On a beau tenter de rester impartial, lorsque l'on s'attaque à un
Juliette Benzoni on s'attend irrémédiablement à une lecture de qualité. Et "Ces belles inconnues de la Révolution" ne fait pas exception à la règle. Adoratrice de l'Histoire, ce filon en or et jamais tari est exploité avec virtuosité par Benzoni. le destin de femmes exceptionnelles racontées par une femme exceptionnelle.
Par le biais de vingt chapitres, l'auteur nous livre des anecdotes sur la période révolutionnaire, menée avec ferveur et passion par les femmes. Féministe au plus profond de son âme,
Juliette Benzoni dresse un fier portrait de vingt femmes actrices de la Révolution de 1789, que ce soit sur le devant ou à l'arrière de la scène révolutionnaire. Ignorées et délaissées par l'Histoire, d'abord conçue par et pour les hommes, les femmes n'en ont pas moins jouées un rôle déterminant, influençant les plus grands noms français par le biais de leurs charmes envoûtants. Danton, David,
Robespierre,
Saint Just, Hoche… tous de grands meneurs qui vécurent des amours fous et passionnés et qui succombèrent à la tentation. Bien éloignés de leurs grands airs sévères, ce roman biographique révèle une face caché à ces monuments vivants : une tendresse inattendue et un goût pour les plaisirs charnels.
Vingt destins hors du commun sont mis en valeur dans cet ouvrage, sous la plume habile de
Juliette Benzoni qui, loin de raconter platement une biographie, s'en donne à coeur joie pour animer avec panache la vie incongrue des belles dames qui firent ce monde. Elles doivent beaucoup à la France, mais la France leur doit encore plus : d'avoir filé son histoire et ancrer la Révolution dans une révolte populaire mais également féministe. le style dynamique de Benzoni, soulevé d'une pointe d'humour toujours bien placée, permet de savourer de jolies tournures de phrases, de se délecter de paroles spirituelles et légendaires, de rire de moqueries innocentes mais aussi de s'étonner des destinées parfois tragiques, de se révolter face à l'injustice omniprésente et de frissonner sous les actes de bravoure de ces femmes parfois dociles, parfois haineuses mais toujours aimantes et courageuses. L'histoire de la Villirouët est l'exemple même de cette puissance de caractère qui mena une femme fidèle à se faire avocat, par amour pur, pour son mari destiné à la sinistre guillotine.
A la manière d'un
Stéphane Bern et de ses fameux « Secrets d'Histoire », on traverse le fil du passé en s'arrêtant sur des épisodes de vie rédigés d'une manière totalement romanesque, mais avec ce brin d'exactitude historique qui force le respect de l'auteur. On s'attarde ainsi sur un événement majeur et marquant mis en scène à la manière d'un Vaudeville. Et ce sont les histoires d'amour (car il y en a toujours une cachée derrière les histoires de pouvoir) qui ont le monopole de l'ouvrage. Plongé au coeur de la période révolutionnaire, les moeurs de la civilisation sont alors dépeintes avec des couleurs réalistes : les mariages arrangés, les toilettes, l'avidité de savoir et de pouvoir… Rien ne manque à ces courts chapitres pour immerger le lecteur au coeur de ce XVIIIe siècle révolté. Les personnages sont toujours attachants, même si détestables pour certains, et l'on a l'impression que ces peintures de David ou du Fragonard prennent brusquement vie sous nos yeux ébahis. de manière stéréotypée, les héros et héroïnes sont de beaux jeunes gens destinés à s'aimer tandis que, le temps passant, la cupidité et l'infidélité se chargent de les enlaidir. Pour autant, tous les personnages sont toujours charmants et possèdent une once de mystère qui les rend irrésistiblement attirants. le Bien ne triomphe pas toujours du Mal et les coeurs sont très souvent malmenés. Néanmoins, toutes, à leur manière, se sont battues pour sauver un amour, quitte à s'y donner corps et âmes. Complots, machinations, finauderie, séduction… rien ne manque à ces femmes dotées d'un courage féroce qui ont bien valu à elles seules tous les hommes de la nation.
Ce roman appuie ainsi l'idée que l'Histoire ne s'est pas jouée sur les tribunes politiques ni sur les grands champs de bataille, mais bien dans le confort des bras d'une femme, à la confidence d'une nuit.