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EAN : 9782234089983
308 pages
Stock (25/08/2021)
  Existe en édition audio
3.89/5   372 notes
Résumé :
Abel Bac, flic solitaire et bourru, évolue dans une atmosphère étrange depuis qu'il a été suspendu. Son identité déjà incertaine semble se dissoudre entre cauchemars et déambulations nocturnes dans Paris. Reclus dans son appartement, il n'a plus qu'une préoccupation : sa collection d'orchidées, dont il prend soin chaque jour.

C'est cette errance que vient interrompre Elsa, sa voisine, lorsqu'elle atterrit ivre morte un soir devant sa porte.
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Critiques, Analyses et Avis (102) Voir plus Ajouter une critique
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Syndrome de stress post-traumatique : jamais Abel, jusqu'à ces derniers jours totalement investi dans la routine absorbante de son métier de flic, n'aurait pensé que cela lui tomberait dessus, après tant d'années d'un équilibre en apparence à peu près stable. le premier gros coup de canif à sa tranquillité est bien sûr sa suspension, pour l'instant inexpliquée, qui fait soudain tomber le paravent qui faisait écran entre son quotidien actif et les blessures anciennes auxquelles il pensait pouvoir tourner le dos. Soudain aussi vulnérable qu'un bernard-l'hermite expulsé de la coquille où il avait cru s'abriter, exposé sans défense à la résurgence de souvenirs torturants, le voilà de surcroît en butte à une série de troublantes coïncidences, qui, comme autant d'insidieuses allusions, ou alors de signes du vacillement de sa raison, ne cessent de pointer de plus en plus nettement vers ce passé terrible que rien ne semble plus pouvoir contenir.


Combien de temps Abel pourra-t-il tenir, entre les intrusions de cauchemars récurrents, qu'il rente d'oublier en déambulant dans Paris la nuit et en soignant sa collection d'orchidées le jour, reclus dans son appartement, et celles d'un monde extérieur bien décidé, semble-t-il, à lui arracher ses derniers lambeaux de santé mentale ? Elles sont trois à l'empêcher de refermer totalement les écoutilles : son envahissante nouvelle voisine Elsa, sa collègue Camille Pierrat qui s'inquiète de son silence, et surtout, de manière de plus en plus évidente, une dénommée Mila, déconcertante artiste anonyme devenue mondialement célèbre pour ses impressionnantes performances, à l'avant-garde de l'art contemporain.


Toute la tension de la narration provient de ce mystérieux drame, survenu deux décennies plus tôt, qui va peu à peu se dévoiler à la connaissance du lecteur, et de ses bizarres correspondances avec les spectaculaires et transgressives performances d'une artiste dont personne, si ce n'est son avocat et agent, ne connaît le visage. C'est donc dans un climat étrange et mystérieux, en compagnie de personnages de plus en plus manifestement les proies d'une grande et ancienne souffrance perturbant leur équilibre psychique, que l'on avance dans une intrigue puissamment construite qui tient le lecteur en haleine de bout en bout.


La souffrance peut rendre fou, mais avant d'éclater au grand jour, dans un paroxysme parfois aussi soudain que violent, la folie mûrit parfois lentement, hibernant longuement pour mieux frapper ensuite, ou demeurant plus ou moins discrètement tenue en laisse grâce à des dérivatifs capables de la canaliser. L'expression artistique devient ici exutoire et sublimation, dans un débordement d'émotions et de sensations, ici volontairement provocant, que le spectateur perçoit sans toujours le comprendre. L'oeuvre est un ressassement infini, une déclinaison travaillée de production en production, où reviennent en filigrane les mêmes obsessions, celles qui cristallisent les blessures de l'âme de l'artiste. Que serait devenue Mila sans cet antidote à sa colère ? Tout comme Abel, sans ses orchidées ?


Hommage à Marina Abramovic et à son art unique et éphémère de la performance, ce fascinant roman est tout autant l'occasion de découvrir cet angle extrême, souvent très dérangeant, de l'art contemporain, que de se plonger dans un récit addictif qui nous fait quitter subrepticement les rivages incertains de la santé mentale. Un livre original et fort, et un nouveau coup de coeur pour cet auteur.

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Ce titre qui met le feu m'a semblé idéal pour entamer des vacances à la mi-juillet. On y rencontre Abel Bac, flic venant d'être suspendu de ses fonctions suite à une dénonciation anonyme, dont nous ne connaissons pas le motif. On le retrouve enfermé chez lui avec ses orchidées à longueur de journée, sans contact avec l'extérieur, sauf la nuit : Lorsque ses cauchemars violents le réveillent, il sort parcourir la ville jusqu'à ce qu'il ne sache plus où il se trouve. Présentant des symptômes de stress post-traumatique, il n'a pas de relations amicales ou amoureuses, n'invite jamais personne chez lui. Mais sa collègue Camille, qui s'inquiète pour lui, va tenter de percer sa bulle, son mutisme, son espace vital… Et le mystère qui entoure ce binôme qu'elle aime beaucoup.


« Abel fait peur. Ce n'est pas son visage, mais ce qui se voit pas. (…) C'est une tension infinitésimale de ses muscles, qui palpite comme une alerte. »


Le mystère qui l'entoure va justement s'épaissir lorsqu'il trouve, devant sa porte, le journal du jour en plusieurs exemplaires et à son nom, alors qu'il n'est pas abonné. En première page, un fait divers étonnant : Un cheval a été introduit la nuit dernière dans un musée… Et quelqu'un tenait visiblement à ce qu'Abel le sache. D'ailleurs la vision de ce cheval blanc ne lui est pas totalement inconnue, elle lui rappelle quelque chose de désagréable, que son subconscient refuse de laisser émerger. Mais tandis que l'enquête de police piétine, d'autres « performances » sont réalisées les jours suivants dans les musées alentours. le bruit commence à courir que ce serait l'oeuvre de cette nouvelle artiste en vogue nommée Mila, dont personne ne connaît la véritable identité. Abel n'a jamais entendu parler de Mila, mais il se sent visé par ses oeuvres et son passé secret semble refaire surface, ce qui pourrait lui coûter son poste.


La tension va crescendo, on se demande qui en veut à Abel et quel est son passé traumatique. J'ai apprécié les chapitres consacrés à Abel, dont la personnalité, malgré son apparente froideur un peu too much, demeure mystérieusement attachante et intrigante, tout comme ses expressions désuètes qui apportent la touche d'humour au roman. Mais j'ai été moins passionnée par les chapitres consacrés à Mila, qui m'a moins touchée malgré son histoire sûrement poignante, ce qui faisait malheureusement retomber un peu trop la tension intéressante dans le récit.


Cela dit, moi qui n'aime pas les bouquins qui parlent d'art, j'ai trouvée que Claire Berest parvenait à rendre l'art pétillant dans ce roman. Bien sûr, il est question de tableaux vivants, ce qui aide. Mais elle nous offre aussi des dialogues savoureux, entre ce flic terre à terre hyper carré et logique, et une étudiante en art qui tente de l'éclairer de manière accessible sur l'intérêt et le concept de « performance » d'artistes. Et comme elle est passionnée et amusante, elle parvient à nous intéresser en nous faisant sourire. le côté décalé de leurs échanges rend ce binôme attendrissant. de manière générale, les femmes de ce roman apportent la touche de fantaisie qu'Abel ne peut plus atteindre depuis longtemps.


L'enjeu sera de découvrir ce qui lui est arrivé. Tous ces faits sont-ils liés ? Et pourquoi resurgissent-ils maintenant ? Pour ce faire, l'auteur nous dévoile peu à peu l'histoire de chaque personnage, en alternant les chapitres qui leur sont consacrés. Leurs titres en forme d'indices sont pour le moins intrigants…! J'ai aimé ce détail : Comme l'emballage et le noeud en Bolduc parachèvent un cadeau, ces titres parachèvent l'oeuvre de Claire Berest. Et puis c'est gratifiant : J'avais relevé LA phrase indice de l'histoire qui permettait d'être sûre de l'issue.
Je n'ai pas eu de coup de coeur comme Cannetille, mais j'ai passé un bon moment avec ce un policier décalé, amusant et intéressant pour les vacances.
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Abel émerge d'un cauchemar récurrent, qui le laisse à la limite de la suffocation, tant cela paraît réel, et entend gratter à sa porte. Entrée fracassante d'Elsa, la voisine du dessus qui tente de d'entrer chez lui car en état d'ébriété avancé elle s'est trompée d'étage…

Abel est un policier, bien noté, du genre solitaire et bourru qui se retrouve étrangement suspendu, à la suite d'une dénonciation anonyme bien sûr… Camille, sa collègue tente de comprendre ce qui se passe mais devant le silence buté d'Abel, elle va procéder autrement et tomber sur un problème lié au passé.

Pendant ce temps, un cheval est retrouvé au musée Beaubourg, puis un tag représentant le même cheval sur un mur. Elsa accompagne Abel à Beaubourg pour tenter s'en savoir plus. Ce n'est que le début : un triptyque « artistique » se met en place, impliquant le musée d'Orsay, Pierre Arnaud… Et de manière concomitante, Abel trouve régulièrement un exemplaire du journal « le Parisien » auquel quelqu'un l'a mystérieusement abonné.

On parcourt Paris, à pied, le jour et la nuit, selon les envies d'Abel qui oublie un passé douloureux en marchant, tentant d'apaiser ses angoisses, ses TOC… et ses interactions avec Elsa et Camille, ou ses rencontres d'un soir. Abel est attachant avec ses centaines d'orchidées qui remplissent son appartement, et dont il prend un immense soin. Ce sont ses amies, ses colocataires….

En même temps, immersion dans le domaine de l'art contemporain, avec les prouesses d'une mystérieuse artiste, Mila, dont l'avocat s'occupe de la publicité autant que de la publicité liée à ses oeuvres éphémères mais souvent sujettes à caution, oeuvres qui, entre parenthèses, se monnaient des millions d'euros chez Sotheby's ou Christie's.

On devine assez vite qui se cache derrière qui, en revisitant Jean de la Fontaine au passage, avec « le loup, le renard et le cheval », dont les vers servent de titre de chapitre.

Claire Berest revient souvent dans son récit, comme un hommage, à Marina Abramovic, artiste plasticienne, ce qui à la longue finit par devenir pesant, car on se sent voyeur…

Le récit démarre lentement, mais on finit par s'accrocher, par avoir envie de savoir, de connaître la clef de l'énigme, car on se doute bien qu'il y a eu un drame à l'origine de tout cela et que chacun réagit comme il peut à un traumatisme profond, sur fond de feux d'artifice de 14 juillet, et de quels artifices s'agit-il en fait dans ce roman ? l'histoire nous le dira.

Mon avis est assez mitigé, l'intrigue est intéressante si on la regarde comme une enquête policière, avec des personnages compliqués, pour ne pas dire complètement barges, pour certains, mais je suis peu réceptive à l'art contemporain en général : des oeuvres temporaires qui font le buzz et se revendent des millions voire plus, cela me laisse perplexe.

L'écriture veut faire « jeune » avec du verlan, souvent alors versus La Fontaine il y a de quoi déranger aussi (cf. les deux derniers extraits)

La couverture est magnifique et c'est elle qui m'a donné envie de lire ce livre. C'est ma première incursion dans l'univers de Claire Berest, surtout connue pour ses biographies et ses essais alors que j'ai toujours en prévision dans ma PAL, « Rien n'est noir ».

Un grand merci à NetGalley et aux éditions qui m'ont permis de découvrir ce roman et son auteure dont j'ai prévu de lire « Gabriële » qu'elle a coécrit avec sa soeur Anne Berest dont j'ai beaucoup aimé « La carte postale » et « Sagan, 1954 » …

#Artifices #NetGalleyFrance
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Claire Berest doit sa notoriété d'écrivaine à des romans biographiques très réussis, dont l'un – Gabriële – avait été écrit conjointement avec sa soeur Anne. Son dernier livre, Artifices, est un roman pur jus, une fiction. C'est même un roman qui se donne l'allure d'un polar. Des faits apparemment inexplicables s'y produisent, suscitant d'étranges réactions chez les personnages. Et toi, lectrice, lecteur, tu t'y laisseras prendre, tu voudras comprendre, tu scruteras les indices et du coup, tu enfileras les pages et les chapitres avec une frénésie gourmande. le livre n'est pas vraiment un polar, mais en matière d'artifices, l'auteure sait y faire.

A première vue, les personnages ont l'air de ressembler à tout le monde, mais leur idiosyncrasie s'affiche nettement au fil des chapitres. En numéro un, Abel Bac, un drôle de nom ! – mais qui oserait prétendre qu'on ne choisit pas son nom ? – Dans l'exercice de son métier d'officier de police judiciaire, c'est un homme consciencieux jusqu'à l'insignifiance. Dans sa vie privée de célibataire endurci, c'est un homme solitaire et taiseux, qui flirte avec la marginalité. Il est sujet à des cauchemars, à des angoisses, à des troubles obsessionnels compulsifs, des tocs qui ont redoublé depuis qu'il a été suspendu de ses fonctions sans qu'il sache pourquoi…

Deux ou trois femmes entourent Abel – sont-elles deux, sont-elles trois ? – et semblent lui porter intérêt, voire plus s'il est question d'affinités. Il y a Elsa, une voisine invasive un peu foldingue, il y a Camille, une collègue, qui, à l'inverse, prend tout très au sérieux. Et puis dans l'ombre s'active une autre femme, une artiste devenue archicélèbre sous le pseudonyme de Mila et dont personne ne connaît le vrai nom ni le visage. Une spécialiste du happening, dont les performances laissent des traces et suscitent des témoignages qui s'arrachent à prix d'or chez les collectionneurs d'art très contemporain.

Et justement, voilà que trois événements spectaculaires se produisent mystérieusement dans trois musées parisiens. Au ministère, on est dans ses petits souliers ; à la PJ, on enquête, tandis que la presse et le public commentent. La paternité (je devrais dire la maternité) du triptyque ne fait aucun doute, Mila la revendique dans une déclaration officielle. Mais quel en est le sens et à qui s'adresse-t-elle ?

Au fil des chapitres et des indices que l'auteure daigne te révéler au compte-gouttes, lectrice, lecteur, tu commenceras à cerner les enchaînements de causes à effets qu'elle a imaginés. Cette imagination étant sans limites, tu pourras t'interroger sur la vraisemblance des péripéties, mais peu importe. Les personnages principaux sont vraiment déjantés et leurs délires peuvent s'expliquer au vu du traumatisme qu'ils partagent, d'autant que le style narratif incline à l'onirisme.

Claire Berest donne un rythme haletant à sa narration. Son écriture est spontanée, virevoltante, les phrases sont courtes, les tournures lapidaires. Elle maîtrise tellement sa plume, qu'elle s'autorise des petits dérapages très contrôlés. Elle lâche des mots fortement expressifs, comme un peintre jetterait des touches de matière sur une toile. Les dialogues sont tranchants, la narration emprunte par moment les codes du langage parlé et cela donne envie de lire le texte à haute voix.

Finalement, tout s'explique. Sans remonter à l'origine du monde, l'histoire avait été bien engagée grâce à une fable De La Fontaine, dont des fragments scandent les chapitres. Mais tout avait été interrompu lors d'un 14 juillet tragique, illuminé par un feu d'artifice éblouissant, dont les compositions étincelantes s'étaient pétrifiées en orchidées multicolores.

Un livre dont les pages sont brillantes comme un feu d'artifice. En s'éteignant, il t'abandonnera, lectrice, lecteur, au plus profond d'une obscurité aveuglante et d'un silence assourdissant. de quoi te couper le souffle. Quel talent pour écrire un tel livre ! Et si l'art du roman était justement l'art de l'artifice !

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Abel en proie à un cauchemar récurrent est réveillé en sursaut par des bruits provenant de la serrure. Lorsqu'il ouvre la porte, sa voisine passablement avinée, lui tombe dans les bras.
Pas facile de retrouver le sommeil, pour un insomniaque, angoissé.
Comme souvent, il sort, déambule dans les rues de Paris, s'arrête à la pharmacie, achète une lotion anti-poux pour lui et du Doliprane pour ses fleurs préférées.
En proie à de terribles démangeaisons du cuir chevelu, depuis qu'il a été radié de la police, suite à une dénonciation anonyme à l'IGPN, Abel vit en solitaire avec ses 93 orchidées auxquelles il prodigue les meilleurs soins.
Bizarre mais bosseur perfectionniste, ce flic ne s'est jamais contenté du « Qui ? », il a toujours voulu savoir « Pourquoi ? ». Pourquoi a-t-il été mis sur la touche ? par qui ? Autant de questions qui le hantent.
Léa, la voisine se réveille avec la gueule de bois et le vague souvenir d'Abel : « Elle le revoit par instantanés, lui et son corps glacé, son inaccessible. »
Mila dont nous faisons la connaissance quelques chapitres plus loin est une artiste aussi mystérieuse que controversée pour la brutalité de ses oeuvres. Seul son avocat connaît sa véritable identité la gardant secrète depuis 20 ans.
Reine invisible de l'art contemporain, ses oeuvres se monnaient des millions d'euros chez Sotheby's ou Christie's.
Ajoutez à ces personnages, un mystérieux cheval entré de nuit à Beaubourg, pourquoi ? Qui l'y a conduit ?
Voilà bien des questions qui font de ce roman un thriller haletant.
Je n'ai pu le lâcher avant d'avoir le fin mot de l'histoire. Dans la première moitié du roman, impossible de savoir où l'auteure a l'intention de nous emmener.
On passe d'un personnage à l'autre, ce qui donne du nerf au récit tandis que le mystère s'épaissit.
L'auteure s'attarde sur l'art contemporain et nous en propose une analyse intéressante.
J'ai été surprise de découvrir Claire Berest dans un registre totalement différent de celui auquel elle m'avait habituée avec notamment « Rien n'est noir » ou « Gabrielle » écrit à quatre mains avec sa soeur Anne.
L'écriture est comme toujours parfaite de simplicité, addictive et imagée.
Je remercie très vivement NetGalley et les Editions Stock pour cette lecture coup de coeur.
#Artifices #NetGalleyFrance !



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critiques presse (2)
Liberation
10 janvier 2022
L’ouvrage de Claire Berest livre un polar étonnant, une tragicomédie dominée par un flic taciturne.
Lire la critique sur le site : Liberation
LeFigaro
06 janvier 2022
Un polar littéraire dans lequel un flic, prisonnier de son passé, une collègue amoureuse et une voisine bizarre sont mêlés à de curieux événements.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (86) Voir plus Ajouter une citation
- Ah, vous voyez, ça vous intéresse, finalement ! Avec vous, il faut prendre son mal en patience.
- Ne parlez pas de moi comme si vous me connaissiez. Vous ne me connaissez pas."
Elsa cesse de sourire. Se plante en face d'Abel et le pousse des deux mains sur les épaules, comme un boxeur en provoquerait un autre dans un combat de rue improvisé. Abel s'arrête, coi. Il est beaucoup plus grand qu'elle et bien plus massif, ça lui fait l'effet d'un colibri énervé qui lui aurait donné un coup de bec.
"Abel, je comprends tout votre truc de méfiance et d'être rugueux, c'est bon, ça va. Vous m'envoyez bouler toutes les deux secondes, et moi je suis bonne pâte, parce que vous vous dites probablement que je suis cinglée, alors les gens toc-toc on peut leur parler mal. Non, je ne vous connais pas, et je ne prétends pas vous connaître. Calmez vos nerfs deux secondes. Quand je dis : avec vous il faut prendre son mal en patience, c'est une manière de dire que je me préoccupe, que vous me touchez, c'est ce que les gens font quand ils se rencontrent, non, vous sortez d'où ? Vous ne rencontrez pas des gens dans votre vie, vous n'essayez pas d'être aimable, ou d'entrer en connivence ? Vous voyez ce que c'est la connivence ? Ce n'est pas méchant."
Pris de court et piqué par cette femme, Abel a l'impression d'être tiraillé et maladroit comme un adolescent, tout à trac il livre à Elsa qu'eh bien, il s'est inscrit sur Tinder, et que lui aussi peut rencontrer des gens.
"Vous vous êtes inscrit sur Tinder ? Quand ça ?
- Il y a deux jours.
- C'est tordant. Et vous avez couché avec quelqu'un ?
- Non. Pas encore. Mais presque, répond Abel, consterné du tour qu'a pris la conversation par sa faute.
- Presque ? Vous êtes un génie.
- J'ai un autre rendez-vous ce soir." Pourquoi continue-t-il à dire ces choses ? s'admoneste-t-il in petto.
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Épier, quand du grabuge se fait entendre, est une action bancale qui oscille entre le voyeurisme et le courage. La curiosité malsaine (ça se passe mal quelque part, j’ai envie d’en savoir plus) pouvant se transformer parfois en sauvetage (ça se passe très mal, il faudrait que j’intervienne). Abel Bac et Camille Pierrat auraient pu ensemble parler longuement de ce sujet tant ils avaient eu à auditionner de témoins ayant été confrontés à ce dilemme. Les témoins pouvaient se montrer actifs ou passifs (tout l’écheveau qu’il y avait à démêler dans sa tête en une seconde quand le choix se posait entre : il faudrait que j’intervienne, il faut que j’intervienne, j’interviens). Certains témoins se payant pour une vie la culpabilité de n’être pas intervenu. Camille n’était pas toujours tendre quand ils débriefaient après coup : « Ce connard entend une gonzesse qui se fait casser la tête dans l’appart d’à côté et ce gros con augmente le son de sa télé ! » Abel, lui, ne jugeait jamais. Comment savoir qui on est tant que ça ne nous est pas arrivé ? répondait-il à Camille, en substance. Car ce n’était jamais si clair dans la bouche de Bac, qui n’était pas un orateur. Et Elsa, qui était devenue Mila, aurait dit aux deux autres si elle avait participé à leur conversation : c’est le kairos. Elle aurait expliqué quelque chose comme : Kairos c’est le dieu grec de l’action opportune. Avant c’est trop tôt, après c’est trop tard. Il faut saisir ou agir à l’instant T. Sinon on peut traîner l’hésitation ou le manquement toute sa vie. Camille Pierrat aurait alors fait remarquer que Kairos c’était aussi le nom du portail Internet de Pôle Emploi et que l’administration française avait un putain de drôle de sens de l’humour.
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Le musée d’Orsay a été une gare. Quand on se tient dans son hall, on peut encore imaginer la foule qui devait s’y agglutiner, attendant les trains. Les familles et les solitaires pris dans la si curieuse tension d’être immobiles et au bord du mouvement, caractéristique du voyageur sur le point de partir. Certains lieux sont plus propices aux empreintes du passé, Orsay est tout à fait habité. Une croix sur une carte mentale, lieu où l’on arrive et d’où l’on s’éloigne, carrefour, c’était intelligent de le transformer en musée, passage ambigu de la mémoire. Un bâtiment dont on transforme la finalité doit s’inventer, il s’oblige à faire preuve d’astuces. Ce qui est beau à Orsay, c’est que le visiteur pénètre par le haut, l’ancienne gare s’ouvre à lui sous ses pieds, il n’est pas en position d’être écrasé mais dans celle de pouvoir cueillir. Il peut embrasser le champ entier d’un seul regard, descendre par l’escalier de droite ou celui de gauche, il n’est pas contraint. C’est une aventure.
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Il y a deux types d’enquêteurs. Ceux qui se concentrent sur le « qui ». Qui a eu la capacité, l’occasion, la possibilité de commettre l’acte. Ils ne peuvent pas être vingt mille, il s’agit de tamiser. Et les adeptes du « pourquoi ». Pourquoi, dans le cas présent, quelqu’un a ressenti le besoin de planter un couteau dix-huit fois dans le gras de ce type pas sympathique ? Camille appartient à la famille du qui. Ça marche avec le comment. Elle n’est pas là pour faire des thérapies de groupe. Quand tu recoupes patiemment les emplois du temps, les liens avec la victime, les fadettes des téléphones, les alibis éliminatoires, les GPS des bagnoles, les témoins potentiels, il en reste peu qui ont pu décrocher la queue du Mickey. Mathématique. Le pourquoi, c’est pour les tribunaux. Pour les procureurs et les avocats. C’est de la littérature.
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[…] il attend, il n’y a rien à dire, il attend qu’elle se laisse pulvériser par l’incendie de ses fleurs, qu’elle se repaisse du pourpre et du parme, qu’elle confronte le jaune et le blanc, qu’elle s’étourdisse des taches et des ruptures que crient les pétales, qu’elle se saisisse des bouches, des ailes, des gouffres que forment leurs calices, myriade de têtes folles, d’ovaires offerts, de sexes écartés, impudiques et sauvages, ses fleurs … (p.356)
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Vidéo de Claire Berest
Chaque mois, un grand nom de la littérature contemporaine est invité par la BnF, le Centre national du livre et France Culture à parler de sa pratique de l'écriture. L'écrivaine Claire Berest est à l'honneur de cette nouvelle séance.
Cette vidéo ne sera accessible que durant la durée de la conférence.
Entretien animé par Arnaud Laporte, France Culture.
Animés par des producteurs et productrices de France Culture, les entretiens du cycle « En lisant, en écrivant » sont réalisés en public à la BnF, puis diffusés dans la grille d'été de France Culture et disponibles en podcast. Genèse des oeuvres, sources d'inspiration, aléas de la vie quotidienne d'un auteur ou d'une autrice, édition et réception des textes – autant de sujets que ces rencontres permettent d'aborder, au plus près de la création littéraire.
En savoir plus sur les Master classes : https://www.bnf.fr/fr/agenda/masterclasses-en-lisant-en-ecrivant
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