pas la moindre déclivité et que l'attelage se contentait de rouler, disons, sur une avenue de canal parfaitement plate (quoique particulièrement boueuse). Le pilote, assis dans l'écoutille de la carriole, s'occupait des contrôles, qui transmettaient aux roues des précisions telles que : « Oh, la pente s'accentue, tu devrais rouler plus vite » ou « Attends, non, la colline s'aplatit, ralentissons un peu » ou encore « Bon, en fait, il n'y a plus de colline, tu peux t'arrêter ». Et les roues, dupées par les enluminures, obéissaient docilement, éliminant ainsi le besoin de chevaux, mulets, chèvres ou toute autre créature stupide pouvant être persuadée de tirer des gens de-ci de-là.
P 18-19
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La transition entres les Communes et le campo était aussi brutale que radicale : des allées boueuses aux pavés propres, des relents de fumée, de crottin et de putréfaction à l'arôme doux de la viande épicée grillée ; jusqu'aux passants, avec leur vêtements bien coupés et colorés, la peau propre et saine, qui marchaient sans infirmité, difformité, fatigue ou ébriété.
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De l'eau. Des fontaines crachant de l'eau, de la vraie eau claire et propre. Elle en voyait déjà trois de la où elle se trouvait.
Malgré l'étonnement et la frayeur, elle ne put s'empêcher de songer : ils utilisent de l'eau - de l'eau propre - comme décoration ? L'eau potable était incroyablement rare dans les Communes et la plupart des gens buvaient à la place du vin de canne léger. En voir gargouiller dans les rues sans aucune raison était incompréhensible.
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Re diffusion "brute" du live instagram à l'occasion de la venue de Robert Jackson Bennett à Paris. Merci aux éditions Albin Michel Imaginaire et Livre de Poche Imaginaire pour cette événement.
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