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EAN : 9782226167057
263 pages
Albin Michel (16/03/2005)
3.33/5   30 notes
Résumé :
Dans sa grande propriété du Sud-Ouest, Alberte de Vildrac, une belle veuve de quarante ans, mène une vie austère, seule avec sa bonne.
Alberte n'a jamais connu l'amour, et s'est résignée à se cloîtrer moralement. A Paris, sa fille Camille poursuit de brillantes études. Autant Alberte est rêveuse et repliée sur elle-même, autant Camille est vive, active et hardie dans sa carrière. Lorsque la jeune fille présente à sa mère Franz, un bel et savant ingénieur d'or... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Avec, en introduction, une lettre d'Alberte adressée à son avocat commis d'office, nous savons dès l'entrée du roman qu'elle doit être jugée pour un acte qui a eu lieu huit années en arrière et pour lequel elle s'est dénoncée elle-même.
N'ayant à l'esprit aucune volonté de se défendre, ni de se disculper, elle a subitement éprouvé le besoin de se libérer du douloureux poids « du plus monstrueux des mensonges. »
Dans cette tragique histoire, c'est donc la voix d'Alberte que l'on va entendre, remontant tous les éléments de sa pauvre vie qui ont concouru à cette dramatique issue.
Comme nous le précise Alberte en entamant sa confession, il faut avant tout connaître les âges des protagonistes pour saisir toute l'essence du drame à venir. Elle a 41 ans. Sa fille Camille en a 22 et Franz, le fiancé de Camille a 34 ans.

Comme il est difficile de porter un jugement sur la personne dont la voix emplit ce roman ! Ses aveux qui lui coûtent, sa profonde culpabilité, ses remords, les circonstances atténuantes que l'on veut lui accorder ne peuvent effacer certains comportements, certaines dérives qu'elle n'a nullement tentées de contrer pour éviter le drame. Tout ceci au nom de la passion, de l'amour qu'elle n'avait jusque là jamais éprouvé.
Son existence fut morne et monotone. Elle est désormais veuve d'un homme terne qu'elle n'a jamais aimé. Aucune sortie n'égayait sa vie conjugale, aucun invité ne venait mettre un peu de gaité chez elle si ce n'est le fondé de pouvoir de son mari qui partageait la partie de jacquet disputée uniquement entre les deux hommes.
Avec ses vêtements de deuil, elle s'est retirée à Maguelonne, la maison de campagne héritée de sa mère. Elle y passe des journées égales, depuis quelques années déjà. du vide, une vie à l'image d'une page blanche mais dans la sérénité. Puis en 1917 surviendra « l'évènement d'où tant d'infortune devait sortir. » Camille arrive, au volant d'une voiture conçue par son fiancé d'origine polonaise, ingénieur d'une importante firme automobile allemande. Dans l'attente de papier pour leur mariage, ils s'installent pour quelques temps à Maguelonne.

La mère et la fille, dissemblables autant moralement que physiquement sont pourtant toutes deux ardentes et passionnées, chacune à leur manière, et c'est de ce tempérament, bien vivant pour l'une mais enfoui depuis quarante ans pour l'autre que va surgir un drame intime d'une extrême violence.

Alberte, effacée depuis tant d'années se réveillera de sa léthargie en étant encore une femme belle, désirable et avide de bonheur. Elle a sans doute un retard de vie à rattraper mais à quel prix se fera-t-il !

Ce roman, purement introspectif, est admirablement écrit par Pierre Benoit qui met en scène une histoire tragique liée à l'intensité de la passion lorsque l'on arrive à un âge charnière. Cette confession, livrée comme un rapport de faits et de conséquences autour d'un éveil subit à la vie, laisse en suspens la question de la responsabilité de cette effroyable issue. Ai-je aimé cette lecture ? Honnêtement, je ne crois pas. L'écriture, le déroulé, l'intensité qui en ressort sont irréprochables mais je n'ai pas aimé Alberte. Les points excusables n'ont pas réussi à faire leur chemin pour atténuer sa culpabilité et même la raison par laquelle sa conscience se réveille est blâmable. Je n'ai ressenti qu'un profond malaise face à ce sujet noir autour de la passion.
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Ce roman bien ficelé, qui se passe durant la guerre 14-18, allie le sordide au sublime, comme d'autres oeuvres de Pierre Benoit, avec d'autres héroïnes dont le prénom commence aussi par A: Axelle, Allegria, Anne de la Ferté... Il prend la forme originale d'un long récit à son avocat fait par Alberte depuis une maison d'arrêt, et ce n'est qu'à la page 247 et dernière, qu'on apprendra ce qui est reproché à cette femme sensible, coupable et victime. Un peu comme Thérèse Desqueyroux de Mauriac, le roman commence donc en quelque sorte par la fin.
Pendant tout ce temps, l'impatience du lecteur est soutenue par des phrases telles que «J'avoue que je n'avais pas prévu de qui allait se passer», «On verra par la suite que j'aurais dû être plus attentive», «C'est surtout à la lumière des événements qui ont suivi que j'ai compris» ou «Hélas, pouvais-je deviner...» ainsi que par quelques indices, insuffisants cependant pour expliquer l'incarcération.
Après quelques années d'un mariage avec un mari terne comme la pluie, Alberte, résignée et passive, se retrouve veuve d'un mari épousé sans amour et sans plaisir, et ne s'habille plus désormais que de noir, comme il convient en province. Un jour, sa fille Camille qui a fait de brillantes études à Paris, lui annonce triomphalement ses fiançailles avec Franz, un jeune ingénieur qui a déjà quelques brevets à son actif dans le domaine de l'automobile et ne parle que de différentiel, carter d'embrayage, gicleur, etc. Elle annonce aussi leur arrivée, pendant un mois de congé, pour lui présenter son fiancé. le seul obstacle pour les amoureux, c'est que nous sommes en pleine guerre 14-18. Franz, qui est polonais, est né dans une région sous contrôle allemand et n'arrive pas à obtenir un acte de naissance nécessaire pour se marier. Sous la pression de Camille, Alberte délaisse peu à peu le deuil, se maquille, et se découvre femme. le séjour des tourtereaux se prolonge, et en bonne catholique, Alberte se demande avec effroi si sa fille n'est pas passée du statut de fiancée à celui de maîtresse.
Franz a conçu une automobile à la technologie révolutionnaire, à traction avant et comportant notamment un frein hydraulique. C'est dans ce bolide que le trio se promène dans la campagne conduit tantôt par Franz et tantôt par Camille.
Pierre Benoit sème insensiblement quelques indices montrant que Franz est de plus en plus attiré par la mère et de moins en moins par la fille, et qu'il ne fait rien pour hâter son mariage. Pire, le récit donne à penser que Franz est devenu malgré elle l'amant d'une Alberte trop passive pour pouvoir lui résister. Pour en sortir, Alberte réussit à obtenir les papiers et fixe la date du mariage avec le maire et le curé, mais entend Franz murmurer «Jamais». La veille du mariage, Camille se rend en voiture à la ville et ne revient pas. On la retrouve morte en contrebas d'un virage sans doute manqué. le frein à main était tiré, mais il n'y avait pourtant aucune trace de freinage sur la route.
Les funérailles à peine terminées, Alberte ne résiste plus à Franz, et découvre l'amour sur le tard, tout en étant torturée par le côté sordide de la situation. Impossible de rester au village. Ils s'installent à Paris où Franz a constitué une société automobile avec un certain Monsieur X.
Franz, qui a sept ans de moins qu'elle, lui propose de l'épouser, mais l'image de Camille s'interpose et elle refuse. Avec le temps, Franz est de moins en moins assidu et prétend devoir dormir à l'usine pour prévenir des sabotages. Il «n'est plus à un mensonge près» et est devenu l'amant de Cécile, la fille – beaucoup plus jeune qu'Alberte - de Monsieur X. Des fiançailles sont annoncées. Alberte aime encore celui qui lui a fait découvrir l'amour et exige une explication. Il avoue, mais se dérobe aux explications qu'il n'offre de fournir que le lendemain. «Demain, Franz, fais attention, ce sera trop tard... je ne serai plus là». Franz s'en va quand même, et deux heures après, Alberte est dans le train pour son village. Comme Hercule Poirot au dernier chapitre, elle obtient de son ancienne domestique et du garagiste les confirmations de son intuition sur l'accident de voiture et la mort de Camille: Franz avait vidé l'huile du frein hydraulique et n'avait pas installé le témoin de pression d'huile. Alberte se fait alors conduire chez le procureur de la république et dépose plainte pour assassinat. Cette avant-dernière page du récit fait par Alberte à son avocat éclaire la première («J'ai écrit avec la fièvre d'une pauvre femme qui peut enfin dire la vérité, alors que huit années durant elle a vécu captive du plus monstrueux des mensonges»). À la dernière page, une quinzaine de lignes avant le point final, le juge d'instruction qui vient de décerner un mandat d'arrêt contre Franz, lui déclare «Par application de l'article 60, paragraphe premier, du Code pénal, je me vois dans l'obligation de vous inculper de complicité et de décerner immédiatement contre vous un mandat de dépôt».
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Alternant romans « exotiques » et romans « métropolitains », Pierre Benoit, avec « Alberte » (1926), nous replonge dans la province française (le Quercy en l'occurrence) pour un roman d'atmosphère, à la fois roman sentimental, psychologique et roman policier, un peu le genre qui fera quelques années plus tard, la fortune de Georges Simenon.
Alberte, 41 ans est veuve d'un receveur des finances, et mère de Camille, 22 ans, aussi enjouée et vive que sa mère est digne et quelque peu compassée. Un jour Camille vient avec son fiancé Franz, un ingénieur d'origine polonaise, qui travaille dans l'automobile. Entre Alberte et Franz le courant passe. Il passe même si bien qu'ils deviennent amants. Alberte éprouve une certaine culpabilité, et c'est le coeur déchiré qu'elle consent au mariage de sa fille. C'est un peu une Phèdre quercynole, et comme chez Racine, c'est un coup de théâtre qui clôt le premier acte : Un soir tragique de 1917, Camille, la veille de son mariage, se tue dans un accident de voiture. Franz et Alberte vivent leur amour au grand jour. Alberte est rongée par une double culpabilité : avoir trompé sa fille, et (pense-t-elle) être indirectement responsable de sa mort, plus la douleur de mère d'avoir perdu son enfant unique. Franz, lui, se pose moins de questions, réussit en affaires, et peu à peu s'éloigne d'Alberte. Mais la mort de Camille présente des zones d'ombres, Alberte fait son enquête…
S'il fallait prouver que Pierre Benoit n'est pas seulement un romancier d'aventures exotiques pour des lecteurs amateurs de lointains mystérieux et d'héroïnes captivantes, des livres comme « Mademoiselle de la Ferté » ou « Alberte » seraient là pour montrer non seulement la grande qualité littéraire de l'auteur, mais encore sa capacité à décrire un processus psychologique particulier, à saisir l'âme de ses personnages, les méandres de leur personnalité, à capter les errements de caractères qui ne sont pas forcément aussi forts ni aussi faibles qu'on croit.
Le caractère d'Alberte évolue au long du roman. Au début, jeune veuve d'un mari qui ne l'a jamais rendue vraiment heureuse, elle est recluse, effacée, et ne vit que pour sa fille. L'arrivée de Franz qui correspond à une renaissance (amoureuse essentiellement, mais pas seulement), la transforme, et lui rend un statut de femme (en plus de celui de mère). Puis vient le temps de la culpabilité, renforcé avec la mort de Camille. Et enfin le temps du soupçon qui la pousse à faire son enquête.
On avait évoqué l'atmosphère des romans de Mauriac à la sortie de « Mademoiselle de la Ferté ». On peut dire qu'il y a du « Thérèse Desqueyroux » dans « Alberte » : les tourments d'une âme en quête de vérité, dût-elle, cette vérité, se retourner contre elle. Elle est coupable, elle le reconnaît et elle est consciente de mériter un châtiment. Ce châtiment elle est prête à l'accepter, avec même une sorte de soulagement…
On est loin ici des sables de « L'Atlantide » et des couloirs de « Koenigsmark ». « Alberte » est un roman sombre, tout en introspection. le côté psychologique interdit toute autre analyse : pas de critique sociale ; en dehors des trois personnages principaux, aucun autre portrait n'est fouillé, et encore, Camille et Franz ne servent que de répondants à Alberte. Les beaux paysages du Quercy ont peu de pouvoir sur la sensibilité des acteurs du drame.
« Alberte » est un roman qu'il faut avoir lu, pour se rendre compte que Pierre Benoit peut être un auteur « multicartes », aussi à l'aise dans l'exotisme que dans l'intimité, dans l'aventure extérieure que dans l'aventure intérieure, dans la fantaisie romanesque que le drame personnel. Multicartes, oui, et sacrément talentueux en plus.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Après tout, je n'avais encore que des soupçons. Trop souvent, je m'étais emportée en reproches prématurés qui m'avaient barré la route de la preuve.
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Videos de Pierre Benoit (6) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Pierre Benoit
Pierre Benoit, un auteur majeur à redecouvrir .Voir l'émission : http://www.web-tv-culture.com/pierre-benoit-un-auteur-majeur-a-redecouvrir-375.htmlDe 1918 à 1962, il fut un auteur incontournable et a vendu des millions de livres dans le monde entier. Mais qui se souvient de Pierre Benoît ?50 ans après sa mort, dans sa maison des Landes, redécouvrez l?auteur de «L?Atlantide » et « Koenigsmark ».
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